Le lieu du débarquement était-il le meilleur?
CIVILISATION
+ DE 2 ANS
Le 23/05/2014 à 09h27
116 vues
Question d'origine :
En juin 1944 les américains et d'autres ont versé beaucoup de sang pour la liberté et la démocratie en Europe.
Les récits des événements liés au débarquement indiquent que les premiers jours du débarquement ont été très meurtriers, et ont permis aux forces allemandes d'être dans des configurations de terrains qui leur permettaient de procéder à des tirs très meurtriers.
De leur coté, les troupes alliées ont fait débarqué toujours plus de soldats, jusqu'à obtenir une situation favorable, mais au prix de beaucoup de morts, tués en masse du haut de certaines falaises.
On n'ose peut-être pas se poser la question, mais, avec le recul, et peut-être le regard de certains spécialistes des opérations militaires, le lieu (globalement, puisqu'il y eu plusieurs endroits précis) du débarquement était-il le meilleur?
Du coup on peut se demander, la victoire des alliés après l'entrée en lice des USA et les moyens dont ils disposaient, devenait-elle inéluctable, ou bien, même avec les USA, rien n'était acquis?
Merci.
Pascal
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 27/05/2014 à 08h38
Bonjour,
Dans cet ouvrage paru en 2004 pour la commémoration du 60e anniversaire du débarquement trois spécialistes de la seconde guerre mondiale ; Robert O. Paxton pour les Etats-Unis et la Grande Bretagne, Jean Pierre Azéma pour la France, Philippe Burin pour la France et l’Europe racontent les dessous et les enjeux de la préparation du jour J, montre les rivalités nationales autant que l'enthousiasme des libérateurs, décortique les opérations vues des deux camps, les évolutions et les conséquences du débarquement sur la suite de la Guerre. Ils proposent une lecture croisée des faits et mettent en avant les enjeux géopolitiques et mémoriels du jour J.
Anthony Beevor, historien réputé de la seconde guerre mondiale, militaire de formation, dans D-Day et la bataille de Normandie paru en 2009 donne davantage de place aux opérations militaires.
Le Débarquement allé en Normandie, le 6 juin 1944, passe à juste titre pour un des grands tournants de la Seconde Guerre Mondiale - à tel point que dans l'esprit de beaucoup de Français le reste de la guerre ne fut qu'une formalité. L’auteur démontre qu’il n'en est rien. Si le Débarquement fut un de ces moments où se forgent les légendes, la bataille qui s'en suivit, connue sous le nom de bataille de Normandie, fut autrement plus longue, difficile, émaillée d'atrocités - et décisive. En effet une défaite alliée aurait eu des conséquences géopolitiques majeures pour l'Europe, car rien alors n'aurait pu empêcher l'Armée rouge de pousser jusqu'à l'Atlantique. Or, Antony Beevor révèle, pour la première fois, à quel point le désordre, l'improvisation, les erreurs stratégiques et tactiques, l'impréparation de leurs troupes faillirent coûter leur victoire aux Alliés. Seule leur écrasante supériorité aérienne leur permit de l'emporter - mais à quel prix, notamment en vies civiles françaises et en morts accidentelles dans leurs propres rangs.
Olivier Wieviorka, autre historien de renom, propose quant à lui, dans l’ histoire du débarquement en paru en 2007, une histoire plus globale du débarquement, des origines à la libération de Paris, en intégrant l’ensemble des points de vue, en envisageant la pluralité des aspects, économiques, militaires, diplomatiques, mais également politiques et sociaux. S’appuyant sue des sources inédites, pour l’essentiel américaines et anglaises, il retrace cette longue épopée des tous premiers projets à l’assaut final ; Une histoire moins mythique que la légende complaisamment forgée par les dirigeants alliés : dissensions au sein du haut Commandement, pénurie de bateaux, erreurs tactiques, effondrement psychique des combattants, autant de réalités parfois tues qui pourtant pesèrent sur le bon déroulement du D-Day.
Cet article donne des éléments de réponse aux questions que vous-nous posez :
Durant la nuit du 5 au 6 juin 1944 le ciel normand est envahi par des nuées d’avions qui larguent parachutistes et leurres. Au sol, côté allemand, la surprise est totale, les troupes n’ont pas été mises en alerte. Même surprise à l’aube du 6, pour les défenseurs du mur de l’Atlantique lorsqu’ils découvrent l’immense armada qui s’apprête à débarquer des flots de troupes sur Utah, Omaha, Gold, Juno et Sword.
Comment une telle surprise a-t-elle pu être possible alors que cela fait plusieurs années que les Allemands attendent ce débarquement ? Pourquoi les Alliés ont-ils choisi la Normandie, et comment ont-ils réussi à concentrer autant de forces ? Mais aussi comment se fait-il que malgré cette surprise initiale, les Alliés aient ensuite piétiné près de deux mois dans le bocage normand ?
Autant de question auxquelles cette réédition en poche de l’ouvrage d’Olivier Wieviorka (paru en 2007) permet de répondre. Ce spécialiste de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale nous livre ici un ouvrage de référence sur cet évènement capital de la guerre sur le front de l’ouest….
Ce n’est qu’à Téhéran(1943) qu’Overlord fut définitivement approuvée et prévue pour mai 1944. L’auteur montre les débats qui agitèrent le camp allié. Il démonte l’image d’un Roosevelt naïf ,qui en refusant les propositions de Churchill pour une offensive méditerranéenne, aurait favorisé la progression soviétique en Europe centrale.
Une mobilisation économique et technologique
La préparation de l’opération nécessita une coordination des efforts alliés dans le domaine militaire avec la mise en place d’un état-major combiné. Mais elle demanda surtout une immense mobilisation industrielle.
Grâce à l’expérience acquise par les Britanniques dans leurs opérations commandos, et aux leçons tirées des débarquements de 1942 et 1943, les Alliés purent définir de manière assez précise les besoins nécessaires à l’opération. Il fallut en effet prévoir des navires pour transporter les troupes d’assaut, mais également les vagues suivantes et les dizaines de milliers de tonnes d’approvisionnement quotidien nécessaires. Un impératif logistique qui conditionna la construction des Mulberries et impliquait également la prise d’un port dans les plus brefs délais(Cherbourg)….
Les Alliés n’étaient pas les seuls à avoir des problèmes de commandement. Chez les Allemands, le débarquement était attendu. Les inconnues portaient sur le moment et le lieu du fait des lacunes des services de renseignement, mais également sur la meilleure stratégie pour y répondre….
Pour aggraver l’incertitude des allemands, les Alliés mirent sur pied de nombreuses opérations de désinformation. Ils utilisèrent des agents allemands retournés ; mais surtout ils mirent au point l’opération Fortitude. Celle-ci fit croire aux Allemands qu’un groupe d’armée dirigé par Patton devait débarquer dans le Pas-de- Calais, et que les opérations en Normandie ne constituaient qu’une diversion. Cela fonctionna jusqu’en juillet 1944.
Une offensive laborieuse.
L’image que l’on garde des évènements de l’été 1944 en Normandie est souvent celle d’un débarquement difficile, à l’image d’Omaha la sanglante où les Américains ne furent pas loin de rembarquer. Olivier Wieviorka ne remet pas en cause les lourdes pertes des troupes aéroportée ou celles d’Omaha mais il rappelle qu’il y eut au total 10 000 victimes alliées le 6 juin alors que les états-majors en attendaient plus du double (25 000). La surprise, l’ampleur des moyens déployés, la disproportion des forces engagées expliquent largement ce résultat.
Pourtant, au final, la journée se révéla un demi-succès, les Alliés, n’atteignant pas les objectifs fixés pour le soir du Jour J. A cause de la résistance des Allemands, mais aussi en raison de la désorganisation logistique et du manque d’entrain de troupes qui pour la plupart considérèrent qu’avoir réussi à débarquer était leur principal objectif. Ainsi, surtout dans le secteur britannique, les troupes tardèrent à avancer à l’intérieur des terres….
Voir aussi :
-le récit assez détaillé du Jour J
-les espions du débarquement :
6 juin 1944, le jour J. Un tournant dans le conflit mondial, une victoire des Alliés par les armes, mais aussi grâce à un moyen inédit et décisif : la désinformation. Celle-ci vise à convaincre les Nazis que le Débarquement aura lieu à Calais et en Norvège, et, une fois l'opération lancée, à leur faire croire qu'il s'agit d'une manoeuvre de diversion destinée à retarder l'arrivée des renforts allemands.
-Le dernier numéro de Géohistoire, consacré au débarquement avec une interview d’Olivier Wieviorka qui répond aux questions d’un journaliste similaires à la vôtre.
Bonnes lectures
Dans cet ouvrage paru en 2004 pour la commémoration du 60e anniversaire du débarquement trois spécialistes de la seconde guerre mondiale ; Robert O. Paxton pour les Etats-Unis et la Grande Bretagne, Jean Pierre Azéma pour la France, Philippe Burin pour la France et l’Europe racontent les dessous et les enjeux de la préparation du jour J, montre les rivalités nationales autant que l'enthousiasme des libérateurs, décortique les opérations vues des deux camps, les évolutions et les conséquences du débarquement sur la suite de la Guerre. Ils proposent une lecture croisée des faits et mettent en avant les enjeux géopolitiques et mémoriels du jour J.
Anthony Beevor, historien réputé de la seconde guerre mondiale, militaire de formation, dans D-Day et la bataille de Normandie paru en 2009 donne davantage de place aux opérations militaires.
Le Débarquement allé en Normandie, le 6 juin 1944, passe à juste titre pour un des grands tournants de la Seconde Guerre Mondiale - à tel point que dans l'esprit de beaucoup de Français le reste de la guerre ne fut qu'une formalité. L’auteur démontre qu’il n'en est rien. Si le Débarquement fut un de ces moments où se forgent les légendes, la bataille qui s'en suivit, connue sous le nom de bataille de Normandie, fut autrement plus longue, difficile, émaillée d'atrocités - et décisive. En effet une défaite alliée aurait eu des conséquences géopolitiques majeures pour l'Europe, car rien alors n'aurait pu empêcher l'Armée rouge de pousser jusqu'à l'Atlantique. Or, Antony Beevor révèle, pour la première fois, à quel point le désordre, l'improvisation, les erreurs stratégiques et tactiques, l'impréparation de leurs troupes faillirent coûter leur victoire aux Alliés. Seule leur écrasante supériorité aérienne leur permit de l'emporter - mais à quel prix, notamment en vies civiles françaises et en morts accidentelles dans leurs propres rangs.
Olivier Wieviorka, autre historien de renom, propose quant à lui, dans l’ histoire du débarquement en paru en 2007, une histoire plus globale du débarquement, des origines à la libération de Paris, en intégrant l’ensemble des points de vue, en envisageant la pluralité des aspects, économiques, militaires, diplomatiques, mais également politiques et sociaux. S’appuyant sue des sources inédites, pour l’essentiel américaines et anglaises, il retrace cette longue épopée des tous premiers projets à l’assaut final ; Une histoire moins mythique que la légende complaisamment forgée par les dirigeants alliés : dissensions au sein du haut Commandement, pénurie de bateaux, erreurs tactiques, effondrement psychique des combattants, autant de réalités parfois tues qui pourtant pesèrent sur le bon déroulement du D-Day.
Cet article donne des éléments de réponse aux questions que vous-nous posez :
Durant la nuit du 5 au 6 juin 1944 le ciel normand est envahi par des nuées d’avions qui larguent parachutistes et leurres. Au sol, côté allemand, la surprise est totale, les troupes n’ont pas été mises en alerte. Même surprise à l’aube du 6, pour les défenseurs du mur de l’Atlantique lorsqu’ils découvrent l’immense armada qui s’apprête à débarquer des flots de troupes sur Utah, Omaha, Gold, Juno et Sword.
Comment une telle surprise a-t-elle pu être possible alors que cela fait plusieurs années que les Allemands attendent ce débarquement ? Pourquoi les Alliés ont-ils choisi la Normandie, et comment ont-ils réussi à concentrer autant de forces ? Mais aussi comment se fait-il que malgré cette surprise initiale, les Alliés aient ensuite piétiné près de deux mois dans le bocage normand ?
Autant de question auxquelles cette réédition en poche de l’ouvrage d’Olivier Wieviorka (paru en 2007) permet de répondre. Ce spécialiste de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale nous livre ici un ouvrage de référence sur cet évènement capital de la guerre sur le front de l’ouest….
Ce n’est qu’à Téhéran(1943) qu’Overlord fut définitivement approuvée et prévue pour mai 1944. L’auteur montre les débats qui agitèrent le camp allié. Il démonte l’image d’un Roosevelt naïf ,qui en refusant les propositions de Churchill pour une offensive méditerranéenne, aurait favorisé la progression soviétique en Europe centrale.
Une mobilisation économique et technologique
La préparation de l’opération nécessita une coordination des efforts alliés dans le domaine militaire avec la mise en place d’un état-major combiné. Mais elle demanda surtout une immense mobilisation industrielle.
Grâce à l’expérience acquise par les Britanniques dans leurs opérations commandos, et aux leçons tirées des débarquements de 1942 et 1943, les Alliés purent définir de manière assez précise les besoins nécessaires à l’opération. Il fallut en effet prévoir des navires pour transporter les troupes d’assaut, mais également les vagues suivantes et les dizaines de milliers de tonnes d’approvisionnement quotidien nécessaires. Un impératif logistique qui conditionna la construction des Mulberries et impliquait également la prise d’un port dans les plus brefs délais(Cherbourg)….
Les Alliés n’étaient pas les seuls à avoir des problèmes de commandement. Chez les Allemands, le débarquement était attendu. Les inconnues portaient sur le moment et le lieu du fait des lacunes des services de renseignement, mais également sur la meilleure stratégie pour y répondre….
Pour aggraver l’incertitude des allemands, les Alliés mirent sur pied de nombreuses opérations de désinformation. Ils utilisèrent des agents allemands retournés ; mais surtout ils mirent au point l’opération Fortitude. Celle-ci fit croire aux Allemands qu’un groupe d’armée dirigé par Patton devait débarquer dans le Pas-de- Calais, et que les opérations en Normandie ne constituaient qu’une diversion. Cela fonctionna jusqu’en juillet 1944.
Une offensive laborieuse.
L’image que l’on garde des évènements de l’été 1944 en Normandie est souvent celle d’un débarquement difficile, à l’image d’Omaha la sanglante où les Américains ne furent pas loin de rembarquer. Olivier Wieviorka ne remet pas en cause les lourdes pertes des troupes aéroportée ou celles d’Omaha mais il rappelle qu’il y eut au total 10 000 victimes alliées le 6 juin alors que les états-majors en attendaient plus du double (25 000). La surprise, l’ampleur des moyens déployés, la disproportion des forces engagées expliquent largement ce résultat.
Pourtant, au final, la journée se révéla un demi-succès, les Alliés, n’atteignant pas les objectifs fixés pour le soir du Jour J. A cause de la résistance des Allemands, mais aussi en raison de la désorganisation logistique et du manque d’entrain de troupes qui pour la plupart considérèrent qu’avoir réussi à débarquer était leur principal objectif. Ainsi, surtout dans le secteur britannique, les troupes tardèrent à avancer à l’intérieur des terres….
Voir aussi :
-le récit assez détaillé du Jour J
-les espions du débarquement :
6 juin 1944, le jour J. Un tournant dans le conflit mondial, une victoire des Alliés par les armes, mais aussi grâce à un moyen inédit et décisif : la désinformation. Celle-ci vise à convaincre les Nazis que le Débarquement aura lieu à Calais et en Norvège, et, une fois l'opération lancée, à leur faire croire qu'il s'agit d'une manoeuvre de diversion destinée à retarder l'arrivée des renforts allemands.
-Le dernier numéro de Géohistoire, consacré au débarquement avec une interview d’Olivier Wieviorka qui répond aux questions d’un journaliste similaires à la vôtre.
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