Pourquoi certains trichent-ils toujours aux jeux de société
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 01/03/2020 à 14h41
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Question d'origine :
Bonjour,
Nous sommes un groupe de sportifs et le soir nous jouons régulièrement à des jeux de société tel que le Uno, le Loup-Garou...
Notre question est la suivante: pourquoi lors de nos parties, certains et toujours les mêmes, ne peuvent-ils pas s’empêcher de tricher systématiquement?
Est-ce pour gagner? Est-ce que c’est parce que cela les fait rire? Ou est-ce que cela est dû à la culture ou à leur éducation?
Nous voulons essayer de comprendre pourquoi car leur attitude gâche le plaisir du jeu et cela nous énerve!
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 04/03/2020 à 08h59
Bonjour,
Voici quelques articles qui vous aideront peut-être à mieux comprendre l’attitude des tricheurs de votre groupe :
«Quelles sont les motivations à tricher?
La première motivation de la plupart des tricheurs est de gagner. Cette soif de victoire, où la place de deuxième n’est même pas envisageable, relève souvent d’une blessure d’amour-propre, une fêlure narcissique qui rend ingérable le fait de perdre le jeu, ce qui reviendrait à perdre la face et son estime personnelle.
Ce comportement sera plus souvent observé chez les enfants, pour maintenir sa supériorité d’aîné ou par pur esprit rebelle chez les adolescents, qui sont à l’âge de la transgression des règles dans tous les domaines.
Ce comportement peut très bien se corriger, pour autant que le joueur reconnaisse son problème. On peut lui proposer des jeux sans trop d’enjeu, où il n’y a pas vraiment de grand gagnant. Le joueur tricheur peut aussi se rendre compte par lui-même qu’il éprouve beaucoup plus de satisfaction à avoir gagné sans « entourloupe ».
Certains joueurs prennent aussi un malin plaisir à tricher dans le seul but d’éprouver le plaisir transgressif d’avoir berné les autres et de ne pas avoir été pris la main dans le sac. La triche devient alors un jeu dans le jeu. Cet objectif peut parfois s’étendre à tous les participants de la partie de manière tacite ou non. Mais est-ce encore de la tricherie si tous les joueurs y ont recours ?
On observe finalement peu de tricheurs dans le monde des joueurs réguliers. Le risque de se faire prendre, d’en éprouver de la honte et de se voir écarter des parties futures doit probablement suffire à maintenir les joueurs dans le droit chemin.
En tout cas, bien peu de personnes admettront qu’elles trichent encore à l’âge adulte, sauf si elles parviennent à relativiser leur acte de triche.
Voici quelques exemples de raisons poussant à tricher d’une manière perçue comme licite et à l’admettre :
• Pour laisser gagner un enfant, pour le voir sourire ou lui éviter une trop grande frustration. Il vaudrait mieux, dans un but éducatif et formateur, rééquilibrer les chances de gagner en s’octroyant un handicap, ce que certains jeux prévoient explicitement.
• Pour abréger une partie ennuyeuse, pour la pimenter. On pourrait plutôt négocier un abrègement de la partie ou proposer un changement de règles afin de le rendre plus dynamique.
• Pour défier leurs amis de prendre le tricheur sur le fait.
• Pour ne pas éliminer tous les joueurs quand on occupe la place de maître du jeu dans un jeu de rôle.
• Pour éviter que tout le monde ne perde dans un jeu coopératif.
• Parce que cela fait partie de la réputation du tricheur, réputation de sa personnalité, et qu’il en retire une certaine reconnaissance auprès de son cercle d’amis. Il peut alors se retrouver piégé dans cette image et ne plus pouvoir gagner à la loyale sans être systématiquement soupçonné d’avoir triché.
• Parce que le tricheur est persuadé que tout le monde triche autour de la table.
Quelques méthodes de tricherie
Autant en connaître quelques-unes pour s’en prémunir.
Les tricheurs utilisent souvent des compétences externes au jeu pour tricher. La connaissance de la sténographie ou de la langue des signes pourra être détournée pour tricher à un jeu en équipe du style de Time’s up, Pictionnary, mais cela suppose évidemment que les équipiers soient de mèche.
Les techniques de prestidigitation seront aussi très utiles pour se distribuer un meilleur jeu, escamoter ou remplacer des éléments. On y inclura les techniques de détournement d’attention pratiquées par les magiciens.
