Question d'origine :
Que connaît-on de la philosophie de Leonard Nelson ?
Y a-t-il un moyen de connaître sa pensée ? sa logique "critique" ? ses idées politiques ?
Réponse du Guichet
Voici quelques extraits de documents qui vous en apprendront plus sur le philosophe allemand Leonard Nelson.
Bonjour,
Voici tout d'abord une courte biographie extraite du Maitron :
Leonard Nelson, après avoir étudié les mathématiques et la philosophie et être habilité, en 1909, à la faculté des sciences naturelles de Gottingen, devait y enseigner la philosophie de 1919 à sa mort. Ses idées, qui devaient beaucoup à Kant à travers Jakob Fries, furent exposées en 1924 dans son System der philosophischen Rechtslehre und Politik et se situaient dans la ligne du néo-kantisme, représenté avant la guerre par Hermann Cohen et Karl Vorlander, proches du révisionnisme bernsteinien.
Quant à la pensée de Nelson, elle s’exprimait sous la forme d’un rigoureux rationalisme et dans un langage mêlé de formules mathématiques. Fondateur, en 1917, de la Ligue internationale de la jeunesse (Internationaler Jugendbund, IJB) — groupe qui ne comprenait qu’un millier d’adhérents —, il lui enseignait un socialisme éthique, éloigné à la fois du marxisme et de la démocratie parlementaire, mais,qui se trouvait lié à l’idée libérale du Rechtsstaat, à l’émancipation à l’égard des Églises et, sur le plan économique, à un égalitarisme qu’il pensait obtenir aux dépens de la grande propriété foncière, grâce à la création de colonies communautaires. L’IJB prônait l’abstinence et la lutte contre l’alcoolisme. Expulsé en 1925 du SPD, Nelson fonda d’après les mêmes principes le Combat socialiste international (Internationaler sozialistischer Kampfbund ; ISK) qui, après sa mort, fut dirigé par Willi Eichler dans un sens antinazi.
Le philosophe allemand Leonard Nelson (1882-1927) est le premier à avoir mis en pratique l'idéal kantien de la philosophie critique.
La Philosophisch-Politische Akademie qu'il a fondée existe toujours, même si aujourd'hui, ce n'est plus l'unique endroit où les philosophes organisent des dialogues "nelsoniens".
La philosophie nelsonienne est axée sur deux éléments essentiels. Tout d'abord, l'examen philosophique sert à révéler notre manière d'être au monde et nos valeurs basiques. La philosophie doit dresser l'inventaire de nos intuitions fondamentales. Ensuite, il importe de les légitimer et de les "prouver". Seule l'intuition du bien et du mal n'est pas suffisante. En tant qu'instance de légitimation, la philosophie a une tâche vitale : comment fonder nos intuitions ?
La mise à jour et la légitimation des idées fondatrices constituent dès lors l'enjeu majeur de la pratique philosophique. Ce genre de philosophie dans la tradition nelsonienne repose sur un scénario plus ou moins fixe.
Le scénario du dialogue socratique
Dans sa structure logique, le dialogue socratique mis en pratique ressemble à celui de la tradition allemande. Le schéma suivant éclairera notre propos :
- Question fondamentale
- Exemple
- Thèse
- Argument
- Valeurs et principes
source : Diotime
Dans la première livraison des Abhandlungen der Fries’schen Schule. Neue Folge, qu’il fonde en 1906 avec le concours du mathématicien Gerhard Hessenberg, Nelson définit son projet de développer une philosophie « dont la méthode soit aussi rigoureusement scientifique que la méthode des mathématiques et des sciences de la nature » [Nelson 1906, Vorwort, IX]. Il s’élève contre « la scolastique » hégélienne et sa puissante influence, contre l’historicisme, contre le platonisme de Schelling et aussi contre l’empirisme dont il estime définitive la réfutation par Kant. L’axiomatique constitue pour lui le modèle de rigueur à suivre et non pas le vecteur essentiel d’une nouvelle philosophie en rupture totale avec la métaphysique. Ce dernier point le sépare tant de Hilbert que de Reichenbach et des autres membres du groupe de Berlin. Nelson se réclame également de Fries, auquel il attribue la première réalisation du transfert de la Critique aux mathématiques et la constitution de la « philosophie des mathématiques » en discipline autonome dans Die mathematische Naturphilosophie [Fries 1822]. Pour Nelson la « déduction anthropologique » des principes métaphysiques par Fries préfigurerait le rapport critique établi par Hilbert entre mathématique et axiomatique, puis entre mathématique et métamathématique. Comme Fries, Nelson conçoit les mathématiques comme un ensemble de propositions synthétiques a priori [Nelson 1928] et entend donner un fondement philosophique critique aux axiomes mathématiques en les soumettant à la méthode régressive prônée par Fries. Il n’est pas davantage que Fries hostile à l’esprit de système, qui sera honni par la majorité des membres du groupe de Reichenbach. Pour eux point de système philosophique, point de déduction métaphysique, point de synthétique a priori.
source : BENIS SINACEUR Hourya, « Philosophie scientifique : origines et interprétations. Hans Reichenbach et le groupe de Berlin », Philosophia Scientiæ, 2018/3 (22-3), p. 33-76.
Pour en savoir plus, n'hésitez pas à consulter les documents suivants :
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- Revue de l'enseignement primaire et primaire supérieur, 23 janvier 1927