quotas en politique
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 18/11/2015 à 08h06
461 vues
Question d'origine :
Peut-on dire que les mesures mises en place pour réduire les inégalités homme/femme sont efficaces ? Pourquoi ?
Commentaire de
Pauline69 :
Publié le 18/11/2015 à 08:10
Pourquoi les quotas ne sont pas efficaces ?
Comment peut-on les rendre efficaces ?
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 20/11/2015 à 09h22
Bonjour,
Le site vie publique rend compte des effets contrastés de la mise en place des quotas dans le système électoral français :
Depuis l’ordonnance du 21 avril 1944 adoptée par le Gouvernement provisoire de la République française, basé à Alger, les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes. Si les femmes participent aux élections politiques dans les mêmes proportions que les hommes, en revanche, elles restent pendant longtemps très minoritaires parmi les élus.
Or, les organisations féministes ne se saisissent que tardivement de la cause de la représentation politique des femmes. Celle-ci ne devient une priorité que dans les années 90 c’est-à-dire après que nombre de revendications dans le domaine privé ou professionnel ont été satisfaites. C’est en 1999 qu’est adoptée une réforme constitutionnelle qui permet l’établissement de quotas en faveur des femmes. Deux lois en 2000 et 2007 complètent ce dispositif.
La mise en place d’un dispositif contraignant pour favoriser la parité
En 1982, le Conseil constitutionnel censure une loi qui prévoyait un quota de 25 % de femmes dans les listes des élections municipales estimant que le principe d’égalité devant la loi à l’article premier s’oppose à toute division par catégories des électeurs et des éligibles.
Cette décision du Conseil constitutionnel constitue, pour la suite, un obstacle juridique à l’adoption de toute mesure visant une égalité de représentation entre les femmes et les hommes. Les gouvernements successifs, craignant une nouvelle censure, renoncent à des dispositifs contraignants de type quotas. Le thème de la parité dans la représentation politique ne ressurgit vraiment que lors de la campagne électorale des élections présidentielles de 1995 pendant laquelle Jacques Chirac promet d’instituer un Observatoire de la parité. Celui-ci est créé en octobre 1995, sa rapporteure générale est Roselyne Bachelot, Gisèle Halimi y est responsable de la commission politique. Toutes deux rédigent un rapport en 1996 dans lequel elles proposent des mesures volontaristes législatives et/ou constitutionnelles instaurant les principes d’un quota ou d’une parité.
En 1997, dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre Lionel Jospin s’engage à réformer la Constitution pour y inscrire la parité. La loi constitutionnelle du 8 juillet 1999 complète l’article 3 de la Constitution en posant que la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives et elle désigne, dans l’article 4, les partis politiques comme contribuant à la mise en œuvre du principe énoncé à l’article 3.
La loi tendant à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives est ensuite promulguée le 6 juin 2000. Elle prévoit une égalité obligatoire des candidatures pour les scrutins de liste et même une alternance des candidats de chaque sexe sur les listes. L’alternance est stricte pour les élections à un tour et par tranche de six pour les élections à deux tours. Pour les élections législatives, la loi prévoit une égalité facultative : les partis qui ne présentent pas 50% de candidats de chaque sexe doivent payer une amende (la pénalité est en fait déduite de la première partie du financement public). La loi de 2000 est lacunaire puisqu’elle ne concerne ni les élections municipales dans les villes de moins de 3500 habitants, ni les cantonales, ni les sénatoriales dans les départements qui élisent moins de trois sénateurs.
Pour corriger certaines faiblesses de cette loi, une nouvelle loi est promulguée le 31 janvier 2007. La nouvelle loi entend d’abord féminiser les exécutifs locaux en prévoyant l’application de la parité pour l’élection des adjoints au maire ainsi que pour les membres de la commission permanente et les vice-présidences des conseils régionaux. Les élections cantonales entrent dans le champ du dispositif paritaire. Désormais, les candidats doivent avoir un suppléant de sexe différent. Cette disposition a cependant un impact faible sur la part des femmes dans les conseils généraux puisque les conseillers généraux sortants sont majoritairement des hommes. Les femmes se retrouvent le plus souvent suppléantes si le sortant souhaite se représenter, même si les motifs de remplacement ont été étendus. Pour les élections législatives, la loi accentue le montant de la pénalité financière sans la rendre dissuasive. En revanche, les propositions émises par la Délégation pour les droits des femmes du Sénat (limite du cumul des mandats, extension des règles de parité aux structures intercommunales) n’ont pas été retenues.
Des résultats contrastés
La législation en faveur de la parité a donné des résultats contrastés selon les modes de scrutin. Le scrutin de liste, assorti de contraintes strictes quant à la composition paritaire des listes de candidats, a permis à la parité de devenir une réalité effective dans les conseils municipaux des villes de plus de 3 500 habitants, dans les conseils régionaux et dans la représentation française au Parlement européen.
Ainsi, lors des élections municipales de 2001 et de 2008, la loi du 6 juin 2000 a profondément modifié les conseils municipaux des communes de plus de 3500 habitants faisant passer le pourcentage de femmes de 25,7% en 1995 à 47,5% en 2001 et à 48,5% en 2008. Le pourcentage global de femmes, toutes communes confondues, passe de 21,7% en 1995, à 33% en 2001 et 35% en 2008. Cependant, dans les communes de moins de 3500 habitants, la loi n’étant pas contraignante, les avancées de la parité sont restées limitées. Par ailleurs, malgré la promulgation de la loi de 2007 qui impose la parité dans l’élection des adjoints, la proportion de femmes élues maires reste faible (13,8%) et les têtes de listes investies par les partis politiques sont des hommes à 83,5%.
La loi a également bien fonctionné pour les élections régionales. De 1995 à 2004, le pourcentage de conseillères régionales passe de 27,5% à 47,6%. En 2010, après l’entrée en vigueur de la loi de 2007 qui impose la parité, au sein du conseil régional, dans la commission permanente et dans les vice-présidences, la part des femmes dans les conseils régionaux se situe aux alentours de 48% et leur présence dans les exécutifs régionaux progresse fortement (les femmes occupent 48,1% des mandats exécutifs ; cependant, la loi ne posant pas d’obligation pour les têtes de listes, seules deux femmes sont présidentes de région). Enfin, les élections européennes sont régulièrement citées comme les élections exemplaires en matière de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes (44,4% de femmes élues en 2009).
En revanche, pour les élections qui reposent sur un scrutin uninominal, la parité n’a que très peu progressé. C’est notamment le cas pour les élections législatives. Si la proportion de femmes candidates au premier tour a augmenté, la proportion de femmes élues à l’Assemblée nationale est passée de 10,9% en 1997, à 12,3% en 2002 et à 18,5% en 2007. Les partis politiques ont préféré payer des pénalités plutôt que d’investir des femmes à la place des députés sortants. Dans le cadre de la réforme territoriale, des conseillers territoriaux doivent remplacer les conseillers généraux et les conseillers régionaux à partir de 2014. L’élection de ces nouveaux conseillers doit se faire au scrutin uninominal à deux tours. L’adoption de ce mode de scrutin fait craindre, notamment à l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes, un recul de la parité dans les assemblées locales.
Le Réseau du savoir électoral dresse une liste des arguments favorables et défavorables avancés à l’égard des quotas en faveur des femmes en politique :
Plusieurs arguments soutiennentl’adoption dans la loi de quotas favorables à l’élection des femmes :
•L’expérience prouve que les quotas sont la meilleure façon de mieux équilibrer la représentation des deux sexes.
Ce sont dans les pays où des quotas (prévus par la loi ou optionnels) ont été adoptés qu’on a vu les plus grands progrès vers la représentation égale des deux sexes.
•L’inscription de quotas dans la loi aide à contourner la résistance des dirigeants traditionalistes des partis.
Certains estiment que le contrôle des partis par des hommes à tendance traditionaliste pose le plus grand obstacle à l’investiture et à l’élection de femmes candidates. L’inscription de quotas dans la loi permet de forcer la main de ces élites récalcitrantes.
•Les femmes élues deviennent des exemples pour les autres femmes.
On affirme parfois que si peu de femmes se lancent en politique, c’est en raison d’un manque d’exemples à suivre dans ce domaine. En permettant l’élection de quelques femmes, les quotas stimulent l’intérêt des femmes pour la politique.
•Les quotas prévus par la loi forcent les partis à trouver de bonnes candidates.
Pour des raisons liées à la tradition, aux habitudes ou aux réseaux, les comités d’investiture des partis, s’ils sont composés surtout d’hommes, choisissent en général moins de candidates que de candidats. Les quotas forcent les partis à trouver et à former de bonnes candidates – effort qu’ils ne feraient peut-être pas autrement.
•Une fois élues, les femmes peuvent aider à supprimer certains des obstacles structurels à l’élection des femmes.
Les femmes députées sont plus susceptibles que leurs collègues masculins de prôner des projets de loi qui supprimeront les obstacles à l’élection d’un plus grand nombre de femmes.
•Les quotas prévus par la loi ne sont pas discriminatoires, mais corrigent au contraire une discrimination existante.
Si on admet que tout pays compte autant de bonnes candidates potentielles que de bons candidats, il faut en déduire que la faible représentation des femmes est due à une discrimination structurelle. Les quotas ne sont donc pas eux-mêmes discriminatoires, mais corrigent plutôt une discrimination existante.
•Les quotas ne limitent pas la liberté de choix; au contraire, ils donnent le choix d’élire des femmes aussi bien que des hommes
D’aucuns soutiennent que les quotas ne restreignent pas la liberté de choix des électeurs, mais l’augmentent au contraire en leur donnant la possibilité de voter aussi bien pour des femmes que pour des hommes.
Il y a en revanche des argumentscontre l’inscription dans la loi de quotas favorables aux femmes.
L’adoption de quotas profemmes est de plus en plus courante, mais elle reste hautement controversée. Qu’ils considèrent ou non que la représentation égale des hommes et des femmes soit souhaitable en soi, les opposants aux quotas avancent plusieurs arguments, dont les suivants.
•Les quotas prévus par la loi sont discriminatoires envers les hommes.
Certains estiment que les quotas sont discriminatoires envers les hommes qui, sinon, auraient remporté les sièges. On peut répondre à cet argument que les quotas ne font que corriger une discrimination structurelle (voir ci-dessus).
•Les quotas mènent à des assemblées législatives moins compétentes.
Certains opposants à l’adoption de quotas prévus par la loi soutiennent que les femmes élues grâce à des quotas sont moins compétentes que les autres élus masculins, et que le faible nombre de femmes candidates découle surtout du moins grand bassin de candidates potentielles compétentes. Ces opposants perçoivent que les femmes désignées comme candidates ne le sont qu’en raison de leur sexe.
•Les femmes élues grâce à des quotas sont moins respectées et ne possèdent pas de pouvoir réel.
Les femmes élues grâce à des quotas risquent d’être jugées moins compétentes que leurs collègues masculins; elles pourraient donc préférer être élues sans cette aide.
•Les quotas briment la liberté de choix des électeurs.
Pour certains, c’est la liberté de choix des électeurs qui est brimée lorsqu’un certain nombre de sièges sont réservés aux femmes à l’assemblée législative.
•Les quotas faussent le concept de représentation et nuisent aux femmes.
Selon certains, les quotas donnent l’impression que seules des femmes peuvent représenter les femmes, alors que les hommes, eux, peuvent représenter les deux sexes. Cette fausse impression nuirait aux femmes qui veulent être élues non pas parce qu’elles sont femmes, mais en raison de leurs idées.
•Les quotas ne profitent pas aux femmes qui le méritent le plus.
D’aucuns croient que les quotas prévus par la loi profitent surtout aux épouses, filles, sœurs, cousines, etc., des politiciens traditionnels, et non à des femmes qui ont acquis leurs propres appuis.
•Il est très difficile de faire inscrire des quotas dans la loi (et encore plus dans la Constitution).
L’inscription de quotas dans la loi peut être très ardue si le gouvernement ne jouit pas d’une forte majorité à l’assemblée législative. De ce point de vue, les quotas prévus par la loi ne peuvent pas vraiment avoir un impact révolutionnaire, puisqu’ils ne peuvent être adoptés que si la majorité des élus et des dirigeants politiques sont déjà engagés en faveur de l’égalité entre les sexes. Il peut donc être plus facile et tout aussi utile de faire pression pour que les partis adoptent volontairement leurs propres quotas.
•Les quotas peuvent devenir un plafond plutôt qu’un plancher.
Certains craignent que les quotas prévus par la loi soient vus comme le nombre maximal de femmes qu’il faut élire, et qu’ils empêchent ainsi la vraie parité.
•Les quotas prévus par la loi (et surtout les sièges réservés) dressent les femmes les unes comme les autres.
Certains disent que les sièges réservés incitent les femmes à rivaliser les unes contre les autres au lieu de travailler ensemble à accroître leur influence politique.
A l’occasion de la journée de la femme et des élections départementales en mars dernier, la journaliste de France Bleu Alsace Aurélie Locquet revient sur la question des quotas : Pour ou contre les quotas de femmes en politique ?, dans un département traditionnellement défavorable aux femmes…
Toujours en mars 2015, l’Observatoire des inégalités précise que la représentation des femmes en politique est encore loin de l’égalité :
La loi de juin 2000 sur la parité a contribué à une meilleure représentation féminine dans les exécutifs nationaux et locaux. Mais seulement 26,9 % de femmes siègent à l’Assemblée nationale. Au rythme actuel de progression en nombre de sièges obtenus par les femmes, la parité devrait être atteinte…dans 25 ans. Au niveau local, seule une femme est à la tête d’une région, alors qu’elles représentent près de la moitié des conseillers de ces instances. 16 % des maires sont des femmes, et 14,6 % sont à la tête de communes de plus de 100 000 habitants.
Pour approfondir, nous vous conseillons d’explorer le site de l’Observatoire des inégalités, qui a notamment publié en 2014 une série d’analyses sur la représentation des femmes en politique aux différents niveaux :
- La représentation des femmes à l’Assemblée et au Sénat
- La représentation des femmes en politique au niveau local
- La part des femmes au parlement européen
Pour aller plus loin :
- Femmes-hommes : penser l'égalité, sous la direction de Sandrine Dauphin et Réjane Sénac; Avec la participation de Marie Duru-Bellat, Elisabeth Elgàn, Maxime Forest, Maryse Jaspard...[et al.]
- Hommes-femmes : une impossible égalité professionnelle ? Dominique Meurs
- Femmes-hommes : enfin l'égalité ? sous la direction de Nathalie Pilhes et Gilles Pennequin
- Les discriminations entre les femmes et les hommes, sous la direction de Françoise Milewski, Hélène Périvier
- L'égalité professionnelle hommes-femmes dans la fonction publique : rapport au président de la République, par Françoise Guégot, députée de la Seine-Maritime
- Toutes les femmes ne viennent pas de Vénus ! : l'égalité aujourd'hui, Charlotte Lazimi
- L'égalité sous conditions : genre, parité, diversité, Réjane Sénac; préface de Janine Mossuz-Lavau; postface de Joan W. Scott
- La parité : une exigence !, Michelle Meunier; ouvrage dirigé par Rémi Raher
- Manuel de survie à destination des femmes en politique, Sandrine Rousseau; préface de Claire Serre-Combe; avant-propos de Clémentine Autain, Emmanuelle Cosse, Cécile Duflot,...[et al.]
Bonne journée.
Le site vie publique rend compte des effets contrastés de la mise en place des quotas dans le système électoral français :
Depuis l’ordonnance du 21 avril 1944 adoptée par le Gouvernement provisoire de la République française, basé à Alger, les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes. Si les femmes participent aux élections politiques dans les mêmes proportions que les hommes, en revanche, elles restent pendant longtemps très minoritaires parmi les élus.
Or, les organisations féministes ne se saisissent que tardivement de la cause de la représentation politique des femmes. Celle-ci ne devient une priorité que dans les années 90 c’est-à-dire après que nombre de revendications dans le domaine privé ou professionnel ont été satisfaites. C’est en 1999 qu’est adoptée une réforme constitutionnelle qui permet l’établissement de quotas en faveur des femmes. Deux lois en 2000 et 2007 complètent ce dispositif.
En 1982, le Conseil constitutionnel censure une loi qui prévoyait un quota de 25 % de femmes dans les listes des élections municipales estimant que le principe d’égalité devant la loi à l’article premier s’oppose à toute division par catégories des électeurs et des éligibles.
