Question d'origine :
Bonjour,
Tout au long de l'année et particulièrement en été, fleurissent partout en France d'innombrables festivals de toute nature (musique, danse, théâtre...). C'est étonnant d'en voir même dans de petites communes rurales.
Est-il possible de les comptabiliser ?
Je souhaiterais savoir s'il en est de même dans d'autres pays de l'Union européenne ? ou bien si c'est une spécificité française (liée à une politique culturelle peut-être ?).
Merci pour votre réponse et félicitations pour votre site.
Réponse du Guichet
gds_se
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 22/08/2014 à 08h55
Bonjour,
Le ministère de la Culture édite tous les ans un guide de la Saison Culturelle en France. Ouvrage de référence sur l'actualité des programmes des établissements sous tutelle ou subventionnés par le ministère de la Culture et de la Communication, la « Saison Culturelle » est conçu comme un annuaire. Les informations sont regroupées par régions, départements et villes, et accessibles grâce à cinq index (régions, départements, villes, festivals par nom et festivals par thème/dates). Ce guide est consultable en ligne.
Le recensement dans ce guide est toutefois à relativiser, comme nous l’explique Luc Benito dans son ouvrage Les festivals en France : marchés, enjeux et alchimie : outre l’absence de données statistiques, les recensements de festivals effectués dans les guides culturels n’apparaissent pas des plus représentatifs faute d’acceptation commune de la définition.
On apprend en effet que le ministère de la Culture présente dans « Festivals et expositions » et « Saison culturelle » près de 700 festivals pour l’année, tandis que l’Office régional de la culture de PACA en propose près de 500 uniquement pour sa région et l’été.
Cette difficulté vient du fait que la notion de festival intègre deux types de critères.
Des critères objectifs facilement identifiables et qui peuvent se résumer en général par la règle des trois unités du théâtre classique :
• l’unité de temps sur une courte durée et à périodicité renouvelée,
• l’unité de lieu limitée à un ou plusieurs sites, souvent prestigieux, d’une ville,
• l’unité d’action ou de thème représentée par une discipline artistique.
Des critères subjectifs plus difficiles à appréhender d’un point de vue statistique car ils font référence à un état d’esprit :
• la célébration publique qui présente un festival comme un quasi-pèlerinage réunissant tous les passionnés d’une discipline artistique, amateurs ou professionnels, dans une communion d’esprits,
• la célébration d’un art qui induit une programmation de choix pour le directeur artistique et une prestation de qualité pour des artistes très souvent « sublimés » par l’événement.
Un festival pourrait par conséquent se définir comme une forme de fête unique, célébration publique d’un genre artistique dans un espace temps réduit. Suivant la rigidité de la définition, on peut grossièrement situer le nombre de festivals en France dans une tranche allant de 600 à 2000 manifestations chaque année.
Nous n’avons pas trouvé de chiffres concernant les festivals en Europe ; toutefois, nos différentes lectures nous laissent penser qu’il ne s’agit pas d’une spécificité française mais plutôt d’un essor culturel propre à toute l’Europe.
C’est ce qu’explique Bernard Faivre-d’Arcier dans Comment donner un avenir aux festivals ? :
Mais, il s’est avéré qu’au lendemain de la seconde guerre mondiale, et dans l’esprit rénovateur que les milieux culturels de la Résistance entendaient faire partager, les festivals sont nés au même moment et dans plusieurs pays. Aix-en-Provence est né un an seulement après Avignon et Edimbourg a le même âge qu’Avignon. C’est pourquoi on peut parler d’un phénomène à la fois social et historique qui correspondait à l’esprit du temps, qui était et reste consubstantiel à la société de loisirs et de communication qui est la nôtre.
Depuis, les festivals n’ont cessé de se multiplier au point qu’on ne sait plus les dénombrer. Aux dernières statistiques, on chiffrait le nombre de festivals en Europe de l’Ouest à 3 000. Mais on en annonce toujours plus comme s’il s’agissait de la multiplication de petits pains bénits pour le tourisme et l’économie locale. La Hongrie, par exemple, affiche délibérément l’objectif d’un bon millier de manifestations que les autorités locales baptisent allègrement « festivals ».
On sait que la France essaie de retrouver un certain équilibre entre production et diffusion dans le domaine du spectacle vivant. Une très forte augmentation de l’offre des spectacles, voire une surproduction, a produit un encombrement des circuits de diffusion, une saturation de la communication, voire une certaine fatigue du public. On le sait, de plus en plus de spectacles sont de moins en moins diffusés et les festivals servent de bouffée d’oxygène à bien des spectacles dont certains d’ailleurs ne sont plus conçus qu’à cet effet. On le sait aussi, en France ce déséquilibre économique est, en dernière analyse, la cause de tous les maux des intermittents du spectacle. Il n’y a pas trop de spectacles s’il y a du public pour les rencontrer. Et donc, il n’y a pas trop de festivals s’ils sont capables d’accroître le nombre de spectateurs, d’élargir comme on dit « le cercle des connaisseurs ».
Dans d’autres pays d’Europe, on n’en est pas, cependant, à se plaindre de saturation. Tout l’Est de l’Europe a adopté depuis longtemps la formule de festival, mais elles ne sont pas si nombreuses que cela les occasions de faire circuler d’un pays à un autre des œuvres, notamment dans le sens est/est. Par exemple, des pays baltes vers la Bulgarie ou de la Roumanie vers la Pologne, mais nul doute que la tendance lourde sera là aussi, dans cette partie du continent européen, celle de la multiplication des festivals.
L’auteur revient également sur les raisons d’organiser un festival :
• donner une nouvelle chance à la démocratisation de la culture
• l’impression ou l’illusion de créer du lien social et de renforcer une identité locale
• le festival est une bonne opportunité économique
• le festival offre aussi à la collectivité qui l’accueille, une visibilité, une image qu’elle n’aurait point par ailleurs
• un festival a une utilité artistique et culturelle de premier plan.
(Source : European Atelier for Young Festival Managers 2006 / Association Européenne des Festivals)
Pour aller plus loin :
• L’Europe des festivals : de Zagreb à Edimbourg, points de vue croisés
• Les festivals de musique : un monde en mutation : une comparaison internationale
• Quel avenir pour le « modèle » festival en Europe ? / Dragan Klaic
Bonne journée
Le ministère de la Culture édite tous les ans un guide de la Saison Culturelle en France. Ouvrage de référence sur l'actualité des programmes des établissements sous tutelle ou subventionnés par le ministère de la Culture et de la Communication, la « Saison Culturelle » est conçu comme un annuaire. Les informations sont regroupées par régions, départements et villes, et accessibles grâce à cinq index (régions, départements, villes, festivals par nom et festivals par thème/dates). Ce guide est consultable en ligne.
Le recensement dans ce guide est toutefois à relativiser, comme nous l’explique Luc Benito dans son ouvrage Les festivals en France : marchés, enjeux et alchimie : outre l’absence de données statistiques, les recensements de festivals effectués dans les guides culturels n’apparaissent pas des plus représentatifs faute d’acceptation commune de la définition.
On apprend en effet que le ministère de la Culture présente dans « Festivals et expositions » et « Saison culturelle » près de 700 festivals pour l’année, tandis que l’Office régional de la culture de PACA en propose près de 500 uniquement pour sa région et l’été.
Cette difficulté vient du fait que la notion de festival intègre deux types de critères.
Des
• l’unité de temps sur une courte durée et à périodicité renouvelée,
• l’unité de lieu limitée à un ou plusieurs sites, souvent prestigieux, d’une ville,
• l’unité d’action ou de thème représentée par une discipline artistique.
Des
• la célébration publique qui présente un festival comme un quasi-pèlerinage réunissant tous les passionnés d’une discipline artistique, amateurs ou professionnels, dans une communion d’esprits,
• la célébration d’un art qui induit une programmation de choix pour le directeur artistique et une prestation de qualité pour des artistes très souvent « sublimés » par l’événement.
Un festival pourrait par conséquent se définir comme une forme de fête unique, célébration publique d’un genre artistique dans un espace temps réduit. Suivant la rigidité de la définition, on peut grossièrement situer le nombre de festivals en France
Nous n’avons pas trouvé de chiffres concernant les festivals en Europe ; toutefois, nos différentes lectures nous laissent penser qu’il ne s’agit pas d’une spécificité française mais plutôt d’un essor culturel propre à toute l’Europe.
C’est ce qu’explique Bernard Faivre-d’Arcier dans Comment donner un avenir aux festivals ? :
Mais, il s’est avéré qu’au lendemain de la seconde guerre mondiale, et dans l’esprit rénovateur que les milieux culturels de la Résistance entendaient faire partager, les festivals sont nés au même moment et dans plusieurs pays. Aix-en-Provence est né un an seulement après Avignon et Edimbourg a le même âge qu’Avignon. C’est pourquoi on peut parler d’un phénomène à la fois social et historique qui correspondait à l’esprit du temps, qui était et reste consubstantiel à la société de loisirs et de communication qui est la nôtre.
Depuis, les festivals n’ont cessé de se multiplier au point qu’on ne sait plus les dénombrer. Aux dernières statistiques, on chiffrait le nombre de festivals en Europe de l’Ouest à 3 000. Mais on en annonce toujours plus comme s’il s’agissait de la multiplication de petits pains bénits pour le tourisme et l’économie locale. La Hongrie, par exemple, affiche délibérément l’objectif d’un bon millier de manifestations que les autorités locales baptisent allègrement « festivals ».
On sait que la France essaie de retrouver un certain équilibre entre production et diffusion dans le domaine du spectacle vivant. Une très forte augmentation de l’offre des spectacles, voire une surproduction, a produit un encombrement des circuits de diffusion, une saturation de la communication, voire une certaine fatigue du public. On le sait, de plus en plus de spectacles sont de moins en moins diffusés et les festivals servent de bouffée d’oxygène à bien des spectacles dont certains d’ailleurs ne sont plus conçus qu’à cet effet. On le sait aussi, en France ce déséquilibre économique est, en dernière analyse, la cause de tous les maux des intermittents du spectacle. Il n’y a pas trop de spectacles s’il y a du public pour les rencontrer. Et donc, il n’y a pas trop de festivals s’ils sont capables d’accroître le nombre de spectateurs, d’élargir comme on dit « le cercle des connaisseurs ».
Dans d’autres pays d’Europe, on n’en est pas, cependant, à se plaindre de saturation. Tout l’Est de l’Europe a adopté depuis longtemps la formule de festival, mais elles ne sont pas si nombreuses que cela les occasions de faire circuler d’un pays à un autre des œuvres, notamment dans le sens est/est. Par exemple, des pays baltes vers la Bulgarie ou de la Roumanie vers la Pologne, mais nul doute que la tendance lourde sera là aussi, dans cette partie du continent européen, celle de la multiplication des festivals.
L’auteur revient également sur les raisons d’organiser un festival :
• donner une nouvelle chance à la démocratisation de la culture
• l’impression ou l’illusion de créer du lien social et de renforcer une identité locale
• le festival est une bonne opportunité économique
• le festival offre aussi à la collectivité qui l’accueille, une visibilité, une image qu’elle n’aurait point par ailleurs
• un festival a une utilité artistique et culturelle de premier plan.
(Source : European Atelier for Young Festival Managers 2006 / Association Européenne des Festivals)
Pour aller plus loin :
• L’Europe des festivals : de Zagreb à Edimbourg, points de vue croisés
• Les festivals de musique : un monde en mutation : une comparaison internationale
• Quel avenir pour le « modèle » festival en Europe ? / Dragan Klaic
Bonne journée
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