Question d'origine :
Bonjour.
Je prépare un histoire des arts et j'aimerai récolter un maximum d'information sur les photographies qui s'intitule "The Last Resort" de Martin Parr.
Si vous pouviez m'indiquer des sites qui décrit chaques photographies, j'aimerai aussi avoir des références à des articles, revues, livres, etc..
Et sur la symbolique de ces photographies.
Merci d'avance.
Réponse du Guichet
bml_art
- Département : Arts et Loisirs
Le 02/03/2016 à 11h19
Nous vous rappelons que l’épreuve d’Histoire des arts est une épreuve orale, au cours de laquelle les professeurs vont tester les connaissances que vous possédez, mais aussi votre capacité à les exploiter. Ils examineront ce que vous avez recueilli comme informations déjà toutes faites, mais aussi ce que vous aurez cherché par vous-mêmes, ce que vous aurez assimilé.
On vous demande de :
Situer l’œuvre dans le temps, dans l’espace et dans son contexte historique, social ou artistique
Analyser l’œuvre : description, techniques, signification, publics visés.
Employer un vocabulaire adapté
Comparer et rapprocher l’œuvre d’autres références artistiques
Être capable d’introduire un jugement personnel et critique
Construire un exposé cohérent et clair, qui respecte le temps imparti
Répondre judicieusement aux questions posées et argumenter.
Nous vous proposons un certain nombre de références à consulter en lien direct avec l’œuvre choisie, ainsi que certains points, plus contextuels, sur lesquels pourrait se porter votre curiosité.
Un très bon résumé de la vie et de l’œuvre de Martin Parr figure dans l’introduction du livre Martin Parr / Sandra S. Phillips :
« Martin Parr appartient à cette catégorie de photographes qui prennent plaisir à examiner les détails, tout en proposant une vision plus globale de la société. Il est l'un des grands observateurs de notre société. Son travail peut être incisif, mais jamais cruel ; il se nourrit de toutes les déceptions que nous, les sujets de ces images, lui infligeons. Fasciné par notre espèce si curieuse, son regard subtil et amusé, s'est posé, au cours des trente dernières années, sur les us et coutumes des Européens dont la culture est en pleine mutation. Il a également étudié les effets de la mondialisation sur les comportements, et leur évolution à travers le monde. »
« Né en 1952, Martin Parr affirme avoir toujours su qu'il deviendrait photographe. George Parr, son grand-père, était un amateur éclairé… C'est avec ses encouragements que Martin Parr, alors âgé de seize ans, réalise une série de photographies d'une célèbre boutique de fish and chips dans le Yorkshire, où vivait George Parr…
Martin Parr ne s'est jamais vraiment investi dans ses études, mais il devient très tôt un collectionneur passionné de photographie contemporaine. En 1970, il intègre Manchester Polytechnic pour y étudier la photographie…
Avant d'entrer à Manchester Polytechnic, Martin Parr a également visité une exposition de Bill Brandt à Londres et une rétrospective de l'œuvre d'Henri Cartier-Bresson au Victoria and Albert Museum. Hormis ces quelques événements, « la Grande-Bretagne dormait sur le plan photographique », déclare-t-il.
Celui qui a le plus influencé Martin Parr est, de son propre aveu, l’Anglais Tony Ray-Jones, qui a photographié Américains et Anglais dans des situations quotidiennes cocasses, voire embarrassantes…
Les images de Ray-Jones, influencées par la photographie américaine, qu'il contribue à introduire en Angleterre, ont beaucoup compté pour Martin Parr, qui observe la société en s'inspirant de ce regard, y décelant les véritables ambiguïtés de la vie contemporaine. Dans l'œuvre de Ray-Jones, Martin Parr a trouvé une tension entre tradition et modernité et une vision de la distance qui peut séparer les êtres.
C'est dans les années 1960 que la photographie américaine amorce sa mutation, bien qu'elle n'intéresse et n'affecte que peu de monde, même à New York. Ses nouvelles figures bénéficient du soutien d'un défenseur averti et acharné : John Szarkowski, conservateur du département photographie du Museum of Modern Art, à New York. En 1967, il organise New Documents, une exposition réunissant des œuvres de Diane Arbus, Lee Friedlander et Garry Winogrand, artistes émergents auquel son nom restera associé. D'après lui, ces œuvres se distinguent de la tradition documentaire du passé, qui se mettait au service d'un idéal social dans le but de transformer les mentalités et de réparer un mal. « Au cours de la dernière décennie, une nouvelle génération de photographes a orienté l'approche documentaire vers des objectifs plus personnels, déclare Szarkowski. Leur but n'est pas de changer la vie, mais de la connaître. Leur œuvre trahit de la compassion, presque de l'affection, pour les imperfections et les fragilités de la société. En dépit de ses horreurs, ils aiment le monde réel en tant que source de tout émerveillement, fascination et valeur, et ne le trouvent pas moins précieux car il est irrationnel. »…
Avant même d’entrer à l'école, Martin Parr a lu dans Creative Camera que le livre de Robert Frank, Les Américains (1959), est sans doute « le plus célèbre essai sur la photographie jamais réalisé ». Bill Jay partage cette opinion. C'est ainsi que Martin Parr, avec ses camarades étudiants dévore l'ouvrage pratiquement inconnu des enseignants. Dans le même temps, il se lance dans la photographie locale et la culture prolétarienne, allant jusqu'à travailler au centre de vacances de Butlin, dans l'est du Yorkshire, où il photographie les vacanciers. C'est là-bas qu'il découvre les cartes postales réalisées par la société de John Hinde...
Martin Parr est, en outre, devenu un
En fait, il a dépassé l'impressionnante et immense collection de cartes postales de Walker Evans en publiant trois volumes intitulés, non sans ironie, Boring Postcards (1999-2001). En 1989, à la mort de son père, son héritage lui permet d'acheter le livre de Bill Brandt, The English at Home (1936), étude approfondie de la société anglaise d'avant-guerre. Depuis, Martin Parr est un collectionneur expert et passionné de livres de photographie. En cosignant un ouvrage ambitieux, en deux volumes, Le livre de photographies : une histoire il a contribué à faire de ce genre un art à part entière et a ancré la notoriété de cette forme d'art jusque-là quasiment ignorée. Toutes les facettes de son art témoignent de la conviction de Martin Parr que la photographie est un élément culturel essentiel, à la fois témoignage et analyse de notre style de vie. »
« En 1982, Martin Parr rentre en Angleterre et s'installe près de Liverpool. Le passage à la couleur est un tournant majeur dans son oeuvre. Comme plusieurs de ses contemporains américains, il opte pour un Plaubel Makina de moyen format, appareil souple et léger, qui procure sur les négatifs les mêmes informations qu'un appareil classique. Martin Parr recourt aussi plus souvent au flash pour combler les zones d'ombre, même par soleil, et s'équipe d'un objectif grand-angle. Il s'intéresse en outre à William Eggleston, non seulement pour son utilisation innovante de la couleur, mais pour sa façon de photographier la culture du Sud profond américain, sa riche histoire, triste et ambiguë, avec une sorte de malaise ou d'insouciance…
Comme il l'a déjà fait, Martin Parr emploie pour certaines de ces photographies un objectif grand-angle et un flash de complément. Le flash tend à mettre en relief une silhouette et à donner une image plus générale, mais ajoute aussi une dimension psychologique aux images en soulignant un déséquilibre ou une distance.
Tenu à hauteur de la taille, le grand-angle attire l'attention sur le centre absolu de l'image. »
« À son retour, Martin Parr constate un bouleversement culturel en Angleterre. Les vieilles traditions immortalisées sur ses premières images cèdent la place à une activité culturelle de masse et une économie agressive instaurée par le gouvernement de Margaret Thatcher. L'un des changements les plus spectaculaires aux yeux de Martin Parr, réside dans l'alimentation, désormais produite massivement et vendue dans d'immenses supermarchés. Martin Parr étudie les changements dans la vie des gens ordinaires en observant les lieux où les liens communautaires perdurent. Dans son ouvrage The Last Resort (La dernière station balnéaire, 1986), un aspect incisif inédit apparaît dans ses images : on y voit des enfants dévorant des cochonneries et des familles prenant le soleil, sur une plage de galets jonchée de détritus (nos 11, 12, 13) ou près d'une autochenille abandonnée, l'objectif grand-angle capturant la totalité de la scène. Les gens semblent inquiets ou pleins d'ennui, les enfants sont souvent turbulents, voire vulgaires. Il s'agit là de photographie documentaire sociale classique, témoignant d'un changement dans la société et de l'adoption des biens matériels comme valeur. Mais les photographies de Martin Parr ne sont pas seulement critiques. En 1986, lors d'un voyage à Dublin, il est témoin de la prospérité qui permet aux Irlandais de profiter de ce qu'ils n'ont jamais vu dans leur pays auparavant : du homard et de la viande rouge en abondance au supermarché (n°15). Ces transformations essentielles, presque éblouissantes, sont parfaitement rendues par l'emploi de la couleur et d'un appareil de moyen format…
Cost of Living (Le coût de la vie, 1989), le livre suivant de Martin Parr, propose un regard sur les membres de sa propre classe, qui bénéficie de la nouvelle économie monétaire de Thatcher, et montre un intérêt, sinon un véritable engagement, envers la doctrine des biens matériels… Dans ces images, la distance, l'isolement et l'égocentrisme priment sur le lien communautaire et l'intégration…
Il commence à voyager à la fin des années 1970, mais ce n'est qu'en 1986, lorsqu'une exposition lui est consacrée aux Rencontres internationales de la photographie d'Arles qu'il acquiert une reconnaissance internationale. Grâce à cette présence plus étendue, il se lance dans l'étude du devenir de la culture européenne dans le monde, en se concentrant sur le voyage, le tourisme et les loisirs. Il étudie et s'approprie notamment les formes vernaculaires de photographie employées pour les souvenirs touristiques : la carte postale et le cliché d'amateur… Avec ses couleurs saturées, la blancheur irréelle du sable et les nombreux baigneurs, cette photographie apparaît comme une plaisanterie et un commentaire sur une réalité fantasmée : nous rêvons désormais tous des mêmes choses, à quelques variantes près selon les pays. Depuis les années 1990, Martin Parr a su adapter, de façon experte et imaginative, les couleurs vives et éléments idéalisés des cartes postales traditionnelles.
