Question d'origine :
Utilise-t-on réellement de l'huile bouillante jetée du haut des murailles des châteaux forts au moyen Age (confirmée par J. Le Goff, Le Moyen Age expliqué au enfants) ou utilisait-on plutôt de l'eau bouillante ou du sable brûlant étant donné le prix de l'huile ?
Merci
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 15/10/2008 à 09h54
La réponse de Jacques Le Goff dans le livre Le Moyen Age expliqué aux enfants ne vise pas à confirmer l’utilisation de l’huile bouillante. Il répond sur une représentation plus générale des sièges, sans aller dans le détail.
Vous trouverez par contre une réponse très précise et qui confirme votre point de vue, dans Les châteaux forts. De la guerre à la paix, par Jean Mesqui, page 117 :
[…] Pauvres défenseurs, obligés par la tradition moderne à faire bouillir des marmites d’huile sur des feux ménagés sur les chemins de ronde, et à manipuler ces marmites pour déverser l’huile bouillante depuis les créneaux, les hourds, voire les mâchicoulis… Il est curieux de constater à quel point cette imagerie traditionnelle fait loi.
Pourtant, qui pourrait croire, à bien y réfléchir, que les défenseurs alimentaient en haut des murs des feux pour chauffer de lourdes marmites, remplies d’un liquide très coûteux, et au surplus que ces mêmes défenseurs agrippaient des marmites brûlantes pour les déverser, sous le feu ennemi, sur quelques assaillants… ? Les textes anciens permettent d’affirmer au contraire, que la défense sommitale repose essentiellement sur l’usage de projectiles solides, à commencer par les pierres qui étaient stockées avant le siège, sur le sommet des tours et des courtines ; mais on utilisa également des matériaux tout aussi efficaces que l’huile bouillante, par exemple la chaux vive liquide.
Le règlement d’Hugues de Cardaillac, en 1347, pour le château de Bioule, prévoyait ainsi au sommet des tours des bacs de chaux vive. Par ailleurs les récits de siège mentionnent le recours à des projectiles bien plus prosaïques ne serait-ce que les tonneaux d’excréments lancés lors de tel siège alsacien au XIII° siècle.
Mais pour l’essentiel, l’attaque et la défense des places reposèrent sur l’usage des armes de jet, qu’il s’agisse des armes individuelles (arcs et arbalètes), ou collectives (trébuchets, catapultes), complétées par celui de projectiles manuels, pierres ou poutres. L’approche est certes moins romantique , mais elle permet de comprendre que, durant le Moyen Age, comme auparavant pendant l’Antiquité, et plus tard à l’époque classique, la «poliorcétique» (l’art du siège) fut toujours affaire de spécialistes qui mirent en œuvre des méthodes de plus en plus évoluées ; les ingéniatores, ingénieurs au XVI° siècle, n’avaient cure d’huile bouillante. Pour eux, la façon de construire les machines ou les canons, les méthodes de progression vers la place, les moyens de détecter la mine ou la sape, formaient un corps de doctrine dont l’évolution est autrement significative que les discours faciles de guides touristiques en manque d’inspiration. »
Pour en savoir plus :
L’Art de la guerre au Moyen Age
La Guerre au Moyen Age
DANS NOS COLLECTIONS :
Ça pourrait vous intéresser :
Je recherche un roman se déroulant en Angleterre au...
The secret museum of mankind vol.3 : ethnic music classics...
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter