Question d'origine :
D'ou provient le racisme , qui la mis en marche? pourquoi?
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 19/11/2015 à 11h16
Bonjour,
Dans racisme, une histoire, George M. Fredrickson s’intéresse aux origines du racisme et revient sur l’utilisation du mot « racisme », à savoir un terme utilisé de façon intuitive et assez vague pour désigner les préjugés hostiles à l’encontre d’un groupe humain et les comportements qui en découlent.
L’histoire du racisme n’est pas nouvelle et ce même si l’auteur signale qu’elle atteint son paroxysme au XXe siècle avec l’ascension et la chute des « régimes ouvertement racistes », qu’il s’agisse des lois ségrégationnistes dans le sud des Etats-Unis rendant impossible l’exercice du droit de vote pour les noirs, la persécution des juifs érigée en politique officielle par les nazis au cours des années 1930 ou le système d’apartheid mis en place en Afrique du Sud.
Mais, pour reprendre plus précisément à votre question, mentionnons certains passages de l’ouvrage. L’auteur relate que durant l’antiquité il n’existait pas de racisme tel qu’on l’entend aujourd’hui. Il note ainsi que les Grecs faisaient une distinction entre civilisés et barbares, mais n’accordaient manifestement pas un caractère héréditaire à ces catégories. On était civilisé si on avait la chance de vivre dans une cité-état et de participer à sa vie politique (…) A Rome, il y avait des esclaves d’autant de couleurs et de nationalités que l’on pouvait trouver aux marches de l’Empire, et des citoyens tout aussi divers parmi les hommes de condition libre qui proclamaient leur allégeance à la République ou à l’empereur.
C’est au XIIe et XIIIe siècles que l’on peut relever les fondements du racisme ; la haine des chrétiens d’Europe pour les juifs ne cessa de s’intensifier et posa les fondements du racisme tel qu’il se développerait plus tard. Jusque-là bien tolérés comme marchands et négociants internationaux, les juifs furent de plus en plus relégués par la concurrence commerciale (…) Toutefois, en cette époque d’intense religiosité, c’est surtout la menace spirituelle qu’ils étaient censés représenter qui déclencha les pires violences contre les Juifs. Lancée en 1066, la première croisade donna le signal des massacres (…) au XIIIe et XIVe siècle se développa une mythologie populaire qui allait permettre, au sens propre, de les diaboliser et, par ce biais , de les exclure de la communauté des hommes (…) De plus en plus souvent, les légendes, le folklore et l’iconographie associaient les Juifs et le diable ou les juifs et la sorcellerie .
(…)
La paranoïa collective est un trait spécifique du dénigrement des Juifs à travers les siècles, qu’on les accuse d’être des suppôts de Satan, des agents de la finance internationale ou de fomenter une révolution mondiale. De puissantespeurs irrationnelles n’ont pas joué un rôle aussi déterminant dans la radicalisation d’autres groupes humains.
(…) Selon l’historien Rober Bartlett, le racisme ou le protoracisme de la fin du Moyen Age ne visait pas que les Juifs, loin de là. Tandis que le catholicisme romain continuait à se répandre, à conquérir et à coloniser les marches du continent, se faisaient jour des sentiments de supériorité à l’égard des populations autochtones, sentiments annonciateurs des comportements de domination et d’appropriation qui marqueraient l’expansion ultérieure des Européens en Asie, en Afrique et dans les Amériques.
Le Dictionnaire des racismes, de l’exclusion et des discriminations propose également des réflexions sur l’émergence du racisme et la notion d’altérité
L’idée de l’autre étranger, objet de peur et de haine, est aussi vieille que l’humanité. L’hétérophobie telle que l’a définie Albert Memmi est inhérente à son histoire. Une histoire inexorablement ponctuée de tentatives et de mises à l’écart de cet Autre, diversement désigné, ou carrément de son expulsion du corps social, comme si, à chaque fois, l’identité même de ce corps social et sa pérennité étaient en jeu.
En Occident chrétien, au Moyen Age et jusqu’au débat des temps modernes, la religion est grande partie garante de la cohésion sociale et l’Autre de l’intérieur est d’abord souvent un Autre religieux. Au différend proprement théologique peuvent se combiner les motifs politiques, ainsi lors de la croisade contre les Albigeois à partir de 1209, du combat contre les hussites entre 1419 et 1436 ou encore des guerres dites de religions, qui opposent en France catholiques et protestants entre 1562 et 1598. cet Autre-là, violemment combattu, est aussi et surtout, en l’occurrence , un adversaire politique.
C’est une altérité d’un autre type, souvent d’ailleurs tolérée, mais symboliquement essentielle, qu’incarnent, par excellence, les Juifs. Par leur statut, leur nombre et leur dispersion, ils ne représentent aucun danger réel, mais ils sont associés à une « étrangeté » qui, dans certains contexte de rechristianisation ou de crise profonde les fait paraître inquiétants et indésirables
(…) En terre européenne, avec la « reconquête » catholique de l’Espagne, qui s’intensifie au XIIe siècle, le musulman de l’intérieur devient à son tour un Autre dont la condition se rapproche beaucoup de celle du juif, plus ou moins toléré. Conversions forcées, expulsions, persécutions ont un lot partagés par les deux communautés …
Nous vous laissons également consulter des réponses précédentes apportées sur Racisme, xénophobie, antisémitisme, race et lire notre points d’actu Tous immigrés !
En complément, nous vous suggérons aussi de parcourir le Dictionnaire historique et critique du racisme sous la direction de Pierre-André Taguieff et de naviguer sur le
Portail national des professionnels de l'éducation qui recense diverses ressources disponibles pour comprendre et discuter du racisme.
Dans racisme, une histoire, George M. Fredrickson s’intéresse aux origines du racisme et revient sur l’utilisation du mot « racisme », à savoir un terme utilisé de façon intuitive et assez vague pour désigner les préjugés hostiles à l’encontre d’un groupe humain et les comportements qui en découlent.
L’histoire du racisme n’est pas nouvelle et ce même si l’auteur signale qu’elle atteint son paroxysme au XXe siècle avec l’ascension et la chute des « régimes ouvertement racistes », qu’il s’agisse des lois ségrégationnistes dans le sud des Etats-Unis rendant impossible l’exercice du droit de vote pour les noirs, la persécution des juifs érigée en politique officielle par les nazis au cours des années 1930 ou le système d’apartheid mis en place en Afrique du Sud.
Mais, pour reprendre plus précisément à votre question, mentionnons certains passages de l’ouvrage. L’auteur relate que durant l’antiquité il n’existait pas de racisme tel qu’on l’entend aujourd’hui. Il note ainsi que les Grecs faisaient une distinction entre civilisés et barbares, mais n’accordaient manifestement pas un caractère héréditaire à ces catégories. On était civilisé si on avait la chance de vivre dans une cité-état et de participer à sa vie politique (…) A Rome, il y avait des esclaves d’autant de couleurs et de nationalités que l’on pouvait trouver aux marches de l’Empire, et des citoyens tout aussi divers parmi les hommes de condition libre qui proclamaient leur allégeance à la République ou à l’empereur.
C’est au
(…)
La paranoïa collective est un trait spécifique du dénigrement des Juifs à travers les siècles, qu’on les accuse d’être des suppôts de Satan, des agents de la finance internationale ou de fomenter une révolution mondiale. De puissantes
(…) Selon l’historien Rober Bartlett, le racisme ou le protoracisme de la fin du Moyen Age ne visait pas que les Juifs, loin de là. Tandis que le catholicisme romain continuait à se répandre, à conquérir et à coloniser les marches du continent, se faisaient jour des sentiments de supériorité à l’égard des populations autochtones, sentiments annonciateurs des comportements de domination et d’appropriation qui marqueraient l’expansion ultérieure des Européens en Asie, en Afrique et dans les Amériques.
Le Dictionnaire des racismes, de l’exclusion et des discriminations propose également des réflexions sur l’émergence du racisme et la notion d’altérité
L’idée de l’autre étranger, objet de peur et de haine, est aussi vieille que l’humanité. L’hétérophobie telle que l’a définie Albert Memmi est inhérente à son histoire. Une histoire inexorablement ponctuée de tentatives et de mises à l’écart de cet Autre, diversement désigné, ou carrément de son expulsion du corps social, comme si, à chaque fois, l’identité même de ce corps social et sa pérennité étaient en jeu.
En Occident chrétien, au Moyen Age et jusqu’au débat des temps modernes, la religion est grande partie garante de la cohésion sociale et l’Autre de l’intérieur est d’abord souvent un Autre religieux. Au différend proprement théologique peuvent se combiner les motifs politiques, ainsi lors de la croisade contre les Albigeois à partir de 1209, du combat contre les hussites entre 1419 et 1436 ou encore des guerres dites de religions, qui opposent en France catholiques et protestants entre 1562 et 1598. cet Autre-là, violemment combattu, est aussi et surtout, en l’occurrence , un adversaire politique.
C’est une altérité d’un autre type, souvent d’ailleurs tolérée, mais symboliquement essentielle, qu’incarnent, par excellence, les Juifs. Par leur statut, leur nombre et leur dispersion, ils ne représentent aucun danger réel, mais ils sont associés à une « étrangeté » qui, dans certains contexte de rechristianisation ou de crise profonde les fait paraître inquiétants et indésirables
(…) En terre européenne, avec la « reconquête » catholique de l’Espagne, qui s’intensifie au XIIe siècle, le musulman de l’intérieur devient à son tour un Autre dont la condition se rapproche beaucoup de celle du juif, plus ou moins toléré. Conversions forcées, expulsions, persécutions ont un lot partagés par les deux communautés …
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