Question d'origine :
Encore une citation sans source partout répétée sur Internet. Elle est attribuée à Hélder Câmara et formulée ainsi : "Si je donne de la nourriture aux pauvres, on me traite de saint. Si je demande pourquoi les pauvres n’ont pas de nourriture, on me traite de communiste." Sauriez-vous trouver son origine ou, au moins, un livre ou un article (sérieux !) signé, la citant. Merci d'avance.
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 26/09/2019 à 12h36
Bonjour,
D’après les sources que nous avons consultées, il semblerait que cette phrase soit rapportée dans la biographie de l’évêque de Recife par Zildo Rocha Helder, o dom: uma vida que marcou os rumos da Igreja no Brasil (Source : Wikiquote).
Voici la phrase en version originale :
« Quando dou comida aos pobres chamam-me de santo. Quando pergunto por que eles são pobres chamam-me de comunista. »
L’ouvrage de Zildo Rocha ne faisant pas partie de notre catalogue, nous n’avons pu le consulter. Mais un extrait lisible sur Google Livres indique que l’auteur a découvert la citation sur une affiche du Fonds catholique pour le développement de l’outre-mer, sans plus de précision.
Difficile de dire alors s’il s’agit de l’extrait d’un livre, d’un prêche, d’une déclaration médiatique, d’autant qu’Hélder Câmara, très charismatique évêque suppléant de Rio de Janeiro puis évêque de Recife à de 1968 à 1984 (date à laquelle il fut mis à la retraite par une hiérarchie assez frileuse vis-à-vis de la théologie de la libération), deviendra, dès les années 1970, « l’évêque le plus célèbre du monde », selon La guerre des dieux [Livre] : religion et politique en Amérique latine / Michael Löwy ; trad. de l'anglais par Michael Gibson.
On retrouve cependant aisément des écrits et des déclarations au sens quasi identique. Dans son ouvrage LE DESERT EST FERTILE [Livre] :
« Car celui qui se borne à demander aux puissants de l’aide pour les pauvres, celui-là même qui commence à aider les pauvres par un début de promotion humaine, mais sans pousser l’ « imprudence » et l’ « audace » jusqu’à parler de droits et jusqu’à exiger la justice, celui-là est un homme admirable et un saint. Mais que celui qui opte pour la justice et pour le changement des structures qui réduisent en esclavage des millions d’enfants de Dieu se prépare à voir sa pensée déformée, à être objet de diffamations et de calomnies, à perdre tout prestige auprès des gouvernants et des puissants, peut-être même à être mis en prison, torturé, voire éliminé… »
Le prélat savait ce qu’il disait, puisque son ouvrage fut publié en 1971, après sept ans d’une dictature militaire dont la « justification » était de faire rempart contre le péril communiste.
On trouve également sur cfrt.tv un intéressant – et légèrement hagiographique – reportage sur « Dom Hélder Câmara », qui comporte une citation encore plus proche, à 16’30’’ (et en français dans le texte) :
« Quand nous dénonçons les injustices, et surtout quand nous encourageons la promotion humaine – parce que nous avons une grave fatalité dans ce presque fatalisme où nous rencontrons nos masses – alors tout de suite, nous sommes appelés des subversifs, et même des communistes. »
Dans la même vidéo, le père José Comblin, qui fut « conseiller théologique de Dom Hélder », remarque que celui-ci a été « accusé de communisme de manière officielle par les autorités, le gouvernement, le gouverneur d’Etat… Mais [qu’] au Brésil, le mot « communisme » a un sens très large : toute personne qui conteste la société actuelle est communiste. »
Pour aller plus loin :
- Les œuvres d’Hélder Câmara dans le catalogue de la BmL.
- Dictionnaire historique de la théologie de la libération [Livre] / sous la direction de Maurice Cheza, Luis Martínez Saavedra et Pierre Sauvage ;
- Histoire du christianisme. [Livre] : des origines à nos jours / sous la dir. de Jean-Marie Mayeur, Charles Pietri, André Vauchez, Marc Venar
- Le discours social de l'Église catholique [Livre] : de Léon XIII à Benoît XVI : les grands textes de l'enseignement social de l'Eglise catholique /
Bonne journée.
