Valeur d'une oeuvre de guido reno
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 22/03/2014 à 16h06
471 vues
Question d'origine :
Bonjour,
Pour son tableau de l'Assomption, Guido Reni (au musée des Beaux Arts de Lyon) a été payé 400 piastres au XVII° siècle. Peut-on savoir à quel montant cela équivaut (approximativement) en euros?
Merci
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 24/03/2014 à 13h44
Bonjour,
La piastre a désigné (et désigne encore) de nombreuses monnaies, mais il semble que celle qui avait cours en Europe au XVIIe était la piastre espagnole :
Les piastres d'Espagne ont été fabriquées d'une manière si constante et si fidèle, qu'elles ont cours de monnaie, non-seulement dans toute l'Amérique, mais encore dans la république des États-Unis, dans une partie considérable de l'Europe, de l'Afrique et de l'Asie (SAY, Écon. pol., 1832, p.253).On donne aujourd'hui encore le nom de piastre à diverses petites monnaies en usage dans le bassin de la Méditerranée. Telles sont la piastre de Chypre, unité monétaire de l'île, valant un neuvième de shilling; les piastres de Turquie, d'Égypte, de Syrie, qui équivalent au centième de la livre turque, égyptienne, syrienne (Lar. comm.1930).
Source : CNRTL
En effet la piastre espagnole était une monnaie très répandue du XVIe au XVIIIe, dont l’histoire est liée aux colonies d’Amérique. On trouve son histoire détaillée dans un article de Carlos Marichal dans la Revue européenne des sciences sociales : La piastre ou le real de huit en Espagne et en Amérique : une monnaie universelle (XVIe-XVIIIe siècles) :
Dans le continuum de l’histoire de l’économie mondiale, l’historien a un intérêt particulier de prêter attention à l’étude du legs du système monétaire espagnol des XVIe-XVIIIe siècles, lequel est d’une importance particulière tant en raison de l’extension de l’empire hispanique que de l’extraordinaire diffusion internationale du peso de plata (piastre d’argent), dont la circulation finit par être pratiquement universelle. Cette diffusion s’explique par deux faits fondamentaux. En premier lieu, il est utile de rappeler que, durant cette longue période, pendant laquelle les règlements s’effectuaient avant tout en métal, la demande prioritaire de monnaie circulante dans presque tous les pays du monde consistait en monnaies d’argent ; l’or monnayé servait aux transactions commerciales de grande ampleur, mais, fondamentalement, il faisait fonction de réserve dans les trésors publics ou privés. En second lieu, il faut se remémorer que, tout au long de ces trois siècles, les domaines de l’Espagne en Amérique furent la source de plus des trois quarts de l’argent produit dans le monde.
Cette monnaie est mentionnée notamment dans Le Guide du voyageur en Italie (1834), où on lui donne la valeur de 6 livres et 10 sous en Piémont et en Ligurie au XIXe.
Il semble, d’après l’article Trafic et prix de l’homme en Méditerranée au XVIIe et XVIIIe siècle, qu’à la période qui nous intéresse la valeur de la piastre était plus proche de 3 livres. Ce qui revient à dire que 400 piastres équivalent environ à 1200 livres tournois.
La livre, en tant que monnaie de compte (monnaie imaginaire servant à compter, à évaluer la valeur respective des pièces), trouve son origine dans la livre de poids et vaut 20 sous ou 240 deniers dans le système tournois.
(Sources : Vocabulaire historique du Moyen Âge, François-Olivier Touati et Civilisation matérielle, économie et capitalisme, XVe-XVIIIe siècle : Les structures du quotidien, Fernand Braudel.)
Le forum passion-histoire.net nous donne plusieurs éléments qui permettent d’avoir une idée de la valeur de la livre tournois :
Quelques données chiffrées du pouvoir d'achat de la Livre Tournois en 1726:
Salaires civils annuels:
-Cuisinier: 950 L
-Laquais: 540 L
-Jardinier: 400 L
Salaires militaires annuels:
-Capitaine: 2400 L
-Lieutenant: 900 L
-Sous-lieutenant: 600 L
-Sergent: 234 L
-Brigadier: 144 L
-Grenadier: 120 L
Pris de biens et de denrées:
-1 livre de café de moka: 18 sols
-1 livre de café de java: 5 sols
-1 sétier (156 l.) de blé: 10 L
-1 sétier de seigle: 7 L
-1 sétier d'orge: 4 L, 10 s.
-1 muid (268 l.) de vin: 30 L
-1 muid de cidre: 20 L
-1 charge (160 l.) d'huile): 100 L
-une petite maison avec jardin: 1600 L
-1 arpent de terre labourable: 1650 L
-1 boeuf: 100 L
-1 vache: 50 L
-1 veau: 30 L
-1 génisse: 30 L
-1 porc: 30 L
-1 mouton: 6 L
-1 chèvre: 5 L
-1 agneau: 2 L, 10 s.