Des moyens techniques, voire technologiques, peuvent être aussi mis en œuvre et demandent une certaine logistique, comme avoir placé un jeu de lettres sous la table, des oreillettes pour qu’un complice vous souffle les bonnes réponses.
Le culot peut à lui seul suffire : avec assez d’aplomb on peut prétendre que telle règle à notre avantage existe bel et bien, ou encore annoncer un pouvoir lié à une carte, que personne n’ira vérifier.
Par opportunisme, il est parfois difficile pour certains joueurs de résister à la tentation de tricher quand le danger d’être pris est nul. Dans le cas, par exemple, où votre adversaire quitte la pièce.
L’éloge de perdre
Perdre ne veut pas dire être un perdant, un looser. Il y a beaucoup de leçons à tirer d’une partie perdue.
Premièrement, que l’on ne peut pas toujours gagner dans la vie.
Cet apprentissage est moins difficile à assimiler grâce à un jeu qu’en étant confronté brutalement à un évènement de la vie réelle.
Deuxièmement, nous pouvons en dégager des stratégies à abandonner pour la partie prochaine et ainsi nous améliorer. Troisièmement, apprendre à perdre de manière élégante, c’est aussi apprendre à gérer sa frustration, sa colère, ses pulsions. Parfois, il est même drôle de perdre. On peut s’amuser d’avoir le personnage le plus puissant du jeu et ne tirer aux dés que des résultats minables..
En jouant avec des enfants, on peut leur rappeler que ce qui importe dans cette activité, c’est le temps de qualité partagé, le plaisir de jouer et pas qui a gagné ou perdu. Apprendre à être un bon gagnant, modeste et humble, est d’ailleurs tout aussi important que d’apprendre à perdre.
Vous avez repéré un tricheur?
Plusieurs solutions s’offrent à vous. La solution diplomate consiste à lui faire remarquer gentiment qu’il s’est trompé. Vous pouvez aussi feinter en affirmant que vous ne vous rappelez plus bien des règles et proposer de les relire. Vous lui laissez ainsi le bénéfice du doute et une porte de sortie honorable. Vous pouvez également choisir d’être plus offensif : ne rien dire et contrer le tricheur en trichant vous-même. Evidemment, cela demande d’être aussi habile que le tricheur dans les manipulations.
Vous connaissez la propension à la tricherie de certains joueurs?
Vous pouvez rappeler que la tricherie ne sera pas autorisée pendant le jeu … parfois il y a des fondamentaux à rappeler. Vous pouvez aussi prévoir éventuellement des sanctions en cas de tricherie, comme la perte de toutes ses ressources, comme l’a constaté sur le terrain M. Barbier au cours de ses recherches pour sa thèse. Certains jeux prévoient dans leurs règles des pénalités en cas de tricherie. Au jeu Compatibility, par exemple, le fait d’être pris à communiquer avec son partenaire fait reculer le duo de 3 cases.
Ces jeux qui jouent avec la tricherie
On a vu apparaître des jeux qui intégraient la triche dans leur mécanique, comme le jeu de cartes Munchkin, qui dans une de ses extensions a ajouté des cartes « tricheur ».
Mais là encore, la tricherie annoncée n’en est pas une puisque tout le monde est au courant que ces cartes existent.
Et puis il y a cet ovni, MITO, qui a rencontré un vif succès auprès des petits et des grands. La mécanique est en effet très spéciale, car pour se débarrasser des cartes mito il faut utiliser des techniques de tricherie : escamotage de cartes, détournement d’attention,…
Il peut en effet être assez jouissif d’avoir l’autorisation de faire ce qui est habituellement interdit.
Mais attention, tout n’est pas permis non plus ! Il n’est pas autorisé de faire disparaître ses cartes pendant la phase arrêtée du jeu, ou de se débarrasser en douce de sa dernière carte. Donc la « vraie » tricherie est possible, même dans ce jeu où il est pourtant permis de « pseudo-tricher ».
Conclusion
Il faut donc pas mal de préparation, d’anticipation, d’intelligence et de roublardise pour tricher.
