Question d'origine :
Qui était le philosophe François de La Mothe Le Vayer (né en 1588) ?
Pourquoi n'est-il pas reconnu aujourd'hui ?
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 11/06/2020 à 13h39
Bonjour,
Nous avons trouvé plusieurs biographies de François de La Mothe Le Vayer et autres articles sur ses travaux. Quelques exemples :
- Wikipedia : François de La Mothe Le Vayer
- Encyclopaedia universalis
- Dictionnaire historique et critique / par Monsieur Bayle
- Les hommes illustres qui ont paru en France pendant ce siècle, avec leurs portraits au naturel. Tome 2 / , par M. Perrault - Paris, Antoine Dezallier, 1700 (à consulter dans Gallica)
- Stratégies d'écriture et pouvoir politique : le cas de La Mothe Le Vayer / Isabelle Moreau, Littératures classiques, 2004/3 (N° 55), p. 147-156.
- Le libertinage érudit et la formation de l’homme : le caractère paradoxal de François de La Mothe Le Vayer / Nathanaëlle Dupuy, Le Télémaque, 2018/2 (N° 54), p. 147-162.
- Les libertins du XVIIe siècle : "Vivre comme des dieux" / Jean Roudaut - Le Magazine Littéraire, no. 371 - mardi 1 décembre 1998, p. 20
Quelques extraits de l'Universalis :
"Philosophe et écrivain français, l'un des représentants majeurs de ce « libertinage érudit » qui marque, entre l'humanisme de la Renaissance et la philosophie du siècle des Lumières, une étape essentielle . À quarante ans, cet indolent n'a écrit aucun livre : il s'est prêté avec quelque répugnance aux devoirs de sa charge de substitut au procureur du roi et s'est surtout « composé un caractère. Le caractère d'abord d'un original [...] ; le caractère, aussi, d'un homme indépendant, réservé, un peu sournois, avec une prudence ombrageuse et volontiers narquoise » (R. Pintard) — sous laquelle il cache des méditations qui deviendront de plus en plus audacieuses. Les nombreux voyages qu'il a entrepris lui ont fait découvrir l'infinie variété des mœurs et des croyances, l'instabilité des opinions et des institutions les plus autorisées ; ils l'ont engagé à de vastes lectures (philosophes sceptiques et relations de voyages) ; les innombrables conversations, franches et hardies, avec ses amis de la Tétrade, ce groupe que forment avec lui Gassendi, Diodati et Naudé, ce grand foyer (secret) du libertinage érudit, le décident à publier le fruit de ses réflexions. " [...]
La Mothe Le Vayer, ou « les variations d'un sceptique », les détours, les ruses et finalement la défaite d'un libertin, conclut l'historien du libertinage érudit : «Trop de subtilités en somme dans ses livres, trop de réserves, trop de démentis et de contradictions [...] sa philosophie libertine a été pour une large part frappée de stérilité, faute d'avoir pu, d'avoir osé être logique et claire » (R. Pintard).
Vous dites qu'il ne s'agit pas d'un philosophe reconnu. Certains affirment que sa pensée, bien que pertinente, s'est quelque peu dispersée et aurait perdu de sa force. A l'image de cette citation de Voltaire qui dit en parlant de François de La Mothe Le Vayer :
«On trouve beaucoup d’esprit et de raison dans ses ouvrages trop diffus . » (Académie française).
Nathanaëlle Dupuy en introduction de son article cité plus haut indique : " Les libertins érudits du XVIIe siècle sont des auteurs qui ont été dévalorisés deux fois : une première fois dans le mouvement même qui les nommait ainsi comme tels, mouvement porté notamment par le Père Garasse et Mersenne. Une seconde fois par l’histoire de la philosophie et de la littérature qui les ont relégués aux marges du Grand Siècle comme autant d’auteurs mineurs. Même ceux comme René Pintard – le père des recherches sur le libertinage érudit au XXe siècle – qui les ont étudiés, ne leur ont pas reconnu de véritable consistance théorique. Ces dernières années, les spécialistes de l’histoire de la philosophie et de la philosophie moderne se sont intéressés à la structure même de leur pensée et ont parfaitement analysé cette période, mais il n’y a pas de travaux significatifs du libertinage érudit en philosophie de l’éducation . "
Un sujet qui demande à être creusé !
Pour en savoir plus sur le libertinage érudit, vous pouvez consulter ces documents :
- Le libertinage érudit dans la première moitié du XVIIe siècle / René Pintard - consultable dans son édition précédente à la BML
- Les libertins érudits en France au XVIIe siècle / Françoise Charles-Daubert
- LES LIBERTINS : VANINI, LE PHILOSOPHE À LA LANGUE ARRACHÉE / Didier Foucault - L'Histoire, no. 398 - DOSSIER, mardi 1 avril 2014, p. 38
- Le tour d'Europe des incrédules / STÉPHANE VAN DAMME - L'Histoire - Collections, no. 87 - Dossier, vendredi 1 mai 2020, p. 78
dont voici quelques extraits :
" Avant que ne s'épanouissent aux Provinces-Unies les critiques radicales du spinozisme, Italiens, Français, Anglais, Allemands, prirent, dès la première moitié du XVIIe siècle, le risque, parfois physique, de combattre les pouvoirs établis et les dogmatismes au nom de la liberté de penser. Libertins érudits, sceptiques, épicuriens, penseurs hétérodoxes des diasporas huguenote ou juive, cartésiens, nouveaux philosophes expérimentateurs, nourrissent cet imaginaire d'un underground intellectuel qui finit par rassembler tous ceux qui ne renverraient pas à la pensée dominante ou dogmatique des Églises. [...]
