Comment soignait-on une petite plaie infectée au 17e siècle
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 14/12/2019 à 11h01
1742 vues
Question d'origine :
Bonjour,
Je souhaiterais savoir comment les médecins tentaient de soigner une petite plaie (par exemple à la main) infectée, au XVIIe siècle.
Utilisaient-ils déjà des produits comme l'alcool?
Sinon quel était leur protocole, sachant que la médecine manquait encore terriblement de moyens et de savoir comme le relève Molière?
Merci!
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 16/12/2019 à 13h26
Bonjour,
Dès le néolithique, les premiers hommes utilisaient des préparations à base de graisse et plantes pour soigner leurs plaies. En 1 600 avant J.-C., en Égypte, les plaies ouvertes étaient soignées par application de viande fraîche puis de miel, de graisse ou de cire d’abeille, de fibres végétales absorbantes ou encore d’excipients à base de liquides (huile, vin, lait, eau). En 460 avant J.-C. en Grèce, Hippocrate conseillait quant à lui le lavage des plaies à l’eau de mer mais considérait la suppuration des plaies nécessaire à leur guérison et élargissait les plaies dans ce but. A Rome, les plaies souillées étaient parfois recouvertes d’un mélange appelé barbarum (huile, vinaigre, aluminium, oxyde de plomb…) astringent et antiseptique. Au Moyen-Âge, les plaies sont élargies avec les doigts et “méchées” avec de l’étoffe trempée dans du blanc d’œuf. On retrouve régulièrement l’utilisation d’un mélange de blanc d’œuf, d’huile de rose, et de vin, emprunté à la médecine arabe.
source : Histoire du pansement de Thierry LE GUYADEC et snitem
Qu'en est-il du soin apporté aux plaies au XVIIe siècle ?
Sur les conseils de Nicolas Lemery (1645-1715) qui a publié la Pharmacopée universelle en 1697, les médecins recommandaient d'utiliser l'eau vulnéraire pour soigner les plaies. Il s'agit d'un mélange de différentes plantes et d'alcool.
L'eau d'arquebusade en est un exemple et a été utilisée notamment par Madame de Sévignée pour soigner ses blessures.
" Lettres du 7 mars et du 29 avril 1685 (n" 785 et 788).
« Quand ma petite dernière plaie a été fermée, il s'est jeté aux environs un feu léger, et des sérosités se sont répandues en six ou sept petites cloches, qui se sont percées et séchées en même temps, à la faveur de votre eau d'arquebusade, dont je me suis souvenue, et qui en deux jours m'a remise en état de marcher » (n' 785).
Cette eau d'arquebusade est une eau vulnéraire qui doit son nom au fait « qu'elle a été employée pour les playes d'arquebuse » (VIII, p. 735). Au XVIIe siècle, plusieurs formules voisines portaient ce même nom . La formule donnée par de Blégny (III, t. I, p. 103) comprenait quatorze plantes et celle indiquée par Nicolas Lémery (VII, p. 542 et VIII, p. 87 s.) vingt-quatre. [...]
Ce remède, plus ou moins modifié, se retrouvera dans de très nombreux ouvrages pharmaceutiques ; et Dorvault (3, p. 112), en 1955 encore, indique la formule et la préparation de l'alcoolat vulnéraire ou eau d'arquebusade. [...]
Nicolas Lémery (VIII, p. 3) classe l'eau d'arquebusade (ainsi que les teintures d'Aloès, de Mirrhes, les Aristoloches et les autres vulnéraires) parmi les « remèdes dessiccatifs ». Ceux-ci, étant détersifs, nettoyent les plaies et les débarrassent de toute « matière qui y excite la fermentation et la corruption », si bien que les chairs reviennent et la cicatrice se fait ». "
source : Dillemann Georges, Lemay René. Les médicaments de Mme de Sévigné (suite). In: Revue d'histoire de la pharmacie, 54ᵉ année, n°190, 1966. pp. 161-184.
"Fabriquées en distillant d’innombrables substances aromatiques – thym, romarin, origan, marjolaine, sauge, basilic, angélique, sarriette, fenouil, lavande – avec un alcool quelconque, certaines eaux spiritueuses telles que l’eau de la reine de Hongrie ou l’eau d’arquebusade, plus fréquemment appelée eau vulnéraire, sont encore employées à de multiples fins au XVIIIe siècle . Utilisées comme remontants dans le cas des évanouissements légers et des nausées, elles sont aussi cosmétiques dans la mesure où elles peuvent servir à nettoyer et à blanchir le teint. Cependant, les vertus qui leur sont accordées les font encore clairement relever du domaine de la médecine dermatologique. Vulnéraires, elles doivent contribuer à la guérison des plaies, des tumeurs ou encore nettoyer les ulcères externes , mais leur intervention est aussi envisagée de manière plus profonde. Dans le cadre de la théorie médicale des humeurs, amendées par les conceptions iatromécanistes du XVIIe siècle, ces eau que l’on dit discussives et répercussives se voient assigner le rôle nouveau de favoriser la circulation des fluides à la surface de la peau, reconnue désormais comme une garantie de son équilibre, de sa santé et de sa beauté."
