Question d'origine :
Mesdames, Messieurs,
Tous observent que suivant une mode parisienne, les pains vendus en France sont le plus souvent de moins en moins cuits, la croûte est devenue blanche et n'a plus de reflets dorés.
Il serait intéressant de calculer quel est l'écart de consommation d'énergie pour produire un pain croustillant et un pain nouvelle mode (blanc et mou) ?
Pouvez-vous étudier ce problème et donner l'écart de prix (à marge constante) qu'il devrait y avoir entre pain croustillant et pain mou ?
D'avance merci pour cet examen.
Bien cordialement.
André Gromier
Réponse du Guichet
bml_sci
- Département : Sciences et Techniques
Le 06/11/2019 à 14h57
Bonjour,
En effet, comme vous l’écrivez il semblerait que le pain vendu en France soit de moins en moins cuit.
Cet article, datant de 2013, issu du magazine gratuit "20 minutes" et l’interview sur Europe 1 en septembre 2018 de Steven Kaplan, historien et spécialiste américain du pain français confirment votre remarque.
En revanche, cela ne semble pas venir d’une mode parisienne, mais simplement d’une évolution du goût des français.
Ainsi d’après la boulangerie parisienne "Landemaine" citée par "20 minutes" :
«Huit fois sur dix, on me demande une baguette pas trop cuite», témoigne la vendeuse de la boulangerie Landemaine de la rue de Clichy, un des dix meilleurs pétrins de Paris. Dans cette boutique pourtant axée sur la qualité, où la baguette parisienne de base est vendue 0,95 euro, les clients n’ont d’yeux que pour la croûte bien blanche. Et ce n’est pas une exception: «Le ramollissement de la baguette est malheureusement une réalité, commente Rémi Héluin, blogueur pain-ssionné et fin observateur de la vie de la mie. Je le constate partout, le pain est de moins en moins cuit: environ 20 minutes au lieu de 23 ou 24 nécessaires.» et l’article d’expliquer :
« Mais d’où nous vient cette envie de mâchonner du mou? En dehors de l’illusion qu’il se conserve mieux, Rémi Héluin estime que «nous sommes de plus en plus habitués à manger quelque chose de mou, de pratique, à ne pas faire d’efforts». Il en veut pour preuve le succès croissant du pain de mie, «qu’on trouve même maintenant sans croûte!», s’exclame-t-il. Et puis le pain chaud et mou, c’est réconfortant, c’est un aliment «doudou» qui console et qui réchauffe le cœur et l’âme. L’enfant au fond de nous veut de la baguette blanche, comme pour nous rappeler le temps où l’on léchait la cuillère de pâte à gâteau de maman. ».
Cette évolution ne semble pas forcément plaire aux boulangers, qui eux ont conscience qu’un pain de qualité est un pain cuit :
« De leur côté, les boulangers sont bien obligés de se plier aux attentes de leurs clients. «Ils répondent à une demande et se disent que dans un environnement tellement concurrentiel, on ne peut pas prendre le risque de perdre de la clientèle. Donc ils abandonnent l’idée de faire du pain bien cuit», poursuit Rémi Héluin. Yosuké nous confie que pour lui, «le meilleur pain est bien cuit»: «Bien sûr que ça me fait mal au cœur de moins cuire, mais ce n’est pas moi qui mange la baguette!».
Cette situation, où seul 1/3 des consommateurs préfère le pain bien cuit, semble également mettre en colère Stéphane Kaplan, notre spécialiste américain du pain. Voici ce qui ressort de son interview sur Europe 1 :
"Vous vous êtes américanisés !" De quoi agacer Steven Kaplan, historien américain et universitaire spécialiste du pain, auteur de "Raisonner sur les blés", invité de La Table des bons vivants sur Europe1. "Pas trop cuit n’a pas de sens", assure-t-il. "Un pain doit être correctement cuit". "Il y a des règles", poursuit-il. "Pour que le pain atteigne son sommet sensoriel, il faut un échange d’arôme entre la croûte et la mie. Or, il ne peut pas y avoir d’échange s’il n’y a pas de croûte. Le propre du pain français, c’est sa croustillance (…)Vous allez vers le mou parce qu'il vous semble plus sensuel, plus facile, vous n’avez pas à mastiquer. C’est une facilité mais c’est ridicule !".
Et depuis septembre 2018 une opération de défense de la baguette bien cuite a même été instaurée par l’entreprise familiale de meunier «Les Moulins Bourgeois » dans les quelques 1000 boulangeries qu’ils fournissent « Objectif ? Sensibiliser le grand public aux qualités nutritives et digestives de la baguette bien cuite... et redorer son blason ».
