Question d'origine :
Madame, Monsieur,
je m'intéresse à Hubert Lecour (né le 30 mai 1820 à Oissery et mort le 2 juillet 1871). Il est célèbre pour avoir "codifié" la boxe française avec son frère aîné Charles. Grand professeur de combat, il excellait à la canne et tenait des salles de sport fréquentées par le beau monde.
On sait moins qu'il était passionné de musique, chansonnier à ses heures et avait épousé une pianiste avec laquelle il se produisait en duo.
Hubert Lecour avait fondé, visiblement autour de 1847, des "assauts-concerts" dont parle notamment Jules Vallès.
Ces spectacles mêlaient combats et prestations musicales (romance, etc.)
Ils purent être organisés au théâtre des Variétés et à la salle Richelieu.
On en trouve quelques programmes dans la presse de l'époque.
Mais j'aimerais en savoir plus sur ces assauts-concerts. Le livres sur l'histoire de la savate ne s'y attardent pas. Savez-vous où je pourrais trouver de plus amples informations ? Peut-être dans une histoire des spectacles ?
En vous remerciant de votre aide,
Bien cordialement
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 02/03/2015 à 09h45
Bonjour,
La mode des « assauts-concerts » semble n’avoir duré que peu de temps, les traces de ce type de spectacle sont donc minces.
Néanmoins, il est possible de trouver des témoignages de ces spectacles dans les journaux d’époque, ainsi sur Gallica, on retrouve des assauts-concerts relatés par des journalistes.
Dans le journal Le Figaro du 14 février 1901, à la page des sports, le déroulement d’un assaut-concert est détaillé :
« Escrime
Société d’entraînement à l’escrime et au pistolet.
L’assaut ou plutôt l’assaut-concert, organisé par cette jeune Société, pour sa grande séance annuelle, a été réussi de tous points sauf une légère critique : l’abondance des intermèdes l’a prolongé un peu tard.
Cependant, avec les artistes en tous genres qui agrémentaient la soirée, nous n’aurions pas été si à plaindre en restant plus tard encore à la salle des Agriculteurs, que garnissait d’ailleurs une élégante assistance.
M. Georges Bureau, président de la Société et M. Bruneau de Laborie, président honoraire, ont alternativement dirigé les assauts.
Le programme était composé d’une façon éclectique, même pour les assauts : le fleuret, l’épée et le sabre y étaient tour à tour représentés.
Dans la première partie, on a applaudi les passes d’armes de MM. Yévrême Pantelicht et Braviet (sabre), M. Gaucheron et René Lacroix (épée), Marcel Boulanger et Jeanvois (fleuret).
Après un autre jeu de fleuret entre M. Nissard et R. Bideau, MM. Berger et Bougnol ont soutenu un des assauts d’épée les plus vivement disputés de la soirée.
[…]
Pendant, les entractes de cette belle séance on parlait des escrimeurs récemment décorés des palmes académiques[…]
Bien qu’il ne s’agisse plus d’escrime, je ne dois pas oublier de mentionner, dans la soirée de la Société d’entraînement, les artistes vivement applaudis qui ont pris part aux intermèdes littéraires et musicaux : Melle Jeanne Dumas, Marthe Lafargue, Jeanne Petit, Spindler, Cortez, Darcey ; la jeune violoniste Madeleine Duval ; MM. Puylagarde et Carlo Pazzi « le roi des siffleurs ». »
Les assauts-spectacles étaient donc une alternance de combats et de spectacles musicaux ou littéraires. Entre chaque combat, on assistait à un entracte animé par des musiciens, des chanteurs, et de nombreux artistes.
Vous trouverez d’autres éléments sur ces « assauts-spectacles » dans d’autres journaux :
- Le Figaro du 6 février 1899.
- Le XXe siècle du 2 janvier 1887.
- Gil Blas du 11 septembre 1895.
