RELATIVITE EINSTEIN
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 06/12/2019 à 10h12
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Question d'origine :
Bonjour cher Guichet du Savoir,
Pourriez vous me dire comment Einstein a découvert la théorie de la relativité ? J'ai cru entendre qu'il était en dans un train !
Merci beaucoup,
Belle journée,
Morganne
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 09/12/2019 à 15h04
Bonjour,
Nous voyons mal à quelle anecdote vous faites allusion. Le site astrosurf évoque un dialogue entre Einstein et un contrôleur de train, mais qui ne nous paraît pas très pertinent dans le contexte de votre question. Il pourrait aussi s’agir du paradoxe du train, une « expérience de pensée destinée à illustrer des effets paradoxaux de la relativité restreinte ».
Nous trouvons également une allusion aux chemins de fer dans une discussion sur le forum futura-science portant justement sur la question : Comment Einstein a-til trouvé la théorie de la relativité ? :
« Si tu lis son article fondateur de 1905, tu verras qu'il analyse le procédé de mesure de la longueur d'un objet, en mouvement uniforme, par rapport à celui qui le mesure.
Pour cela il fait quelques hypothèses(postulats).
Il a été peut-être inspiré par d'autres idées, mais, en fait, son approche est très pragmatique.
A titre anecdotique, il y avait un problème de chemins de fer, qui étaient à voie unique à l'époque, qui ne pouvaient se croiser que dans les gares, d'où un problème de synchronisation. Les diagrammes qu'on utilisait avaient une parenté avec ceux de RR .
En fait le fondement philosophique est que les lois de la la nature (hormis la gravitation à cette époque) devaient être les mêmes dans tous les référentiels inertiels (pas de référentiel inertiel absolu).
Quant à la paternité, il est vrai que Lorentz et encore plus Poincaré avaient balisé le terrain, mais Einstein a fait un paquet cadeau du tout (en le mettant en forme).
Sur cette histoire de paternité, il faut savoir qu'il y a eu des batailles rangées entre scientifiques qui ressurgissent d'ailleurs à chaque date anniversaire de la relativité. »
Ce qui nous amène à cette présentation de la Relativité Restreinte sur le site du CLEA :
« Une des caractéristiques de la fin du XIX siècle en Europe et aux États-Unis d'Amérique concerne le développement très rapide des lignes de chemins de fer.
Pour l'Allemagne il s'agissait, en particulier, de pouvoir mobiliser très rapidement l'ensemble des troupes vers le lieu des combats.
Ce développement eut une conséquence inattendue concernant le problème de la synchronisation des horloges. Pour assurer une bonne régulation du trafic, pour permettre aux voyageurs de prévoir leurs déplacements, de faciliter les correspondances, il était nécessaire de se mettre d'accord sur la mesure du temps.
A cette époque, la synchronisation des horloges se faisait à partir d'une horloge centrale ou maîtresse, le plus souvent située en un point stratégique comme une capitale (Paris, Berlin, Berne...).
Toutes les autres horloges secondaires étaient pilotées par l'horloge centrale. On se doute que le temps de propagation du signal dépend de l'éloignement des horloges secondaires par rapport à l'horloge maîtresse.
Albert Einstein se posait la question de la synchronisation de ces horloges et en particulier ce que l'on entendait par la notion de simultanéité de 2 événements.
Des questions qui semblaient presque enfantines...
Albert Einstein précisait ce que l'on entend par la notion de simultanéité de deux événements se produisant dans un même lieu : "Si je dis qu'un train arrive à 7 heures dans une gare, cela signifie que l'arrivée de l'aiguille de ma montre sur le chiffre 7 et l'arrivée du train dans la gare coïncident".
Mais quand deux événements se produisent à distance comment définir la simultanéité des deux événements ? Selon la distance à parcourir le signal de l'horloge maîtresse mettra des temps différents. Ces temps sont faibles mais mesurables. On constatait alors que deux événements " simultanés " dans un système de référence ne l'était plus dans un autre.
Pour définir le concept de simultanéité de deux événements situés loin l'un de l'autre il fallait convenir d'une procédure.
Ce terrain était déjà bien exploré par Henri Poincaré. Dans un livre publié en 1902 "La science et l'hypothèse" ce dernier écrivait :
"Il n'y a pas de temps absolu. Dire que deux durées sont égales, c'est une assertion qui n'a PAR ELLE-MÊME aucun sens et qui ne peut en acquérir que par une CONVENTION" De même nous n'avons pas l'intuition "de la simultanéité de deux événements qui se produisent sur des théâtres différents"
(Dans les fils électriques le courant se propage à des vitesses mesurables proches de la vitesse c).
Pour passer de la relativité Galiléenne à la théorie de la Relativité Restreinte, Albert Einstein fut contraint de revisiter le concept de temps.
Le temps disait-il ne peut être défini par lui même d'une façon absolue. Il y a un lien indissoluble entre le temps et la vitesse de propagation du signal.
La définition de la simultanéité de deux événements situés à distance, par exemple en des points A et B, nécessite de connaître le temps que met le signal pour aller de A à B et le temps pour aller de B à A.
Ces temps doivent être égaux : TA/B = TB/A
Albert Einstein construisit une nouvelle cinématique permettant de passer des transformations de Galilée à celles de Lorentz.
Pour Galilée et Newton le temps était absolu, le même pour tous et d'essence métaphysique. Pour Henri Poincaré et Albert Einstein ce temps résultait d'une simple convention.
Dans un référentiel Galiléen nous avons besoin de trois dimensions d'espace (x, y, z) auxquelles on ajoute un temps absolu.
En Relativité Restreinte on utilise un espace-temps à quatre dimensions décrit par la géométrie de Minkowski.
Les relations de transformation étaient déjà établies par Lorentz pour satisfaire les résultats surprenants de l'expérience de Michelson et Morley.
La théorie de la Relativité Restreinte, formulée par Albert Einstein en 1905, congédia l'éther que Poincaré s'efforçait de préserver. »
Concernant le contexte de la naissance de la théorie de la relativité, voici quelques explications trouvées dans l’ouvrage de vulgarisation de Marc Lachièze-Rey : Einstein à la plage : la relativité dans un transat :
«La relativité restreinte sauve la physique
Les physiciens du XIXe siècle sont confrontés à un problème majeur : pourquoi lumière et matière se comportent-elles différemment ? La relativité restreinte d’Albert Einstein résout l’énigme en volatilisant le cadre classique du temps et de l’espace…
Continuité et rupture
Au XVIIe siècle en Italie, le génial Galilée (1564-1642) énonçait un principe s’appliquant au mouvement de la matière qui, plus tard, sera finalement appelé principe de la relativité. En 1905, le jeune Einstein parvient à l’étendre à un nouveau domaine : celui de la propagation des ondes électromagnétiques, c’est-à-dire de la lumière visible mais également des rayonnements invisibles comme l’infrarouge, l’ultraviolet ou les ondes radio. Surtout, Einstein confère un rôle central à ce principe de relativité, en continuité avec celui de Galilée.
Mais en même temps, il se montre en rupture avec le savant de la Renaissance, dans le domaine de la cinématique. Cette discipline décrit le mouvement des objets « libres » (ceux qui ne sont soumis à aucune interaction) par opposition à la dynamique qui décrit leurs mouvements lorsqu’ils sont soumis à des forces. Einstein remplace la cinématique de Galilée par une nouvelle cinématique. Cela va impliquer une théorie nouvelle, mais surtout un abandon radical : celui des notions d’espace et de temps au profit de celle d’espace-temps, une entité globale aux propriétés étonnantes…
Un nouveau principe de relativité
Quel est donc ce fameux principe de relativité, énoncé par Galilée puis étendu par Einstein ? Chez l’un comme chez l’autre, il déclare la chose suivante : « les lois de la physique s’écrivent exactement de la même façon pour différents « observateurs » (des physiciens effectuant des mesures) en mouvement les uns par rapport aux autres ».
Avec l’importante condition, cependant, que ces observateurs soient inertiels, c’est-à-dire qu’ils ne soient soumis à aucune force et n’évoluent que selon leur propre inertie. Cela exclut par exemple un cosmonaute poussé par les moteurs de sa fusée, ou une planète soumise à l’attraction gravitationnelle du soleil… Tous les observateurs inertiels ont les uns par rapport aux autres des mouvements uniformes, c’est-à-dire en ligne droite et à vitesse constante (ce qui constitue d’ailleurs l’énoncé d’un autre principe, le principe d’inertie).
