Question d'origine :
Lors d'Atala-René de Chateaubriand, il est fait mention de plusieurs légendes indiennes:
"Il raconte les guerres du grand Liévre contre Matchimitsou, dieu du mal.Il dit le premier homme et Atahensic la première femme précipités du ciel pour avoir perdu leur innocence, la terre rougie du sang fraternel, Jouskeka l'impie immolant le juste Tahouistsaron, le déluge déscendant à la voix du grand Esprit, Massou sauvé seul dans son canot d'écorce, et le corbeau envoyé à la découverte de la terre, il dit encore la belle Endaé retirée de la contrée des Âmes par les douces chansons de son époux."
Or les mythes du paradis terrestre, d'Abel et Caïn, de l'arche de Noé et d'Orphée semblent relativement reconnaissables.
Sachant que l'ouvrage est plus ou moins une célébration de la foi chrétienne, est-ce que ces mythes existent vraiment, tendant à prouver une sorte d'universalité des mythes, ou alors est-ce que ce sacré René n'est pas plutôt en train de remettre tous ça à la sauce exotique pour prouver que Dieu est VRAIMENT partout?..
Merci d'avance et à bientôt, Brumaire
Réponse du Guichet
bml_litt
- Département : Langues et Littératures
Le 16/06/2005 à 08h29
"Atala ou les amours de deux sauvages dans le désert. Oeuvre de l'écrivain français François-René de Chateaubriand (1768-1848). Publiée en 1801. L'auteur eut, dès sa jeunesse, l'idée de décrire les moeurs des sauvages, en les encadrant dans une trame historique. Le massacre (qui fut commis par les français en Louisiane, en 1727) de la tribu rebelle des Natchez lui sembla un bon sujet. Et, au retour de son fameux voyage en Amérique, il devait réaliser son rêve de jeunesse dans Atala, simple épisode de son livre sur les Natchez, de même que René. De ces deux récits, ajoutés comme exemples au Génie du christianisme, Atala fut publié à part avant le reste de l'ouvrage. Cette "anecdote" écrite "dans les déserts et sous les huttes des sauvages", n'entend pas seulement affirmer la théorie de la beauté du christianisme, surtout dans la partie relative à la poésie de la religion, mais elle révèle un grand amour de la nature et cette richesse sentimentale qui devaient rendre l'écrivain célèbre parmi les romantiques."
in Le nouveau dictionnaire des oeuvres
Pour plus de détails sur les motivations de F.R. de Chateaubriand, nous vous renvoyons vers les ouvrages :
- Oeuvres romanesques et voyages T.1 / F.R. de Chateaubriand (éd. Gallimard - la Pléiade) dans laquelle vous pourrez lire l'introduction, les sources et les préfaces
- Atala, le désir cannibale / Pierre Glaudes
- Chateaubriand / Pierre Moreau qui, en partie, étudie l'attitude de F.R. de Chateaubriand face au christianisme
et les sites :
- Atala
- François René de Chateaubriand
- Christianisme et création littéraire : Chateaubriand et Dostoïevski
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 16/06/2005 à 09h36
En avril 1791, Chateaubriand s'embarqua pour l'Amérique et y voyagea quelques mois. Il en rapporta de volumineuses notes qui allaient nourrir ses œuvres littéraires, notamment son Voyage en Amérique (1826) et Atala ou les Amours de deux sauvages dans le désert (1801). Ce dernier roman fait référence à un peuple indien, les Natchez. Ce peuple vivait sur les rives du Mississippi. Le premier contact des français avec les Natchez avait eu lieu en 1682 lors de l’expédition La Salle. Comme tous les peuples indiens, leur tradition et leur croyance se transmettaient oralement. Sans doute, avaient-ils des mythes et des légendes très différents de ceux qui sont cités dans ce roman à cette époque. Mais, après cette expédition, les contacts entre la tribu et les français s’étaient multipliés entraînant des modifications dans leur mode de vie et l’arrivée des missionnaires venait bouleverser leurs croyances. Petit à petit, le peuple des Natchez aurait assimilé la religion chrétienne prêchée par ses missionnaires dans leurs mythes et légendes, gardant, toutefois, les noms des personnages de leur croyance. Cependant, certains récits faits par des voyageurs et des colons ont permis d’avoir des informations sur leur croyance avant qu’elle ne soit totalement imprégnée par la religion chrétienne.
Ainsi, dans Mythes et croyances du monde entier au livre 3 concernant l’Afrique noire, l’Amérique et l’Océanie qui se trouve dans nos locaux au département de civilisation, il est dit que les Natchez vouaient un culte très particulier au soleil. « Les Natchez croyaient que, dans un passé lointain, une divinité suprême liée étroitement au soleil les avait choisis pour leur envoyer son fils. Ce dernier leur avait apporté les lois et les cérémonies religieuses. Ensuite il s’était retiré à l’intérieur d’une pierre que l’on conservait depuis dans le temple principal. Le pouvoir était passé entre les mains du Grand Soleil, nom par lequel on désignait le grand chef des Natchez. »
Vers 1730, alors que la guerre faisait rage entre les Natchez, dirigés par une faction proanglaise, et les Français, cette tribu a été pratiquement exterminée. Ceux, qui avaient pu en réchapper, auraient trouvé refuge chez d’autres peuples indiens comme les Chickasaw, les Cherokees et les Creek.
Aussi, lorsque Chateaubriand fit son voyage dans ces contrées américaines, il rencontra les représentants de ce peuple disséminés dans les différentes tribus indiennes qui lui racontèrent leurs mythes et leurs légendes, tels qu’ils s’en souvenaient après l’influence des missionnaires. Ces mythes existent donc vraiment mais ils ne sont que le résultat d’un amalgame entre leur croyance et celle des européens de l’époque.
Si vous souhaitez élargir la question des mythes et des légendes des indiens d’Amérique du Nord, je vous conseille de lire :
Et coyote créa le monde de Richard Erdoes et Alfonso Ortiz dans le département de civilisation.
Religions des Indiens d'Amérique d’Ake Hultkrantz
L'Ame Indienne de Charles Eastman
Il existe aussi quelques sites Internet sur les Natchez que vous pouvez consulter :
civilisation des Natchez
Le peuple Natchez
DANS NOS COLLECTIONS :
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