On pourrait même se demander si cette énergie bien utilisée n’assurerait pas bien des victoires à la loyale aux tricheurs, rendant donc la triche inutile, tout au moins dans les cas où le jeu ne réclame pas de compétence spécifique, telle que dextérité ou connaissances.
Et comme le dit un ami clown :
« Qu’est ce qui arrive aux tricheurs ? Ils gagnent… mais sans gloire » »
Source : Autour de la tricherie, ludobel.be
« Dans le cadre d’un jeu, il est facile de tricher. Surtout si l’on joue à un jeu « à l’allemande » impliquant de nombreuses manipulation de cubes dans son coin. La probabilité d’être pris en flagrant délit est donc relativement faible. De plus, la lourdeur de la sanction potentielle est quasi nulle: tout au plus un joueur vous fera une remarque, mais il n’y aura pas de réelle sanction. Et puis, il est facile de dire que l’on s’est trompé, que l’on n’a pas fait exprès. L’analyse bénéfice vs coûts du SMORC semble dès lors beaucoup plus pertinente: je peux prendre un avantage sans doute décisif pour la victoire vs j’ai peu de chance de me faire attraper et même si c’est le cas, il ne va rien m’arriver de grave. Je pense donc que le SMORC peut expliquer pourquoi des gens très honnêtes dans la vie peuvent être de vilains tricheurs autour d’un plateau.
Reste à savoir quels sont les réels bénéfices retirés. Gagner une partie en trichant… Inconcevable pour nombre d’entre nous! Je crois que c’est à ce moment qu’interviennent les considérations de la Fudge Factor Theory. Il semblerait que les tricheurs parviennent à rationnaliser suffisamment leur action pour se convaincre qu’il était justifié de tricher pour gagner. Sans doute valorisent-ils plus la destination que le voyage, mais ça, c’est le sujet d’un autre article! Sans doute aussi, leur esprit est rempli de justification du genre « ce n’était pas vraiment tricher; ça n’a pas tellement influé que ça la partie; j’aurais gagné de toutes façons; je suis sûr que les autres le font aussi. »
Le plus surprenant, me direz-vous peut-être, est encore de constater que quelqu’un peut tricher dans un jeu coopératif. « Pas si surprenant que ça » dirait Dan Ariely. Il a en effet mené des expériences ayant montré que la tendance générale à la tricherie est plus marquée lorsque celle-ci bénéficie à la fois à nous-mêmes et à une tierce personne. Encore plus contre-intuitif, est le constat que la tendance à tricherie est encore plus forte lorsque celle-ci ne profite qu’à une autre personne – et que nous n’en retirons donc aucun bénéfice direct. Là aussi, il s’agit d’une question de justification, de rationalisation. Il est plus acceptable à nos yeux de tricher si ça ne nous profite pas, et à fortiori si ça profite à quelqu’un d’autre que soi.
En définitive, quelles conclusions tirer? Le modèle SMORC semble avoir plus de sens lorsque l’on joue, peut-être parce que nos valeurs sont modifiées, ou tout du moins réévaluées. La question suivante serait alors de se demander si les jeux montrent notre vraie personnalité, ou si au contraire ils l’altèrent. »
Source : Vous arrive-t-il de tricher en jouant? gusandco.net
En fait, tricher pourrait être une fin en soi, car la triche procurerait un sentiment d’autosatisfaction :
« Ces derniers temps, on ne peut pas vraiment dire que les exemples de tricherie aient manqué. Entre le compte en Suisse de Jérôme Cahuzac, les longues années de mensonge de Lance Armstrong et les cas de fuites au bac, il y a de quoi faire. Et puis, ne nous mentons pas, les Français sont des tricheurs. Pourtant, ce vil acte peut parfois créer un sentiment agréable d'autosatisfaction, constate le Journal of Personality and Social Psychology.
A travers une série d’études, les chercheurs se sont penchés sur le ressenti des tricheurs en leur donnant différents tests écrits. Ceux qui ont triché se sont sentis bien. Même dans le cas où tricher entraînerait une non-validation des résultats, ceux qui l’ont fait ressentaient plus d’autosatisfaction que ceux ayant joué le jeu.
Plus surprenant encore, les tricheurs ayant reçu un rappel à la fin du test expliquant à quel point il était important de ne pas tricher se sentaient encore mieux que ceux n’ayant rien reçu.
«Il est perturbant de voir que les gens se sentent mieux après avoir triché, car il y a un renforcement émotionnel du comportement, signifiant qu’ils pourraient d’avantage recommencer», constate Nicole E. Ruedy, auteure de l’étude et chercheure à l’université de Washington.
Un tel comportement pourrait s’expliquer par un phénomène de groupe, remarque l’étude:
«Il est possible que quand un ensemble de personnes coordonnent leurs efforts pour tromper le système, cela accentue le plaisir du tricheur en répartissant la responsabilité en cas de conséquences négatives et en construisant un sens de la camaraderie.»
Le Time rapporte que de tels résultats ont surpris les spécialistes du genre, comme David Callahan auteur The Cheating Culture: Why More Americans Are Doing Wrong to Get Ahead (La culture de la triche: pourquoi plus d'Américains font de mauvaises choses pour être en tête) pour qui «les tricheurs se sentent souvent en conflit ou pas super».
«Montrer des personnes se sentant bien après avoir commis une transgression morale est plutôt novateur», a expliqué au New York Times Scott Wiltermuth, professeur assistant à l’université de Californie du Sud, qui a écrit sur le comportement éthique et n’était pas impliqué dans l’étude.
Les conclusions de ces recherches sur le «plaisir du tricheur» guident les chercheurs vers d’autres études plus poussées sur la compréhension des émotions et leur influence sur la morale et l’éthique. De la fraude fiscale au téléchargement illégal, les implications concrètes sont nombreuses. »
Source : Psychologie: tricher fait du bien, slate.fr
Enfin, d’autres chercheurs expliquent ce comportement par les hormones :
« Adepte de la triche au Monopoly ? C'est peut-être un "problème" d'hormones... C'est en tout cas ce que rapporte une équipe de chercheurs des universités du Texas et de Harvard qui publient une étude dans la revue Journal of Experimental Psychology concernant l'impact du système endocrinien sur notre tendance à adopter des comportements non-éthiques. Ainsi, une petite expérience réalisée sur 117 personnes leur a permis d'associer une plus forte propension à s'arranger avec la réalité avec un niveaux plus élevé de deux hormones : la testostérone et la cortisol, l'hormone du stress. "Bien que la science des hormones et celle du comportement soient nées au début du 19e siècle, ce n'est que récemment que la recherche a révélé à quel point le système endocrinien est en mesure d'influencer les comportements humains", explique le professeur Robert Josephs de l'université du Texas.
Un niveau élevé de testostérone diminue la crainte des sanctions tout en augmentant la sensibilité à la récompense" - Pr Robert Josephs
Il a été demandé à ces participants d'effectuer une série d'exercices de mathématiques et, une fois les solutions données, de se noter eux-mêmes et de rapporter le nombre de problèmes correctement résolus. Pour mettre un peu de piment, ceux qui présentaient les meilleurs résultats devaient toucher une récompense en espèces sonnantes et trébuchantes. À partir d'échantillons de salive collectés avant et après les tests, les chercheurs ont établi que les individus avec des niveaux élevés de testostérone et de cortisol avaient plus tendance à exagérer le nombre de problème correctement résolus.
L'explication ? D'un côté, "un niveau élevé de testostérone diminue la crainte des sanctions tout en augmentant la sensibilité à la récompense", explique le Pr Robert Josephs ; de l'autre, "un niveau élevé de cortisol est lié à un état de stress important". Or face à un problème, le niveau de stress est plus élevé. Ainsi "la testostérone fournit le courage de tricher tandis que la cortisol offre une bonne raison de tricher" : se soulager de son stress. Car de fait, les participants ayant triché présentaient après l'expérience des niveaux plus faibles de cortisol comme si le fait de tricher les avait libérés. "La réduction du stress est accompagnée d'une forte stimulation du circuit de la récompense dans le cerveau. Ainsi, ces modifications physiologico-psychologiques ont pour malheureuse conséquence de renforcer les comportements contraires à la morale", précise le Pr Josephs.