D’après les sources que nous avons consultées, il semblerait que cette phrase soit rapportée dans la biographie de l’évêque de Recife par Zildo Rocha Helder, o dom: uma vida que marcou os rumos da Igreja no Brasil (Source : Wikiquote).
Voici la phrase en version originale :
« Quando dou comida aos pobres chamam-me de santo. Quando pergunto por que eles são pobres chamam-me de comunista. »
L’ouvrage de Zildo Rocha ne faisant pas partie de notre catalogue, nous n’avons pu le consulter. Mais un extrait lisible sur Google Livres indique que l’auteur a découvert la citation sur une affiche du Fonds catholique pour le développement de l’outre-mer, sans plus de précision.
Difficile de dire alors s’il s’agit de l’extrait d’un livre, d’un prêche, d’une déclaration médiatique, d’autant qu’Hélder Câmara, très charismatique évêque suppléant de Rio de Janeiro puis évêque de Recife à de 1968 à 1984 (date à laquelle il fut mis à la retraite par une hiérarchie assez frileuse vis-à-vis de la théologie de la libération), deviendra, dès les années 1970, « l’évêque le plus célèbre du monde », selon La guerre des dieux [Livre] : religion et politique en Amérique latine / Michael Löwy ; trad. de l'anglais par Michael Gibson.
On retrouve cependant aisément des écrits et des déclarations au sens quasi identique. Dans son ouvrage LE DESERT EST FERTILE [Livre] :
« Car celui qui se borne à demander aux puissants de l’aide pour les pauvres, celui-là même qui commence à aider les pauvres par un début de promotion humaine, mais sans pousser l’ « imprudence » et l’ « audace » jusqu’à parler de droits et jusqu’à exiger la justice, celui-là est un homme admirable et un saint. Mais que celui qui opte pour la justice et pour le changement des structures qui réduisent en esclavage des millions d’enfants de Dieu se prépare à voir sa pensée déformée, à être objet de diffamations et de calomnies, à perdre tout prestige auprès des gouvernants et des puissants, peut-être même à être mis en prison, torturé, voire éliminé… »
Le prélat savait ce qu’il disait, puisque son ouvrage fut publié en 1971, après sept ans d’une dictature militaire dont la « justification » était de faire rempart contre le péril communiste.
On trouve également sur cfrt.tv un intéressant – et légèrement hagiographique – reportage sur « Dom Hélder Câmara », qui comporte une citation encore plus proche, à 16’30’’ (et en français dans le texte) :
« Quand nous dénonçons les injustices, et surtout quand nous encourageons la promotion humaine – parce que nous avons une grave fatalité dans ce presque fatalisme où nous rencontrons nos masses – alors tout de suite, nous sommes appelés des subversifs, et même des communistes. »
Dans la même vidéo, le père José Comblin, qui fut « conseiller théologique de Dom Hélder », remarque que celui-ci a été « accusé de communisme de manière officielle par les autorités, le gouvernement, le gouverneur d’Etat… Mais [qu’] au Brésil, le mot « communisme » a un sens très large : toute personne qui conteste la société actuelle est communiste. »
- Les œuvres d’Hélder Câmara dans le catalogue de la BmL.
- Dictionnaire historique de la théologie de la libération [Livre] / sous la direction de Maurice Cheza, Luis Martínez Saavedra et Pierre Sauvage ;
- Histoire du christianisme. [Livre] : des origines à nos jours / sous la dir. de Jean-Marie Mayeur, Charles Pietri, André Vauchez, Marc Venar
- Le discours social de l'Église catholique [Livre] : de Léon XIII à Benoît XVI : les grands textes de l'enseignement social de l'Eglise catholique /
Bonne journée.
DANS NOS COLLECTIONS :
Ça pourrait vous intéresser :
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter