Question d'origine :
Bonjour, de retour d'un beau séjour en Picardie maritime, je me pose certains questions.
1/ Pourquoi beaucoup de noms de villages ou hameaux se terminent-ils par le suffixe -court?
2/Pourquoi la foire d'Abbeville est-elle nommée foire de la Madeleine?
3/Nous avons remarqué que des récipients (seaux en plastique, p.ex) contenant des graines, avec une ouverture à clapet en bas (faisant office de distributeur) étaient très souvent disposés sur le pourtour des champs cultivés. De quoi s'agit-il? Un poison pour éliminer certains animaux nuisibles?
Merci.
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 16/08/2012 à 13h21
Bonjour,
1/ Le suffixe toponymique -court est relativement propre au quart nord-est de la France.
Il signifie « ferme, domaine, exploitation agricole ».
cf : Wikipedia : -court et Wikipedia : toponymie française
Ces toponymes sont fréquemment formés d'un anthroponyme (nom d'homme) suivi du suffixe -court.
Ainsi, Rogécourt est "le domaine de Roger".
Nous vous recommandons la lecture de l'ouvrage intitulé "Noms de lieux de Picardie" de Jacques Chaurand et Maurice Lebègue aux pages 71 à 80.
Les auteurs expliquent qu'il s'agit d'un apport germanique datant du VIe siècle :
Le procédé de la composition, abondamment en usage à l'époque gauloise (par exemple, "Samarobriva" "pont sur la Somme") avait tendu à décliner dans la Gaule romanisée, où avait triomphé la dérivation. Il redevient courant désormais et le référent est désigné par deux noms qui se combinent pour former une unité : l'un indique quelle sorte d'objet nous désignons, une ferme, un village, un bois etc, l'autre détermine celui-ci en ajoutant un repère qui permet de le localiser sur un point d'espace particulier. [...]
Du moment que la composition entre en jeu la question de l'ordre des composants est soulevée : est-ce l'élément qui détermine ou l'élément déterminé qui passe le premier ? En latin, l'ordre était libre et dans les chartes latines les deux types sont attestés. Mais dans notre région comme dans celles qui l'avoisinent, et probablement sous une influence germanique, une tendance très forte a fait placer en tête d'une façon quasi-systématique, l'élément qui détermine. [...]
Les formations en -ville et -court et autres semblables dont la construction est antérieure au XIe siècle présentent cet ordre qui est l'inverse de celui qui nous est habituel.
2/ Le nom de la Foire de la Madeleine viendrait probablement de Sainte Madeleine dont une relique auraient été conservée à Abbeville. La Foire a lieu autour du 22 juillet, fête de la Sainte Marie-Madeleine.
M. l'abbé Faillon fait les réflexions suivantes au sujet du prétendu chef de Ste Marie-Madeleine, conservé à Saint-Gilles d'Abbeville : "Nous ne doutons pas que cette relique ne soit d'une sainte appelée Madeleine, que la piété des peuples aura canonisée et dont le culte établi insensiblement dans cette ville aura été fixé au jour même de la fête de Sainte Madeleine, 22 juillet, à cause de l'identité de nom, comme on le fit à Vezelay pour la Ste Madeleine dont on possédait les reliques. ce qui doit montrer en effet, que celles d'Abbeville ont réellement appartenu à quelque Sainte de même nom, c'est qu'il y avait dans cette ville plusieurs lieux dédiés à Ste Madeleine, et que l'église des Cordeliers qui possédait son crâne était aussi dédiée sous son nom. Enfin, la foire qui a encore lieu chaque année à Abbeville, le 22 juillet, aura sans doute pris naissance à l'occasion de ces mêmes reliques que le peuple venait vénérer ; du moins les religieux de S. François les exposaient ce jour-là à la vénération publique, et cet usage a persévéré jusqu'à la Révolution.
