Pourquoi le "on" se conjugue t-il comme "il" et "elle" et qu'est ce qui le distingue du "nous" ?
Question d'origine :
Pourquoi le "on" va avec "il, elle" et pas avec "nous" ? Le "on" implique pourtant plusieurs personnes.
Quelles sont les différences entre "on" et "nous" dans la langue française ?
Réponse du Guichet
L'étymologie du mot "on" le rapproche des pronoms "il" et "elle" mais le nouvel emploi du "on" depuis le XIXème siècle, en particulier à l'oral, floute parfois la frontière entre le "nous" et le "on". Pourtant leurs utilisations renvoient à des usages distincts.
Bonjour,
C'est une histoire à en perdre son latin !
Pour comprendre l'histoire du pronom personnel indéfini "on", il faut remonter à la racine latine du mot. En effet, le Projet Voltaire, service en ligne de formation orthographique, rappelle que "on" a d'abord été un nom commun, et pas n'importe lequel puisqu'il descend du nominatif homo qui désignait à l'origine l'homme en général. La construction actuelle du mot viendrait de l'accusatif hominem. D'abord orthographié om puis hom il aurait perdu en précision à force de désigner un "individu aussi indéterminé" pour se transformer avec le temps en pronom indéfini tel que nous le connaissons.
Quant à "Il" il serait issu du bas latin "illi" qui signifie "celui-là". Idem pour "elle" qui proviendrait de "illa" qui veut dire "celle-là" comme l'indique cet article du Figaro : Connaissez-vous (vraiment) l’origine du pronom «on»?, qui poursuit :
Auparavant, l’usage voulait qu’on le fasse précéder de l’article défini, «le hom», vestige du nom commun «hom». «L’on» signifiait alors «l’homme quelconque»
(...)
Au XVIIe siècle, Vaugelas privilégie l’usage du «on» sans l’article défini devant, «l’on», bien qu’il admette les deux formes. Ce qui n’empêche pas l’écrivain Boileau de l’employer encore: «Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement». Cet usage littéraire est à distinguer (et à ne pas confondre) de l’emploi toujours actuel du «l» euphonique pour éviter une syllabe malvenue: «C’est ce que l’on m’a dit» , plutôt que «c’est ce qu’on m’a dit».
"L'on", comme forme abrégée de "l'homme" (au sens des individus de manière générique) dans sa construction démonstrative rapprochait alors "on" des troisièmes personnes du singulier "il" et "elle". Il désignait alors"quelqu'un" que l'on ne connaissait pas : "L"on a frappé à la porte".
"On" s'utilise aujourd'hui de trois façons. Les trois exemples utilisés par Le Figaro sont très parlants pour en répertorier les usages :
Le «on» qui désigne «n’importe qui, tout le monde» («On voit tout de suite quand quelqu’un est à son aise» - Giono)
Le «on» désignant «quelqu’un» («Il sentit qu’on relevait son drap, puis qu’on lui palpait le ventre - Maupassant)
Le «on» désignant «personne» dans un contexte négatif («On ne refuse pas le fils Péloueyre» - Mauriac).
Ce deuxième article du Figaro est excellent pour comprendre la distinction entre "on" et "nous" et les utiliser judicieusement : Quand utiliser les pronoms «on» et «nous»?
La substitution du "nous" en "on" dans notre usage oral serait en revanche très récente et daterait au moins du XIXème siècle.
Selon le linguiste Julien Soulié, "Nous" ferait d'abord référence à un groupe de personnes précises et son utilisation concrétiserait une démarche collective conférant une forme "d'identité" au groupe. A l'oral le locuteur privilégiera l'usage du "on" pour apporter un ton plus "naturel" à son propos, tandis que le "nous" sera employé majoritairement à l'écrit dans une forme plus solennelle.
Dans son usage courant "on va chercher du pain", le "on" déroberait alors les attributs du "nous", faisant automatiquement référence à un groupe plus précis qu'incertain. Il fait en réalité des vas et viens dans son utilisation, entre le précis et l'imprécis, allant du singulier au général pour davantage de nuances. Encore le Figaro :
Mais l’imprécision apportée par le pronom «on» conduisait aussi à l’utiliser à la place des pronoms «je» ou «tu», témoignant de nuances pudiques («l’on a des secrets à vous y révéler», dit Elmire alors qu’elle va se livrer à des confidences dans Le Tartuffe) ou familières («qu’est-ce qu’on vous sert?», qu’on entend parfois encore au restaurant.
Pour résumer le "on" se substitue au "nous" autant par habitude pour pour alléger notre langue à l'oral, les deux pronoms investiguant le même champs sémantiques à savoir on = nous = moi + une ou d'autres personnes. Alors que traditionnellement, tel qu'il nous est parvenu dans la langue française le "on", utilisé à la troisième personne du singulier, désigne autrui : On = les gens (en général), On = quelqu'un (inconnu) ou On = une personne anonyme (exemple tiré de Francepodcasts).
Bonne journée,