Question d'origine :
Bonjour,
Pourquoi Rudolf Hess est il parti en Ecosse.
Hitler etait il au courant de ce départ ?
Cordialement,
Drekki
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 16/04/2005 à 09h04
Comme vous le savez peut-être la réponse à cette question fait débat entre historiens.
Charles Bloch propose une analyse très argumentée dans son ouvrage Le III° Reich et le monde
Le jour de l’arrivée de Darlan en Allemagne, le 10 mai 1941, «le second d’Hitler»dans le Parti, Rudolf Hess s’était envolé vers l’Angleterre. Certains historiens croient qu’il aurait agi avec le consentement, peut-être même sur l’instigation de Hitler. Nous ne saurions rallier cet avis. Il est vrai que Hess connaissait le désir constant du führer de parvenir à un accord avec l’Angleterre. Il le partageait entièrement, se croyant destiné à une mission spéciale pour atteindre cet objectif. Il est possible que dans le courant de 1940 il ait dit à Hitler qu’il ferait un effort dans ce sens. Mais la manière et le moment qu’il choisit ne purent que contrecarrer les projets du dictateur.
Hess était un disciple de Karl Haushofer et entretenait des relations étroites avec son fils Albrecht. Hess lui parlait de ses ambitions en automne 1940. Albrecht Haushofer était lui aussi actif dans la recherche de la paix avec la grande Bretagne. Il avait envoyé des messages à Hoare et au Duc d’Hamilton qu’il voulait rencontrer à Lisbonne. Il était également en rapport avec Carl Buckardt. Le duc était un aristocrate écossais qui entretenait de bonnes relations avec la cour de Londres. Il n’y a pas de preuves qu’Hitler ait été au courant de ces démarches, mais elles ne pouvaient que convenir à ses desseins. Albrecht Haushofer rendit certainement compte à Hess de ses contacts, mais il ne l’encouragea pas à son geste précipité. En débarquant à l’improviste en Ecosse (après deux tentatives antérieures dans l’hiver 1940-1941, restées secrètes), Hess détruisit d’un seul coup tout le travail patient d’ Albrecht Haushofer par la publicité que provoqua son acte spectaculaire. En effet, Albrecht Haushofer se préparait à partir pour Madrid le 11 mai, sous prétexte d’une conférence, afin d’y rencontrer Hoare. La condition préalable à tout compromis anglo-allemand était la chute de Churchill. Or Hess l’exigea et ainsi la rendit impossible. Il le dit dans ses entretiens avec Kirkpatrick, l’ancien chargé d’Affaires britannique à Berlin, ainsi qu’avec les membres du gouvernement de Londres, lord Simon et lord Beaverbrook. Il formula aussi d’autres revendications inacceptables pour les Anglais, notamment au sujet du Proche Orient. (Ceci est un autre indice qu’il agit de sa propre initiative. Il était né à Alexandrie. Par contre Hitler se désintéressait de cette région qu’il considérait comme zone de domination italienne). Les propos de Hess étaient d’ailleurs très incohérents. Ce fut seulement dans son dernier entretien avec Beaverbrook , le 16 septembre, c’est à dire presque deux mois après l’attaque d’Hitler contre l’URSS, qu’il parla d’une alliance anglo-allemande contre le bolchévisme. Sans être dérangé mentalement au sens propre du terme, Hess était exalté et déséquilibré. D’ailleurs la presse et la radio qualifièrent sa démarche comme celle d’un «illuminé» sans en attendre les résultats (ce que Goebbels aurait fait si Hess était parti avec l’assentiment d’Hitler). Selon une source, la Lutwaffe aurait reçu l’ordre, le 10 mai, d’abattre tout avion suspect se dirigeant ver les côtes anglaises. En outre, Albrecht Haushofer fut rendu responsable de l’action de Hess et mis aux arrêts pendant huit semaines. Finalement Hitler ne pouvait pas ignorer qu’une initiative aussi maladroite devait nécessairement éveiller des soupçons chez ses alliés, l’Italie et le Japon, qui pensèrent qu’il cherchait une paix séparée avec l’Angleterre à leurs dépens. Il lui fut d’ailleurs facile de les rassurer. Par contre Staline, - et pendant un moment même Roosevelt – nourrit une méfiance envers Churchill qui devait persister pendant toute la guerre. Il ne cessait de craindre que le chef du gouvernement britannique ne sortit un jour Hess de sa prison pour se servir de lui comme intermédiaire dans d ‘éventuelles négociations avec Hitler.
Un livre récent apporterait un éclairage nouveau et complémentaire sur cette question. Il est en commande à la bibliothèque.
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