Injustice
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 19/04/2016 à 19h09
104 vues
Question d'origine :
Bonsoir
Qu'y-a-t-il de pire que l'injustice?
Cdt
A.
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 21/04/2016 à 14h51
Bonjour,
Ayant posé votre question autour de nous, nous avons reçu plusieurs propositions : la mort, la famine, la torture, la violence… Mais, nous semble-t-il, toutes ces notions peuvent, de près ou de loin, être rattachées à l’injustice : fondamentalement, que nous en soyons les victimes ou de simples spectateurs, ces situations éveillent notre sentiment d’injustice et nous incitent à chercher les moyens d’y remédier.
Nous pourrions vous répondre, comme Arletty en commentant les violences de l’épuration, que pire que l’injustice peut être la justice.
De fait, la notion de justice, qui vient de « jus », le droit, peut désigner aussi bien ce qui est conforme à la loi, que ce qui relève de la vertu morale :
En effet, par « juste » on peut entendre des choses très différentes et des champs de réflexion qui ne se recoupent pas nécessairement. En un premier sens, on peut dire que le juste est ce qui est conforme à la loi. Ce niveau de la légalité définit un comportement qui est celui du bon citoyen. Cependant, la justice est également un concept moral : un homme juste est plus qu’un bon citoyen, comme le souligne Aristote. Par conséquent, s’interroger sur la justice d’un comportement ou d’une intention implique de poser la question de la légitimité et du fondement.Ainsi il est des actes que la loi peut autoriser et que je jugerai pourtant injustes .
Source : Dissertations sur la justice, Hervé Guineret
La diversité des règles, des institutions ou même des principes moraux que la justice humaine a établis, rend difficile à définir une « justice absolue » dont la valeur serait universelle :
L’expérience de l’injustice s’impose clairement à notre conscience, mais la justice reste difficile, sinon impossible, à cerner et à définir. C’est la position soutenue par Hans Kelsen (What is justice ? Justice, Law and Politics in the mirror of Science, University of California Press, Berkeley et Los Angeles, 1957), pour lequel tout ce que l’on peut déduire de la diversité des tentatives de justifier les systèmes moraux et les systèmes judiciaires, c’est la diversité des valeurs, et la futilité de tenter d’établir un modèle de comportement humain comme juste. La justice absolue n’est qu’une illusion. Le relativisme éthique que défend Kelsen impose à l’individu de choisir parmi ces systèmes, par ailleurs tous équivalents, ce qui, pour lui, est bien ou mal, juste ou injuste.
Source : La justice, Magali Bessone
La dimension subjective et sociale de la justice est évidente si l’on compare des systèmes judiciaires de pays différents, ou même en comparant l’état actuel de notre justice avec ce qu’elle était il n’y a pas si longtemps : la peine de mort est-elle une réponse proportionnée ou cruelle aux crimes qu’elle punit ? L’avortement est-il un meurtre ? L’homosexualité est-elle « immorale » ?...
Un système judiciaire donné n’est pas parfait, et peut donner lieu à de nombreuses injustices et inéquités dans son fonctionnement lui-même, comme le constate le comité sur les frais judiciaires mis sur pied par le Barreau de Montréal.
Cette forme d’injustice, nous direz-vous, reste de l’injustice. Mais peut-être pouvons-nous argumenter que, de notre point de vue, cette injustice « intégrée » dans le système légal est pire que les autres, puisque celui qui en est victime est puni ou ignoré par le système qui a vocation de le défendre et le protéger, justement, contre l’injustice…
Bonne journée.
Ayant posé votre question autour de nous, nous avons reçu plusieurs propositions : la mort, la famine, la torture, la violence… Mais, nous semble-t-il, toutes ces notions peuvent, de près ou de loin, être rattachées à l’injustice : fondamentalement, que nous en soyons les victimes ou de simples spectateurs, ces situations éveillent notre sentiment d’injustice et nous incitent à chercher les moyens d’y remédier.
Nous pourrions vous répondre, comme Arletty en commentant les violences de l’épuration, que pire que l’injustice peut être la justice.
De fait, la notion de justice, qui vient de « jus », le droit, peut désigner aussi bien ce qui est conforme à la loi, que ce qui relève de la vertu morale :
En effet, par « juste » on peut entendre des choses très différentes et des champs de réflexion qui ne se recoupent pas nécessairement. En un premier sens, on peut dire que le juste est ce qui est conforme à la loi. Ce niveau de la légalité définit un comportement qui est celui du bon citoyen. Cependant, la justice est également un concept moral : un homme juste est plus qu’un bon citoyen, comme le souligne Aristote. Par conséquent, s’interroger sur la justice d’un comportement ou d’une intention implique de poser la question de la légitimité et du fondement.
Source : Dissertations sur la justice, Hervé Guineret
La diversité des règles, des institutions ou même des principes moraux que la justice humaine a établis, rend difficile à définir une « justice absolue » dont la valeur serait universelle :
L’expérience de l’injustice s’impose clairement à notre conscience, mais la justice reste difficile, sinon impossible, à cerner et à définir. C’est la position soutenue par Hans Kelsen (What is justice ? Justice, Law and Politics in the mirror of Science, University of California Press, Berkeley et Los Angeles, 1957), pour lequel tout ce que l’on peut déduire de la diversité des tentatives de justifier les systèmes moraux et les systèmes judiciaires, c’est la diversité des valeurs, et la futilité de tenter d’établir un modèle de comportement humain comme juste. La justice absolue n’est qu’une illusion. Le relativisme éthique que défend Kelsen impose à l’individu de choisir parmi ces systèmes, par ailleurs tous équivalents, ce qui, pour lui, est bien ou mal, juste ou injuste.
Source : La justice, Magali Bessone
La dimension subjective et sociale de la justice est évidente si l’on compare des systèmes judiciaires de pays différents, ou même en comparant l’état actuel de notre justice avec ce qu’elle était il n’y a pas si longtemps : la peine de mort est-elle une réponse proportionnée ou cruelle aux crimes qu’elle punit ? L’avortement est-il un meurtre ? L’homosexualité est-elle « immorale » ?...
Un système judiciaire donné n’est pas parfait, et peut donner lieu à de nombreuses injustices et inéquités dans son fonctionnement lui-même, comme le constate le comité sur les frais judiciaires mis sur pied par le Barreau de Montréal.
Cette forme d’injustice, nous direz-vous, reste de l’injustice. Mais peut-être pouvons-nous argumenter que, de notre point de vue, cette injustice « intégrée » dans le système légal est pire que les autres, puisque celui qui en est victime est puni ou ignoré par le système qui a vocation de le défendre et le protéger, justement, contre l’injustice…
Bonne journée.
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