Un observateur au repos (qui ne se déplace pas) est également un observateur inertiel. Le principe de relativité implique donc directement que les lois physiques s’écrivent pour tout observateur inertiel comme s’il se trouvait au repos ! Voilà la « substantifique moelle » du principe, que Galilée avait résumé par la belle formule « le mouvement [uniforme] est comme rien »…
Ceci justifie l’usage du terme relativité. Le principe implique que tous les observateurs inertiels jouent des rôles strictement identiques, que les lois s’énoncent identiquement pour tous. Dans ces conditions, impossible d’en distinguer certains, que l’on déclarerait par exemple au repos tandis que les autres seraient en mouvement. Autrement dit, la seule notion de mouvement ayant un sens est celle de mouvement relatif entre différents observateurs. Aucun moyen de donner un sens à celle de « mouvement absolu », ni d’ailleurs de « repose absolu », qui pourrait servir de référence.
Le principe de relativité galiléen a servi de base à la physique de Newton. Il exprime la façon dont les deux savants considéraient l’espace et le temps dans leurs théories.
Einstein parvient à étendre ce principe aux lois et aux phénomènes de l’électromagnétisme. Cette théorie, élaborée dans les années 1860 par le physicien écossais James Clerk Maxwell, unifie l’électricité et le magnétisme. Le principe de relativité einsteinien, ainsi étendu, va constituer le socle de sa nouvelle théorie, la relativité restreinte. Comme son pendant galilée, il concerne les observateurs inertiels, en mouvements uniformes. Mais cette fois il prend en compte les lois de l’électromagnétisme. Or ceci n’est pas anodin car, comme l’a compris Einstein, cela implique la disparition des notions de temps et d’espace absolus, qui seront remplacées par celle d’espace-temps ! Une dizaine d’années plus tard, Einstein étendra encore la validité de ce principe aux observateurs non inertiels et aux mouvements non uniformes. Cela constituera la base de la théorie de la relativité générale […], qui manipule la géométrie d’un espace-temps « déformé ». Tout un programme…
1905, « année miraculeuse »
En 1905, Albert Einstein est employé au Bureau Fédéral de la propriété intellectuelle de la ville de Berne. Son travail : évaluer la valeur des brevets déposés. « Sans ce travail, écrira-t-il, […] j’aurais fini par perdre la raison ». Il jouit en tout cas d’une sécurité matérielle qui le laisse libre de réfléchir, et lui permet de publier cinq articles fondamentaux qui vont révolutionner la physique : une véritable annus mirabilis pour lui !
Le premier, Une vue heuristique concernant la production et la transformation de la lumière, propose l’hypothèse du « quantum de lumière ». Il constituera le fondement de la physique quantique, et vaudra à Einstein le prix Nobel en 1921 (le seul de sa carrière, étrangement) !
Les deux articles suivants, Sur une nouvelle détermination des dimensions moléculaires et Sur le mouvement des petites particules en suspension dans un liquide stationnaire, en fonction de la théorie cinétique moléculaire de la chaleur, sont liés à sa thèse de doctorat. Il y explique le « mouvement brownien » (complètement irrégulier) des particules en suspension dans un liquide, par leurs chocs avec les molécules de ce liquide. Cela valide pour de bon l’hypothèse de l’existence des atomes et molécules…
Le quatrième, Sur l’électrodynamique des corps en mouvement, fonde la relativité restreinte, accompagné du cinquième, L’inertie d’un corps dépend-elle de l’énergie qu’il contient ? Ce dernier dévoile la plus célèbre équation de la physique : E = mc2.
Un fâcheux problème de vitesse
Mais comment Einstein en est-il arrivé à renier la notion de temps ?
