Question d'origine :
les dieux egyptiens RA,ISIS,OSIRIS etc... ont-ils existé en tant qu'êtres humains
avant de devenir Dieux merci d'avance
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 20/01/2011 à 16h26
Aussi étrange que cela puisse paraître pour nous après deux millénaires de monothéisme, il n’y avait pas d’incompatibilité entre « être (un) dieu » et mener une existence terrestre en Egypte antique. Avant que le dieu ne devienne cette entité lointaine et sublimée qu’il deviendra plus tard, il est présent sur terre, vivant en ses statues ou en son animal consacré. Il n’y a pas non plus d’antériorité de la vie terrestre sur l’existence divine. Les dieux, comme les hommes, naissent, vivent et meurent.
L’un des ouvrages sur cette question qui a fait date est celui de l’égyptologue suisse Erik Hornung,
« Nous constaterons à maintes reprises que les divinités égyptiennes ne se présentent pas à nous avec une nature aussi claire et bien définie que celle des dieux grecs. La conception de dieu que nous rencontrons ici est fluide, inachevée, mouvante. (…) Il est bien entendu contraire à la nature d’un dieu égyptien de faire l’objet d’une définition stricte. Leur être demeure un état fluide auquel nous ne sommes pas habitués ; il échappe à toute définition dogmatique, définitive et peut toujours être élargi et différencié plus avant. » (p. 85)
« Il est un ensemble de traits communs à tous les dieux égyptiens qui les rend étonnamment transitoires et soumis à la marche du temps. Ils ont un commencement et un terme temporels. Ils naissent ou sont créés, ils se modifient avec le temps, ils vieillissent et meurent, et un jour, ils cessent d’exister. » (p. 129)
Que les dieux naissent, ne nous surprend pas outre mesure, car c’est le cas dans de nombreuses mythologies, mais qu’ils ne soient pas immortels est déconcertant, et le meurtre d’Osiris, par exemple, montre qu’un dieu est susceptible de mourir et d’être inhumé.
Vous lirez dans cet ouvrage de nombreuses pages passionnantes sur la conception égyptienne de l’existence et de la mort. L’Egypte, dont
Voici quelques citations et ouvrages de référence, qui nous semblent pouvoir alimenter votre réflexion :
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« Les dieux existent. Ce pluriel est capital puisqu’il est, d’emblée, la reconnaissance implicite du polythéisme. Les dieux sont multiples et leurs noms, leurs formes et leurs images sont variés, car les dieux ont plus d’une apparence, ce qui est une caractéristique du polythéisme égyptien. (…) Les dieux sont mortels. Ils ont même plusieurs façons d’être mortels. L’étude de leurs mythes montrera comment ils naissent, vieillissent et meurent selon un processus anthropomorphique. » (p. 16-17)
- « C'est en effet par centaines qu'il faut compter les dieux de l'Égypte : divinités des nomes, dieux locaux et des grandes capitales ; dieux de formes diverses : homme, femme, chien, chatte, lionne, chacal, faucon, vautour, taureau, vache, bélier, scorpion, cobra, sycomore, lotus, flèches, etc. Remarquons toutefois que, malgré leur origine animale ou végétale, toutes ces divinités ont un aspect humain. L'anthropomorphisme apparut très tôt et les artistes égyptiens ont su adapter harmonieusement une tête animale à un corps masculin ou féminin». Article de Jean VERCOUTTER dans Encyclopaedia Universalis en ligne.
- « Conçu à l’image de l’homme ; mais d’un homme infiniment fort et puissant, il possède un fluide vital, le « sa », qu’il peut renouveler à volonté en se faisant faire l’imposition des mains par un autre dieu mieux pourvu ; mais il ne peut se défendre éternellement contre la vieillesse, et il finit même parfois par mourir. Il aime à se montrer aux humains et s’incarne soit dans la statue du temple, soit dans un fétiche, soit dans un animal qu’il a choisi et que les initiés reconnaissent à certains signes. Au début, il vit seul, jaloux de son autorité ; mais l’Egyptien ne peut concevoir la vie sans une famille, et de bonne heure il marie son dieu ou sa déesse et leur adjoint un dieu-fis, formant ainsi ce qu’on appelle une triade divine. »
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- « Parmi les diverses catégories d’êtres imaginaires qui peuplaient l’univers égyptien, il en est une dont on a traduit le nom par dieu (ou déesse), dès les débuts de l’égyptologie, parce qu’il servait en copte avec ce sens, sans qu’on se soit toutefois préoccupé de savoir exactement ce que ce mot (neter) représentait pour les anciens Egyptiens. (…) En 1945, S. Schott (…) attirait l’attention sur l’anthropomorphisme nécessaire des dieux égyptiens, qui ont non seulement une apparence visible le plus souvent humaine, mais surtout, quelle que soit leur forme, ont toujours un comportement humain. (…)
« Concrètement, Osiris étant tantôt le grain qui renaît après avoir été enterré, tantôt le Nil qui connaît une nouvelle crue après les mois d’étiage, tantôt encore la lune, qui resplendit de nouveau au ciel après une période d’invisibilité, ou même le soleil qui réapparaît après la nuit, il faudrait pour le [commun dénominateur] définir isoler ce qui a pu être ressenti comme commun à tous ces phénomènes, et qui marque aussi la destinée humaine, car Osiris est encore, en dehors de tous les aspects naturels énumérés, le type même du prince qui se perpétue dans son fils, et qui, d’autre part, après sa mort, découvre la survie spirituelle. Or cette commune mesure que nous cherchons ne nous paraît pouvoir être autre chose que la périodicité qui affecte tous ces faits. Le recommencement est en effet attendu et souhaité, provoqué par les rites s’il le faut, tant de la moisson, de la crue, du cycle solaire ou lunaire, que de la vie humaine. Dans le cas de cette dernière, pour garantir à l’homme l’immortalité, il faut après qu’il a passé par la mort – qu’il a donc accompli un cycle complet – par des rites et des formules appropriés, l’assimiler au dieu qui est l’éternel retour, pour qu’il participe de cette qualité, qu’il devienne apte lui-même à se recommencer. (…)
« Quand aux attributs de la divinité, nous ne les préciserons pas facilement non plus. Il y a naturellement en premier lieu la vie et la durée, ce qui n’empêche cependant pas que les dieux meurent parfois dans les mythes. Le passage par la mort est, dans le cas d’Osiris, le moyen d’accéder à une vie plus sûre. »
On voit ainsi que les frontières entre ces deux mondes n’étaient pas aussi « étanches » qu’on pourrait penser.
- « Les liens entre le roi et les dieux sont de deux natures. Il est leur héritier et les utilise comme modèles. Il s’identifie à certains d’entre eux lorsque le rôle qu’il doit jouer s’y prête. »
- Cette situation intermédiaire du roi est également abordée dans l’ouvrage de Françoise Dunand et Christiane Zivie-Coche,
- Sur la filiation dieux-pharaons, vous lirez dans l’ouvrage
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