"Le message à retenir est que les injonctions fondées sur l'éthique et la morale tout comme celles reposant sur la menace de sanctions ne seraient en fait pas efficaces pour prévenir la fraude", poursuit le chercheur. Ces travaux mettant en lumière de nouveaux mécanismes sous-jacent à ce type de comportements pourraient ainsi ouvrir la voix à de nouvelles stratégie comme "méditer pour réduire son niveau de stress" par exemple. En attendant, vous saurez quoi répondre la prochaine fois que vous serez pris la main dans la banque au Monopoly. »
Source : Vous aimez tricher ? C'est peut-être la faute de vos hormones, sciencesetavenir.fr
Pour aller plus loin :
- Ce que les jeux de société disent de nous, lexpress.fr
- Les meilleurs jeux de société pour les tricheurs, huffingtonpost.fr
Bonne journée.
Voici quelques articles qui vous aideront peut-être à mieux comprendre l’attitude des tricheurs de votre groupe :
«
La première motivation de la plupart des tricheurs est de gagner. Cette soif de victoire, où la place de deuxième n’est même pas envisageable, relève souvent d’une blessure d’amour-propre, une fêlure narcissique qui rend ingérable le fait de perdre le jeu, ce qui reviendrait à perdre la face et son estime personnelle.
Ce comportement sera plus souvent observé chez les enfants, pour maintenir sa supériorité d’aîné ou par pur esprit rebelle chez les adolescents, qui sont à l’âge de la transgression des règles dans tous les domaines.
Ce comportement peut très bien se corriger, pour autant que le joueur reconnaisse son problème. On peut lui proposer des jeux sans trop d’enjeu, où il n’y a pas vraiment de grand gagnant. Le joueur tricheur peut aussi se rendre compte par lui-même qu’il éprouve beaucoup plus de satisfaction à avoir gagné sans « entourloupe ».
Certains joueurs prennent aussi un malin plaisir à tricher dans le seul but d’éprouver le plaisir transgressif d’avoir berné les autres et de ne pas avoir été pris la main dans le sac. La triche devient alors un jeu dans le jeu. Cet objectif peut parfois s’étendre à tous les participants de la partie de manière tacite ou non. Mais est-ce encore de la tricherie si tous les joueurs y ont recours ?
On observe finalement peu de tricheurs dans le monde des joueurs réguliers. Le risque de se faire prendre, d’en éprouver de la honte et de se voir écarter des parties futures doit probablement suffire à maintenir les joueurs dans le droit chemin.
En tout cas, bien peu de personnes admettront qu’elles trichent encore à l’âge adulte, sauf si elles parviennent à relativiser leur acte de triche.
Voici quelques exemples de raisons poussant à tricher d’une manière perçue comme licite et à l’admettre :
• Pour laisser gagner un enfant, pour le voir sourire ou lui éviter une trop grande frustration. Il vaudrait mieux, dans un but éducatif et formateur, rééquilibrer les chances de gagner en s’octroyant un handicap, ce que certains jeux prévoient explicitement.
• Pour abréger une partie ennuyeuse, pour la pimenter. On pourrait plutôt négocier un abrègement de la partie ou proposer un changement de règles afin de le rendre plus dynamique.
• Pour défier leurs amis de prendre le tricheur sur le fait.
• Pour ne pas éliminer tous les joueurs quand on occupe la place de maître du jeu dans un jeu de rôle.
• Pour éviter que tout le monde ne perde dans un jeu coopératif.
• Parce que cela fait partie de la réputation du tricheur, réputation de sa personnalité, et qu’il en retire une certaine reconnaissance auprès de son cercle d’amis. Il peut alors se retrouver piégé dans cette image et ne plus pouvoir gagner à la loyale sans être systématiquement soupçonné d’avoir triché.
• Parce que le tricheur est persuadé que tout le monde triche autour de la table.
Autant en connaître quelques-unes pour s’en prémunir.
Les tricheurs utilisent souvent des compétences externes au jeu pour tricher. La connaissance de la sténographie ou de la langue des signes pourra être détournée pour tricher à un jeu en équipe du style de Time’s up, Pictionnary, mais cela suppose évidemment que les équipiers soient de mèche.
Les techniques de prestidigitation seront aussi très utiles pour se distribuer un meilleur jeu, escamoter ou remplacer des éléments. On y inclura les techniques de détournement d’attention pratiquées par les magiciens.
Des moyens techniques, voire technologiques, peuvent être aussi mis en œuvre et demandent une certaine logistique, comme avoir placé un jeu de lettres sous la table, des oreillettes pour qu’un complice vous souffle les bonnes réponses.