A cause d’un étonnant problème rencontré par la cinématique galiléenne. Celle-ci décrit, nous l’avons dit, les mouvements des objets libres, ceux qui ne sont soumis à aucune interaction. Un tel mouvement ne peut donc dépendre de rien d’autre que des propriétés… de l’espace et du temps eux-mêmes ! Ceci fait apparaître la cinématique comme l’expression des propriétés de l’espace et du temps et des relations qu’ils entretiennent…
La cinématique galiléenne (ou newtonienne) possède une propriété remarquable et familière : les vitesses des objets s’y composent en s’additionnant simplement. Si vous marchez à la vitesse V1 dans un train qui roule à la vitesse V2, vous vous déplacez à la vitesse V1 + V2 par rapport aux rails. Une évidence totale a priori qui fut pourtant au cœur d’une crise décisive…
En effet, les physiciens du XIXe siècle s’aperçoivent peu à peu que la lumière semble ne pas se plier à cette loi : au lieu de se composer avec la vitesse de la source qui l’émet, elle reste toujours absolument la même ! Une apparente aberration, pourtant confirmée en 1887 avec l’expérience cruciale de Michelson et Morley […]. La communauté scientifique en est alors convaincue : la lumière n’obéit pas aux mêmes lois cinématiques que la matière. Pourtant, si la cinématique exprime les rapports fondamentaux de l’espace et du temps, comment interpréter cette différence ? Comment les propriétés fondamentales de l’espace et du temps pourraient-elles différer, selon que l’on s’y intéresse par l’intermédiaire de la lumière ou de la matière ? Un vrai mystère…
Pas d’éther en vue
Au XIXe siècle, les physiciens pensaient que, pour se propager, la lumière a besoin d’un support occupant tout l’espace. Ils appelaient ce support « éther luminifère ». La lumière semblait être une onde analogue aux vagues, et ces dernières ont bien un support : celui de la mer ; l’éther jouerait pour la lumière le rôle que joue la mer pour les vagues. Mais si la lumière, en se propageant dans l’éther, suivait la cinématique de Galilée et Newton, sa vitesse devrait se composer avec celle de sa source, lorsque celle-ci est en mouvement. On devrait alors pouvoir mettre en évidence le mouvement de la Terre par rapport à cet éther, en mesurant les vitesses (a priori différentes) de plusieurs rayons lumineux : l’un se propageant dans le sens du mouvement orbital de la Terre, l’autre dans le sens opposé ou dans une direction perpendiculaire.
En 1887, les physiciens américains Albert Michelson et Edward Morley ont utilisé un interféromètre (un instrument très précis inventé par Michelson) pour réaliser cette expérience. Le résultat s’est révélé négatif : quelle que soit sa direction de propagation, la lumière va toujours à la même vitesse ; aucun signe d’un quelconque « vent d’éther »…
Certains physiciens entrevoient pourtant une solution. Au début du XXe siècle, George Fitzgerlad, Hendrik Lorentz et Henri Poincaré proposent séparément une même formule capable de résoudre l’épineux problème. Elle modifie en fait la loi (cinématique) de la composition des vitesses : il ne s’agit plus d’une simple addition, mais d’une combinaison nouvelle exprimée précisément par cette formule, que l’on baptisera plus tard « transformation de Lorentz ». Son mérite, c’est qu’elle rend aussi bien compte des comportements de la matière et de la lumière.
En premier lieu, lorsque les vitesses des objets en jeu ne sont pas très élevées, son résultat s’identifie presque à celui de la loi classique d’addition. C’est le cas de tous les objets « du quotidien » pour lesquels la formule de Galilée s’applique donc avec une précision souvent suffisante.
Mais par ailleurs, si l’une des deux vitesses est c, vitesse de la lumière dans le vide, le résultat est également c ; cela exprime précisément que la vitesse de la lumière est toujours constante ! Et la formule implique qu’aucun objet matériel ne peut atteindre cette vitesse c, qui devient donc une limite absolue.
La nouvelle formule résout donc le problème posé. Mais ce qui est étrange, c’est qu’elle « mélange » les coordonnées de temps et d’espace d’une curieuse façon. Il semble alors bien difficile de la concilier avec les notions usuelles d’espace et de temps et elle reste profondément mystérieuse, échappant à toute interprétation jusqu’en 1905… Einstein comprend alors qu’elle exige une remise en cause très profonde du cadre classique utilisé par Galilée et Newton, en particulier un abandon des notions de temps et d’espace absolus. Un peu plus tard, le physicien allemand Hermann Minkowski (ancien professeur d’Einstein) introduira la notion d’espace-temps. Et celui-ci sera reconnu comme le cadre le plus adapté pour rendre compte des nouvelles transformations cinématiques, et pour formuler la relativité restreinte d’Einstein. »
Peut-être trouverez-vous d’autres réponses dans les ouvrages suivants :
Albert Einstein, un siècle de relativité / Andrew Robinson
« Biographie illustrée du physicien, qui relate sa vie et ses plus grandes découvertes ainsi que l'influence permanente de ses idées sur la physique contemporaine. »
Einstein et la relativité générale : les chemins de l'espace-temps / Jean Eisenstaedt
« La relativité générale reste une théorie difficile, mal comprise, hermétique. L'auteur présente de façon accessible à tout un chacun comment, dans quel contexte et au prix de quels efforts elle est née et a évolué depuis le début du XXe siècle. Il rentre dans le détail de l'histoire des techniques mathématiques, physiques et observationnelles, dans le cadre de l'évolution de la physique. »
De Pythagore à Einstein, tout est nombre : la relativité générale, 25 siècles d'histoire / Nathalie Deruelle
« A l'occasion du centenaire de la théorie de la gravitation, ou relativité générale, cet ouvrage met en avant sa grandeur novatrice en retraçant vingt-cinq siècles d'hypothèses physiques et mathématiques sur l'Univers. L'auteure explore ainsi l'originalité, la genèse et le devenir de la théorie formulée par A. Einstein. »
3 minutes pour comprendre les grandes théories d'Einstein / Paul Parsons
« Ouvrage de vulgarisation sur la vie, les théories et l'influence de celui qui révolutionna la physique. La structure de la matière, la relativité générale, le monde quantique, la théorie des champs unifiés, etc., chaque double page présente un aspect de l'histoire personnelle ou de l'apport scientifique d'A. Einstein en 3 courts paragraphes à lire en 3 minutes. »
La théorie de la relativité restreinte / David Bohm
« Le physicien rappelle la transformation de la façon de concevoir l'espace et le temps suite à la théorie de la relativité d'Einstein. Les implications de cette théorie ont eu un impact et une portée encore plus révolutionnaires. Il emprunte des concepts à la philosophie et à la psychologie du développement, et montre comment la notion de relativité touche le coeur de la conception de l'Univers. »
Bonne journée.
Nous voyons mal à quelle anecdote vous faites allusion. Le site astrosurf évoque un dialogue entre Einstein et un contrôleur de train, mais qui ne nous paraît pas très pertinent dans le contexte de votre question. Il pourrait aussi s’agir du paradoxe du train, une « expérience de pensée destinée à illustrer des effets paradoxaux de la relativité restreinte ».
Nous trouvons également une allusion aux chemins de fer dans une discussion sur le forum futura-science portant justement sur la question : Comment Einstein a-til trouvé la théorie de la relativité ? :
« Si tu lis son article fondateur de 1905, tu verras qu'il analyse le procédé de mesure de la longueur d'un objet, en mouvement uniforme, par rapport à celui qui le mesure.
Pour cela il fait quelques hypothèses(postulats).
Il a été peut-être inspiré par d'autres idées, mais, en fait, son approche est très pragmatique.
En fait le fondement philosophique est que les lois de la la nature (hormis la gravitation à cette époque) devaient être les mêmes dans tous les référentiels inertiels (pas de référentiel inertiel absolu).
Quant à la paternité, il est vrai que Lorentz et encore plus Poincaré avaient balisé le terrain, mais Einstein a fait un paquet cadeau du tout (en le mettant en forme).
Sur cette histoire de paternité, il faut savoir qu'il y a eu des batailles rangées entre scientifiques qui ressurgissent d'ailleurs à chaque date anniversaire de la relativité. »
Ce qui nous amène à cette présentation de la Relativité Restreinte sur le site du CLEA :
« Une des caractéristiques de la fin du XIX siècle en Europe et aux États-Unis d'Amérique concerne le développement très rapide des lignes de chemins de fer.
Pour l'Allemagne il s'agissait, en particulier, de pouvoir mobiliser très rapidement l'ensemble des troupes vers le lieu des combats.
Ce développement eut une conséquence inattendue concernant le problème de la synchronisation des horloges. Pour assurer une bonne régulation du trafic, pour permettre aux voyageurs de prévoir leurs déplacements, de faciliter les correspondances, il était nécessaire de se mettre d'accord sur la mesure du temps.
A cette époque, la synchronisation des horloges se faisait à partir d'une horloge centrale ou maîtresse, le plus souvent située en un point stratégique comme une capitale (Paris, Berlin, Berne...).
Toutes les autres horloges secondaires étaient pilotées par l'horloge centrale. On se doute que le temps de propagation du signal dépend de l'éloignement des horloges secondaires par rapport à l'horloge maîtresse.
Albert Einstein se posait la question de la synchronisation de ces horloges et en particulier ce que l'on entendait par la notion de simultanéité de 2 événements.
Des questions qui semblaient presque enfantines...
Albert Einstein précisait ce que l'on entend par la notion de simultanéité de deux événements se produisant dans un même lieu : "Si je dis qu'un train arrive à 7 heures dans une gare, cela signifie que l'arrivée de l'aiguille de ma montre sur le chiffre 7 et l'arrivée du train dans la gare coïncident".
