Question d'origine :
On trouve fréquemment sur les gravures anciennes ou sur la première page de livres du XVIIème ou XVIIIème la mention : Avec Privilège du Roy.
En quoi consistait exactement ce privilège royal : simple approbation flatteuse pour l'auteur, ou réel avantage de nature à préciser ?
A partir de quand ce privilège royal a t'il été introduit et quelle administration royale était en charge de ce travail sans doute assez lourd car il semble que ce privilège n'était pas attribué à l'artiste ou à l'auteur, mais à telle ou telle de ses oeuvres ?
Merci d'avance de vos éclaicissements !
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 24/06/2009 à 15h05
Réponse du service Guichet du Savoir
Bonjour,
Voici tout d'abord ce qu'indique l'encyclopédie en ligne Wikipedia :
Sous l'Ancien Régime, le privilège du Roi ou, par ellipse, le privilège, est une autorisation exclusive d'imprimer un ouvrage. Cette autorisation était délivrée après lecture du manuscrit par les censeurs royaux.
Le "Que sais-je ?" intitulé "Histoire de la censure dans l'édition" écrit par Robert Netz retrace l'histoire de la mise en place de ce privilège. En voici un extrait :
L'article 78 des ordonnances de février 1566, dites édit de Moulins, arrête qu'il ne peut désormais être imprimé aucun livre "sans notre congé et permission et lettre de privilège expédiées sous notre grand scel ". [...]
Cette réglementation sera rappelée et développée par les lettres patentes de Henri III du 12 octobre 1586 et surtout par l'ordonnance de 1618, qui achève de placer le contrôle du livre sous l'autorité des officiers du roi.
[...]
Au XVIIe siècle, la législation de la librairie devient un maquis de plus en plus touffu d'ordonnances, de statuts, d'arrêts, de règlements. Paul Mellottée [Histoire économique de l'imprimerie] y distinguait deux réglementations, qui s'entrecroisent :
— celle du roi, qui vise à la fois à protéger la profession et à la contrôler, tout en y trouvant un intérêt financier ;
— celle des corps de métier, qui tend à maintenir la qualité de la production, empêcher la contrefaçon et limiter, sans le dire, la concurrence.
Quoique créée par la volonté royale, la Chambre syndicale (commune aux libraires et imprimeurs depuis 1618) n'a pas toujours, en matière de contrôle et de répression, les mêmes intérêts que le pouvoir. Pour celui-ci, il importe en
premier lieu de surveiller, et d'empêcher, le cas échéant, la circulation de certaines idées. Pour celle-là, ce qui compte, c'est de lutter contre les contrefaçons en protégeant autant que faire se peut, y compris par des mesures de police, le
régime des privilèges et les intérêts des libraires.
Pour des raisons qui sont donc fort différentes, le contrôle royal et la vigilance corporative se rejoignent aux XVIIe et XVIIIe siècles dans une volonté commune d'enserrer le livre dans un carcan d'obligations et d'interdictions.
Certes, les règlements, tel celui de 1618, parlent de «privilège et permission» comme étant deux choses distinctes. Mais dans la pratique, «on confondit assez vite ces deux formalités, et le privilège tint lieu d'autorisation ; ce fut même, à partir du XVIIe siècle, la forme supérieure de l'autorisation» sans qu'elle perde pour autant «son caractère attributif de monopole ».
Bien que la contrefaçon ne soit pas le thème de ce livre, il convenait de le rappeler. Car dans la pratique répressive, les deux types d'ouvrages font l'objet des mêmes saisies, des mêmes amendes, des mêmes destructions.
1. Les règlements. — De 1610 à 1715, les règlements concernant l'imprimerie sont répétés et précisés de multiples fois : règlement du 20 novembre 1610 ; du 9 juillet 1618 ; édit du 15 janvier 1629 (le Code Michaux) ; règlement du 7 septembre 1650 (élaboré en 1649) ; édit du 21 août 1686 qui restera en vigueur jusqu'en 1723...
Le contrôle royal sur les libraires et imprimeurs est établi par diverses obligations, organisant notamment la profession (apprentissage, maîtrise, établissement d'une Chambre corporative dirigée par un syndic et deux, puis quatre adjoints). Toute activité syndicale, toute organisation autonome de prévoyance ou de solidarité est interdite.
Certaines dispositions visent plus directement le contrôle de l'impression et de la diffusion :
—La première est le privilège . De nombreux arrêts, sentences et ordonnances ainsi que les règlements successifs confirment la législation du XVIe siècle : aucun livre ne peut être imprimé « sans lettres patentes signées et scellées du grand sceau» (édit de 1686). Il est interdit de vendre des livres sans privilège ainsi que des livres contrefaits.
D'ailleurs, imprimeurs et libraires sont tenus d'insérer le « privilège et permission » qui leur sera octroyé « à la fin ou au commencement» de chaque exemplaire, «à peine de punition exemplaire» (arrêt du 17 janvier 1645)...
Nous vous invitons à consulter cet ouvrage dans son intégralité pour en savoir plus sur le sujet.
Voir aussi :
- Livre et censure - chronologie sommaire de l'élaboration de la législation censoriale et bibliographie réalisée par la BNF (Bibliothèque nationale de France)
- L'article consacré à la Censure dans l'Encyclopaedia Universalis écrit par Julien DUVAL
- article "censure royale" de Wikipedia
- Lectures interdites : le travail des censeurs au XVIIIe siècle : 1723-1774 / Barbara de Negroni
- La censure royale des livres dans la France des Lumières / Raymond Birn
- Censure, autocensure et art d'écrire, par Jacques Domenech, Université de Nice-Sophia Antipolis 2005
Bonjour,
Voici tout d'abord ce qu'indique l'encyclopédie en ligne Wikipedia :
Sous l'Ancien Régime, le privilège du Roi ou, par ellipse, le privilège, est une autorisation exclusive d'imprimer un ouvrage. Cette autorisation était délivrée après lecture du manuscrit par les censeurs royaux.
Le "Que sais-je ?" intitulé "Histoire de la censure dans l'édition" écrit par Robert Netz retrace l'histoire de la mise en place de ce privilège. En voici un extrait :
Cette réglementation sera rappelée et développée par les lettres patentes de Henri III du 12 octobre 1586 et surtout par l'ordonnance de 1618, qui achève de placer le contrôle du livre sous l'autorité des officiers du roi.
[...]
Au XVIIe siècle, la législation de la librairie devient un maquis de plus en plus touffu d'ordonnances, de statuts, d'arrêts, de règlements. Paul Mellottée [Histoire économique de l'imprimerie] y distinguait deux réglementations, qui s'entrecroisent :
— celle du roi, qui vise à la fois à protéger la profession et à la contrôler, tout en y trouvant un intérêt financier ;
— celle des corps de métier, qui tend à maintenir la qualité de la production, empêcher la contrefaçon et limiter, sans le dire, la concurrence.
Quoique créée par la volonté royale, la Chambre syndicale (commune aux libraires et imprimeurs depuis 1618) n'a pas toujours, en matière de contrôle et de répression, les mêmes intérêts que le pouvoir. Pour celui-ci, il importe en
premier lieu de surveiller, et d'empêcher, le cas échéant, la circulation de certaines idées. Pour celle-là, ce qui compte, c'est de lutter contre les contrefaçons en protégeant autant que faire se peut, y compris par des mesures de police, le
régime des privilèges et les intérêts des libraires.
Pour des raisons qui sont donc fort différentes, le contrôle royal et la vigilance corporative se rejoignent aux XVIIe et XVIIIe siècles dans une volonté commune d'enserrer le livre dans un carcan d'obligations et d'interdictions.
Certes, les règlements, tel celui de 1618, parlent de «privilège et permission» comme étant deux choses distinctes. Mais dans la pratique, «on confondit assez vite ces deux formalités, et le privilège tint lieu d'autorisation ; ce fut même, à partir du XVIIe siècle, la forme supérieure de l'autorisation» sans qu'elle perde pour autant «son caractère attributif de monopole ».
Bien que la contrefaçon ne soit pas le thème de ce livre, il convenait de le rappeler. Car dans la pratique répressive, les deux types d'ouvrages font l'objet des mêmes saisies, des mêmes amendes, des mêmes destructions.
Le contrôle royal sur les libraires et imprimeurs est établi par diverses obligations, organisant notamment la profession (apprentissage, maîtrise, établissement d'une Chambre corporative dirigée par un syndic et deux, puis quatre adjoints). Toute activité syndicale, toute organisation autonome de prévoyance ou de solidarité est interdite.
Certaines dispositions visent plus directement le contrôle de l'impression et de la diffusion :
—
D'ailleurs, imprimeurs et libraires sont tenus d'insérer le « privilège et permission » qui leur sera octroyé « à la fin ou au commencement» de chaque exemplaire, «à peine de punition exemplaire» (arrêt du 17 janvier 1645)...
Nous vous invitons à consulter cet ouvrage dans son intégralité pour en savoir plus sur le sujet.
Voir aussi :
- Livre et censure - chronologie sommaire de l'élaboration de la législation censoriale et bibliographie réalisée par la BNF (Bibliothèque nationale de France)
- L'article consacré à la Censure dans l'Encyclopaedia Universalis écrit par Julien DUVAL
- article "censure royale" de Wikipedia
- Lectures interdites : le travail des censeurs au XVIIIe siècle : 1723-1774 / Barbara de Negroni
- La censure royale des livres dans la France des Lumières / Raymond Birn
- Censure, autocensure et art d'écrire, par Jacques Domenech, Université de Nice-Sophia Antipolis 2005
DANS NOS COLLECTIONS :
Ça pourrait vous intéresser :
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter