Question d'origine :
Bonjour,
Il y a longtemps (trop longtemps?), j'ai lut que Pétain était un des principaux instigateurs des Bordels Militaires de Campagne, sur le front de Ouest en 14-18. Je ne retrouve plus ce petit bouquin dont je ne me souviens plus des références. Si je me souviens bien, cela a été discrètement "officialisé" durant la bataille de Verdun, il ne fallait pas non plus inquiéter et scandaliser les épouses. Les filles étaient médicalement surveillée, car la grande crainte de l'armée était la propagations des maladies vénériennes. J'aurais voulu avoir confirmation que ma mémoire était bonne, que Pétain était bien "dans le coup", et éventuellement l'une ou l'autre référence de livre traitant de ce sujet à cette époque.
Bon temps de Noël et bonne dernière semaine 2010.
Merci.
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 30/12/2010 à 09h31
Nous vous avons déjà répondu à plusieurs reprises sur le thème de la première guerre mondiale. A l'avenir, nous vous invitons à tirer profit des sources proposées ; elles possèdent la plupart du temps de nombreuses références bibliographiques qui nous servent à vous répondre…
Concernant votre nouvelle question, rien dans nos recherches ne permet d’affirmer que Pétain est à l’origine des "maisons de tolérance". En revanche, quelques ouvrages nous donnent de sérieuses indications sur leur création en métropole, notamment pour le moral des troupes et pour la lutte contre la propagation des maladies vénériennes due en partie à la prostitution clandestine.
L’ouvrage le plus détaillé est probablement celui issu d’une thèse de doctorat de Jean-Yves Le Naour : Misères et tourments de la chair durant la Grande Guerre : les mœurs sexuelles des français 1914-1918. Ce document est très complet sur le sujet (Voir en particulier le chap. III : l’armée entre moralisation et proxénétisme) et donne de nombreux détails, et contient une somme de références bibliographiques qu’il nous semble indispensable de consulter.
La première guerre mondiale et la syphilophobie poussée à son comble conduisent le service de santé des armées à lancer un vaste plan de campagne d’éducation pour avertir les mobilisés du péril vénérien et les moyens de l’éviter. Le dilemme est alors de choisir entre la prescription de la chasteté, la dissuasion de toute pratique sexuelle, potentiellement dangereuse, et la recommandation de la prostitution surveillée médicalement. L’armée ne parvient pas à trancher sur ce point : à côté des conseils prophylactiques et moraux, de l’entreprise de répression sexuelle, elle conduit une politique de canalisation séminale en s’intéressant, à partir de mars 1918, à la construction de bordels militaires.[…]
Le bordel militaire de campagne ou réservé à la clientèle militaire existe dans les colonies, mais n’a pas droit de cité en France métropolitaine, où il demeure un commerce privé soumis aux lois du marché, sanctionné par l’autorisation de la municipalité. […] Dès le 10 octobre 1915, L’Echo des tranchées avait lancé un vibrant appel au bordel mobile de campagne.[…] Tant que le ministère de la Guerre ne s’était pas prononcé sur la question, il était impossible à l’armée de s’engager personnellement dans la création de maisons closes. Tout change avec l’arrivée au pouvoir de l’abolitionniste repenti Clemenceau et l’entrée du général Mordacq comme chef de cabinet au ministère. Ce dernier est convaincu des bienfaits de la prostitution en maison pour le moral des troupes […] Le 13 mars 1918, le général Mordacq prend la décision de créer des maisons de tolérance militaires. Pour ce faire, il demande aux généraux les différentes régions militaires de l’informer de toutes les localités où sont cantonnés des effectifs et du nombre de maisons fonctionnant déjà sur ces places. Par ailleurs, il les prie de rechercher des locaux appropriés et d’en construire de nouveaux si aucun bâtiment n’est susceptible d’accueillir l’intendance spéciale…
Un compte rendu de lecture est en ligne ici.
Sur le site de la BDIC :
Les soldats ont parfois l’occasion de passer une soirée à l’arrière. Ils y retrouvent une compagnie féminine et peuvent aussi rencontrer des prostituées qui se sont installées près du front. L’état-major a tenté d’endiguer l’essor de la prostitution dans la zone des armées pour éviter la propagation des maladies vénériennes. Mais, les bordels fleurissent dans les bourgs situés en arrière du front. Le 13 mars 1918, l’armée crée des bordels militaires soumis à un règlement strict concernant les règles d’hygiène.
D’autres pistes :
- Michel-Serge Hardy,
- Amours, guerres et sexualité 1914-1945
- L’âge d’or de la prostitution de 1870 à nos jours
- 1914-1918 : combats de femmes : les femmes, pilier de l’effort de guerre
- La femme au temps de la guerre de 14
Pour finir, nous vous proposons des textes issus du Fonds guerre 14-18 conservés à la bibliothèque de Lyon :
- De la nécessité de discipliner l’instinct sexuel [du soldat], in La Chronique médicale, 1er février 1918
- Conseils au soldat pour sa santé / Ministère de la Guerre (1915)
- La prophylaxie des maladies vénériennes aux armées / Marius Carle (1916)
- La lutte antivénérienne dans les Armées (1921)
- L’armée et la police des mœurs : biologie sexuelle du soldat / Louis Fiaux (1917)
- ...
DANS NOS COLLECTIONS :
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