Cette décision du Conseil constitutionnel constitue, pour la suite, un obstacle juridique à l’adoption de toute mesure visant une égalité de représentation entre les femmes et les hommes. Les gouvernements successifs, craignant une nouvelle censure, renoncent à des dispositifs contraignants de type quotas. Le thème de la parité dans la représentation politique ne ressurgit vraiment que lors de la campagne électorale des élections présidentielles de 1995 pendant laquelle Jacques Chirac promet d’instituer un Observatoire de la parité. Celui-ci est créé en octobre 1995, sa rapporteure générale est Roselyne Bachelot, Gisèle Halimi y est responsable de la commission politique. Toutes deux rédigent un rapport en 1996 dans lequel elles proposent des mesures volontaristes législatives et/ou constitutionnelles instaurant les principes d’un quota ou d’une parité.
En 1997, dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre Lionel Jospin s’engage à réformer la Constitution pour y inscrire la parité. La loi constitutionnelle du 8 juillet 1999 complète l’article 3 de la Constitution en posant que la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives et elle désigne, dans l’article 4, les partis politiques comme contribuant à la mise en œuvre du principe énoncé à l’article 3.
La loi tendant à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives est ensuite promulguée le 6 juin 2000. Elle prévoit une égalité obligatoire des candidatures pour les scrutins de liste et même une alternance des candidats de chaque sexe sur les listes. L’alternance est stricte pour les élections à un tour et par tranche de six pour les élections à deux tours. Pour les élections législatives, la loi prévoit une égalité facultative : les partis qui ne présentent pas 50% de candidats de chaque sexe doivent payer une amende (la pénalité est en fait déduite de la première partie du financement public). La loi de 2000 est lacunaire puisqu’elle ne concerne ni les élections municipales dans les villes de moins de 3500 habitants, ni les cantonales, ni les sénatoriales dans les départements qui élisent moins de trois sénateurs.
Pour corriger certaines faiblesses de cette loi, une nouvelle loi est promulguée le 31 janvier 2007. La nouvelle loi entend d’abord féminiser les exécutifs locaux en prévoyant l’application de la parité pour l’élection des adjoints au maire ainsi que pour les membres de la commission permanente et les vice-présidences des conseils régionaux. Les élections cantonales entrent dans le champ du dispositif paritaire. Désormais, les candidats doivent avoir un suppléant de sexe différent. Cette disposition a cependant un impact faible sur la part des femmes dans les conseils généraux puisque les conseillers généraux sortants sont majoritairement des hommes. Les femmes se retrouvent le plus souvent suppléantes si le sortant souhaite se représenter, même si les motifs de remplacement ont été étendus. Pour les élections législatives, la loi accentue le montant de la pénalité financière sans la rendre dissuasive. En revanche, les propositions émises par la Délégation pour les droits des femmes du Sénat (limite du cumul des mandats, extension des règles de parité aux structures intercommunales) n’ont pas été retenues.
La législation en faveur de la parité a donné des résultats contrastés selon les modes de scrutin. Le scrutin de liste, assorti de contraintes strictes quant à la composition paritaire des listes de candidats, a permis à la parité de devenir une réalité effective dans les conseils municipaux des villes de plus de 3 500 habitants, dans les conseils régionaux et dans la représentation française au Parlement européen.
Ainsi, lors des élections municipales de 2001 et de 2008, la loi du 6 juin 2000 a profondément modifié les conseils municipaux des communes de plus de 3500 habitants faisant passer le pourcentage de femmes de 25,7% en 1995 à 47,5% en 2001 et à 48,5% en 2008. Le pourcentage global de femmes, toutes communes confondues, passe de 21,7% en 1995, à 33% en 2001 et 35% en 2008. Cependant, dans les communes de moins de 3500 habitants, la loi n’étant pas contraignante, les avancées de la parité sont restées limitées. Par ailleurs, malgré la promulgation de la loi de 2007 qui impose la parité dans l’élection des adjoints, la proportion de femmes élues maires reste faible (13,8%) et les têtes de listes investies par les partis politiques sont des hommes à 83,5%.
La loi a également bien fonctionné pour les élections régionales. De 1995 à 2004, le pourcentage de conseillères régionales passe de 27,5% à 47,6%. En 2010, après l’entrée en vigueur de la loi de 2007 qui impose la parité, au sein du conseil régional, dans la commission permanente et dans les vice-présidences, la part des femmes dans les conseils régionaux se situe aux alentours de 48% et leur présence dans les exécutifs régionaux progresse fortement (les femmes occupent 48,1% des mandats exécutifs ; cependant, la loi ne posant pas d’obligation pour les têtes de listes, seules deux femmes sont présidentes de région). Enfin, les élections européennes sont régulièrement citées comme les élections exemplaires en matière de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes (44,4% de femmes élues en 2009).
En revanche, pour les élections qui reposent sur un scrutin uninominal, la parité n’a que très peu progressé. C’est notamment le cas pour les élections législatives. Si la proportion de femmes candidates au premier tour a augmenté, la proportion de femmes élues à l’Assemblée nationale est passée de 10,9% en 1997, à 12,3% en 2002 et à 18,5% en 2007. Les partis politiques ont préféré payer des pénalités plutôt que d’investir des femmes à la place des députés sortants. Dans le cadre de la réforme territoriale, des conseillers territoriaux doivent remplacer les conseillers généraux et les conseillers régionaux à partir de 2014. L’élection de ces nouveaux conseillers doit se faire au scrutin uninominal à deux tours. L’adoption de ce mode de scrutin fait craindre, notamment à l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes, un recul de la parité dans les assemblées locales.
Le Réseau du savoir électoral dresse une liste des arguments favorables et défavorables avancés à l’égard des quotas en faveur des femmes en politique :
Plusieurs arguments soutiennent
•
Ce sont dans les pays où des quotas (prévus par la loi ou optionnels) ont été adoptés qu’on a vu les plus grands progrès vers la représentation égale des deux sexes.
•
Certains estiment que le contrôle des partis par des hommes à tendance traditionaliste pose le plus grand obstacle à l’investiture et à l’élection de femmes candidates. L’inscription de quotas dans la loi permet de forcer la main de ces élites récalcitrantes.
•
On affirme parfois que si peu de femmes se lancent en politique, c’est en raison d’un manque d’exemples à suivre dans ce domaine. En permettant l’élection de quelques femmes, les quotas stimulent l’intérêt des femmes pour la politique.
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Pour des raisons liées à la tradition, aux habitudes ou aux réseaux, les comités d’investiture des partis, s’ils sont composés surtout d’hommes, choisissent en général moins de candidates que de candidats. Les quotas forcent les partis à trouver et à former de bonnes candidates – effort qu’ils ne feraient peut-être pas autrement.
•
Les femmes députées sont plus susceptibles que leurs collègues masculins de prôner des projets de loi qui supprimeront les obstacles à l’élection d’un plus grand nombre de femmes.
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Si on admet que tout pays compte autant de bonnes candidates potentielles que de bons candidats, il faut en déduire que la faible représentation des femmes est due à une discrimination structurelle. Les quotas ne sont donc pas eux-mêmes discriminatoires, mais corrigent plutôt une discrimination existante.
•
D’aucuns soutiennent que les quotas ne restreignent pas la liberté de choix des électeurs, mais l’augmentent au contraire en leur donnant la possibilité de voter aussi bien pour des femmes que pour des hommes.
Il y a en revanche des arguments
L’adoption de quotas profemmes est de plus en plus courante, mais elle reste hautement controversée. Qu’ils considèrent ou non que la représentation égale des hommes et des femmes soit souhaitable en soi, les opposants aux quotas avancent plusieurs arguments, dont les suivants.
•
Certains estiment que les quotas sont discriminatoires envers les hommes qui, sinon, auraient remporté les sièges. On peut répondre à cet argument que les quotas ne font que corriger une discrimination structurelle (voir ci-dessus).
•
Certains opposants à l’adoption de quotas prévus par la loi soutiennent que les femmes élues grâce à des quotas sont moins compétentes que les autres élus masculins, et que le faible nombre de femmes candidates découle surtout du moins grand bassin de candidates potentielles compétentes. Ces opposants perçoivent que les femmes désignées comme candidates ne le sont qu’en raison de leur sexe.
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Les femmes élues grâce à des quotas risquent d’être jugées moins compétentes que leurs collègues masculins; elles pourraient donc préférer être élues sans cette aide.
•
Pour certains, c’est la liberté de choix des électeurs qui est brimée lorsqu’un certain nombre de sièges sont réservés aux femmes à l’assemblée législative.
•
Selon certains, les quotas donnent l’impression que seules des femmes peuvent représenter les femmes, alors que les hommes, eux, peuvent représenter les deux sexes. Cette fausse impression nuirait aux femmes qui veulent être élues non pas parce qu’elles sont femmes, mais en raison de leurs idées.
•
D’aucuns croient que les quotas prévus par la loi profitent surtout aux épouses, filles, sœurs, cousines, etc., des politiciens traditionnels, et non à des femmes qui ont acquis leurs propres appuis.
•
L’inscription de quotas dans la loi peut être très ardue si le gouvernement ne jouit pas d’une forte majorité à l’assemblée législative. De ce point de vue, les quotas prévus par la loi ne peuvent pas vraiment avoir un impact révolutionnaire, puisqu’ils ne peuvent être adoptés que si la majorité des élus et des dirigeants politiques sont déjà engagés en faveur de l’égalité entre les sexes. Il peut donc être plus facile et tout aussi utile de faire pression pour que les partis adoptent volontairement leurs propres quotas.
•
Certains craignent que les quotas prévus par la loi soient vus comme le nombre maximal de femmes qu’il faut élire, et qu’ils empêchent ainsi la vraie parité.
•
Certains disent que les sièges réservés incitent les femmes à rivaliser les unes contre les autres au lieu de travailler ensemble à accroître leur influence politique.
A l’occasion de la journée de la femme et des élections départementales en mars dernier, la journaliste de France Bleu Alsace Aurélie Locquet revient sur la question des quotas : Pour ou contre les quotas de femmes en politique ?, dans un département traditionnellement défavorable aux femmes…
Toujours en mars 2015, l’Observatoire des inégalités précise que la représentation des femmes en politique est encore loin de l’égalité :
La loi de juin 2000 sur la parité a contribué à une meilleure représentation féminine dans les exécutifs nationaux et locaux. Mais seulement 26,9 % de femmes siègent à l’Assemblée nationale. Au rythme actuel de progression en nombre de sièges obtenus par les femmes, la parité devrait être atteinte…dans 25 ans. Au niveau local, seule une femme est à la tête d’une région, alors qu’elles représentent près de la moitié des conseillers de ces instances. 16 % des maires sont des femmes, et 14,6 % sont à la tête de communes de plus de 100 000 habitants.
Pour approfondir, nous vous conseillons d’explorer le site de l’Observatoire des inégalités, qui a notamment publié en 2014 une série d’analyses sur la représentation des femmes en politique aux différents niveaux :
- La représentation des femmes à l’Assemblée et au Sénat
- La représentation des femmes en politique au niveau local
- La part des femmes au parlement européen
- Femmes-hommes : penser l'égalité, sous la direction de Sandrine Dauphin et Réjane Sénac; Avec la participation de Marie Duru-Bellat, Elisabeth Elgàn, Maxime Forest, Maryse Jaspard...[et al.]
- Hommes-femmes : une impossible égalité professionnelle ? Dominique Meurs
- Femmes-hommes : enfin l'égalité ? sous la direction de Nathalie Pilhes et Gilles Pennequin
- Les discriminations entre les femmes et les hommes, sous la direction de Françoise Milewski, Hélène Périvier
- L'égalité professionnelle hommes-femmes dans la fonction publique : rapport au président de la République, par Françoise Guégot, députée de la Seine-Maritime
- Toutes les femmes ne viennent pas de Vénus ! : l'égalité aujourd'hui, Charlotte Lazimi
- L'égalité sous conditions : genre, parité, diversité, Réjane Sénac; préface de Janine Mossuz-Lavau; postface de Joan W. Scott
- La parité : une exigence !, Michelle Meunier; ouvrage dirigé par Rémi Raher
- Manuel de survie à destination des femmes en politique, Sandrine Rousseau; préface de Claire Serre-Combe; avant-propos de Clémentine Autain, Emmanuelle Cosse, Cécile Duflot,...[et al.]
Bonne journée.
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