Question d'origine :
Bonjour,
Je voudrais savoir pourquoi avoir un entonnoir sur la tête est un symbole de débilité.
Cordialement,
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 23/11/2015 à 14h27
Bonjour,
La représentation du fou avec un entonnoir renversé sur la tête nous vient du Moyen-âge. A l’époque, l’entonnoir représentait la transmission du savoir, le mettre à l’envers s’opposait donc au savoir mais les sens donnés à l’entonnoir étaient plus variés.
Le Guichet du savoir avait répondu à cette question en 2012 : Représentation du fou. L’origine de cette représentation est attribuée à Jérôme Bosch, peintre néerlandais des XVe et XVIe siècles dont les tableaux avaient souvent pour thème la folie.
L’un de ces premiers tableaux utilisant l’entonnoir, L’extraction de la Pierre de Folie, montre un homme portant un entonnoir renversé opérant un paysan qui s’estime fou. C’est le « chirurgien » qui porte l’entonnoir et non le fou, l’entonnoir représenterait plutôt la duperie que la folie.
Le site Etaletaculture montre les différents sens qui ont pu être attribué à l’entonnoir par Jérôme Bosch dans ses œuvres :
« L’entonnoir, on le retrouve également, toujours chez Jérôme Bosch, dans Le Concert dans l’œuf, tableau étrange et allégorique. Ici, c’est sur la tête d’un personnage face au spectateur. Ici encore, la tromperie est présente dans tout le tableau! Le moine, tout d’abord, pointe le doigt vers une partition. Façon de recentrer ses camarades sur des cantiques religieux? Non! Il s’agit en réalité d’une chanson paillarde bien connue de l’époque… Lui-même se fait de toute façon berner par un voleur en train de lui dérober sa bourse…
Ici encore, l’entonnoir servant de chapeau ne symbolise pas la folie, mais plutôt la tromperie… à moins que le peintre n’ait voulu illustrer un proverbe de l’époque « boire comme un entonnoir »?
[…]
Bon, c’est bien beau tout ça, mais le tableau de Jérôme Bosch fourmille comme toujours de détails. Parmi eux, distinguons cet étrange oiseau coiffé d’un entonnoir. On peut considérer qu’il s’agit là encore d’un symbole de tromperie… Selon certains spécialistes, les documents qu’il transporte dans le bec sont un faux témoignage contre Saint-Antoine pour le vouer à la damnation. […] »
Le sens donné à l’entonnoir a donc évolué au cours du temps, il est passé de la tromperie à la folie.
Le symbole de l’entonnoir serait aussi passé du psychiatre au fou. On peut effectivement imaginer que le « chirurgien » du tableau L’extraction de la Pierre de Folie, ôte la folie du patient, il le soigne comme le fait le psychiatre qui soigne le fou. La revue TDC dans son article La folie entre Moyen-âge et Renaissance présente aussi cette hypothèse :
« La pierre de folie
Dans le tableau de Jérôme Bosch (1450-1516), L’Extraction de la pierre de folie, un homme coiffé d’un entonnoir, symbole non pas de folie mais de tromperie, est assisté de deux personnages : un religieux tenant une fiole à la main et une femme avec un livre sur la tête qui symbolise la connaissance. Une fleur, proche de la tulipe, est extraite du crâne du patient, tandis qu’une autre, déposée sur une table, vient sans doute d’en être retirée. Une inscription accompagne l’image : Meester snijt die keie ras, Mijne name is Lubbert Das. Elle peut être traduite par : « Maître, opérez-moi promptement de la pierre, mon nom est Lubbert Das. » Plusieurs gravures et tableaux de l’école flamande du XVe au XVIIe siècle représentent des opérations pratiquées sur le crâne humain par un chirurgien, ou un barbier-chirurgien, tentant d’extraire un corps étranger d’aspect minéral du cerveau pour guérir de la folie. L’observation de tumeurs calcifiées peut être à l’origine de la pierre de folie. Mais ces images évoquent davantage l’action d’un charlatan qu’une véritable intervention chirurgicale. Même si la trépanation était une opération pratiquée à l’époque de Bosch, elle n’est pas représentée ici. Le ton du tableau est allégorique, voire satirique, et l’on peut considérer cette œuvre comme un contrepoint à la Nef des fous du musée du Louvre. […] »
Le « chirurgien » enlève la « pierre de folie » se trouvant dans le crâne du malade, il cherche à le soigner comme le psychiatre le fait, l’entonnoir aurait représenté le psychiatre puis par assimilation à celui du fou.
L’origine de l’utilisation de l’entonnoir pour représenter la folie n’est donc pas précise même si l’on connaît le premier peintre à l’avoir utilisée. Il est complexe de retrouver le sens qu’a voulu donner un artiste à un œuvre.
Pour en savoir plus :
- Folie, politique et psychiatrie, le moment révolutionnaire 1789-1840, une émission de France Inter.
- Jheronimus Bosch : l'oeuvre complet, Stefan Fischer.