Ces dissidents sont souvent des hommes de lettres. De sorte qu'on a pu les décrire comme les praticiens d'une guérilla intellectuelle contre les autorités établies. Afin d'échapper à la persécution tout en diffusant leurs écrits, ils ont inventé une écriture de la dissimulation. Souvent présents dans les clientèles aristocratiques des princes de sang, comme Gaston d'Orléans, le frère cadet de Louis XIII,on les retrouve dans les fonctions de précepteur comme François de La Mothe Le Vayer ou de bibliothécaire comme Gabriel Naudé. Après la multiplication des scandales, ils militent d'abord pour un art de la discrétion et de la prudence, que le moraliste Pierre Charron avait déjà revendiqué en 1601 dans son traité De la sagesse , mais ils usent aussi d'un art de la tromperie.
L'anonymat, la pseudonymie, l'écriture équivoque, sont ainsi des pratiques courantes dans ces milieux. La Mothe Le Vayer par exemple a publié des livres sous le pseudonyme d'Orasius Tubero ou de Tubertus Ocella, avec des dates et des lieux d'édition fantaisistes afin de tromper la censure. Mais ce repli n'est pas simplement un moyen d'échapper à la persécution. Il permet aussi de produire une subversion politique et morale, de mener un combat de l'intérieur à la fois contre la religion établie et contre l'absolutisme ."
Bonne journée.
Nous avons trouvé plusieurs biographies de François de La Mothe Le Vayer et autres articles sur ses travaux. Quelques exemples :
- Wikipedia : François de La Mothe Le Vayer
- Encyclopaedia universalis
- Dictionnaire historique et critique / par Monsieur Bayle
- Les hommes illustres qui ont paru en France pendant ce siècle, avec leurs portraits au naturel. Tome 2 / , par M. Perrault - Paris, Antoine Dezallier, 1700 (à consulter dans Gallica)
- Stratégies d'écriture et pouvoir politique : le cas de La Mothe Le Vayer / Isabelle Moreau, Littératures classiques, 2004/3 (N° 55), p. 147-156.
- Le libertinage érudit et la formation de l’homme : le caractère paradoxal de François de La Mothe Le Vayer / Nathanaëlle Dupuy, Le Télémaque, 2018/2 (N° 54), p. 147-162.
- Les libertins du XVIIe siècle : "Vivre comme des dieux" / Jean Roudaut - Le Magazine Littéraire, no. 371 - mardi 1 décembre 1998, p. 20
Quelques extraits de l'Universalis :
"
La Mothe Le Vayer, ou « les variations d'un sceptique », les détours, les ruses et finalement la défaite d'un libertin, conclut l'historien du libertinage érudit : «
Vous dites qu'il ne s'agit pas d'un philosophe reconnu. Certains affirment que sa pensée, bien que pertinente, s'est quelque peu dispersée et aurait perdu de sa force. A l'image de cette citation de Voltaire qui dit en parlant de François de La Mothe Le Vayer :
«
Nathanaëlle Dupuy en introduction de son article cité plus haut indique : "
Un sujet qui demande à être creusé !
Pour en savoir plus sur le libertinage érudit, vous pouvez consulter ces documents :
- Le libertinage érudit dans la première moitié du XVIIe siècle / René Pintard - consultable dans son édition précédente à la BML
- Les libertins érudits en France au XVIIe siècle / Françoise Charles-Daubert
- LES LIBERTINS : VANINI, LE PHILOSOPHE À LA LANGUE ARRACHÉE / Didier Foucault - L'Histoire, no. 398 - DOSSIER, mardi 1 avril 2014, p. 38
- Le tour d'Europe des incrédules / STÉPHANE VAN DAMME - L'Histoire - Collections, no. 87 - Dossier, vendredi 1 mai 2020, p. 78
dont voici quelques extraits :
" Avant que ne s'épanouissent aux Provinces-Unies les critiques radicales du spinozisme, Italiens, Français, Anglais, Allemands, prirent, dès la première moitié du XVIIe siècle, le risque, parfois physique, de combattre les pouvoirs établis et les dogmatismes au nom de la liberté de penser. Libertins érudits, sceptiques, épicuriens, penseurs hétérodoxes des diasporas huguenote ou juive, cartésiens, nouveaux philosophes expérimentateurs, nourrissent cet imaginaire d'un underground intellectuel qui finit par rassembler tous ceux qui ne renverraient pas à la pensée dominante ou dogmatique des Églises. [...]
Ces dissidents sont souvent des hommes de lettres. De sorte qu'on a pu les décrire comme les praticiens d'une guérilla intellectuelle contre les autorités établies. Afin d'échapper à la persécution tout en diffusant leurs écrits, ils ont inventé une écriture de la dissimulation. Souvent présents dans les clientèles aristocratiques des princes de sang, comme Gaston d'Orléans, le frère cadet de Louis XIII,
L'anonymat, la pseudonymie, l'écriture équivoque, sont ainsi des pratiques courantes dans ces milieux. La Mothe Le Vayer par exemple a publié des livres sous le pseudonyme d'Orasius Tubero ou de Tubertus Ocella, avec des dates et des lieux d'édition fantaisistes afin de tromper la censure. Mais ce repli n'est pas simplement un moyen d'échapper à la persécution. Il permet aussi de produire une subversion politique et morale, de mener un combat de l'intérieur à la fois contre la religion établie et contre l'absolutisme
Bonne journée.
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