Doit-on mettre un "S" à un nom commun placé derrière le mot " sans" ?
Question d'origine :
Bonjour,
J'ai toujours entendu dire qu'on ne mettait pas de "S" à un mot quand il était derrière le mot " sans", par exemple "une fleur sans pétalE" et non pas " sans petalES" puisqu'il n'y en a pas, ou bien " un ciel sans nuagE " au lieu de "sans nuagES", etc...
L'autre jour en me servant un verre de coca zéro j'ai vu sur la bouteille qu'il y avait marqué " sans sucrES" et " sans caloriES", donc si je suis mon raisonnement il ne devrait pas y avoir de S vu que Zéro est égal à sans "S".
Mais peut-être est-ce moi qui ne connaît pas bien mes règles de syntaxe...
Pourriez-vous me dire si coca-cola fait des fautes d'orthographe ou si je dois retourner à l'école ?
Merci pour votre réponse
Atikus
Réponse du Guichet
En règle générale, les mots suivant la préposition "sans" restent au singulier lorsqu'ils désignent un objet indénombrable, indéfini, ou vu comme singulier. Ils peuvent être au pluriel si le contenu sémantique le permet. En l'occurrence, le pluriel se justifie ici si on comprend non pas "le sucre" comme ingrédient, mais "les sucres" comme composés chimiques.
Bonjour,
D'après les sources que nous avons consultées, les deux usages se rencontrent et peuvent être acceptables selon le contexte.
Une page du Robert en ligne nous apprend ainsi que :
Le nom qui suit la préposition sans se met au singulier ou au pluriel selon le nombre de choses ou d'êtres habituellement présents : une lettre sans date (Il n'y a habituellement qu'une seule date dans une lettre.)
un jardin sans fleurs (Il y a habituellement plusieurs fleurs dans un jardin.)
Dans de nombreux cas, on peut employer indifféremment le singulier ou le pluriel :
un couple sans enfant(s) (On peut avoir un ou plusieurs enfants.)
un voyageur sans bagage(s) (On peut avoir un ou plusieurs bagages.)
Le CNRTL remarque également :
Le substantif qui suit la préposition sans est général sans article : mais l'article s'emploie quand le substantif est déterminé par une épithète ou un complément. J'imaginais qu'à droite et à gauche de l'étroite bordure il y avait un précipice et que je devais avancer sans le moindre faux pas (Duhamel, Confess. min., 1920, p. 90). 2. Ce substantif est souvent au singulier parce qu'il évoque l'unité, l'abstrait ou le non comptable; le pluriel est plus fréquent quand le substantif appartient au concret. Tout cela usait Félicie. Par-dessus tout, elle était sans nouvelles d'Alain (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 321).
Vous trouverez des explications sensiblement semblables sur le site de l'Office québécois de la langue française ou encore le Projet Voltaire.
Nous ne dirions donc pas que Coca Cola commet ici une erreur : simplement, l'expression employée évoque "des sucres", comme lorsqu'on parle de "sucres rapides et sucres lents". Sur le site de Coca Cola France, on peut ainsi lire cette présentation de la betterave, principale matière première de l'industrie sucrière en France métropolitaine :
Les scientifiques l’appellent beta vulgaris et les gastronomes betterave. Cette plante herbacée bisannuelle, décrite pour la première fois par le naturaliste Linné en 1753, possède une racine épaisse dont la pulpe concentre les sucres à hauteur de 15 à 20%, selon les espèces.
Une autre page évoque "les sucres naturels et les sucres ajoutés". Pourquoi ? Parce que, comme l'explique le site Cultures sucres, "sucre" se met au pluriel quand on parle non d'ingrédients culinaires, mais de composés chimiques :
Lorsque l’on parle de « sucre », sans « s », il s’agit du sucre de table (le sucre blanc ou roux, extrait de la betterave sucrière ou de la canne à sucre), aussi appelé saccharose. Par contre, « les sucres » au pluriel représentent la famille des glucides simples (sucre + fructose des fruits + lactose du lait…). Ils sont étiquetés « dont sucres » sur l’emballage et peuvent être soient ajoutés soient naturellement présents dans le produit.
Selon le même article, cette nuance a une indidence sur la manière de lire les étiquettes des produits transformés :
Les sucres sont indiqués à la ligne « glucides dont sucres » de l’étiquetage nutritionnel. Cette ligne seule ne permet pas de différencier les sucres naturellement présents (dans les fruits, les légumes ou le lait) des sucres ajoutés. Pour savoir si un produit contient des sucres ajoutés, il faut regarder la liste des ingrédients.
Si le sucre, ni aucun autres produits sucrants (miel, sirop de glucose…), ne fait pas partie de la liste des ingrédients, les seuls sucres sont ceux naturellement contenus dans les légumes, les fruits ou le lait. C’est par exemple le cas d’une sauce tomate 100 % tomate, d’un yaourt nature, d’une compote sans sucres ajoutés : il n’y a pas de sucres ajoutés dans la liste des ingrédients pourtant la ligne « glucides dont sucres » n’est pas nulle car il y a les sucres naturellement présents.
Bonne journée.