Question d'origine :
Bonjour, je suis désolée d'avance, je ne me rend pas compte du degrès d'interêt de ma question, et si elle est stupide, je m'en excuse. J'aimerais savoir en quelle mesure, l'Eglise au Moyen Age considerait que Dieu pardonnait ? Qui allait en Enfer ? Et au Paradis ?
Merci d'avance
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 04/12/2013 à 11h49
Bonjour,
L’ouvrage Histoire de la pénitence des origines à nos jours de Philippe Rouillard consacre un chapitre au Moyen-âge et explique les pratiques qui avaient cours à cette époque pour s’assurer le pardon de Dieu :
« Le Christ lui-même a confié à ses Apôtres la mission de lier ou de délier, le pouvoir de remettre ou de retenir les péchés. Tout au long des siècles, l’Eglise a donc estimé que la récitation du « Notre Père », incluant le pardon au prochain, était un moyen normal et suffisant de la rémission des fautes moins graves, dites vénielles ou quotidiennes. […]
Mais la plupart des chrétiens sentent la nécessité d’un intermédiaire, et d’une absolution qui les libère et les rassure, et donc font appel à un prêtre lorsqu’ils se sentent en danger de mort. [...]
Les théologiens de l’époque donnent la théorie de cette pratique (la confession à un laïc). Ils insistent sur l’importance et la nécessité de la confession. L’aveu des fautes n’est plus le moyen qui permettait au confesseur d’appliquer le tarif pénitentiel, mais il devient l’élément essentiel de la pénitence : l’acte d’humilité qu’implique l’aveu constitue désormais la véritable expiation. […]Le pouvoir d’absoudre n’appartient qu’au prêtre ; mais en cas d’urgence et en l’absence de prêtre, un laïc peut recevoir la confession du pécheur, le libérer de son secret et ainsi le rendre digne du pardon de Dieu. »
Laconfession était donc la première façon de se faire pardonner par Dieu de ces péchés, néanmoins, la gravité de certains crimes ne pouvait être effacée aussi simplement. C’est pourquoi d’autres actions ont été créées pour absoudre les pécheurs comme le pèlerinage.
« Les moines venus d’Irlande avaient donné l’exemple de la pérégrination. Pour eux, parcourir des pays inconnus et plus ou moins accueillants, dans un constant effort de renoncement et d’adaptation, était une des meilleures formes de l’ascèse, de la mortification et de la vie pénitente. On comprend que souvent, aux chrétiens qui venaient s’accuser de fautes graves, ils aient imposé comme pénitence ou satisfaction de pérégriner pendant un an, cinq ans ou plus, sans domicile fixe et sans destination précise, avec tous les aléas et les dangers de cette errance aventureuse. Les hommes soumis à la longue route de la pénitence ont parfois des fers aux pieds, tandis que les femmes sont affublées d’une longue robe blanche qui les offre à la dérision. S’ils comptent les lieues, ils comptent surtout les mois et les jours qui les rapprochent de leur délivrance et de leur retour à la vie normale, après une expérience qui les aura marqués à jamais.Cette forme de pénitence est imposée surtout aux clercs et aux laïcs coupables d’un homicide, ainsi qu’aux clercs ayant commis des fautes sexuelles scandaleuses : dans les deux cas, l’éloignement a l’avantage d’éviter la vengeance, et il aide à faire oublier le scandale. »
Pour compléter ce panel d'actions pour obtenir le pardon divin,l’Année sainte est créée en 1300, une année qui revient régulièrement et durant laquelle tous les péchés sont pardonnés, après plusieurs changements, cette durée est passée de 100 ans à 25 ans pour que le plus grand nombre puisse en profiter.
Le canon 21 issu du Concile de Latran IV (1215)impose aux fidèles de confesser tous leurs péchés au moins une fois par an et que la confession se fasse auprès de son prêtre (le curé ou le chapelain de sa communauté). Cette obligation est stricte, le chrétien qui ne s’y soumet pas est excommunié, il ne pourra plus entrer dans l’église, il n’aura pas de sépulture chrétienne et il ne pourra pas entrer au ciel après sa mort.