Le culot peut à lui seul suffire : avec assez d’aplomb on peut prétendre que telle règle à notre avantage existe bel et bien, ou encore annoncer un pouvoir lié à une carte, que personne n’ira vérifier.
Par opportunisme, il est parfois difficile pour certains joueurs de résister à la tentation de tricher quand le danger d’être pris est nul. Dans le cas, par exemple, où votre adversaire quitte la pièce.
Perdre ne veut pas dire être un perdant, un looser. Il y a beaucoup de leçons à tirer d’une partie perdue.
Premièrement, que l’on ne peut pas toujours gagner dans la vie.
Cet apprentissage est moins difficile à assimiler grâce à un jeu qu’en étant confronté brutalement à un évènement de la vie réelle.
Deuxièmement, nous pouvons en dégager des stratégies à abandonner pour la partie prochaine et ainsi nous améliorer. Troisièmement, apprendre à perdre de manière élégante, c’est aussi apprendre à gérer sa frustration, sa colère, ses pulsions. Parfois, il est même drôle de perdre. On peut s’amuser d’avoir le personnage le plus puissant du jeu et ne tirer aux dés que des résultats minables..
En jouant avec des enfants, on peut leur rappeler que ce qui importe dans cette activité, c’est le temps de qualité partagé, le plaisir de jouer et pas qui a gagné ou perdu. Apprendre à être un bon gagnant, modeste et humble, est d’ailleurs tout aussi important que d’apprendre à perdre.
Plusieurs solutions s’offrent à vous. La solution diplomate consiste à lui faire remarquer gentiment qu’il s’est trompé. Vous pouvez aussi feinter en affirmant que vous ne vous rappelez plus bien des règles et proposer de les relire. Vous lui laissez ainsi le bénéfice du doute et une porte de sortie honorable. Vous pouvez également choisir d’être plus offensif : ne rien dire et contrer le tricheur en trichant vous-même. Evidemment, cela demande d’être aussi habile que le tricheur dans les manipulations.
Vous pouvez rappeler que la tricherie ne sera pas autorisée pendant le jeu … parfois il y a des fondamentaux à rappeler. Vous pouvez aussi prévoir éventuellement des sanctions en cas de tricherie, comme la perte de toutes ses ressources, comme l’a constaté sur le terrain M. Barbier au cours de ses recherches pour sa thèse. Certains jeux prévoient dans leurs règles des pénalités en cas de tricherie. Au jeu Compatibility, par exemple, le fait d’être pris à communiquer avec son partenaire fait reculer le duo de 3 cases.
On a vu apparaître des jeux qui intégraient la triche dans leur mécanique, comme le jeu de cartes Munchkin, qui dans une de ses extensions a ajouté des cartes « tricheur ».
Mais là encore, la tricherie annoncée n’en est pas une puisque tout le monde est au courant que ces cartes existent.
Et puis il y a cet ovni, MITO, qui a rencontré un vif succès auprès des petits et des grands. La mécanique est en effet très spéciale, car pour se débarrasser des cartes mito il faut utiliser des techniques de tricherie : escamotage de cartes, détournement d’attention,…
Il peut en effet être assez jouissif d’avoir l’autorisation de faire ce qui est habituellement interdit.
Mais attention, tout n’est pas permis non plus ! Il n’est pas autorisé de faire disparaître ses cartes pendant la phase arrêtée du jeu, ou de se débarrasser en douce de sa dernière carte. Donc la « vraie » tricherie est possible, même dans ce jeu où il est pourtant permis de « pseudo-tricher ».
Il faut donc pas mal de préparation, d’anticipation, d’intelligence et de roublardise pour tricher.
On pourrait même se demander si cette énergie bien utilisée n’assurerait pas bien des victoires à la loyale aux tricheurs, rendant donc la triche inutile, tout au moins dans les cas où le jeu ne réclame pas de compétence spécifique, telle que dextérité ou connaissances.
