Plaques d'immatriculation des automobiles
LYON, MÉTROPOLE ET RÉGION
+ DE 2 ANS
Le 18/07/2015 à 05h41
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Question d'origine :
Bonjour, je viens de lire l'article de Lyon Capitale sur l'origine des plaques d'immatriculation des automobiles (http://www.lyoncapitale.fr/Journal/Lyon ... -Tete-d-Or). Il semblerait qu'il s'agisse d'une invention lyonnaise, imposée d'abord (en 1891) aux véhicules circulant à l'intérieur du parc de la Tête-d'or, puis généralisée à toute la France en 1901. Voici mes deux questions : cette information est-elle exacte ? et la France a-t-elle été le premier pays à imposer cette immatriculation ? Je suis enseignante au lycée de l'automobile Emile Béjuit (Bron) et cette question intéressera beaucoup nos élèves. Merci par avance. Docauto
Réponse du Guichet
bml_reg
- Département : Documentation régionale
Le 21/07/2015 à 07h44
Bonjour,
Nous avons déjà donné une réponse à une question similaire.
Dans le livre La Grande Aventure Automobile Lyonnaise, on peut lire l’extrait suivant à ce sujet ; il situe au début de 1900 l’arrêté qui obligeait les automobilistes à apposer un numéro à leur voiture, alors que cet arrêté est visiblement plus ancien et précède son application au niveau national (cf l’ordonance du 14 août 1893, un site sur l’historique des plaques numéralogique et l’article de wikipedia).
Comme contre-publicité efficace pour l’automobile, on peut rappeler la stupide décision du comité chargé d’organiser l’Exposition universelle de 1900 à Paris, d’installer les automobiles dans la section de la carrosserie, de la sellerie et de la bourrellerie. Quelques-unes furent finalement admises à l’annexe de Vincennes, mais personne ne le savait et personne n’y alla. Des parlementaires s’en mêlèrent. L’un d’eux, encore en 1907, défendit un projet de loi imputant automatiquement aux automobilistes, sans la moindre enquête, tous les accidents dans lesquels ils étaient impliqués; ce même parlementaire était par ailleurs, on ne s’en étonnera pas, président d'une « ligue contre les excès des automobilistes ».
Lyon ou la ville à éviter
A Lyon, la municipalité passait pour être autophobe. Le docteur Gailleton, maire de Lyon, avait édicté un certain nombre de règlements extrêmement contraignants, c’est le moins qu’on puisse dire, non seulement pour la traversée de la ville en automobile, mais également a l’intérieur de la cité. La voiture sans chevaux remplaçant petit a petit le cheval lui-même, les automobilistes d’alors (il devait y en avoir une centaine dans le Rhône en 1900) prenaient un grand plaisir a parcourir en voiture les allées du parc de la Tête-d’Or, comme ils le faisaient auparavant avec leur coursier. Début 1900, il devint nécessaire d’être porteur d’une autorisation délivrée par la mairie « après d’innombrables formalités». Pour entrer au parc, le chauffeur devait montrer une autorisation au garde de service, lequel prenait note de ses noms, prénoms et domicile et lui remettait un numéro d’ordre destiné à être suspendu de façon très apparente au véhicule. Ce numéro devait être rendu à la sortie, sous peine d’annulation de l'autorisation.