Un supplément Littéraire du Figaro datant de la fin du XIXe siècle donne des renseignements sur la pratique de la boxe française :
« Quelque temps après l'ouverture de la salle de Georges Lecour, arrivèrent à Paris deux professeurs de province, Loze de Toulouse et Leboucher de Rouen. Loze s'était fait une méthode analogue à celle de Lecour; il avait relevé la garde, adopté le jeu droit et les coups de pied à la hauteur de la poitrine. Leboucher a surtout été un tireur de canne incomparable il avait les jambes trop courtes pour la boxe française; aussi tirait-il peu en public, mais il professait bien et il a fait d'excellents élèves. Sa méthode rie différait pas beaucoup de celle de Lecour.
Autour de ces trois hommes, Lecour, Loze et Leboucher, il se forma bientôt un grand nombre de tireurs qui donnèrent une incontestable supériorité à l'école de Paris. En même temps, la savate avait donné naissance dans le midi à ce qu'on appelle le jeu marseillais, qui a surtout été pratiqué dans les régiments. Peu de coups de poing; on s'attaque par une série de coups de pied tournants qui, la plupart du temps, se perdent dans le vide, attendu que les adversaires n'étant presque jamais de face ne se regardant pas l'œil dans l'œil, ne peuvent avoir le sentiment de la distance. Quelquefois le hasard leur fait réussir un coup de pied de figure très brillant: Devant un jeu droit sérieux, l'école marseillaise ne peut tenir; c'est, si l'on veut, de la gymnastique, de la danse, de la clownerie; ce n'est pas du combat, ce n'est pas de la défense.
La grande période de la boxe française se place de 1845 à 1855. Il y eut là une dizaine d'années d'un éclat incomparable. C'est l'époque des assauts publics organisés au Cirque par Charles Lecour et son frère Hubert, puis à la salle Montesquieu par Leboucher. Je n'ai jamais vu tirer Charles Lecour qui, dès 1848, céda sa salle du passage des Panoramas à son frère et ne parut plus en public. Toute notre génération a connu Hubert Lecour, le professeur par excellence, le véritable gentleman. Il était de petite taille, son jeu était le plus serré, le plus rapide que j'aie vu. Son coup de poing à l'anglaise était terrible, son coup de pied bas d'une rapidité foudroyante. Personne n'exécutait comme lui les coups d'arrêt. Dès 1850 d'ailleurs, il cessa de figurer dans les assauts publics, mais chaque année il donnait dans sa salle, au bénéfice de son prévôt Etienne, un assaut où les plus forts tireurs étaient convoqués. A côté de Lecour, je trouve dans mes souvenirs de cette époque, et pour ne citer que les maîtres de première force, que les étoiles de la salle, Montesquieu, Curel un petit méridional, leste comme un singe, Tessïèr un tireur froid et dangereux entre tous, Charles Ducros, Rambaud dit La Résistance, et enfin Vigneron, que tout le monde a connu sous le nom de l'Homme-Canon. Charles Ducros professe encore aujourd'hui; le jour, il est entrepreneur de peinture, le soir, Il donne leçon dans sa salle du faubourg Saint-Antoine, qui est fréquentée surtout par les bons bourgeois, par les commerçants du quartier.
Il tire encore quelquefois en public la boxe anglaise, dont il s'est fait une spécialité il est le seul de nos professeurs qui ait pu se mettre en face des boxeurs anglais. Un jour, à l'étonnement général, il fit égalité avec le célèbre Crible. Il était un peu rageur. C'est lui qui, à la salle Montesquieu, jeta ses gants au visage de ce colosse de Vigneron qui, abusant de sa force, ne s'était pas arrêté après un coup touché. La scène fut très comique. »
Nos recherches dans Gallica, Google Livres et dans le catalogue de la bibliothèque ne nous ont pas permis de trouver d’ouvrages expliquant l’organisation et le déroulement des assauts-concerts.
Des « assauts-concerts » sont encore proposés par certains clubs de boxe française, comme le prouve cet article de La Dépêche du 4 juin 2014 :
« L'ASPTT Rodez et plus particulièrement sa section boxe française, forte de 80 à 100 membres, propose depuis dix ans la pratique de la boxe française sportive et éducative, de la canne de combat et du bâton, en loisir ou en compétition. Elle anime aussi une école de boxe française pour les plus jeunes.
Samedi 7 juin, c'est à une soirée dont la tradition remonte au XIXe siècle que vous convient les Vieilles Savates et Vieilles Cannes(pratiquants de boxe française de plus de 50 ans), en partenariat avec le comité des fêtes de Salles-Courbatiers, à la salle des fêtes du village. Cette journée autour du patrimoine sportif débutera par un tournoi durant la journée (de 11 heures à 17 heures) avec plus de 50 compétiteurs, assauts Vieilles Savates (boxe française) et Vieilles Cannes (canne de combat). L'entrée est libre, musique, films et présentation de l'histoire de la boxe française et de la canne permettront au public de se familiariser avec ce sport.
Une soirée qui allie découverte de la boxe française, combats, assauts et gastronomie qui devrait enflammer le Bournhou. »
Pour obtenir plus de détails sur ces spectacles, nous vous conseillons d’interroger la Fédération française de Savate, Boxe française et D.A., qui dispose certainement d’archives sur ces pratiques et qui sera plus à même de vous renseigner.
Bonne journée.
La mode des « assauts-concerts » semble n’avoir duré que peu de temps, les traces de ce type de spectacle sont donc minces.
Néanmoins, il est possible de trouver des témoignages de ces spectacles dans les journaux d’époque, ainsi sur Gallica, on retrouve des assauts-concerts relatés par des journalistes.
Dans le journal Le Figaro du 14 février 1901, à la page des sports, le déroulement d’un assaut-concert est détaillé :
« Escrime
Société d’entraînement à l’escrime et au pistolet.
L’assaut ou plutôt l’assaut-concert, organisé par cette jeune Société, pour sa grande séance annuelle, a été réussi de tous points sauf une légère critique : l’abondance des intermèdes l’a prolongé un peu tard.
Cependant, avec les artistes en tous genres qui agrémentaient la soirée, nous n’aurions pas été si à plaindre en restant plus tard encore à la salle des Agriculteurs, que garnissait d’ailleurs une élégante assistance.
M. Georges Bureau, président de la Société et M. Bruneau de Laborie, président honoraire, ont alternativement dirigé les assauts.
Le programme était composé d’une façon éclectique, même pour les assauts : le fleuret, l’épée et le sabre y étaient tour à tour représentés.
Dans la première partie, on a applaudi les passes d’armes de MM. Yévrême Pantelicht et Braviet (sabre), M. Gaucheron et René Lacroix (épée), Marcel Boulanger et Jeanvois (fleuret).
Après un autre jeu de fleuret entre M. Nissard et R. Bideau, MM. Berger et Bougnol ont soutenu un des assauts d’épée les plus vivement disputés de la soirée.
[…]
Pendant, les entractes de cette belle séance on parlait des escrimeurs récemment décorés des palmes académiques[…]
Bien qu’il ne s’agisse plus d’escrime, je ne dois pas oublier de mentionner, dans la soirée de la Société d’entraînement, les artistes vivement applaudis qui ont pris part aux intermèdes littéraires et musicaux : Melle Jeanne Dumas, Marthe Lafargue, Jeanne Petit, Spindler, Cortez, Darcey ; la jeune violoniste Madeleine Duval ; MM. Puylagarde et Carlo Pazzi « le roi des siffleurs ». »
Les assauts-spectacles étaient donc une alternance de combats et de spectacles musicaux ou littéraires. Entre chaque combat, on assistait à un entracte animé par des musiciens, des chanteurs, et de nombreux artistes.
Vous trouverez d’autres éléments sur ces « assauts-spectacles » dans d’autres journaux :
- Le Figaro du 6 février 1899.
- Le XXe siècle du 2 janvier 1887.
- Gil Blas du 11 septembre 1895.
Un supplément Littéraire du Figaro datant de la fin du XIXe siècle donne des renseignements sur la pratique de la boxe française :
« Quelque temps après l'ouverture de la salle de Georges Lecour, arrivèrent à Paris deux professeurs de province, Loze de Toulouse et Leboucher de Rouen. Loze s'était fait une méthode analogue à celle de Lecour; il avait relevé la garde, adopté le jeu droit et les coups de pied à la hauteur de la poitrine. Leboucher a surtout été un tireur de canne incomparable il avait les jambes trop courtes pour la boxe française; aussi tirait-il peu en public, mais il professait bien et il a fait d'excellents élèves. Sa méthode rie différait pas beaucoup de celle de Lecour.
