Question d'origine :
Bonjour,
J'aimerai connaitre les origines de la représentation suivante :
"Les fonctionnaires sont des faineants".
et de ses avatars.
Merci d'avance
Réponse du Guichet
bml_soc
- Département : Société
Le 09/04/2005 à 13h54
« Alors, monsieur, c’est une affaire entendue ? Un parti pris de ne plus mettre les pieds ici ? A cette heure, vous avez perdu votre beau-frère, comme déjà, il y a huit jours, vous aviez perdu votre tante, comme vous aviez perdu votre oncle le mois dernier, votre père à la Trinité et votre mère à Pâques ! […] Et je ne parle ici, notez bien, ni de la petite sœur qui se marie deux fois l’an, ni de la grande qui accouche tous les trois mois ! Et bien ! monsieur, en voilà assez ; que vous vous moquiez du monde soit ! Mais il y a des limites à tout, et si vous supposez que l’administration vous donne deux mille quatre cent francs pour que vous passiez votre vie à enterrer les uns, à marier les autres ou à les tenir sur les fronts baptismaux, vous vous méprenez, j’ose le dire ! ».
Ces propos tenus Mr de la Hourmerie, dans Messieurs les Ronds-de-Cuir de Courteline, donnait, déjà à l’époque, une certaine image des fonctionnaires.
Aujourd’hui toujours, « dès que l’on parle des fonctionnaires on est tout de suite confronté à toutes sortes de clichés et d’idées reçues : le nombre de fonctionnaires, leur coût économique, leur statut social, leur poids dans les décisions publiques suscitent souvent des débats passionnés sans que l’on dispose de connaissances précises sur les faits et leur évolution » dit Luc Rouban.
-Ce directeur de recherche au CNRS, à Sciences Po au Centre d’Etude de la Vie Politique Française (CEVIPOF) décrypte la fonction publique, des défauts et aussi ce qui en fait sa qualité. Dans une petite synthèse « Les fonctionnaires» , il analyse seize idées reçues sur les fonctionnaires. En voici le sommaire :
Trop de fonctionnaires ?
— « Les fonctionnaires constituent la première dépense de l’Etat. »
— « Tous des fonctionnaires ! »
— « La fonction publique est ingérable. »
— « La réforme est impossible. »
Un monde de privilèges ?
— « Tout changerait s'ils n'avaient pas la sécurité de l'emploi. »
— « Les salaires des fonctionnaires sont médiocres. »
— « Les fonctionnaires ont de bien meilleures retraites. »
— « Les fonctionnaires font carrière à l'ancienneté. »
Toujours en grève ?
— « Seuls les fonctionnaires peuvent se permettre de faire grève. »
— « Les syndicats font la loi. »
— « Les fonctionnaires ne sont pas stressés. »
— « Les fonctionnaires constituent une force politique. »
Une élite tout-puissante ?
— « Les hauts fonctionnaires forment une nouvelle noblesse. »
— « Les hommes politiques sont tous des fonctionnaires. »
— « Les hauts fonctionnaires ne pensent qu'à passer dans le privé. »
— « Le pouvoir est aux mains des technocrates.
-Pierre Bitoun, sociologue, écrit Eloge des fonctionnaires. Pour en finir avec le grand matraquage (Editions Calmann-Lévy - 2001), une réponse aux idées reçues sur les fonctionnaires, « à l’incroyable matraquage que subit depuis vingt ans l’opinion publique sur le sujet. »
A partir d’une lecture de l’ouvrage "Toujours plus " de François de Closets, paru en 82 à la veille du virage néo-libéral de la gauche, il montre bien le basculement qu’a connu, avec les années 80, le discours anti-fonctionnaire : « on passe de la vieille critique, courtelinesque, finalement assez bon enfant, à un discours singulièrement plus agressif où les fonctionnaires deviennent, de véritables boucs émissaires au service des visées antisociales des néo-libéraux. Sur un ton qui n’est pas sans habileté, c’est en effet toute la pensée néo-libérale qui se déroule, comme une pelote. (...) Il s’agit : de culpabiliser les agents de l’Etat sur leurs prétendus privilèges ou avantages et d’exciter les jalousies entre salariés du public et du privé ; de les diviser pour précariser l’emploi et réduire les droits sociaux de tous ; d’attaquer le syndicalisme, non pas pour en corriger les défauts mais pour l’affaiblir et le présenter systématiquement comme égoïste, irresponsable, gréviculteur, etc ; d’appeler à la privatisation massive des entreprises et services publics, le privé étant toujours, présenté comme plus efficace, moins cher, etc. ; et enfin, pour couronner le tout, de déculpabiliser les riches à l’aube de la nouvelle offensive du capitalisme dirigée, non plus seulement contre la classe ouvrière, mais la classe moyenne dans son ensemble. »
Il poursuit ce travail de démystification, tout au long du livre en décortiquant des slogans à l’encontre de la fonction publique comme par exemple « ils ne travaillent pas assez » (CH 5 pp.125-154).
-Enfin, vous pouvez aussi consulter les ouvrages suivants :
*Les ouvrages de base :
— Le service public, Jacques Chevallier, Que Sais-je ?, PUF, 1997.
—L'appareil administratif de l'État , Jean-Louis Quermonne, Le Seuil, 1991.
*Les rapports officiels :
— Rapport annuel : La fonction publique de l’État, ministère de la fonction publique et de la réforme de l’État, La Documentation française.
— Le temps de travail dans les trois fonctions publiques [Livre] / Mission interministérielle sur le temps de travail ; rapport au Ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation, Jacques Roché rapporteur, La Documentation française, 1999.
— Fonctions publiques : enjeux et stratégie pour le renouvellement, Bernard Cieutat et Nicolas Tenzer, Commissariat général du Plan, La Documentation française, 2000.
-Notre État : le livre vérité de la fonction publique , Roger Fauroux, Bernard Spitz, Hachette Littératures, 2002.
-Cumuls et pantouflage dans les trois fonctions publiques , Manuel Carius, Berger-Levrault, 2001.
Nous sommes désolés de ne pas avoir le temps de vous fournir une fiche de lecture détaillée et analytique pour chacun de ces ouvrages ! Bonne lecture !
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