Baudry de Saunier, journaliste et historien célèbre de l’automobile, fit paraitre dans la Locomotion Automobile du 15 novembre 1900 un article dans la série intitulée Le péril des maires », qui commençait de la façon suivante « Habitez-vous Lyon, mon pauvre lecteur, ou bien avez-vous récemment traversé cette ville en automobile ? Si oui, vous avez compris mon article a la lecture de son seul titre. » Et il décrivait la procédure appliquée dans cette bonne ville. « Des qu’une automobile se présente aux portes de Lyon, un employé de l’octroi sort de son gite, lui fait signe de stopper... Le conducteur est invité à descendre et même a arrêter son moteur, car "ca sera long”. Le chauffeur entre dans le bureau d’octroi. Un second employé, derrière les barreaux de sa cage, procède a son interrogatoire. Il lui demande ses nom, prénoms, adresse, le nombre des roues de sa voiture (sic), exige l’exhibition de ses certificats, écrit, récrit, récrit encore toute la déposition sur un énorme livre a souche, réclame deux signatures, et enfin 1,50 franc. Il lui délivre un long imprimé, manuscrit par endroits, à garder soigneusement pour le représenter a la sortie”... Enfin il remet le prévenu aux mains du premier employé qui, au moyen de fils de fer, lui ligature un gros numéro en zinc dans le dos, le dos de la voiture, bien entendu... » Il poursuit encore:
« Vous devinez que je viens de bitter irrévocablement Lyon de mon itinéraire, et j’espère bien que tous ceux qui me liront en feront autant... » Il semble bien que cet article, dont l’audience fut considérable, eut des conséquences heureuses. L’arrêté prescrivant les gros numéros fut soumis au Touring-Club, qui attira l’attention du ministre de l’Intérieur sur ce texte qualifié d'abus de pouvoir. Peu de temps après, le maire Augagneur ayant été contacté par téléphone par le président du T.C.F. et par le ministre Pierre Baudin, affirma, parait-il, a ce dernier que la plus grande modération serait apportée dans l’application de cet arrêté.
Ce dernier avait d'ailleurs donné lieu à des abus, que l’on appellerait aujourd'hui « bavures », de simples préposés de l’octroi s’étant arrogé le droit de verbaliser. Le tribunal de paix de Lyon avait rendu des arrêts déclarant nuls de tels agissements.
Néanmoins, un éminent journal automobile parisien, excédé par ces tracasseries, proposait même aux chauffeurs se rendant dans le Midi et désirant éviter Lyon et les vexations qu’ils y subissaient, un itinéraire par Montargis, Briare, Cosne, Nevers, Bourg-Argental, Annonay, Andance et Saint-Vallier ! Belle publicité pour la ville ! Victor Augagneur n’en persista pas moins et répondit à toutes les critiques par une lettre publiée dans Le Progrès du 18 janvier 1901. En voici un extrait: « si les tous, les sauvages désireux de traverser nos rues comme des météores, écrasant de ci, renversant de la, s’abstiennent, nous ne les regretterons guère, convaincus que les automobilistes civilisés ne seront pas effrayés par l’obligation de traverser Lyon sagement, et subiront, sans ennui, l’apposition du numéro. »
Et on pouvait encore lire dans une revue automobile de 1906 l’entrefilet suivant : « La police de Lyon semble oublier que les usines lyonnaises d’automobiles ont acquis une très grosse importance. Elle fait en ce moment la guerre aux chauffeurs, leur dressant des contraventions à tout propos. Heureusement que les constructeurs de la région ont bec et ongles pour se défendre et faire cesser ces tracasseries stupides. Lyon se distingua également par des actes inqualifiables d’autophobie. Les adversaires de l’automobile avaient parfois des idées « renversantes » ! On pouvait lire dans La Dépêche de Lyon en 1908 l’entrefilet suivant
« Circulation d’autos - En présence des dangers permanents que courent les habitants en raison de l’allure désordonnée des automobiles, il est question d’établir sur la grande route Lyon, Genève, Chambéry, des rigoles pavées dites "cassis”, de 2 mètres de largeur et 30 centimètres de flèche, espacées de 10 mètres en 10 mètres. Une souscription est ouverte pour les frais de ces travaux entre MM... (ici les noms d’un mécanicien, de deux médecins et de deux pharmaciens) ». Le journal ajoutait : « On n’est guère partisan des autos dans le pays qui a donné le jour à Serpollet ». La souscription ne dut pas être couronnée de succès, sans quoi on en aurait entendu parler. En effet, la réalisation de ce énième travail d’Hercule aurait paralysé également la circulation de tous les autres véhicules et sérieusement entravé même la marche à pied.
D’après euronews la France aurait été par l’arrêté de 1893 le premier pays à mettre en place le système des plaques d’immatriculations.
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