Et comme le dit un ami clown :
« Qu’est ce qui arrive aux tricheurs ? Ils gagnent… mais sans gloire » »
Source : Autour de la tricherie, ludobel.be
« Dans le cadre d’un jeu, il est facile de tricher. Surtout si l’on joue à un jeu « à l’allemande » impliquant de nombreuses manipulation de cubes dans son coin. La probabilité d’être pris en flagrant délit est donc relativement faible. De plus, la lourdeur de la sanction potentielle est quasi nulle: tout au plus un joueur vous fera une remarque, mais il n’y aura pas de réelle sanction. Et puis, il est facile de dire que l’on s’est trompé, que l’on n’a pas fait exprès. L’analyse bénéfice vs coûts du SMORC semble dès lors beaucoup plus pertinente: je peux prendre un avantage sans doute décisif pour la victoire vs j’ai peu de chance de me faire attraper et même si c’est le cas, il ne va rien m’arriver de grave. Je pense donc que le SMORC peut expliquer pourquoi des gens très honnêtes dans la vie peuvent être de vilains tricheurs autour d’un plateau.
Reste à savoir quels sont les réels bénéfices retirés. Gagner une partie en trichant… Inconcevable pour nombre d’entre nous! Je crois que c’est à ce moment qu’interviennent les considérations de la Fudge Factor Theory. Il semblerait que les tricheurs parviennent à rationnaliser suffisamment leur action pour se convaincre qu’il était justifié de tricher pour gagner. Sans doute valorisent-ils plus la destination que le voyage, mais ça, c’est le sujet d’un autre article! Sans doute aussi, leur esprit est rempli de justification du genre « ce n’était pas vraiment tricher; ça n’a pas tellement influé que ça la partie; j’aurais gagné de toutes façons; je suis sûr que les autres le font aussi. »
Le plus surprenant, me direz-vous peut-être, est encore de constater que quelqu’un peut tricher dans un jeu coopératif. « Pas si surprenant que ça » dirait Dan Ariely. Il a en effet mené des expériences ayant montré que la tendance générale à la tricherie est plus marquée lorsque celle-ci bénéficie à la fois à nous-mêmes et à une tierce personne. Encore plus contre-intuitif, est le constat que la tendance à tricherie est encore plus forte lorsque celle-ci ne profite qu’à une autre personne – et que nous n’en retirons donc aucun bénéfice direct. Là aussi, il s’agit d’une question de justification, de rationalisation. Il est plus acceptable à nos yeux de tricher si ça ne nous profite pas, et à fortiori si ça profite à quelqu’un d’autre que soi.
En définitive, quelles conclusions tirer? Le modèle SMORC semble avoir plus de sens lorsque l’on joue, peut-être parce que nos valeurs sont modifiées, ou tout du moins réévaluées. La question suivante serait alors de se demander si les jeux montrent notre vraie personnalité, ou si au contraire ils l’altèrent. »
Source : Vous arrive-t-il de tricher en jouant? gusandco.net
En fait, tricher pourrait être une fin en soi, car la triche procurerait un sentiment d’autosatisfaction :
« Ces derniers temps, on ne peut pas vraiment dire que les exemples de tricherie aient manqué. Entre le compte en Suisse de Jérôme Cahuzac, les longues années de mensonge de Lance Armstrong et les cas de fuites au bac, il y a de quoi faire. Et puis, ne nous mentons pas, les Français sont des tricheurs. Pourtant, ce vil acte peut parfois créer un sentiment agréable d'autosatisfaction, constate le Journal of Personality and Social Psychology.
A travers une série d’études, les chercheurs se sont penchés sur le ressenti des tricheurs en leur donnant différents tests écrits. Ceux qui ont triché se sont sentis bien. Même dans le cas où tricher entraînerait une non-validation des résultats, ceux qui l’ont fait ressentaient plus d’autosatisfaction que ceux ayant joué le jeu.
Plus surprenant encore, les tricheurs ayant reçu un rappel à la fin du test expliquant à quel point il était important de ne pas tricher se sentaient encore mieux que ceux n’ayant rien reçu.
«Il est perturbant de voir que les gens se sentent mieux après avoir triché, car il y a un renforcement émotionnel du comportement, signifiant qu’ils pourraient d’avantage recommencer», constate Nicole E. Ruedy, auteure de l’étude et chercheure à l’université de Washington.
Un tel comportement pourrait s’expliquer par un phénomène de groupe, remarque l’étude:
«Il est possible que quand un ensemble de personnes coordonnent leurs efforts pour tromper le système, cela accentue le plaisir du tricheur en répartissant la responsabilité en cas de conséquences négatives et en construisant un sens de la camaraderie.»