* Mais Dieu ne pouvait tout pardonner, certains péchés dits « capitaux » entraînaient l’individu inévitablement versl’enfer , ils sont au nombre de 7 :
- l’orgueil ou vaine gloire;
- l’envie;
- la colère;
- la tristesse;
- la cupidité;
- la gourmandise;
- la luxure.
Au contraire, pour s’assurer l’entrée auparadis , le chrétien devait suivre des œuvres de miséricorde :
« Dans le domaine spirituel, il faut :
- admonester les pécheurs
- instruire les ignorants
- conseiller les incertains
- consoler les affligés
- supporter les importuns
- pardonner volontiers
- prier pour les vivants et les morts.
Dans le domaine corporel, il faut :
- nourrir les affamés
- donner à boire aux assoiffés
- vêtir les dénudés
- héberger les sans-logis
- libérer les opprimés
- visiter les malades
- ensevelir les morts (à partir du XIIIe s.). »
Cependant cette vision manichéenne de la vie après la mort était une cause d'angoisse pour les chrétiens, ils ne voyaient que deux possibilités après leur mort le paradis ou l'enfer. Pour répondre à ces inquiétudes, Saint-Augustin explique alors que les peines auxquelles les fidèles seront soumis, après leur mort ne seront que temporaires, les âmes resteraient dans un espace entre l'enfer et le paradis, c’est la création dupurgatoire . Ce lieu ne sera défini qu’au XIIIe siècle. Le mot purgatoire est issu du latin « purgare » qui signifie : nettoyer, purger, purifier, disculper. C’est un lieu dans lequel les âmes des morts errent et souffrent pour une période plus ou moins longue (selon les péchés à expier), après cette durée, Dieu choisit si l’âme va en enfer ou au paradis. Les fidèles ont donc une deuxième chance d’atteindre le paradis.
Avec la création du purgatoire, se sont formées lesindulgences , une contrepartie que les fidèles donnent à l’Eglise en échange d’une réduction de la durée du purgatoire. Au départ, celles-ci existaient sous forme de jeûnes, de pèlerinages ou en encore d’aumônes mais au XVIe siècle l’Eglise propose aux chrétiens d’acheter les indulgences, ce système permettra à l’Eglise de récolter des fonds pour son fonctionnement et la construction de bâtiments comme la basilique Saint-Pierre de Rome.
Ces informations sont issues de la revue Historia dans son numéro spécial Enfer et Paradis.
Nous vous conseillons la lecture de la Divine comédie de Dante qui met en scène les trois espaces existants après la mort dans la religion chrétienne et qui est le symbole des croyances chrétiennes médiévales : L’enfer, Le purgatoire et Le paradis, ces ouvrages sont accessibles dans les bibliothèques de Lyon. Vous pouvez aussi consulter l'ouvrage complet en version numérique sur GoogleLivres: La Divine Comédie.
Pour aller plus loin, quelques pistes bibliographiques :
- La culture populaire au Moyen Age d’Aaron J. Gourevitch.
- Le grand pardon de Chaumont et les pardons dans la vie religieuse.
- Histoire des enfers de Georges Minois.
- Le paradis et l’enfer dans les Evangiles.
Bonne journée.
L’ouvrage Histoire de la pénitence des origines à nos jours de Philippe Rouillard consacre un chapitre au Moyen-âge et explique les pratiques qui avaient cours à cette époque pour s’assurer le pardon de Dieu :
« Le Christ lui-même a confié à ses Apôtres la mission de lier ou de délier, le pouvoir de remettre ou de retenir les péchés. Tout au long des siècles, l’Eglise a donc estimé que la récitation du « Notre Père », incluant le pardon au prochain, était un moyen normal et suffisant de la rémission des fautes moins graves, dites vénielles ou quotidiennes. […]
Mais la plupart des chrétiens sentent la nécessité d’un intermédiaire, et d’une absolution qui les libère et les rassure, et donc font appel à un prêtre lorsqu’ils se sentent en danger de mort. [...]
Les théologiens de l’époque donnent la théorie de cette pratique (la confession à un laïc). Ils insistent sur l’importance et la nécessité de la confession. L’aveu des fautes n’est plus le moyen qui permettait au confesseur d’appliquer le tarif pénitentiel, mais il devient l’élément essentiel de la pénitence : l’acte d’humilité qu’implique l’aveu constitue désormais la véritable expiation. […]
La
« Les moines venus d’Irlande avaient donné l’exemple de la pérégrination. Pour eux, parcourir des pays inconnus et plus ou moins accueillants, dans un constant effort de renoncement et d’adaptation, était une des meilleures formes de l’ascèse, de la mortification et de la vie pénitente. On comprend que souvent, aux chrétiens qui venaient s’accuser de fautes graves, ils aient imposé comme pénitence ou satisfaction de pérégriner pendant un an, cinq ans ou plus, sans domicile fixe et sans destination précise, avec tous les aléas et les dangers de cette errance aventureuse. Les hommes soumis à la longue route de la pénitence ont parfois des fers aux pieds, tandis que les femmes sont affublées d’une longue robe blanche qui les offre à la dérision. S’ils comptent les lieues, ils comptent surtout les mois et les jours qui les rapprochent de leur délivrance et de leur retour à la vie normale, après une expérience qui les aura marqués à jamais.
Pour compléter ce panel d'actions pour obtenir le pardon divin,l’Année sainte est créée en 1300, une année qui revient régulièrement et durant laquelle tous les péchés sont pardonnés, après plusieurs changements, cette durée est passée de 100 ans à 25 ans pour que le plus grand nombre puisse en profiter.
Le canon 21 issu du Concile de Latran IV (1215)
* Mais Dieu ne pouvait tout pardonner, certains péchés dits « capitaux » entraînaient l’individu inévitablement vers
- l’envie;
- la colère;
- la tristesse;
- la cupidité;
- la gourmandise;
- la luxure.
Au contraire, pour s’assurer l’entrée au
« Dans le domaine spirituel, il faut :
- admonester les pécheurs
- instruire les ignorants
- conseiller les incertains
- consoler les affligés
- supporter les importuns
- pardonner volontiers
- prier pour les vivants et les morts.
Dans le domaine corporel, il faut :
- nourrir les affamés
- donner à boire aux assoiffés
- vêtir les dénudés
- héberger les sans-logis
- libérer les opprimés
- visiter les malades
- ensevelir les morts (à partir du XIIIe s.). »
Cependant cette vision manichéenne de la vie après la mort était une cause d'angoisse pour les chrétiens, ils ne voyaient que deux possibilités après leur mort le paradis ou l'enfer. Pour répondre à ces inquiétudes, Saint-Augustin explique alors que les peines auxquelles les fidèles seront soumis, après leur mort ne seront que temporaires, les âmes resteraient dans un espace entre l'enfer et le paradis, c’est la création du
Avec la création du purgatoire, se sont formées les
Ces informations sont issues de la revue Historia dans son numéro spécial Enfer et Paradis.
Nous vous conseillons la lecture de la Divine comédie de Dante qui met en scène les trois espaces existants après la mort dans la religion chrétienne et qui est le symbole des croyances chrétiennes médiévales : L’enfer, Le purgatoire et Le paradis, ces ouvrages sont accessibles dans les bibliothèques de Lyon. Vous pouvez aussi consulter l'ouvrage complet en version numérique sur GoogleLivres: La Divine Comédie.
Pour aller plus loin, quelques pistes bibliographiques :
- La culture populaire au Moyen Age d’Aaron J. Gourevitch.
- Le grand pardon de Chaumont et les pardons dans la vie religieuse.
- Histoire des enfers de Georges Minois.
- Le paradis et l’enfer dans les Evangiles.
Bonne journée.
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