Question d'origine :
Bonjour
Auriez-vous des informations sur les Écuries du Roi (bordel dans les années 70 situé dans le vieux Lyon) et les liens avec Édouard Charret?
Merci par avance
Bien à vous
Réponse du Guichet
bml_reg
- Département : Documentation régionale
Le 04/06/2020 à 08h28
Voici quelques informations sur
1970-2011 : flics et voyous la malédiction lyonnaise :
« (...) Une volonté de la justice de faire le ménage dans les services de police et d’éradiquer un proxénétisme toléré. Dans cette chasse à la corruption, surgit l’affaire dite des Écuries du Roy, du nom d’un club select aux pensionnaires peu farouches. Ses activités nocturnes éclabousseront le député gaulliste Edouard Charret, rapporteur du budget de l’Intérieur à l’Assemblée. Puis un autre commissaire tombe, Louis Tonnot, chef adjoint de la Sûreté, suspecté de relations coupables avec des tenanciers de bordels. Ce dernier sera condamné en juin 1973 à cinq ans de prison ferme. Javilliey est muté, le dossier dépaysé à Dijon. Mais les ennuis continuent. Il est inculpé, incarcéré (...) »
Charles Pellegrini, policier au SRPJ de Lyon au début des années 70, présente un résumé du « scandale politico-judiciaire » souvent désigné sous le titre de « l’affaire de Lyon » (plutôt un ensemble d'affaires) dans un chapitre de sa biographie Flic de conviction :
Du rififi chez les Lyonnais, 1971-1972. Les choses commencent en 1968 avec une enquête sur le Fetich’s Club impliquant le commissaire Javilliey et les frères Hubert et Augustin Sorba, « connus à l’époque comme membres du SAC, « fournisseurs de filles » et agents électoraux de deux députés UDR de Lyon ». Trois ans plus tard, « La saisie de deux documents au domicile des frères Sorba, finalement écroués, est à l’origine des premières fissures dans le mur de respectabilité qui protégeait quelques édiles, policiers en place et notables bien considérés. Une cascade d’informations judiciaires s’abat alors sur Lyon comme une avalanche fatale. Ces documents sont des bombes. Le premier établit que les frères Sorba sont associés, dans le but d’exploiter un hôtel de passe, aux propriétaires des Escuries du Roy, une boîte à filles située dans le Vieux Lyon. Le second est une correspondance entre le député UDR Edouard Charret – rapporteur du budget du ministère de l’Intérieur – et le ministère de l’Intérieur, correspondance dans laquelle Charret intervient pour que soit levée l’interdiction de séjour frappant l’un des frères Sorba à la suite de diverses condamnations. Les soupçons quant à la probité de ce député se renforcent quand on découvre qu’il est le subrogé tuteur du fils de la tenancière des Escuries du Roy et qu’il fut en outre le témoin de mariage de cette dernière. Bien sûr, le marié était lui aussi proxénète. Enfin, le député a fait bénéficier un laboratoire d’analyses appartenant à son propre fils de la clientère – fidèle et fréquente (MST obligent) – d’une centaine de filles oeuvrant pour le clan Sorba. »
« (…) Meyer, l’ancien policier, est incarcéré, les propriétaires des Escuries du Roy arrêtés. Le Parquet de Lyon livre cinq dossiers d’instruction où les mêmes noms reviennent. Les rafles succèdent aux arrestations, de plus en plus de noms de policiers commencent à apparaître, notamment celui de Louis Tonnot, l’ancien chef de la Sûreté urbaine à Lyon, qui est suspendu de ses fonctions. Pendant des années, ce policier qui régnait en maître sur la région lyonnaise avait mis en place un réseau de « clandés » qu’il administrait plus ou moins directement après avoir assuré les propriétaires de sa protection. Tonnot avait interdit à ses subordonnés d’empiéter sur ce domaine réservé, sous le prétexte qu’il s’agissait là d’un vivier à indics. Enfin, il protégeait également Les Escuries du Roy que gérait sa maîtresse (…) »
La presse locale comme nationale s’empare évidemment de l’affaire, comme en témoigne cet article du Monde du 14 août 1972 : LES POLICIERS ONT ARRÊTÉ LA PROPRIÉTAIRE DES " ÉCURIES DU ROY ". Edouard Charret s'y défend des accusations portées contre lui.
Un article paru dans le Progrès le 16 mars 1973 résume l’affaire des Escuries du Roy à l’occasion de son passage devant la cour d’appel, et rappelle les condamnations prononcées par le Tribunal correctionnel de Lyon le 10 novembre 1972. En voici quelques extraits :
« Le réquisitoire ne fut guère qu’un rappel de l’affaire : l’avocat général présentant les membres du groupe qui, liés autant par amitié que par intérêt, s’est lancé par étapes dans les activités lucratives du groupe hôtelier.
D’abord rue du Garet, c’est l’achat par l’un d’entre eux d’un petit hôtel au joli nom « Ma quiétude » et aux quatre chambres, acheté 300F sous forme de droit au bail et revendu – quelques mois plus tard – 100 000 F. Puis, avec ce joli bénéfice, c’est l’acquisition d’un hôtel rue Moncey, cette fois de 14 chambres, au nom plus prosaïque d’Hôtel des Halles, fréquenté surtout par des Nord-Africains. Et la rapide ascension jusqu’à l’hôtel-restaurant-bar dont on a dit que, dans son genre évidemment, il était « l’établissement le plus sélect et le plus cher de Lyon »
« Chiffres. Trois chambres seulement. Mais, sur place, attendant au bar ou au restaurant, un choix de trois à cinq prostituées « sélectionnées et de classe »(… )».
Une recherche dans la presse lyonnaise de l'été 1972 vous permettra d'identifier d'autres articles sur ce lieu et cette affaire. La presse de cette période n'étant pas disponible sous forme numérique, il vous faudra chercher dans la presse papier ou microfilmée.
Quant à Edouard Charret, Pierre Mérindol nous apprend dans Lyon, le sang et l'encre (voir p. 82-84) qu’« Entendu par le juge Hanoteaux dans le cadre de cette vaste affaire de proxénétisme hôtelier, Edouard Charret devait s’en tirer sans peine, ni dépens mais non sans dommage. ». En 1973 il se représente au poste de député dans la 3e circonscription du Rhône, sans étiquette, et sera battu par Jacques Soustelle.
A ce propos lire également Lyon : Charret gâte la sauce, article paru dans l’Unité, hebdomadaire socialiste, paru le 26 janvier 1973.
Pour en savoir plus, vous pourriez lire en complément :
Lyon criminel / André Seveyrat, 1974. Dans son dernier chapitre, « Les risques du métier (de policier), le journaliste développe et contextualise l’affaire du Fetich’s Club et celle de « la bande à… Tonnot », tout en dressant le portrait du député Edouard Charret.
Je ne me tairai jamais, livre publié par Joannès Ambre en 1979. Cet avocat défendit la propriétaire des Escuries du Roy suite à son arrestation, ainsi que le commissaire Tonnot. Il revient sur l’affaire dans le chapitre « Lyon en question » et dans celui consacré au «Fetich’s club ».
Notre-Dame des Esclandres, ouvrage publié en 1973 par deux journalistes, Marc Kunstlé et Jean-Claude Lamy, venus enquêter sur les affaires lyonnaises en cours.
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