Question d'origine :
bonjour,
Est-il exacte qu'il faut donner environ 1750 l d'eau et 1750 g de céréale à un bovin pour un rendu de 100 g de viande et que 75% des terres cultivées sont destinées à nourrir les animaux d'élevage?
Cordialement
Réponse du Guichet
bml_sci
- Département : Sciences et Techniques
Le 22/12/2012 à 09h32
Comme vous le soulignez dans votre question, l’élevage, à l’instar de toute activité humaine, interagit avec l’environnement et contribue à sa transformation.
Les chiffres dont vous nous faites part, c'est-à-dire ce qu’il faut engager en termes d’eau (1750 litres) et de céréales (1750 grammes) pour la production de 100 grammes de viande bovine ne peuvent, d’après nos recherches, être aussi précisément confirmés.
Néanmoins, les diverses sources que nous avons consulté nous donnent plusieurs pistes chiffrées concernant la consommation d’eau qu’implique l’élevage de viande bovine.
Le chiffre le plus fréquemment cité est 1500 litres d’eau pour produire un steak de bœuf de 100 grammes. Cependant, selon les investigations de Doan Bui, journaliste au Nouvel Observateur, il faudrait 25 000 litres d’eau pour produire 100 grammes de bœuf. D’autres sources mentionnent encore des chiffres allant de 30 000 à 60 000 litres d’eau pour 1kg de bœuf.
De son côté, l’UNESCO estime, que « pour produire de la viande, de l'eau doit être utilisée dans la production de nourriture pour animaux, qui doit être donnée aux animaux pendant leur vie entière. La perte d'eau (et d'énergie) entre les niveaux trophiques est très importante. Quand les grains vont directement aux humains, cette inefficacité est évitée. En effet, la production de viande nécessite 60 fois plus d'« eau virtuelle » que celle d'une même quantité de céréales et bien que les céréales contiennent moins de protéines, pour obtenir la même quantité de protéine, l'agriculture réclame 13 fois moins de ressources que l'élevage. Un régime carné consomme environ 4000 litres d'« eau virtuelle » par jour tandis qu'un régime végétarien en consomme 1500 ». Selon la méthode de calcul Waterfootprint appliquée aux bovins, ces besoins en eau virtuelle varieraient de 13 000 à 20 000 m³ par tonne de viande produite.
Voir l'article wikipedia sur l' impact environnemental de la production de viande et le lien de l'organisation Waterfootprint (en anglais).
Cependant, ces chiffres sont contredits par les défenseurs de la filière viande qui dénoncent cette méthode de calcul qui, selon eux, est factice. En effet, la méthode Waterfootprint prend en compte la consommation de l’eau de pluie stockée dans le sol sous forme d’humidité et qui s’évapore via les surfaces cultivées ou les surfaces de prairies qui alimentent les troupeaux. Pour un steak de bœuf de 100 grammes et en retenant le chiffre de 1500 litres d’eau nécessaire à cette production, cette « eau verte » atteindrait 94% de la consommation totale d’eau. Les 6% restant seraient composés d’eau douce parmi laquelle l’« eau bleue », captée dans les eaux de surface et les nappes phréatiques et l’« eau grise », celle qui permet de maintenir la qualité de l’eau aux normes dans les systèmes de production de viande.
Les différentes recherches à l’échelle de la planète montrent, par conséquent, de fortes variations dans le calcul de la consommation d’eau par l’élevage bovin, un groupe ISO travaille actuellement sur une méthodologie commune de calcul de l’empreinte eau.
Voir cet article du site "la viande.fr" et celui du Nouvel Observateur.
Par ailleurs, pour répondre à la deuxième partie de votre question concernant le pourcentage de terres cultivées destiné à nourrir les animaux d’élevages, là aussi, les chiffres varient.
La FAO estime néanmoins que « l’élevage est le premier utilisateur des ressources terrestres de la planète, les pâturages et les terres cultivées affectées à la production de fourrage représentant près de 80% de la superficie agricole totale. Le secteur utilise 3,4 milliards d’hectares sous forme de pâturages et 0,5 milliards d’hectares plantés en cultures fourragères, ce dernier chiffre correspondant à un tiers de la superficie cultivée totale. La superficie totale affectée aux pâturages équivaut à 26 % des terres émergées du globe libres de glace, dont une grande partie trop sèche ou trop froide pour être cultivée et très faiblement peuplé ». L’élevage consommerait donc à lui seul 30% de la surface de terre de la planète.
De même, la FAO estime la superficie des terres cultivées « à 1 525 millions d’h. S’agissant des différents types de cultures occupant les terres cultivées de la planète, on peut constater que les céréales en occupent de loin la plus grande partie (55%), ce qui est cohérent avec le fait que ce groupe d’aliments apporte environ la moitié de l’énergie et des protéines alimentaires de l’humanité. En ce qui concerne la superficie des pâturages permanents du monde, la FAO l’estime à 3 370 millions d’ha ».
Voir le dossier complet de la FAO (Organisation des Nations-Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture) : « La situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture : le point sur l’élevage, 2009 » en PDF.
De plus, certaines cultures sont, en grande partie, destinées à l’alimentation animale : c’est le cas du maïs dont les deux tiers de la production mondiale servent à nourrir les animaux, de même que l’Europe consacre près de la moitié de sa production de blé à l’alimentation animale. Cette dernière offre également un débouché commercial aux sous-produits de l’industrie agro-alimentaire (tourteaux, son, gluten, drèches…), issus de la transformation des matières agricoles en aliments consommables par l’homme ou valorisés sous forme non alimentaire.
Du point de vue environnemental, la FAO a estimé que les gaz à effets de serre directement liés à la production de viande comptaient pour environ 18% du total des émissions mondiales.
Ce chiffre englobe l’ensemble du cycle de production de viande, incluant la déforestation, la production et le transport d’engrais, la consommation de combustible fossile et les émissions de gaz par les animaux. En outre, l’agriculture représente 98% des émissions d’ammoniac en France dont 76% sont dues aux élevages.
Contrebalançant quelque peu ces effets négatifs, la FAO met en exergue le vaste potentiel de stockage de CO² des prairies qui constitue un moyen de lutte important contre le réchauffement climatique.
Aujourd’hui, le grand public apparaît davantage conscient des effets négatifs de l’élevage sur l’environnement et les adeptes de la réduction de consommation de viande se font plus nombreux. Une récente enquête de l’IFOP (2009) montre que 30% des français interrogés ont réduit leur consommation de viande. Pour autant, le public a, dans le même temps, une perception grandissante de l’impact positif de l’élevage pour l’environnement. La population française soutenant toujours aussi massivement son agriculture, consciente des enjeux économiques qu’elle représente.
D’autres pistes vous permettront peut-être d’en savoir davantage :
Elevages et environnement / sous la direction de Sandrine Espagnol et Philippe Leterme, 2010, empruntable à la Part-Dieu.
Un dossier sur l’agriculture et les terres agricoles de Geoconfluences.
Un dossier de l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) sur le bilan carbone des activités agricoles (2010) en PDF.
Deux dossiers de l’INRA, le premier sur les pratiques de l’alimentation animale, le second sur les principes généraux de l’alimentation animale, en PDF.
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