Budget annuel de la maison du roi en 1733:
-Maison (personnel): 6800000 L
-Argenterie: 1.200.000 L
-Ecuries: 2.000.000 L
-Bâtiments: 5.200.000 L
-Vênerie: 1.200.000 L
-Prévôté: 300.000 L
-Aumônes du Roi: 600.000 L
-Menus plaisirs du Roi: 180.000 L
-Menus plaisirs de la Reine: 120.000 L
-Menus plaisirs du Dauphin: 60.000 L
Total: 17.660.000 L
Changes en 1733:
100.000 Livres= à Franckfort 23.735 Reichsthaler courant
100.000 Livres= à Londres 2778 Livres Sterling
On trouve par ailleurs une conversion de la livre tournois en euros sur Wikipedia, dont le calcul (que nous ne sommes pas en mesure de vérifier) se base sur une étude de R.C. Allen :
L'équivalence décrite dans ce paragraphe est sujette à de nombreuses questions. Comment peut on comparer des valeurs d'années différentes sur la simple base d'un salaire horaire d'ouvrier ? Soit, c'est une hypothèse qui en vaut une autre, mais elle néglige complétement le coût de la vie. Ainsi, selon l'étude de R.C. Allen (The Great Divergence in European Wages and Prices from the Middle Ages to the First World War, http://www.idealibrary.com) datée de 2001, et qui étudie les grandes villes européennes, dont Paris, le salaire ne doit pas entrer uniquement en ligne de compte, il faut aussi tenir compte du prix des denrées de base (pain, viande, boissons...).
A partir de l'étude de RC Allen, qui défini des Indices de Coût de la Vie (à peu près de la même façon que l'INSEE le fait pour l'indice de pouvoir d'achat), et en prolongeant la série avec celle de l'INSEE, on trouve que :
• 1 livre de 1430 = 140 EUR de 2007 (de grandes fluctuations on lieu au XVe et XVIe siècle)
• 1 livre de 1500 = 168 EUR de 2007
• 1 livre de 1550 = 75,1 EUR de 2007
• 1 livre de 1600 = 32,6 EUR de 2007
• 1 livre de 1650 = 16,1 EUR de 2007
• 1 livre de 1700 = 16,6 EUR de 2007
• 1 livre de 1786 = 11,5 EUR de 2007 (il y a un trou entre 1787 et 1839)
L’Assomption de la vierge datant de 1637, si on se base sur ce calcul les 400 piastres qu’en a reçu Guido Reni (soit 1200 livres tournois) vaudraient donc entre 39 120 euros (livre de 1600) et 19 320 euros (livre de 1650) environ.
La piastre a désigné (et désigne encore) de nombreuses monnaies, mais il semble que celle qui avait cours en Europe au XVIIe était la piastre espagnole :
Les piastres d'Espagne ont été fabriquées d'une manière si constante et si fidèle, qu'elles ont cours de monnaie, non-seulement dans toute l'Amérique, mais encore dans la république des États-Unis, dans une partie considérable de l'Europe, de l'Afrique et de l'Asie (SAY, Écon. pol., 1832, p.253).On donne aujourd'hui encore le nom de piastre à diverses petites monnaies en usage dans le bassin de la Méditerranée. Telles sont la piastre de Chypre, unité monétaire de l'île, valant un neuvième de shilling; les piastres de Turquie, d'Égypte, de Syrie, qui équivalent au centième de la livre turque, égyptienne, syrienne (Lar. comm.1930).
Source : CNRTL
En effet la piastre espagnole était une monnaie très répandue du XVIe au XVIIIe, dont l’histoire est liée aux colonies d’Amérique. On trouve son histoire détaillée dans un article de Carlos Marichal dans la Revue européenne des sciences sociales : La piastre ou le real de huit en Espagne et en Amérique : une monnaie universelle (XVIe-XVIIIe siècles) :
Dans le continuum de l’histoire de l’économie mondiale, l’historien a un intérêt particulier de prêter attention à l’étude du legs du système monétaire espagnol des XVIe-XVIIIe siècles, lequel est d’une importance particulière tant en raison de l’extension de l’empire hispanique que de l’extraordinaire diffusion internationale du peso de plata (piastre d’argent), dont la circulation finit par être pratiquement universelle. Cette diffusion s’explique par deux faits fondamentaux. En premier lieu, il est utile de rappeler que, durant cette longue période, pendant laquelle les règlements s’effectuaient avant tout en métal, la demande prioritaire de monnaie circulante dans presque tous les pays du monde consistait en monnaies d’argent ; l’or monnayé servait aux transactions commerciales de grande ampleur, mais, fondamentalement, il faisait fonction de réserve dans les trésors publics ou privés. En second lieu, il faut se remémorer que, tout au long de ces trois siècles, les domaines de l’Espagne en Amérique furent la source de plus des trois quarts de l’argent produit dans le monde.
Cette monnaie est mentionnée notamment dans Le Guide du voyageur en Italie (1834), où on lui donne la valeur de 6 livres et 10 sous en Piémont et en Ligurie au XIXe.
Il semble, d’après l’article Trafic et prix de l’homme en Méditerranée au XVIIe et XVIIIe siècle, qu’à la période qui nous intéresse la valeur de la piastre était plus proche de 3 livres. Ce qui revient à dire que 400 piastres équivalent environ à 1200 livres tournois.
La livre, en tant que monnaie de compte (monnaie imaginaire servant à compter, à évaluer la valeur respective des pièces), trouve son origine dans la livre de poids et vaut 20 sous ou 240 deniers dans le système tournois.
(Sources : Vocabulaire historique du Moyen Âge, François-Olivier Touati et Civilisation matérielle, économie et capitalisme, XVe-XVIIIe siècle : Les structures du quotidien, Fernand Braudel.)
Le forum passion-histoire.net nous donne plusieurs éléments qui permettent d’avoir une idée de la valeur de la livre tournois :
Quelques données chiffrées du pouvoir d'achat de la Livre Tournois en 1726:
Salaires civils annuels:
-Cuisinier: 950 L
-Laquais: 540 L
-Jardinier: 400 L
Salaires militaires annuels:
-Capitaine: 2400 L
-Lieutenant: 900 L
-Sous-lieutenant: 600 L
-Sergent: 234 L
-Brigadier: 144 L
-Grenadier: 120 L
Pris de biens et de denrées:
-1 livre de café de moka: 18 sols
-1 livre de café de java: 5 sols
-1 sétier (156 l.) de blé: 10 L
-1 sétier de seigle: 7 L
-1 sétier d'orge: 4 L, 10 s.
-1 muid (268 l.) de vin: 30 L
-1 muid de cidre: 20 L
-1 charge (160 l.) d'huile): 100 L
-une petite maison avec jardin: 1600 L
-1 arpent de terre labourable: 1650 L
-1 boeuf: 100 L
-1 vache: 50 L
-1 veau: 30 L
-1 génisse: 30 L
-1 porc: 30 L
-1 mouton: 6 L
-1 chèvre: 5 L
-1 agneau: 2 L, 10 s.
Budget annuel de la maison du roi en 1733:
-Maison (personnel): 6800000 L
-Argenterie: 1.200.000 L
-Ecuries: 2.000.000 L
-Bâtiments: 5.200.000 L
-Vênerie: 1.200.000 L
-Prévôté: 300.000 L
-Aumônes du Roi: 600.000 L
-Menus plaisirs du Roi: 180.000 L
-Menus plaisirs de la Reine: 120.000 L
-Menus plaisirs du Dauphin: 60.000 L
Total: 17.660.000 L
Changes en 1733:
100.000 Livres= à Franckfort 23.735 Reichsthaler courant
100.000 Livres= à Londres 2778 Livres Sterling
On trouve par ailleurs une conversion de la livre tournois en euros sur Wikipedia, dont le calcul (que nous ne sommes pas en mesure de vérifier) se base sur une étude de R.C. Allen :
L'équivalence décrite dans ce paragraphe est sujette à de nombreuses questions. Comment peut on comparer des valeurs d'années différentes sur la simple base d'un salaire horaire d'ouvrier ? Soit, c'est une hypothèse qui en vaut une autre, mais elle néglige complétement le coût de la vie. Ainsi, selon l'étude de R.C. Allen (The Great Divergence in European Wages and Prices from the Middle Ages to the First World War, http://www.idealibrary.com) datée de 2001, et qui étudie les grandes villes européennes, dont Paris, le salaire ne doit pas entrer uniquement en ligne de compte, il faut aussi tenir compte du prix des denrées de base (pain, viande, boissons...).
A partir de l'étude de RC Allen, qui défini des Indices de Coût de la Vie (à peu près de la même façon que l'INSEE le fait pour l'indice de pouvoir d'achat), et en prolongeant la série avec celle de l'INSEE, on trouve que :
• 1 livre de 1430 = 140 EUR de 2007 (de grandes fluctuations on lieu au XVe et XVIe siècle)
• 1 livre de 1500 = 168 EUR de 2007
• 1 livre de 1550 = 75,1 EUR de 2007
• 1 livre de 1600 = 32,6 EUR de 2007
• 1 livre de 1650 = 16,1 EUR de 2007
• 1 livre de 1700 = 16,6 EUR de 2007
• 1 livre de 1786 = 11,5 EUR de 2007 (il y a un trou entre 1787 et 1839)
L’Assomption de la vierge datant de 1637, si on se base sur ce calcul les 400 piastres qu’en a reçu Guido Reni (soit 1200 livres tournois) vaudraient donc entre 39 120 euros (livre de 1600) et 19 320 euros (livre de 1650) environ.
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