Mais quand deux événements se produisent à distance comment définir la simultanéité des deux événements ? Selon la distance à parcourir le signal de l'horloge maîtresse mettra des temps différents. Ces temps sont faibles mais mesurables. On constatait alors que deux événements " simultanés " dans un système de référence ne l'était plus dans un autre.
Pour définir le concept de simultanéité de deux événements situés loin l'un de l'autre il fallait convenir d'une procédure.
Ce terrain était déjà bien exploré par Henri Poincaré. Dans un livre publié en 1902 "La science et l'hypothèse" ce dernier écrivait :
"Il n'y a pas de temps absolu. Dire que deux durées sont égales, c'est une assertion qui n'a PAR ELLE-MÊME aucun sens et qui ne peut en acquérir que par une CONVENTION" De même nous n'avons pas l'intuition "de la simultanéité de deux événements qui se produisent sur des théâtres différents"
(Dans les fils électriques le courant se propage à des vitesses mesurables proches de la vitesse c).
Pour passer de la relativité Galiléenne à la théorie de la Relativité Restreinte, Albert Einstein fut contraint de revisiter le concept de temps.
Le temps disait-il ne peut être défini par lui même d'une façon absolue. Il y a un lien indissoluble entre le temps et la vitesse de propagation du signal.
La définition de la simultanéité de deux événements situés à distance, par exemple en des points A et B, nécessite de connaître le temps que met le signal pour aller de A à B et le temps pour aller de B à A.
Ces temps doivent être égaux : TA/B = TB/A
Albert Einstein construisit une nouvelle cinématique permettant de passer des transformations de Galilée à celles de Lorentz.
Pour Galilée et Newton le temps était absolu, le même pour tous et d'essence métaphysique. Pour Henri Poincaré et Albert Einstein ce temps résultait d'une simple convention.
Dans un référentiel Galiléen nous avons besoin de trois dimensions d'espace (x, y, z) auxquelles on ajoute un temps absolu.
En Relativité Restreinte on utilise un espace-temps à quatre dimensions décrit par la géométrie de Minkowski.
Les relations de transformation étaient déjà établies par Lorentz pour satisfaire les résultats surprenants de l'expérience de Michelson et Morley.
La théorie de la Relativité Restreinte, formulée par Albert Einstein en 1905, congédia l'éther que Poincaré s'efforçait de préserver. »
Concernant le contexte de la naissance de la théorie de la relativité, voici quelques explications trouvées dans l’ouvrage de vulgarisation de Marc Lachièze-Rey : Einstein à la plage : la relativité dans un transat :
«
Les physiciens du XIXe siècle sont confrontés à un problème majeur : pourquoi lumière et matière se comportent-elles différemment ? La relativité restreinte d’Albert Einstein résout l’énigme en volatilisant le cadre classique du temps et de l’espace…
Au XVIIe siècle en Italie, le génial Galilée (1564-1642) énonçait un principe s’appliquant au mouvement de la matière qui, plus tard, sera finalement appelé principe de la relativité. En 1905, le jeune Einstein parvient à l’étendre à un nouveau domaine : celui de la propagation des ondes électromagnétiques, c’est-à-dire de la lumière visible mais également des rayonnements invisibles comme l’infrarouge, l’ultraviolet ou les ondes radio. Surtout, Einstein confère un rôle central à ce principe de relativité, en continuité avec celui de Galilée.
Mais en même temps, il se montre en rupture avec le savant de la Renaissance, dans le domaine de la cinématique. Cette discipline décrit le mouvement des objets « libres » (ceux qui ne sont soumis à aucune interaction) par opposition à la dynamique qui décrit leurs mouvements lorsqu’ils sont soumis à des forces. Einstein remplace la cinématique de Galilée par une nouvelle cinématique. Cela va impliquer une théorie nouvelle, mais surtout un abandon radical : celui des notions d’espace et de temps au profit de celle d’espace-temps, une entité globale aux propriétés étonnantes…
Quel est donc ce fameux principe de relativité, énoncé par Galilée puis étendu par Einstein ? Chez l’un comme chez l’autre, il déclare la chose suivante : « les lois de la physique s’écrivent exactement de la même façon pour différents « observateurs » (des physiciens effectuant des mesures) en mouvement les uns par rapport aux autres ».
Avec l’importante condition, cependant, que ces observateurs soient inertiels, c’est-à-dire qu’ils ne soient soumis à aucune force et n’évoluent que selon leur propre inertie. Cela exclut par exemple un cosmonaute poussé par les moteurs de sa fusée, ou une planète soumise à l’attraction gravitationnelle du soleil… Tous les observateurs inertiels ont les uns par rapport aux autres des mouvements uniformes, c’est-à-dire en ligne droite et à vitesse constante (ce qui constitue d’ailleurs l’énoncé d’un autre principe, le principe d’inertie).
Un observateur au repos (qui ne se déplace pas) est également un observateur inertiel. Le principe de relativité implique donc directement que les lois physiques s’écrivent pour tout observateur inertiel comme s’il se trouvait au repos ! Voilà la « substantifique moelle » du principe, que Galilée avait résumé par la belle formule « le mouvement [uniforme] est comme rien »…
Ceci justifie l’usage du terme relativité. Le principe implique que tous les observateurs inertiels jouent des rôles strictement identiques, que les lois s’énoncent identiquement pour tous. Dans ces conditions, impossible d’en distinguer certains, que l’on déclarerait par exemple au repos tandis que les autres seraient en mouvement. Autrement dit, la seule notion de mouvement ayant un sens est celle de mouvement relatif entre différents observateurs. Aucun moyen de donner un sens à celle de « mouvement absolu », ni d’ailleurs de « repose absolu », qui pourrait servir de référence.
Le principe de relativité galiléen a servi de base à la physique de Newton. Il exprime la façon dont les deux savants considéraient l’espace et le temps dans leurs théories.
Einstein parvient à étendre ce principe aux lois et aux phénomènes de l’électromagnétisme. Cette théorie, élaborée dans les années 1860 par le physicien écossais James Clerk Maxwell, unifie l’électricité et le magnétisme. Le principe de relativité einsteinien, ainsi étendu, va constituer le socle de sa nouvelle théorie, la relativité restreinte. Comme son pendant galilée, il concerne les observateurs inertiels, en mouvements uniformes. Mais cette fois il prend en compte les lois de l’électromagnétisme. Or ceci n’est pas anodin car, comme l’a compris Einstein, cela implique la disparition des notions de temps et d’espace absolus, qui seront remplacées par celle d’espace-temps ! Une dizaine d’années plus tard, Einstein étendra encore la validité de ce principe aux observateurs non inertiels et aux mouvements non uniformes. Cela constituera la base de la théorie de la relativité générale […], qui manipule la géométrie d’un espace-temps « déformé ». Tout un programme…
En 1905, Albert Einstein est employé au Bureau Fédéral de la propriété intellectuelle de la ville de Berne. Son travail : évaluer la valeur des brevets déposés. « Sans ce travail, écrira-t-il, […] j’aurais fini par perdre la raison ». Il jouit en tout cas d’une sécurité matérielle qui le laisse libre de réfléchir, et lui permet de publier cinq articles fondamentaux qui vont révolutionner la physique : une véritable annus mirabilis pour lui !
Le premier, Une vue heuristique concernant la production et la transformation de la lumière, propose l’hypothèse du « quantum de lumière ». Il constituera le fondement de la physique quantique, et vaudra à Einstein le prix Nobel en 1921 (le seul de sa carrière, étrangement) !
Les deux articles suivants, Sur une nouvelle détermination des dimensions moléculaires et Sur le mouvement des petites particules en suspension dans un liquide stationnaire, en fonction de la théorie cinétique moléculaire de la chaleur, sont liés à sa thèse de doctorat. Il y explique le « mouvement brownien » (complètement irrégulier) des particules en suspension dans un liquide, par leurs chocs avec les molécules de ce liquide. Cela valide pour de bon l’hypothèse de l’existence des atomes et molécules…
Le quatrième, Sur l’électrodynamique des corps en mouvement, fonde la relativité restreinte, accompagné du cinquième, L’inertie d’un corps dépend-elle de l’énergie qu’il contient ? Ce dernier dévoile la plus célèbre équation de la physique : E = mc2.
A cause d’un étonnant problème rencontré par la cinématique galiléenne. Celle-ci décrit, nous l’avons dit, les mouvements des objets libres, ceux qui ne sont soumis à aucune interaction. Un tel mouvement ne peut donc dépendre de rien d’autre que des propriétés… de l’espace et du temps eux-mêmes ! Ceci fait apparaître la cinématique comme l’expression des propriétés de l’espace et du temps et des relations qu’ils entretiennent…
La cinématique galiléenne (ou newtonienne) possède une propriété remarquable et familière : les vitesses des objets s’y composent en s’additionnant simplement. Si vous marchez à la vitesse V1 dans un train qui roule à la vitesse V2, vous vous déplacez à la vitesse V1 + V2 par rapport aux rails. Une évidence totale a priori qui fut pourtant au cœur d’une crise décisive…
En effet, les physiciens du XIXe siècle s’aperçoivent peu à peu que la lumière semble ne pas se plier à cette loi : au lieu de se composer avec la vitesse de la source qui l’émet, elle reste toujours absolument la même ! Une apparente aberration, pourtant confirmée en 1887 avec l’expérience cruciale de Michelson et Morley […]. La communauté scientifique en est alors convaincue : la lumière n’obéit pas aux mêmes lois cinématiques que la matière. Pourtant, si la cinématique exprime les rapports fondamentaux de l’espace et du temps, comment interpréter cette différence ? Comment les propriétés fondamentales de l’espace et du temps pourraient-elles différer, selon que l’on s’y intéresse par l’intermédiaire de la lumière ou de la matière ? Un vrai mystère…
Au XIXe siècle, les physiciens pensaient que, pour se propager, la lumière a besoin d’un support occupant tout l’espace. Ils appelaient ce support « éther luminifère ». La lumière semblait être une onde analogue aux vagues, et ces dernières ont bien un support : celui de la mer ; l’éther jouerait pour la lumière le rôle que joue la mer pour les vagues. Mais si la lumière, en se propageant dans l’éther, suivait la cinématique de Galilée et Newton, sa vitesse devrait se composer avec celle de sa source, lorsque celle-ci est en mouvement. On devrait alors pouvoir mettre en évidence le mouvement de la Terre par rapport à cet éther, en mesurant les vitesses (a priori différentes) de plusieurs rayons lumineux : l’un se propageant dans le sens du mouvement orbital de la Terre, l’autre dans le sens opposé ou dans une direction perpendiculaire.
En 1887, les physiciens américains Albert Michelson et Edward Morley ont utilisé un interféromètre (un instrument très précis inventé par Michelson) pour réaliser cette expérience. Le résultat s’est révélé négatif : quelle que soit sa direction de propagation, la lumière va toujours à la même vitesse ; aucun signe d’un quelconque « vent d’éther »…
Certains physiciens entrevoient pourtant une solution. Au début du XXe siècle, George Fitzgerlad, Hendrik Lorentz et Henri Poincaré proposent séparément une même formule capable de résoudre l’épineux problème. Elle modifie en fait la loi (cinématique) de la composition des vitesses : il ne s’agit plus d’une simple addition, mais d’une combinaison nouvelle exprimée précisément par cette formule, que l’on baptisera plus tard « transformation de Lorentz ». Son mérite, c’est qu’elle rend aussi bien compte des comportements de la matière et de la lumière.
En premier lieu, lorsque les vitesses des objets en jeu ne sont pas très élevées, son résultat s’identifie presque à celui de la loi classique d’addition. C’est le cas de tous les objets « du quotidien » pour lesquels la formule de Galilée s’applique donc avec une précision souvent suffisante.
Mais par ailleurs, si l’une des deux vitesses est c, vitesse de la lumière dans le vide, le résultat est également c ; cela exprime précisément que la vitesse de la lumière est toujours constante ! Et la formule implique qu’aucun objet matériel ne peut atteindre cette vitesse c, qui devient donc une limite absolue.
La nouvelle formule résout donc le problème posé. Mais ce qui est étrange, c’est qu’elle « mélange » les coordonnées de temps et d’espace d’une curieuse façon. Il semble alors bien difficile de la concilier avec les notions usuelles d’espace et de temps et elle reste profondément mystérieuse, échappant à toute interprétation jusqu’en 1905… Einstein comprend alors qu’elle exige une remise en cause très profonde du cadre classique utilisé par Galilée et Newton, en particulier un abandon des notions de temps et d’espace absolus. Un peu plus tard, le physicien allemand Hermann Minkowski (ancien professeur d’Einstein) introduira la notion d’espace-temps. Et celui-ci sera reconnu comme le cadre le plus adapté pour rendre compte des nouvelles transformations cinématiques, et pour formuler la relativité restreinte d’Einstein. »
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