Question d'origine :
Bonjour, Pouvez-vous me préciser quelles étaient les règles de l'héritage des biens des parents dans les années 1790 ? Un droit d'ainesse ou le choix du père par testament pouvaient-il favoriser un des enfants ? Merci d'avance
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 09/04/2010 à 13h00
Bonjour,
Nous n’avons pas pu trouver de renseignements précis sur les années 1790, néanmoins, il semble que les coutumes n’aient connu que peu de changements durant l’Ancien Régime (XVIe-XVIIIe siècles).
Ainsi dans le Dictionnaire de l’Ancien Régime , la définition donnée pour le testament au XVIIIème siècle est celle-ci :
« Acte civil et religieux qui consiste à prendre des mesures pour la transmission d’un patrimoine et pour le salut de son âme. Passé devant notaire (testament solennel) ou écrit à la main du testateur (testament olographe), ce document règle la transmission des biens du testateur selon sa volonté. Celle-ci peut modifier les règles de succession dans la famille, qui varient selon la condition sociale du défunt et d’une coutume à l’autre. Le testament institue l’héritier dans les pays de droit écrit. Il révèle aussi la foi car les catholiques demandent des messes pour le salut de leur âme, font des dons aux pauvres ou à l’Eglise et déterminent le cérémonial de leurs funérailles. A partir des premières décennies du XVIIIe s. (Provence, Paris, Normandie), les formules pieuses et les demandes de messe tendent à devenir plus rares. On réclame aussi des funérailles plus simples. On peut aussi bien y voir les signes d’un détachement du christianisme que ceux d’une aspiration à une religion plus intériorisée. »
Le testament peut donc favoriser l’un des enfants d’une famille, cependant des différences existent selon les régions et les coutumes appliquées, ainsi :
« Coutumes : Formant l’une des sources juridiques, les coutumes sont des règles concernant essentiellement le droit privé : le statut des personnes et la famille (puissance paternelle, régime matrimonial, successions, testaments et donations). On distingue traditionnellement deux grandes zones : une France du Nord au-delà d’une ligne La Rochelle-Genève) où règnent les coutumes (qui étaient orales au Moyen-âge) et une France méridionale où celles-ci ont été submergées, à partir du XIIe siècle, par le droit romain écrit (pays de droit écrit). La codification totale des coutumes sera réalisée par le code civil napoléonien en 1804. »
Ces différentes régions connaissent aussi des formes familiales variées qui peuvent influencer le partage des biens lors des héritages.
« Famille : la composition d’une même famille peut être variable, se modifiant aussi selon les aléas de la vie. On peut seulement en donner les grandes tendances. Le type de famille le plus répandu, dans la plupart des régions et en ville, est la famille nucléaire (couple + enfants). Elle exclut les vieux parents. […] Lorsqu’en matière successorale, la coutume exige un partage égalitaire du patrimoine entre les héritiers, la chose peut être dramatique pour l’avenir de la famille qui n’a pas pu l’accroître. Il existe aussi des familles élargies à d’autres membres de la parenté (ascendants, descendants ou collatéraux). […] En général dans ces familles, le patrimoine foncier se transmet de manière intégrale soit par transmission inégalitaire, privilégiant l’aîné, soit dans le cas de la frérêche (plusieurs noyaux conjugaux dans une même maison et sur une même exploitation), en le conservant en indivision entres ses membres. Le poids du père pèse sur les options matrimoniales et sur la transmission du patrimoine, limitée cependant par les coutumes successorales. »
Ces différences sont confirmées avec l’ouvrage Histoire de la vie privée t.3 : De la Renaissance aux Lumières, dans lequel on peut lire :
« Les règles et les pratiques juridiques familiales ne sont pas les mêmes dans les régions où prédominent les ménages simples et dans celles où les ménages complexes, avec phases à trois générations, sont majoritaires : dans les premières, le droit contraint à partager également les biens entre les enfants, au moins les garçons ; dans les secondes, le sytème de choix d’un héritier pour rester avec ses parents et leur succéder est favorisé par des dispositions juridiques inégalitaires, permettant d’avantager l’héritier au détriment de ses frères et de ses sœurs. Les différences d’ordre juridique, compte tenu de l’absence d’uniformisation du droit sous l’Ancien Régime, sont assez marquées d’une province ou d’un groupe de provinces à l’autre pour que l’on ait pu dessiner les caractéristiques régionales de cette « géographie coutumière » en matière de partages familiaux et de transmission des héritages. En apparence, pour la France, la bipartition est claire : les provinces méridionales, au sud de la Loire, pratiquent majoritairement le partage inégalitaire avec choix d’un héritier, tandis que les provinces du Nord et de l’Ouest sont attachées à un droit égalitaire. Dans la réalité, la carte est infiniment plus compliquée, avec des zones de transition dans les provinces du Centre et des zones inégalitaires dans les provinces ou « pays » du nord et de l’est du territoire hexagonal. »
La noblesse quant à elle, se doit d’établir des règles pour conserver son patrimoine, ainsi dans La noblesse dans la France moderne XVIe-XVIIIe siècles, on peut lire :
« Les coutumes juridiques, qui règlementaient entre autres le partage des biens, avaient énoncé avec soin des dispositions très strictes, permettant aux nobles de préserver leurs terres d’un émiettement qui eût porté préjudice à leur survie de leur lignage. A l’ouest du royaume, l’aîné d’une fratrie était privilégié par les règles du partage noble : outre un préciput (généralement la principale demeure de la famille), il emportait une large part de la succession. […] Mais dans toutes ces régions, la logique du partage noble était la même : préserver les patrimoines dans leur intégralité, afin d’éviter la dérogeance. […] Dans le Nord-est et le Massif Central, toutes les coutumes, influencées par le droit romain, laissaient une grande liberté au chef de famille pour avantager l’un de ses enfants. Comme dans le Midi, le seul héritier pouvait emporter la plus grosse part de la succession, grâce à une donation ou un testament signé par son père. Ces pratiques inégalitaires, légitimées par l’attachement à un nom et à une terre étaient plus fréquentes chez les nobles que chez les roturiers. »
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