Question d'origine :
Bonjour,
à l'époque féodale, un seigneur était dit vassal d'un autre qui était donc son suzerain, mais une ville, une cité qui était elle aussi soumis à un seigneur (qu'il soit évêque ou roi), quel était le terme employé pour désigner son rapport d'allégeance? Etait-elle vassale elle aussi?
Merci et bonnes fêtes
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 30/12/2015 à 11h09
Il faut d’abord signaler que votre question porte sur une période fort longue et donc nécessairement présentant des variations très importantes .
« Le Moyen Âge est une période de l'histoire de l'Europe, s'étendant du Ve siècle au XVe siècle, qui débuta avec le déclin de l'Empire romain d'Occident et se termina par la Renaissance et les Grandes découvertes. Située entre l'Antiquité et l'époque moderne, la période est subdivisée entre le haut Moyen Âge (VIe Xe siècle), le Moyen Âge central (XIe XIIIe siècle) et le Moyen Âge tardif (XIVe XVe siècle). »
Moyen Age
Cependant cette période est marquée par des principes d’organisation qui, s’ils évoluent et se transforment, restent une caractéristique générale de ce temps long : la notion de vassalité et le système de féodalité en sont des éléments clés :
On trouve une définition du terme vassalité et un article sur la féodalité dans l’Encyclopédie Universalis en ligne, accessible à la bibliothèque :
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• en histoire, système social fondé sur les liens entre un suzerain et ses vassaux à qui il donnait un fief mais qui lui devaient fidélité et des services personnels (sous le système de la féodalité)
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"Dans l'histoire de la civilisation de l'Europe occidentale, la féodalité représente un moment particulier qui se caractérise par la dissolution de l'autorité publique ; elle répond à un état de la société et de l'économie fondé sur l'exploitation de la paysannerie par l'aristocratie dans le cadre de la seigneurie. À partir du IXe siècle, les relations de patronage et de dévouement personnel, qui s'étaient développées dans le privé, se sont introduites progressivement dans les structures de l'État. L'affaiblissement de la royauté en fit peu à peu la seule armature des rapports politiques. Le pouvoir de commander, de punir et de taxer les gens du commun se répartit entre de petites cellules autonomes construites autour des châteaux. Parmi les membres de l'aristocratie, l'engagement vassalique et la concession du fief servirent de cadre aux liens de subordination.
L'hommage et le serment de fidélité instituent entre le vassal et son seigneur des devoirs honorables et réciproques de non-agression et d'assistance, peu différents de ceux que déterminent entre parents les liens du sang. Le lien réunit les deux hommes leur vie durant, sauf manquement de la part de l'un ou de l'autre à ses obligations. Pour mériter le fief dont il a reçu la jouissance lors de la prestation de l'hommage, le vassal est astreint à des services, plus nettement positifs, d'aide et de conseil. Mais le réseau des clientèles demeura longtemps discontinu, et la place prépondérante qu'occupa le fief à partir du XIe siècle dans la relation féodo-vassalique contribua à l'affaiblissement du lien affectif. Aussi, les institutions féodales ne parvinrent-elles pas à dégager de la violence et de l'anarchie la société aristocratique, malgré les efforts déployés par l'Église, qui s'était elle-même féodalisée, pour établir la « paix de Dieu ».
Au XIIe siècle, l'autorité monarchique reprend vigueur. Toutefois, les progrès du pouvoir royal se font tout d'abord dans le cadre des institutions féodales, qui peu à peu prennent plus de rigueur ; elles s'organisent en une pyramide qui, par échelons successifs, fait converger vers la personne du souverain l'hommage et le service des vassaux et des arrière-vassaux ; l'exploitation du droit féodal, alors que s'anime la circulation monétaire, sert de base à l'instauration de la fiscalité royale, et prépare la restauration de la souveraineté. »
La ville se situe donc dans ce réseau complexe.
Là encore, on ne parle pas de la même chose selon que nous sommes dans le « Haut Moyen Age » ou le « Moyen Age tardif ».
« Au cours du haut Moyen Age, le réseau des cités qui formait l’armature de l’Empire romain lui a survécu en changeant complètement de fonction. C’est l’Eglise qui l’a préservé, parce qu’elle y avait conformé sa propre organisation. La cité, résidence de l’Evêque et de ses clercs, entourée d’oratoires et de monastères suburbains, centre de consommation de produits rares, sinon de production joue encore dans une civilisation essentiellement rurale un rôle ordonnateur sur le plan social et culturel surtout en Italie et en gaule méridionale. Centre politique aussi parce que siège du comte, elle conserve la fonction militaire que lui confèrent les enceintes fortifiées, bâties au cours du IV° siècle. Les dernières vagues d’invasions au IX° siècle donnent à ces remparts une nouvelle utilité et suscitent l’apparition de lieux forts (
La relance générale de l’urbanisation s’amorce vers la fin du X° siècle.
« C’est l’essor de l’agriculture qui provoque un trop plein d’hommes à employer et un surplus de denrées à échanger. Des lieux de marchés apparaissent au voisinage, soit d’abbayes et de prieurés, soit de châteaux, nouveaux sièges de la puissance politique. Des agglomérations se forment qui conservent la dénomination vague de « ville » (villae) ou prennent celle de bourg. Dans l’immense majorité des cas, cette urbanisation, fondée sur l’échange et la production artisanale, n’a rien de spontané. Elle est souvent d’initiative seigneuriale dans une perspective de colonisation intérieure appuyée par la concession e franchises et de droits spéciaux aux habitants que l’on nomme bourgeois‘, ou sous la forme explicite de fondation, témoins les villes, bourgs et châteaux neufs, les bastides et les
Lecture à poursuivre de l’article « Ville » dans le
Dictionnaire du Moyen Age, sous la direction de Claude Gauvard, Alain de Libera, Michel Zink
« La féodalité ne fut pas seulement le fait des campagnes. Les seigneurs fonciers, bénéficiaires de l’émiettement des pouvoirs, ont accaparé toutes sortes de pouvoirs dans la ville même. Leurs justices privées, leurs maisons fortifiées et leurs guerriers se partageaient la cité, y établissaient et y maintenaient de véritables fiefs.
[...]
En fait, la ville vivait en parfaite conformité avec ses campagnes : sociétés urbaines et sociétés rurales sont étroitement liées et pendant longtemps présentent les m^mes structures dominées par les mêmes maitres. Aux fiefs de la campagne s’ajoutaient ceux de la cité ; aux mottes féodales et aux châteaux forts répondaient les donjons surplombant les rues et places de villes , refuges eux aussi pour une forte clientèle de dépendants.[…]
Le régime féodal, lourd de conséquence sur le plan social, s’est parfaitement implanté dans les cités. »
La ville au Moyen Age, Jacques Heers P 203 et 204
« La reconnaissance juridique de la ville implique discussions et accord avec diverses autorités : celles qui sont présentes sur les lieux et celles qui commandent l’ensemble de la société. C’est un jeu entre le pouvoir local et le pouvoir central dont ont pu tirer parti des communautés urbaines décidées."
Au niveau central,‘ il s’agit de l’autorité « des rois, celle des ducs ou comtes qui dominent une principauté ou un grand fief et qui aspirent à la souveraineté. Elles n’empêchent pas la mise en place d’institutions urbaines, à condition que celles-ci respectent la hiérarchie des pouvoirs. Les libertés octroyées, confirmées ou acquises après des luttes, restent donc subordonnées, marquant les contours d’une autonomie plus ou moins large."
Au niveau local « Là, la communauté en formation se heurte directement aux maîtres du sol et des hommes et leurs pouvoirs quotidiens qui sont présents et actifs. On pressent combien fut variable l’équilibre entre l’ancien (les structures feodo-seigneuriales) et le nouveau (la ville). Ces pouvoirs directs étaient exercés par les seigneurs ecclésiastiques (évêques, monastères anciens) ou laïques (féodaux dont les pouvoirs et les ambitions s’inscrivaient dans une histoire politique complexe mettant en jeu toutes sortes de rivalités avec les suzerains, les autres seigneurs, notamment ecclésiastiques)."
Le monde des villes au Moyen Age, de Simone roux , p 25 et 26
Pour compléter :
- Ville au Moyen Age
- Libertés urbaines
- Et un dossier de la Bibliothèque Nationale de France
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