Mais il est certain que le crâne honoré à Abbeville n'a jamais fait partie intégrante du chef de Ste Marie-Madeleine ; il est encore entier à Saint-Maximin depuis que Charles II le fit placer dans un magnifique reliquaire.
source : Hagiographie du diocèse d'Amiens, Volumes 4 à 5 / Par Jules Corblet
3/ Quant aux seaux disposés autour des terrains agricoles, il s'agit peut-être de seaux d'agrainage, disposés par les chasseurs.
L’agrainage est une pratique cynégétique consistant à nourrir des animaux sauvages, dans leur environnement (plus souvent dans la forêt et plus rarement dans les champs). Le mot « agrainage » est plutôt réservé à l'alimentation des sangliers, mais il est parfois utilisé pour les cervidés ou les oiseaux chassables.
Étymologiquement, il s'agit de mettre à disposition du grain (blé, orge, seigle, maïs..), mais cette expression recouvre aussi une alimentation par d'autres types de nourriture: carottes, betteraves, foin, pommes et parfois déchets agroalimentaires. La nourriture peut être déposée au sol (concentrée, ce qui n'est pas recommandé, ou dispersée). Elle peut aussi être rendue disponible via un distributeur, dit « agrainoir », plus ou moins sophistiqué (en particulier quand l'agrainage cible une espèce particulière). [...]
Objectifs
L'agrainage a (ou a eu) plusieurs objectifs, souvent complémentaires, mais parfois contradictoires :
- nourrir des animaux migrateurs de passage (pour les fixer sur un site où ils seront plus faciles à chasser, ou simplement pour les aider dans leur migration)
- agrainer pour le tir, visant à compléter d'autres modes de chasse devenus insuffisamment efficaces (par exemple à cause d'un manque de chasseurs et/ou de rabatteurs, d'un contexte urbain ou à risque d'accident de chasse dans une forêt très fréquentée) ou pour effectuer des tirs sélectifs. Cette solution n'est pas durable, car les chevreuils et sangliers apprennent vite à reconnaitre un site qui serait trop "dangereux" pour eux. Exceptionnellement des aliments sont utilisés pour endormir des animaux ou des fléchettes narcotiques peuvent être utilisées pour certaines études. Il ne s'agit alors pas de tuer les animaux.
- nourrir des animaux pour qu'ils restent dans un secteur où leur ressource alimentaire est insuffisante en hiver ou serait rapidement surexploitée sans apport extérieur
- agrainer pour dissuader, il concerne surtout le sanglier qu'il s'agit de nourrir régulièrement en des points fixes et habituels, pour qu'il évite d'aller manger (et « retourner » le sol) sur d'autres territoires mais au risque, par exemple, d'être néanmoins responsable de dégâts du gibier si la population ainsi nourrie devient trop importante. Parfois, dans les forêts privées ou publiques, ce sont des cultures cynégétiques qui sont directement implantées au milieu de la forêt pour ne pas avoir à distribuer la nourriture, mais le risque est cette fois d'habituer les animaux à consommer du maïs ou d'autres plantes appétentes qu'ils pourraient ensuite aller rechercher dans les zones agricoles. Il convient aussi d'utiliser un site propre (ex : En Forêt de Verdun, de nombreuses billes de plomb toxique (shrapnells) et des obus non explosés, à demi apparents ont été trouvés sur des sites d'agrainage.
- nourrir des animaux pour augmenter le stock de gibier chassable d'une forêt,
- nourrir des animaux pour les « attacher » à un territoire où le chasseur peut ensuite les tirer plus facilement (on parle alors parfois d'agrainage pour le tir, tir de sanglier notamment). Cette forme n'est plus recommandée[2].
source : Wikipedia
Voir aussi ces articles du site Agrifaune Picardie :
- L’agrainoir de compagnie
- L’agrainoir de couple
Il s'agit probablement d'une mesure de protection de la faune comme l'indique cet article : Des chasseurs jouent les nourrices - Le Parisien 01.08.2011
Nous avons posé la question à plusieurs organismes. Nous vous tiendrons informé de leur réponse dès qu'elle nous parviendra.
1/ Le suffixe toponymique -court est relativement propre au quart nord-est de la France.
Il signifie « ferme, domaine, exploitation agricole ».
cf : Wikipedia : -court et Wikipedia : toponymie française
Ces toponymes sont fréquemment formés d'un anthroponyme (nom d'homme) suivi du suffixe -court.
Ainsi, Rogécourt est "le domaine de Roger".
Nous vous recommandons la lecture de l'ouvrage intitulé "Noms de lieux de Picardie" de Jacques Chaurand et Maurice Lebègue aux pages 71 à 80.
Les auteurs expliquent qu'il s'agit d'un apport germanique datant du VIe siècle :
Le procédé de la composition, abondamment en usage à l'époque gauloise (par exemple, "Samarobriva" "pont sur la Somme") avait tendu à décliner dans la Gaule romanisée, où avait triomphé la dérivation. Il redevient courant désormais et le référent est désigné par deux noms qui se combinent pour former une unité : l'un indique quelle sorte d'objet nous désignons, une ferme, un village, un bois etc, l'autre détermine celui-ci en ajoutant un repère qui permet de le localiser sur un point d'espace particulier. [...]
Du moment que la composition entre en jeu la question de l'ordre des composants est soulevée : est-ce l'élément qui détermine ou l'élément déterminé qui passe le premier ? En latin, l'ordre était libre et dans les chartes latines les deux types sont attestés. Mais dans notre région comme dans celles qui l'avoisinent, et probablement sous une influence germanique, une tendance très forte a fait placer en tête d'une façon quasi-systématique, l'élément qui détermine. [...]
Les formations en -ville et -court et autres semblables dont la construction est antérieure au XIe siècle présentent cet ordre qui est l'inverse de celui qui nous est habituel.
2/ Le nom de la Foire de la Madeleine viendrait probablement de Sainte Madeleine dont une relique auraient été conservée à Abbeville. La Foire a lieu autour du 22 juillet, fête de la Sainte Marie-Madeleine.
M. l'abbé Faillon fait les réflexions suivantes au sujet du prétendu chef de Ste Marie-Madeleine, conservé à Saint-Gilles d'Abbeville : "Nous ne doutons pas que cette relique ne soit d'une sainte appelée Madeleine, que la piété des peuples aura canonisée et dont le culte établi insensiblement dans cette ville aura été fixé au jour même de la fête de Sainte Madeleine, 22 juillet, à cause de l'identité de nom, comme on le fit à Vezelay pour la Ste Madeleine dont on possédait les reliques. ce qui doit montrer en effet, que celles d'Abbeville ont réellement appartenu à quelque Sainte de même nom, c'est qu'il y avait dans cette ville plusieurs lieux dédiés à Ste Madeleine, et que l'église des Cordeliers qui possédait son crâne était aussi dédiée sous son nom. Enfin, la foire qui a encore lieu chaque année à Abbeville, le 22 juillet, aura sans doute pris naissance à l'occasion de ces mêmes reliques que le peuple venait vénérer ; du moins les religieux de S. François les exposaient ce jour-là à la vénération publique, et cet usage a persévéré jusqu'à la Révolution.
Mais il est certain que le crâne honoré à Abbeville n'a jamais fait partie intégrante du chef de Ste Marie-Madeleine ; il est encore entier à Saint-Maximin depuis que Charles II le fit placer dans un magnifique reliquaire.
source : Hagiographie du diocèse d'Amiens, Volumes 4 à 5 / Par Jules Corblet
3/ Quant aux seaux disposés autour des terrains agricoles, il s'agit peut-être de seaux d'agrainage, disposés par les chasseurs.
L’agrainage est une pratique cynégétique consistant à nourrir des animaux sauvages, dans leur environnement (plus souvent dans la forêt et plus rarement dans les champs). Le mot « agrainage » est plutôt réservé à l'alimentation des sangliers, mais il est parfois utilisé pour les cervidés ou les oiseaux chassables.