Tout ça pour dire que beaucoup de boulangers semblent déplorer ce phénomène de consommation et qu’a priori, il n’y a pas de raison économique derrière tout cela… Nous n’avons trouvé aucune information allant dans ce sens en tout cas... Ni même dans les ouvrages d’apprentissage du métier de boulanger tels que Pratique en boulangerie et Bac pro boulanger-pâtissier dans lesquels il n’y a pas de méthode de calcul enseignée aux futurs boulangers pour augmenter leur marge en jouant sur la durée de cuisson du pain… Les 24 minutes (pour la baguette) sont citées partout comme la norme immuable…
Bonne journée
Pour aller plus loin
- Le retour du bon pain, Steven Kaplan
- La France et son pain : histoire d'une passion, Steven L. Kaplan
En effet, comme vous l’écrivez il semblerait que le pain vendu en France soit de moins en moins cuit.
Cet article, datant de 2013, issu du magazine gratuit "20 minutes" et l’interview sur Europe 1 en septembre 2018 de Steven Kaplan, historien et spécialiste américain du pain français confirment votre remarque.
En revanche, cela ne semble pas venir d’une mode parisienne, mais simplement d’une évolution du goût des français.
Ainsi d’après la boulangerie parisienne "Landemaine" citée par "20 minutes" :
«Huit fois sur dix, on me demande une baguette pas trop cuite», témoigne la vendeuse de la boulangerie Landemaine de la rue de Clichy, un des dix meilleurs pétrins de Paris. Dans cette boutique pourtant axée sur la qualité, où la baguette parisienne de base est vendue 0,95 euro, les clients n’ont d’yeux que pour la croûte bien blanche. Et ce n’est pas une exception: «Le ramollissement de la baguette est malheureusement une réalité, commente Rémi Héluin, blogueur pain-ssionné et fin observateur de la vie de la mie. Je le constate partout, le pain est de moins en moins cuit: environ 20 minutes au lieu de 23 ou 24 nécessaires.» et l’article d’expliquer :
« Mais d’où nous vient cette envie de mâchonner du mou? En dehors de l’illusion qu’il se conserve mieux, Rémi Héluin estime que «nous sommes de plus en plus habitués à manger quelque chose de mou, de pratique, à ne pas faire d’efforts». Il en veut pour preuve le succès croissant du pain de mie, «qu’on trouve même maintenant sans croûte!», s’exclame-t-il. Et puis le pain chaud et mou, c’est réconfortant, c’est un aliment «doudou» qui console et qui réchauffe le cœur et l’âme. L’enfant au fond de nous veut de la baguette blanche, comme pour nous rappeler le temps où l’on léchait la cuillère de pâte à gâteau de maman. ».
Cette évolution ne semble pas forcément plaire aux boulangers, qui eux ont conscience qu’un pain de qualité est un pain cuit :
« De leur côté, les boulangers sont bien obligés de se plier aux attentes de leurs clients. «Ils répondent à une demande et se disent que dans un environnement tellement concurrentiel, on ne peut pas prendre le risque de perdre de la clientèle. Donc ils abandonnent l’idée de faire du pain bien cuit», poursuit Rémi Héluin. Yosuké nous confie que pour lui, «le meilleur pain est bien cuit»: «Bien sûr que ça me fait mal au cœur de moins cuire, mais ce n’est pas moi qui mange la baguette!».
Cette situation, où seul 1/3 des consommateurs préfère le pain bien cuit, semble également mettre en colère Stéphane Kaplan, notre spécialiste américain du pain. Voici ce qui ressort de son interview sur Europe 1 :
"Vous vous êtes américanisés !" De quoi agacer Steven Kaplan, historien américain et universitaire spécialiste du pain, auteur de "Raisonner sur les blés", invité de La Table des bons vivants sur Europe1. "Pas trop cuit n’a pas de sens", assure-t-il. "Un pain doit être correctement cuit". "Il y a des règles", poursuit-il. "Pour que le pain atteigne son sommet sensoriel, il faut un échange d’arôme entre la croûte et la mie. Or, il ne peut pas y avoir d’échange s’il n’y a pas de croûte. Le propre du pain français, c’est sa croustillance (…)Vous allez vers le mou parce qu'il vous semble plus sensuel, plus facile, vous n’avez pas à mastiquer. C’est une facilité mais c’est ridicule !".
Et depuis septembre 2018 une
Tout ça pour dire que beaucoup de boulangers semblent déplorer ce phénomène de consommation et qu’a priori, il n’y a pas de raison économique derrière tout cela… Nous n’avons trouvé aucune information allant dans ce sens en tout cas... Ni même dans les ouvrages d’apprentissage du métier de boulanger tels que Pratique en boulangerie et Bac pro boulanger-pâtissier dans lesquels il n’y a pas de méthode de calcul enseignée aux futurs boulangers pour augmenter leur marge en jouant sur la durée de cuisson du pain… Les 24 minutes (pour la baguette) sont citées partout comme la norme immuable…
Bonne journée
- Le retour du bon pain, Steven Kaplan
- La France et son pain : histoire d'une passion, Steven L. Kaplan
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