- Jérôme Bosch vers 1450-1516 : entre le ciel et l'enfer, Walter Bosing.
Bonne journée.
La représentation du fou avec un entonnoir renversé sur la tête nous vient du Moyen-âge. A l’époque, l’entonnoir représentait la transmission du savoir, le mettre à l’envers s’opposait donc au savoir mais les sens donnés à l’entonnoir étaient plus variés.
Le Guichet du savoir avait répondu à cette question en 2012 : Représentation du fou. L’origine de cette représentation est attribuée à Jérôme Bosch, peintre néerlandais des XVe et XVIe siècles dont les tableaux avaient souvent pour thème la folie.
L’un de ces premiers tableaux utilisant l’entonnoir, L’extraction de la Pierre de Folie, montre un homme portant un entonnoir renversé opérant un paysan qui s’estime fou. C’est le « chirurgien » qui porte l’entonnoir et non le fou, l’entonnoir représenterait plutôt la duperie que la folie.
Le site Etaletaculture montre les différents sens qui ont pu être attribué à l’entonnoir par Jérôme Bosch dans ses œuvres :
« L’entonnoir, on le retrouve également, toujours chez Jérôme Bosch, dans Le Concert dans l’œuf, tableau étrange et allégorique. Ici, c’est sur la tête d’un personnage face au spectateur. Ici encore, la tromperie est présente dans tout le tableau! Le moine, tout d’abord, pointe le doigt vers une partition. Façon de recentrer ses camarades sur des cantiques religieux? Non! Il s’agit en réalité d’une chanson paillarde bien connue de l’époque… Lui-même se fait de toute façon berner par un voleur en train de lui dérober sa bourse…
Ici encore, l’entonnoir servant de chapeau ne symbolise pas la folie, mais plutôt la tromperie… à moins que le peintre n’ait voulu illustrer un proverbe de l’époque « boire comme un entonnoir »?
[…]
Bon, c’est bien beau tout ça, mais le tableau de Jérôme Bosch fourmille comme toujours de détails. Parmi eux, distinguons cet étrange oiseau coiffé d’un entonnoir. On peut considérer qu’il s’agit là encore d’un symbole de tromperie… Selon certains spécialistes, les documents qu’il transporte dans le bec sont un faux témoignage contre Saint-Antoine pour le vouer à la damnation. […] »
Le sens donné à l’entonnoir a donc évolué au cours du temps, il est passé de la tromperie à la folie.
Le symbole de l’entonnoir serait aussi passé du psychiatre au fou. On peut effectivement imaginer que le « chirurgien » du tableau L’extraction de la Pierre de Folie, ôte la folie du patient, il le soigne comme le fait le psychiatre qui soigne le fou. La revue TDC dans son article La folie entre Moyen-âge et Renaissance présente aussi cette hypothèse :
« La pierre de folie
Dans le tableau de Jérôme Bosch (1450-1516), L’Extraction de la pierre de folie, un homme coiffé d’un entonnoir, symbole non pas de folie mais de tromperie, est assisté de deux personnages : un religieux tenant une fiole à la main et une femme avec un livre sur la tête qui symbolise la connaissance. Une fleur, proche de la tulipe, est extraite du crâne du patient, tandis qu’une autre, déposée sur une table, vient sans doute d’en être retirée. Une inscription accompagne l’image : Meester snijt die keie ras, Mijne name is Lubbert Das. Elle peut être traduite par : « Maître, opérez-moi promptement de la pierre, mon nom est Lubbert Das. » Plusieurs gravures et tableaux de l’école flamande du XVe au XVIIe siècle représentent des opérations pratiquées sur le crâne humain par un chirurgien, ou un barbier-chirurgien, tentant d’extraire un corps étranger d’aspect minéral du cerveau pour guérir de la folie. L’observation de tumeurs calcifiées peut être à l’origine de la pierre de folie. Mais ces images évoquent davantage l’action d’un charlatan qu’une véritable intervention chirurgicale. Même si la trépanation était une opération pratiquée à l’époque de Bosch, elle n’est pas représentée ici. Le ton du tableau est allégorique, voire satirique, et l’on peut considérer cette œuvre comme un contrepoint à la Nef des fous du musée du Louvre. […] »
Le « chirurgien » enlève la « pierre de folie » se trouvant dans le crâne du malade, il cherche à le soigner comme le psychiatre le fait, l’entonnoir aurait représenté le psychiatre puis par assimilation à celui du fou.
L’origine de l’utilisation de l’entonnoir pour représenter la folie n’est donc pas précise même si l’on connaît le premier peintre à l’avoir utilisée. Il est complexe de retrouver le sens qu’a voulu donner un artiste à un œuvre.
Pour en savoir plus :
- Folie, politique et psychiatrie, le moment révolutionnaire 1789-1840, une émission de France Inter.
- Jheronimus Bosch : l'oeuvre complet, Stefan Fischer.
- Jérôme Bosch vers 1450-1516 : entre le ciel et l'enfer, Walter Bosing.
Bonne journée.
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