Étymologiquement, il s'agit de mettre à disposition du grain (blé, orge, seigle, maïs..), mais cette expression recouvre aussi une alimentation par d'autres types de nourriture: carottes, betteraves, foin, pommes et parfois déchets agroalimentaires. La nourriture peut être déposée au sol (concentrée, ce qui n'est pas recommandé, ou dispersée). Elle peut aussi être rendue disponible via un distributeur, dit « agrainoir », plus ou moins sophistiqué (en particulier quand l'agrainage cible une espèce particulière). [...]
Objectifs
L'agrainage a (ou a eu) plusieurs objectifs, souvent complémentaires, mais parfois contradictoires :
- nourrir des animaux migrateurs de passage (pour les fixer sur un site où ils seront plus faciles à chasser, ou simplement pour les aider dans leur migration)
- agrainer pour le tir, visant à compléter d'autres modes de chasse devenus insuffisamment efficaces (par exemple à cause d'un manque de chasseurs et/ou de rabatteurs, d'un contexte urbain ou à risque d'accident de chasse dans une forêt très fréquentée) ou pour effectuer des tirs sélectifs. Cette solution n'est pas durable, car les chevreuils et sangliers apprennent vite à reconnaitre un site qui serait trop "dangereux" pour eux. Exceptionnellement des aliments sont utilisés pour endormir des animaux ou des fléchettes narcotiques peuvent être utilisées pour certaines études. Il ne s'agit alors pas de tuer les animaux.
- nourrir des animaux pour qu'ils restent dans un secteur où leur ressource alimentaire est insuffisante en hiver ou serait rapidement surexploitée sans apport extérieur
- agrainer pour dissuader, il concerne surtout le sanglier qu'il s'agit de nourrir régulièrement en des points fixes et habituels, pour qu'il évite d'aller manger (et « retourner » le sol) sur d'autres territoires mais au risque, par exemple, d'être néanmoins responsable de dégâts du gibier si la population ainsi nourrie devient trop importante. Parfois, dans les forêts privées ou publiques, ce sont des cultures cynégétiques qui sont directement implantées au milieu de la forêt pour ne pas avoir à distribuer la nourriture, mais le risque est cette fois d'habituer les animaux à consommer du maïs ou d'autres plantes appétentes qu'ils pourraient ensuite aller rechercher dans les zones agricoles. Il convient aussi d'utiliser un site propre (ex : En Forêt de Verdun, de nombreuses billes de plomb toxique (shrapnells) et des obus non explosés, à demi apparents ont été trouvés sur des sites d'agrainage.
- nourrir des animaux pour augmenter le stock de gibier chassable d'une forêt,
- nourrir des animaux pour les « attacher » à un territoire où le chasseur peut ensuite les tirer plus facilement (on parle alors parfois d'agrainage pour le tir, tir de sanglier notamment). Cette forme n'est plus recommandée[2].
source : Wikipedia
Voir aussi ces articles du site Agrifaune Picardie :
- L’agrainoir de compagnie
- L’agrainoir de couple
Il s'agit probablement d'une mesure de protection de la faune comme l'indique cet article : Des chasseurs jouent les nourrices - Le Parisien 01.08.2011
Nous avons posé la question à plusieurs organismes. Nous vous tiendrons informé de leur réponse dès qu'elle nous parviendra.
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 20/08/2012 à 09h21
Bonjour,
La Chambre d'agriculture de Picardie, que nous remiercions, nous a apporté la réponse suivante :
Je pense qu'il s'agit d'un dispositif visant à nourrir le gibier.
Les chasseurs utilisent ce procédé pour garder le gibier. Souvent, ces dispositifs sont couverts par une petite plaque de tôle pour protéger le grain mis à disposition.
Dans le Rhône, c'est peut-être différent. Mais en Picardie, grand territoire de chasse, le procédé est courant.
La Chambre d'agriculture de Picardie, que nous remiercions, nous a apporté la réponse suivante :
Je pense qu'il s'agit d'un dispositif visant à nourrir le gibier.
Les chasseurs utilisent ce procédé pour garder le gibier. Souvent, ces dispositifs sont couverts par une petite plaque de tôle pour protéger le grain mis à disposition.
Dans le Rhône, c'est peut-être différent. Mais en Picardie, grand territoire de chasse, le procédé est courant.
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