Quel monde ! sort en 1995. L'ouvrage est consacré au tourisme international. L'introduction souligne que, si l'industrie du tourisme était un pays, ce serait le troisième plus grand du monde. Martin Parr s'y montre attentif aux conventions et aux maladresses des photographies touristiques… La photographie (et le fait de prendre la photographie) fait partie intégrante de la cérémonie de la visite car elle constitue une trace de ce qui est arrivé, qui soulage le visiteur de l'inconnu lui-même. »
En 1993, Martin Parr découvre Shokuji (« Le banquet »,1993), superbe ouvrage de Nobuyoshi ArakiNobuyoshi Araki entièrement constitué de photographies d'aliments en gros plan, qu'il a trouvé dans une pile de livres lors d'un voyage au Japon… Shokuji incite Martin Parr à étudier les aliments selon ses propres critères, en révélant ses propres goûts.
Ses images d'aliments parlent de ceux qui les mangent, de ce que cela révèle sur la nourriture en tant que produit et en tant qu'élément d'un système multinational. Martin Par achète un objectif macro, du genre de ceux employés en photographie médicale et, avec un flash, il se met à photographier de près ce que mangent les Britanniques et le reste du monde.
Ces images sont d'abord réunies dans British Food (Nourriture de Grande-Bretagne, 1995), avant de rejoindre son ouvrage sur le consumérisme mondial, Common Sense (Sens commun), en 1999. Elles nous montrent ce que nous sommes devenus en mangeant ce que nous mangeons. Elles sont effrayantes : comment les gens peuvent-ils consommer des aliments aussi grotesques, maltraiter leur corps à ce point, avec un tel mauvais goût et à si bas prix ? Nous nous sommes habitués au sucre et au gras bon marché, et nous préférons la malbouffe industrielle aux produits artisanaux. Jamais Martin Parr n'avait approché la haine de si près. »
Un site de photographie Lense attire l’attention sur quelques jalons indispensable à connaître pour appréhender la démarche de Martin Parr.
Deux autres ouvrages indispensables à consulter :
Martin Parr / Val Williams
Ouvrage rétrospectif complet qui présente toutes les facettes de Martin Parr, du photographe documentaire à celles de collectionneur d’objets, de livres, d’éditeur, de commissaire d’exposition, d’animateur de blog.
« En 1992, parlant de « The Last Resort » il remarque : « Effectivement, je m'intéresse moins au fait que ces gens ne sont pas à l'aise financièrement qu'au fait qu'ils doivent s'occuper de leurs gosses hurlants, comme tout le monde. Les classes moyennes, à moins d'être tellement fauchées qu'elles restent cloîtrées et ne voient pas leurs gosses, ont à gérer les mêmes problèmes que les autres - vous savez, le bébé qui n'arrête pas de pleurer. Et c'est ça qui me pousse, bien plus que le refus de représenter la classe ouvrière dans un quartier très délabré de Liverpool.
Je suis heureux de montrer un quartier délabré parce que je veux aussi travailler à un autre niveau, montrer comment la société britannique est en voie de décomposition, comment cette société, autrefois si solide, est en train de s'effondrer.
Le travail à New Brighton, par exemple, fonctionne ainsi. Tout d'abord on gère ses propres impressions concernant, premièrement, les relations des gosses avec leurs parents et avec les adultes présents, la raison pour laquelle les gens vont au bord de la mer. Deuxièmement, on observe les aspects sociologiques, ce qui, je pense, ne me pose pas de problème même si je reconnais que ce n'est pas le cas de tout le monde. Et, troisièmement, on examine les aspects plus larges de décomposition des structures d'une société, notre supposée société d'abondance. Ainsi, de nombreux aspects se conjuguent pour que l'ensemble fonctionne [ ... ].
[À New Brighton] je cherchais les vulnérabilités qu'on peut ressentir dans un lieu public. Si cela ne fait pas mal, s'il n'y a pas de vulnérabilité, je ne pense pas qu'on puisse faire de bonnes photographie »
… Qu'est-ce qui a tant terrifié et écœuré les critiques dans « The Last Resort ? »Indéniablement, il y a des ordures mais jamais jusqu'au cou, et si quelques personnes sont grasses, elles ne sont ni gargantuesques ni majoritaires. Il y a des bébés -qui gazouillent et semblent bien s'amuser, mangeant, buvant, et souriant, même, beaucoup de très jolies femmes participant à des concours de beauté, dansant, prenant le soleil, parlant à d'autres femmes. Il y a des familles qui souffrent peut-être du « thatcherisme » mais qui parviennent encore à profiter d'un jour de congé. Il y a des gens qui paraissent ridicules dans leurs maillots de bain, mais Parr n'a jamais été un photographe de mode. Et-oui c'est le genre d'endroit défraîchi et pelé, mais alors une grande partie de l'Angleterre est défraîchie et pelée. Cela dégoûte David Lee et fait une peur bleue à Robert Morris, mais « The Last Resort » n'a rien d'effrayant ni d'écœurant, ni même de très polémique. C'est drôle, touchant, intelligemment vu, vivant et énergique. Ce n'est pas ce que les journalistes voulaient que cela fût, ni ce qu'ils ont dit que c'était. Ce n'est en aucune façon une condamnation du « thatcherisme », mais plutôt un regard particulier. Il n'y a aucun cynisme, juste de l'intérêt, de l'excitation et un vrai sens de la comédie. Malgré tout ce que Parr affirme au sujet de la vulnérabilité qu'il aime capter, personne dans « The Last Resort » ne semble particulièrement vulnérable. Beaucoup même sourient et la plupart des autres dorment, s'abritent de la pluie, fument, mangent ou regardent simplement leurs enfants. Quelques-uns, néanmoins, paraissent s'ennuyer mais, après tout, les excursions d'une journée peuvent être ennuyeuses…
Quant à Parr, Il n'a jamais considéré « The Last Resort » comme directement politique. Jeune père, il est fasciné par les bébés et la famille tout comme, quand il fait « Love Cubes », Il est captivé par les couples ou, quand il s'installe dans un quartier respectable de Bristol en 1987, il est intrigué par les rituels de la classe moyenne. En tant qu'Anglais en Irlande, il s'intéresse à la spécificité des gens et des lieux, à la construction d'imposants pavillons à portiques et à la vente aux enchères d'un champ de foin. Si son travail est sujet à controverse, c'est peut-être parce que nous croyons trop au pouvoir de la photographie, parce que nous sommes terrorisés par l'idée du chaos social, ou parce ce que nous haïssons ceux qui donnent des garden parties, font des petits pots de crème au citron pour un concours de confiture ou chantent des cantiques de Noël les uns chez les autres.
La photographie de Parr est gênante car, par de nombreux aspects, elle fait ressortir ce qu'il y a de pire en nous. Elle nous rend méprisants ou ridicules, snobs ou cyniques. Ses photographies sont en quelque sorte une farce, apparemment inoffensive, destinée à nous duper nous-mêmes. Dans son projet majeur suivant, Parr jouera le bouffon à la cour du consumérisme avec une réelle espièglerie. »
Le mélange des genres / Martin Parr ; entretien avec Quentin Bajac
Martin Parr s’exprime lui-même dans ses entretiens avec Quentin Bajac, sur sa carrière et sur la série en question.
« … Nous avons fini par nous installer à Liverpool, où Susie s'était vu offrir un travail, à un mile et demi de la route qui mène à New Brighton. J'avais déjà fait des photographies en noir et blanc à New Brighton, vers 1975-1976, j'avais emporté mon appareil alors que j'étais en voyage et je m'étais dit: « Wow, j'adore cet endroit ! »
J'aimais beaucoup l'ambiance qu'on y trouvait. C'est plutôt miteux mais en même temps plein d'énergie et on s'y sent bien. Et je me souviens d'y être retourné par la suite, lorsque nous sommes allés visiter en 1978 la grande exposition de la Walker Art Gallery de Liverpool dont le titre était 23 photographers/23 directions - dans laquelle, soit dit en passant, ne figurait aucun photographe britannique - et qui fut une exposition importante au Royaume-Uni. Je me souviens qu'au cours de ce voyage depuis Hebden Bridge, nous nous étions arrêtés à New
Brighton que nous avions trouvée formidable. J'étais donc pleinement conscient, lorsque nous nous sommes installés à Liverpool, que New Brighton pouvait être un endroit parfait pour mener un travail plus sérieux. J'ai commencé à me servir du flash de mon nouvel appareil, à me familiariser avec son fonctionnement, et me suis rendu sur place pendant trois étés consécutifs, de 1983 à 1985… Je savais juste qu'il y avait là d'énormes possibilités, surtout pour qui souhait ne pas perdre son temps entre 11 et 15 heures, quand le soleil est haut dans le ciel, moment où traditionnellement on ne prend pas de photo. On préfère généralement les prendre avant ou après. Mais pourquoi perdre tout ce temps, alors qu'en plus c'est généralement le moment de plus forte activité. En supprimant les ombres, on peut non seulement obtenir des effets très intéressants mais on peut aussi travailler davantage dans la journée, même en plein soleil quand les contrastes sont très marqués. Il y avait donc un certain nombre de possibilités dont j'étais bien conscient en commençant à travailler au flash. Et après l'expérience
Bad Weather, je savais que j'aimais vraiment certaines des façons dont la lumière du flash transforme une photographie. Cela lui donne un vrai tranchant…
… J'avais dans les années soixante-dix utilisé la couleur pour faire des photographies de supermarchés et j'avais à cette occasion pu juger combien le sujet était intéressant. J'avais réalisé un de mes premiers projets, dans un lieu appelé Prescott, en noir et blanc même si, au plus profond de moi, j'avais vaguement conscience que pour lui conférer une véritable portée critique il aurait fallu utiliser la couleur. Le noir et blanc célèbre la vie, alors que je souhaitais davantage insuffler une dimension critique. Ce que j'avais fait en couleurs sur les bungalows en Irlande avait déjà une dimension critique. Il était absolument inévitable que le langage utilisé et la portée critique que je souhaitais conférer à mes images s'accordent.
Parce que New Brighton était un travail politique. Pendant ses années de gouvernement, Thatcher n'a cessé d'affirmer la grandeur de l'Angleterre, ce qui, vu de Liverpool, une des villes les plus pauvres et miteuses du pays, était encore plus choquant. Et pourtant dans ce décor minable, les gens se livraient à des activités domestiques, allaient à la plage, jouaient avec les gosses, mangeaient des glaces, toutes les occupations habituelles des bords de mer. C'était justement ce contraste que je souhaitais souligner…
… C'est toujours comme ça que je me définis : un photographe documentaire. Je dis toujours d'abord « photographe » qui est le plus important, et puis ensuite il faut bien définir le genre ou la pratique. Et le terme « documentaire » est vraiment celui dont je me sens le plus proche. L'essentiel de mon but est de capter, de comprendre, d'interpréter par la photographie les évolutions du monde contemporain. »
Le site officiel de Martin Parr, où l’auteur anime un blog.
Le site officiel de l’agence Magnum dont Martin Parr est membre.
Viva, une alternative à Magnum ?, signé par Aurore Deligny, sur le site de la revue Etudes photographiques, décrit l’ambition, le fonctionnement et la situation économique préoccupante d’agences de photo, dont Magnum.
Nous pensons qu’il serait souhaitable également d’examiner la confrontation de l’oeuvre de Martin Parr avec celles de trois autres artistes qui la rejoignent sur certains aspects :
Diane Arbus : elle a utilisé systématiquement un appareil moyen format muni d'un flash pour épingler les personnages photographiés. Elle a partagé la détresse de déclassés de la société, les exposant crûment dans tous les détails.
Jacques Tati : il a promené son regard amusé sur les injonctions de la société moderne de consommation et d'ordre, notamment dans son film Les vacances de Monsieur Hulot, où l'on voit à la fois le plaisir partagé dans les activités de plage, et les vacanciers bousculés par le héros dans leurs habitudes héritées de leur travail ou de leur classe sociale.
Jeff Koons : il élève au rang de fétiche artistique les objets quotidiens et les idoles préférées du public, en augmentant leur taille, en polissant leur surface, en les parant de couleurs et de reflets chatoyants. Il s'est lui-même attaqué aux gros plans de nourritures par de grandes toiles très colorées.
© Martin Parr/Magnum Photos
GB. England. New Brighton. From 'The Last Resort'. 1983-85.
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