Autour de ces trois hommes, Lecour, Loze et Leboucher, il se forma bientôt un grand nombre de tireurs qui donnèrent une incontestable supériorité à l'école de Paris. En même temps, la savate avait donné naissance dans le midi à ce qu'on appelle le jeu marseillais, qui a surtout été pratiqué dans les régiments. Peu de coups de poing; on s'attaque par une série de coups de pied tournants qui, la plupart du temps, se perdent dans le vide, attendu que les adversaires n'étant presque jamais de face ne se regardant pas l'œil dans l'œil, ne peuvent avoir le sentiment de la distance. Quelquefois le hasard leur fait réussir un coup de pied de figure très brillant: Devant un jeu droit sérieux, l'école marseillaise ne peut tenir; c'est, si l'on veut, de la gymnastique, de la danse, de la clownerie; ce n'est pas du combat, ce n'est pas de la défense.
La grande période de la boxe française se place de 1845 à 1855. Il y eut là une dizaine d'années d'un éclat incomparable. C'est l'époque des assauts publics organisés au Cirque par Charles Lecour et son frère Hubert, puis à la salle Montesquieu par Leboucher. Je n'ai jamais vu tirer Charles Lecour qui, dès 1848, céda sa salle du passage des Panoramas à son frère et ne parut plus en public. Toute notre génération a connu Hubert Lecour, le professeur par excellence, le véritable gentleman. Il était de petite taille, son jeu était le plus serré, le plus rapide que j'aie vu. Son coup de poing à l'anglaise était terrible, son coup de pied bas d'une rapidité foudroyante. Personne n'exécutait comme lui les coups d'arrêt. Dès 1850 d'ailleurs, il cessa de figurer dans les assauts publics, mais chaque année il donnait dans sa salle, au bénéfice de son prévôt Etienne, un assaut où les plus forts tireurs étaient convoqués. A côté de Lecour, je trouve dans mes souvenirs de cette époque, et pour ne citer que les maîtres de première force, que les étoiles de la salle, Montesquieu, Curel un petit méridional, leste comme un singe, Tessïèr un tireur froid et dangereux entre tous, Charles Ducros, Rambaud dit La Résistance, et enfin Vigneron, que tout le monde a connu sous le nom de l'Homme-Canon. Charles Ducros professe encore aujourd'hui; le jour, il est entrepreneur de peinture, le soir, Il donne leçon dans sa salle du faubourg Saint-Antoine, qui est fréquentée surtout par les bons bourgeois, par les commerçants du quartier.
Il tire encore quelquefois en public la boxe anglaise, dont il s'est fait une spécialité il est le seul de nos professeurs qui ait pu se mettre en face des boxeurs anglais. Un jour, à l'étonnement général, il fit égalité avec le célèbre Crible. Il était un peu rageur. C'est lui qui, à la salle Montesquieu, jeta ses gants au visage de ce colosse de Vigneron qui, abusant de sa force, ne s'était pas arrêté après un coup touché. La scène fut très comique. »
Nos recherches dans Gallica, Google Livres et dans le catalogue de la bibliothèque ne nous ont pas permis de trouver d’ouvrages expliquant l’organisation et le déroulement des assauts-concerts.
Des « assauts-concerts » sont encore proposés par certains clubs de boxe française, comme le prouve cet article de La Dépêche du 4 juin 2014 :
« L'ASPTT Rodez et plus particulièrement sa section boxe française, forte de 80 à 100 membres, propose depuis dix ans la pratique de la boxe française sportive et éducative, de la canne de combat et du bâton, en loisir ou en compétition. Elle anime aussi une école de boxe française pour les plus jeunes.
Une soirée qui allie découverte de la boxe française, combats, assauts et gastronomie qui devrait enflammer le Bournhou. »
Pour obtenir plus de détails sur ces spectacles, nous vous conseillons d’interroger la Fédération française de Savate, Boxe française et D.A., qui dispose certainement d’archives sur ces pratiques et qui sera plus à même de vous renseigner.
Bonne journée.
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