Question d'origine :
Nous sommes moins dans une société réalisée de la connaissance ou du savoir que dans une société potentielle, en devenir.
Reste à savoir ce que sera ce devenir.
S'inscrira-t-il nécessairement dans une logique capitaliste - logique d'exploitation, du savoir ou autre, comme le rappelle Yann Moulier-Boutang- ou irons-nous, moyennant une transformation radicale de la socété, vers une économie coopérative qui conduira à repenser la place de la connaissance et du savoir selon des logique totalement autres?
À la question des mutations technologiques qui dessinent les figures d'une économie cognitive ou immatérielle doit s'adjoindre le problème du capitalisme qui donne à cette économie une orientation particulière, généralement présentée comme la seule voie possible.
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 03/03/2015 à 14h54
Bonjour,
Vous souhaitez savoir si une future société de la connaissance se réalisera dans une logique capitaliste ou dans une logique d’économie coopérative, à inventer.
L’auteur que vous citez, Yann Moulier-Boutang, s’inscrit dans les réflexions actuelles sur les « biens communs », mais dans un courant de capitalisme cognitif, en appliquant aux biens immatériels le concept de pollinisation :
« Yann Moulier Boutang poursuit sur le mode de l’allégorie : le capitalisme, c’est l’ours qui se goinfre en détruisant les essaims d’abeilles. Il recherche la plus-value absolue sans tenir compte des conséquences. Il exploite. L’apiculteur qui ne récolte que le surplus réalise une plus-value relative. Il collabore. L’abeille rend service à son environnement en assurant la pollinisation des plantes et contribue en même temps à la vie de la colonie à laquelle elle appartient. Elle exploite une capacité innée. Elle vit en symbiose. La notion de plus-value perd toute signification. »
(« L’abeille, la pollinisation et l’économie du futur»).
« Dans la compréhension humaine du complexe, on retrouve le rôle pollinisateur. Mais à la place du pollen, on va trouver tous les immatériels, la confiance, la coopération volontaire, la mobilisation des affects qui détermine la capacité cérébrale, et surtout le travail de réseau, la coopération en réseau qui prend la forme de contribution. Que fait l’abeille ? Elle crée du réseau, découvre des endroits à polliniser, revient voir ses congénères, leur indique les zones où il y a à butiner. (...) Donc cette activité rhizomatique c’est exactement ce qui se produit quand les êtres humains résolvent un problème par l’addition de leurs forces cognitives en réseau. C’est ce qu’on appelle le lien social, le maintien des liens, la sociabilité, le langage, autant de principes qui maintiennent des possibilités de coopération et, au-delà d’une coopération strictement mécanique, permettent d’atteindre ce que Durkheim appelle la solidarité organique d’une société. »
(L’abeille et l’économiste, p.127)
Pour séduisante que soit la fable, la critique marxiste lui reproche de prétendre « que le travail ne produit plus la valeur, qui « se forme principalement dans la circulation », [et que du fait] l’exploitation de la force de travail disparaît par enchantement de la circulation du capital inhérente à l’économie de la connaissance ! »
("Les abeilles nous sauveront-elles de la finance ?", L’Humanité, 29 juin 2010)
Le rapprochement avec la phisiocratie ne semble pas usurpé.
Beaucoup d’ouvrages actuels sur l’économie de la connaissance (terminologie du début des années 2000), intitulés économie du savoir, économie de l’immatériel, considèrent comme une évidence le contexte capitaliste, et au premier chef les manuels comme L’économie du savoir, ou La force de l’immatériel pour transformer l’économie qui conclut sur un « capitalisme plus vertueux ». Nous pensons que La richesse, la valeur et l’inestimable pourrait répondre à vos interrogations, à tout le moins alimenter votre réflexion, en revisitant les concepts de valeur et de richesse :
« Le co-président des Economistes atterrés propose une synthèse concernant la valeur et la richesse au sein d'une société dominée par le capitalisme et met en lumière les enjeux politiques qui se dessinent derrière la théorie. Le projet est celui d'une critique de l'économie politique visant à penser une transition vers l'après-capitalisme. ».
Bonne journée.
Vous souhaitez savoir si une future société de la connaissance se réalisera dans une logique capitaliste ou dans une logique d’économie coopérative, à inventer.
L’auteur que vous citez, Yann Moulier-Boutang, s’inscrit dans les réflexions actuelles sur les « biens communs », mais dans un courant de capitalisme cognitif, en appliquant aux biens immatériels le concept de pollinisation :
« Yann Moulier Boutang poursuit sur le mode de l’allégorie : le capitalisme, c’est l’ours qui se goinfre en détruisant les essaims d’abeilles. Il recherche la plus-value absolue sans tenir compte des conséquences. Il exploite. L’apiculteur qui ne récolte que le surplus réalise une plus-value relative. Il collabore. L’abeille rend service à son environnement en assurant la pollinisation des plantes et contribue en même temps à la vie de la colonie à laquelle elle appartient. Elle exploite une capacité innée. Elle vit en symbiose. La notion de plus-value perd toute signification. »
(« L’abeille, la pollinisation et l’économie du futur»).
« Dans la compréhension humaine du complexe, on retrouve le rôle pollinisateur. Mais à la place du pollen, on va trouver tous les immatériels, la confiance, la coopération volontaire, la mobilisation des affects qui détermine la capacité cérébrale, et surtout le travail de réseau, la coopération en réseau qui prend la forme de contribution. Que fait l’abeille ? Elle crée du réseau, découvre des endroits à polliniser, revient voir ses congénères, leur indique les zones où il y a à butiner. (...) Donc cette activité rhizomatique c’est exactement ce qui se produit quand les êtres humains résolvent un problème par l’addition de leurs forces cognitives en réseau. C’est ce qu’on appelle le lien social, le maintien des liens, la sociabilité, le langage, autant de principes qui maintiennent des possibilités de coopération et, au-delà d’une coopération strictement mécanique, permettent d’atteindre ce que Durkheim appelle la solidarité organique d’une société. »
(L’abeille et l’économiste, p.127)
Pour séduisante que soit la fable, la critique marxiste lui reproche de prétendre « que le travail ne produit plus la valeur, qui « se forme principalement dans la circulation », [et que du fait] l’exploitation de la force de travail disparaît par enchantement de la circulation du capital inhérente à l’économie de la connaissance ! »
("Les abeilles nous sauveront-elles de la finance ?", L’Humanité, 29 juin 2010)
Le rapprochement avec la phisiocratie ne semble pas usurpé.
Beaucoup d’ouvrages actuels sur l’économie de la connaissance (terminologie du début des années 2000), intitulés économie du savoir, économie de l’immatériel, considèrent comme une évidence le contexte capitaliste, et au premier chef les manuels comme L’économie du savoir, ou La force de l’immatériel pour transformer l’économie qui conclut sur un « capitalisme plus vertueux ». Nous pensons que La richesse, la valeur et l’inestimable pourrait répondre à vos interrogations, à tout le moins alimenter votre réflexion, en revisitant les concepts de valeur et de richesse :
« Le co-président des Economistes atterrés propose une synthèse concernant la valeur et la richesse au sein d'une société dominée par le capitalisme et met en lumière les enjeux politiques qui se dessinent derrière la théorie. Le projet est celui d'une critique de l'économie politique visant à penser une transition vers l'après-capitalisme. ».
Bonne journée.
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