Nos ressentis personnels rentrent-ils en conflit avec les valeurs la société ?
Question d'origine :
Est-ce que dans notre vie dans ce monde/cette société il y a d'une part ce que la société attend de nous et d'autre part nous avons chacun notre ressenti personnel qui peut faire conflit interieur avec ce que la société veut de nous?
Réponse du Guichet
Les normes sociales qui pèsent sur les individus influencent nos comportements. L'ensemble des désirs humains ne pouvant se réaliser dans la gamme de comportements qu'une société ou un groupe d'individus jugent socialement valorisables, nos aspirations personnelles et les attentes d'un groupe peuvent entrer en conflit. Il faut alors se conformer ou transgresser.
Cher Braveheart,
Nos comportements sont influencés/modelés par ce qu'on appelle des "normes sociales". Ces normes sont un ensemble de règles de conduite qu'il convient de respecter au sein d'un groupe social, d'une communauté ou d'une société. Elles peuvent être formelles et écrites (lois, règlements) ou bien informelles (mœurs, habitudes, coutumes etc.), elles ont pour but de régir nos comportements. Et attention si nous ne nous conformons pas à leurs attentes, les sanctions ne se feront pas attendre : condamnations, exclusion, moqueries etc.
Plus globalement, le Grand dictionnaire Larousse de la psychologie les définit comme "L'ensemble des comportements et des réactions qu’un groupe social approuve et désapprouve, et dont il attend qu’il soit régulièrement adopté ou évité par ses membres en toute situation pertinente”.
En partant de ce principe, oui effectivement nos souhaits ou nos désirs personnels peuvent parfois entrer en contradiction avec ce que la société ou notre entourage exigent de nous. Selon les individus et les situations, les comportements des individus se conforment ou transgressent ces normes. L'ensemble des désirs et des volontés humaines ne pouvant se réaliser dans la gamme de comportements qu'une société ou un groupe d'individu juge valorisable, l'Homme réprime consciemment ou inconsciemment ses désirs afin de s'aligner sur des normes sociales. Voir l'intériorisation des interdictions chez Freud et le concept de Surmoi. Il peut aussi douter, ressentir un conflit entre ce qu'il pense/désir et la manière dont il est attendu qu'il agisse. Qu'elles soient transgressées ou non ces normes exercent une influence considérable sur ce que nous sommes. Notre positionnement vis à vis de celles-ci peut aussi définir notre identité. Voir Howard Becker dans Outsiders : études de sociologie de la déviance et les "carrières déviantes".
Vous devriez aussi vous intéresser au cas des objecteurs de consciences, ces personnes qui refusent d'accomplir certains actes imposés par une autorité en raison de leurs convictions intimes. Vous pouvez regarder du coté de Henry David Thoreau ou plus récemment de Cédric Herrou, un agriculteur condamné par la justice française pour être venu en aide à de nombreux migrants dans sa ferme des Alpes Maritimes.
Cet alignement des comportements sociaux à la norme peut même être irrationnelle. Elle a été étudiée par Gustave Le Bon à la fin du XIXème siècle dans un petit livre intitulé La psychologie des foules. Ce résumé sur le site du Larousse pourrait vous intéresser.
Dans un autre registre l'expérience de Asch ou de l'expérience de Milgram pourraient nourrir vos réflexions sur les concepts d'obéissance/d'autorité et sur l'influence de notre environnement social dans nos prises de décision.
Plus largement enfin, sur ces thématiques nous vous conseillons vivement la lecture de La Psychologie sociale de Gustave-Nicolas Fischer. Avec ce constat terrible sur les normes sociales (p. 132) :
Or comme Festinger l'avait montré, cette validité de notre jugement ne réside pas dans nos propres convictions, mais dans l'adaptation de nos opinions à celles d'autrui. Autrement dit, nous validons nos opinions et nos comportements en les ajustant à ceux d'autrui. A cet effet nous comparons notre point de vue à celui des autres pour établir une sorte de cadre de référence qui nous est commun. Il apparait donc que la validation de nos conduites est sociale car elle repose sur des normes communes qui ont pour fonction de créer une vérité à laquelle on adhère. Les recherches sur la formation des normes ont permis de vérifier ces processus.
Voir également :
La psychologie sociale : quel enjeu ? / Nicolas Dubois et Jean-Léon Beauvois
Vocabulaire de psychologie sociale / Sous la direction de Jacqueline Barus-Michel
Bonne journée,
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