source : La Poudre et le fard: Une histoire des cosmétiques de la Renaissance aux Lumières / Catherine LANOE
Pour aller plus loin :
- L’Art de Panser / Christian Régnier
- Les livrets de santé pour les pauvres aux XVIIe et XVIIIe siècles / Mireille Laget ; Histoire, économie & société Année 1984 3-4 pp. 567-582
- Histoire sommaire de la littérature pharmaceutique : Conférences-leçons à l'usage de MM. les Etudiants en Pharmacie. 4e Conférence : Les littératures spéciales des XVIIe et XVIIIe siècles : officielle, populaire, périodique. / Guitard Eugène-Humbert. In: Revue d'histoire de la pharmacie, 24ᵉ année, n°95, 1936. pp. 374-385.
- Médecins saints et sorciers aux 17e et 18e siècles [Livre] : se soigner autrefois / François Lebrun
Bonne journée.
Dès le néolithique, les premiers hommes utilisaient des préparations à base de graisse et plantes pour soigner leurs plaies. En 1 600 avant J.-C., en Égypte, les plaies ouvertes étaient soignées par application de viande fraîche puis de miel, de graisse ou de cire d’abeille, de fibres végétales absorbantes ou encore d’excipients à base de liquides (huile, vin, lait, eau). En 460 avant J.-C. en Grèce, Hippocrate conseillait quant à lui le lavage des plaies à l’eau de mer mais considérait la suppuration des plaies nécessaire à leur guérison et élargissait les plaies dans ce but. A Rome, les plaies souillées étaient parfois recouvertes d’un mélange appelé barbarum (huile, vinaigre, aluminium, oxyde de plomb…) astringent et antiseptique. Au Moyen-Âge, les plaies sont élargies avec les doigts et “méchées” avec de l’étoffe trempée dans du blanc d’œuf. On retrouve régulièrement l’utilisation d’un mélange de blanc d’œuf, d’huile de rose, et de vin, emprunté à la médecine arabe.
source : Histoire du pansement de Thierry LE GUYADEC et snitem
Sur les conseils de Nicolas Lemery (1645-1715) qui a publié la Pharmacopée universelle en 1697, les médecins recommandaient d'utiliser l'eau vulnéraire pour soigner les plaies. Il s'agit d'un mélange de différentes plantes et d'alcool.
" Lettres du 7 mars et du 29 avril 1685 (n" 785 et 788).
« Quand ma petite dernière plaie a été fermée, il s'est jeté aux environs un feu léger, et des sérosités se sont répandues en six ou sept petites cloches, qui se sont percées et séchées en même temps, à la faveur de votre eau d'arquebusade, dont je me suis souvenue, et qui en deux jours m'a remise en état de marcher » (n' 785).
Ce remède, plus ou moins modifié, se retrouvera dans de très nombreux ouvrages pharmaceutiques ; et Dorvault (3, p. 112), en 1955 encore, indique la formule et la préparation de l'alcoolat vulnéraire ou eau d'arquebusade. [...]
Nicolas Lémery (VIII, p. 3) classe l'eau d'arquebusade (ainsi que les teintures d'Aloès, de Mirrhes, les Aristoloches et les autres vulnéraires) parmi les « remèdes dessiccatifs ». Ceux-ci, étant détersifs, nettoyent les plaies et les débarrassent de toute « matière qui y excite la fermentation et la corruption », si bien que les chairs reviennent et la cicatrice se fait ». "
source : Dillemann Georges, Lemay René. Les médicaments de Mme de Sévigné (suite). In: Revue d'histoire de la pharmacie, 54ᵉ année, n°190, 1966. pp. 161-184.
"
source : La Poudre et le fard: Une histoire des cosmétiques de la Renaissance aux Lumières / Catherine LANOE
- L’Art de Panser / Christian Régnier
- Les livrets de santé pour les pauvres aux XVIIe et XVIIIe siècles / Mireille Laget ; Histoire, économie & société Année 1984 3-4 pp. 567-582
- Histoire sommaire de la littérature pharmaceutique : Conférences-leçons à l'usage de MM. les Etudiants en Pharmacie. 4e Conférence : Les littératures spéciales des XVIIe et XVIIIe siècles : officielle, populaire, périodique. / Guitard Eugène-Humbert. In: Revue d'histoire de la pharmacie, 24ᵉ année, n°95, 1936. pp. 374-385.
- Médecins saints et sorciers aux 17e et 18e siècles [Livre] : se soigner autrefois / François Lebrun
Bonne journée.
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