Le Time rapporte que de tels résultats ont surpris les spécialistes du genre, comme David Callahan auteur The Cheating Culture: Why More Americans Are Doing Wrong to Get Ahead (La culture de la triche: pourquoi plus d'Américains font de mauvaises choses pour être en tête) pour qui «les tricheurs se sentent souvent en conflit ou pas super».
«Montrer des personnes se sentant bien après avoir commis une transgression morale est plutôt novateur», a expliqué au New York Times Scott Wiltermuth, professeur assistant à l’université de Californie du Sud, qui a écrit sur le comportement éthique et n’était pas impliqué dans l’étude.
Les conclusions de ces recherches sur le «plaisir du tricheur» guident les chercheurs vers d’autres études plus poussées sur la compréhension des émotions et leur influence sur la morale et l’éthique. De la fraude fiscale au téléchargement illégal, les implications concrètes sont nombreuses. »
Source : Psychologie: tricher fait du bien, slate.fr
Enfin, d’autres chercheurs expliquent ce comportement par les hormones :
« Adepte de la triche au Monopoly ? C'est peut-être un "problème" d'hormones... C'est en tout cas ce que rapporte une équipe de chercheurs des universités du Texas et de Harvard qui publient une étude dans la revue Journal of Experimental Psychology concernant l'impact du système endocrinien sur notre tendance à adopter des comportements non-éthiques. Ainsi, une petite expérience réalisée sur 117 personnes leur a permis d'associer une plus forte propension à s'arranger avec la réalité avec un niveaux plus élevé de deux hormones : la testostérone et la cortisol, l'hormone du stress. "Bien que la science des hormones et celle du comportement soient nées au début du 19e siècle, ce n'est que récemment que la recherche a révélé à quel point le système endocrinien est en mesure d'influencer les comportements humains", explique le professeur Robert Josephs de l'université du Texas.
Un niveau élevé de testostérone diminue la crainte des sanctions tout en augmentant la sensibilité à la récompense" - Pr Robert Josephs
Il a été demandé à ces participants d'effectuer une série d'exercices de mathématiques et, une fois les solutions données, de se noter eux-mêmes et de rapporter le nombre de problèmes correctement résolus. Pour mettre un peu de piment, ceux qui présentaient les meilleurs résultats devaient toucher une récompense en espèces sonnantes et trébuchantes. À partir d'échantillons de salive collectés avant et après les tests, les chercheurs ont établi que les individus avec des niveaux élevés de testostérone et de cortisol avaient plus tendance à exagérer le nombre de problème correctement résolus.
L'explication ? D'un côté, "un niveau élevé de testostérone diminue la crainte des sanctions tout en augmentant la sensibilité à la récompense", explique le Pr Robert Josephs ; de l'autre, "un niveau élevé de cortisol est lié à un état de stress important". Or face à un problème, le niveau de stress est plus élevé. Ainsi "la testostérone fournit le courage de tricher tandis que la cortisol offre une bonne raison de tricher" : se soulager de son stress. Car de fait, les participants ayant triché présentaient après l'expérience des niveaux plus faibles de cortisol comme si le fait de tricher les avait libérés. "La réduction du stress est accompagnée d'une forte stimulation du circuit de la récompense dans le cerveau. Ainsi, ces modifications physiologico-psychologiques ont pour malheureuse conséquence de renforcer les comportements contraires à la morale", précise le Pr Josephs.
"Le message à retenir est que les injonctions fondées sur l'éthique et la morale tout comme celles reposant sur la menace de sanctions ne seraient en fait pas efficaces pour prévenir la fraude", poursuit le chercheur. Ces travaux mettant en lumière de nouveaux mécanismes sous-jacent à ce type de comportements pourraient ainsi ouvrir la voix à de nouvelles stratégie comme "méditer pour réduire son niveau de stress" par exemple. En attendant, vous saurez quoi répondre la prochaine fois que vous serez pris la main dans la banque au Monopoly. »
Source : Vous aimez tricher ? C'est peut-être la faute de vos hormones, sciencesetavenir.fr
- Ce que les jeux de société disent de nous, lexpress.fr
- Les meilleurs jeux de société pour les tricheurs, huffingtonpost.fr
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