Question d'origine :
Bonjour, pourqoui le suicide au japon est un fleau ? que manque aux japonais pour vivre heureux???
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 16/04/2014 à 13h17
Bonjour,
Tandis que l’AFP relevait effectivement dans une dépêche du jeudi 26 septembre 2013, que le Japon possédait l’un des taux de suicide les plus élevés au monde (environ 22 pour 100.000 habitants en 2012), un chiffre deux fois plus élevé qu'aux Etats-Unis et que dans de nombreux pays d'Europe, Le Figaro a noté dans son édition du jeudi 17 janvier 2013 un repli du nombre de suicides au Japon :
Alors que le Japon tente de faire diminuer le taux de suicide, l'un des plus élevé au monde, le pays enregistre une baisse de 9,4% du nombre de suicides 2012 et tombe à son plus bas niveau en 15 ans , selon l'Agence de la police nationale citée par Les Echos.
L'an dernier 27.766 personnes ont mis fin à leurs jours dans l'archipel. Depuis 1998, ce nombre de cas était, chaque année, resté supérieur à 30.000.
Vous trouverez bien d’autres articles dans la base de données Europresse, disponible dans les bibliothèques du réseau BML ou consultable à distance si vous êtes abonnés.
Cela étant dit, quelles peuvent bien être les causes du suicide au Japon ?
L’AFP relevait le 9 mars 2012 que le nombre de suicides avait nettement augmenté l'an dernier au Japon après leséisme et le tsunami qui ont dévasté le 11 mars les côtes nord-est de l'archipel (…) Cette hausse de plus de 20% du nombre de suicides enregistré en un mois est probablement due au moins en partie à l'anxiété qui s'est emparé de la société japonaise dans les semaines suivant cette catastrophe, a estimé un responsable.
En mai 2011, 3.375 personnes se sont donné la mort, soit plus d'un dixième du total annuel et plus de 20% par rapport au même mois de l'année précédente.
Selon les statistiques de la police et du gouvernement, le nombre de suicides a atteint 30.651 en 2011.
"Un sentiment d'anxiété s'est diffusé au sein de toute la société japonaise après la catastrophe et nous soupçonnons cela d'avoir été un facteur aggravant", a déclaré un responsable du gouvernement. Il a ajouté que le nombre de suicides a été particulièrement élevé parmi les hommes de trente ans.
Néanmoins, ce ne sont pas là les uniques raisons et dès 2007 dans le journal L’Orient, Carine Mansour s’interrogeait sur le « malheur » des japonais :
À en croire une étude réalisée par le groupe de recherche britannique FDS le mois dernier,les salariés japonais seraient les plus déprimés . De fait, le pays du Soleil Levant, derrière une image de pays exotique, affiche l'un des plus forts taux de suicide au monde parmi les pays industrialisés (…) Le Japon a une longue tradition de suicide, mais les chiffres ont explosé pour atteindre plus de 30 000 suicides par an à la fin des années 1990, période de forte récession économique qui a entraîné des restructurations dans de nombreuses entreprises. Ce sont principalement des quinquagénaires qui ont mis fin à leurs jours. Malgré la reprise économique, le taux de suicide reste élevé (…) L'ampleur de la crise n'a été mesurée que récemment avec la multiplication de groupes de suicide créés entre inconnus, sur Internet. Ces cas de suicides collectifs sont en nette recrudescence. En 2005, 91 personnes se sont donné la mort de cette façon, contre 55 en 2004 et 34 en 2003 (…) Les spécialistes définissent le suicide comme un acte auquel une personne est « contrainte » par des pressions économiques ou sociales, plus qu'une décision personnelle prise par un sujet psychologiquement faible. Au Japon, il est malaisé de vivre sans appartenir à un groupe, et une fois qu'un individu en est exclu, il est très difficile de s'y réinsérer. La dépression et d'autres problèmes psychologiques sont à l'origine de la majorité des suicides, soulignent les experts. Le Japon n'a pas réussi à faire baisser son taux de suicide parce que la société continue de minimiser l'importance des ennuis personnels. Que ce soit à l'école, l'université, au travail ou dans le métro, les autres font semblant de n'avoir rien vu (…)Les politiques de prévention se heurtent également à des obstacles culturels et historiques bien ancrés au pays du Soleil Levant, où se suicider constitue une façon honorable de racheter la disgrâce publique et d'exprimer sa honte. En outre, dénonce un expatrié libanais récemment établi à Kobe, « le plus effrayant c'est que le suicide est en train de devenir une mode (...) Muriel Jolivet explique que le nombre alarmant de suicides au Japon est dû à un énorme problème de communication entre les gens, dans une société où les maladies nerveuses sont taboues (… )
Trois catégories sont représentées : les hommes entre deux âges, victimes d'une restructuration économique et qui ont perdu leur emploi, les personnes âgées et les enfants, victimes du « ijime » à l'école, ce qui se traduit souvent par des persécutions ou des mises en quarantaine entre petits camarades.
Enfin, poursuit Muriel Jolivet, je crois qu'il existe malgré tout une tradition du suicide au Japon , dans l'esthétique de la mort. Maurice Pinguet le montre très bien dans son livre La mort volontaire au Japon.
Ce même constat a été formulé par Françoise Biotti-Mache dans son article « Un rite social de mort: seppuku aspects historiques ». Celle-ci explique en effet que les causes du suicide au Japon sont bien évidemment multiples, mais la plupart tournent autour de la notion d’honneur, honneur exigeant, rigoureux, honneur qui se concrétise dans l’abnégation et le sacrifice de soi, mais aussi honneur qui plonge ses racines dans l’esprit guerrier des samouraïs, synthétisé dans leur code bien connu, le Bushid, enfin honneur qui, par-dessus tout, revêt un impérieux caractère social. La terminologie du suicide ou jisatsu en témoigne et des expressions comme inseki jisatsu (pour éviter la honte) ougyokusai (pour l’honneur) sont éloquentes (…) Dès l’origine, le suicide, au Japon, fut donc marqué par ce double caractère : guerrier et honorable.
Source : Biotti-Mache Françoise, « Un rite social de mort: seppuku aspects historiques », Études sur la mort 2/ 2011 (n° 140), p. 113-122
URL : http://www.cairn.info/revue-etudes-sur- ... ge-113.htm. (base de données consultable dans les bibliothèques du réseau BML )
Tandis que l’AFP relevait effectivement dans une dépêche du jeudi 26 septembre 2013, que le Japon possédait l’un des taux de suicide les plus élevés au monde (environ 22 pour 100.000 habitants en 2012), un chiffre deux fois plus élevé qu'aux Etats-Unis et que dans de nombreux pays d'Europe, Le Figaro a noté dans son édition du jeudi 17 janvier 2013 un repli du nombre de suicides au Japon :
Alors que le Japon tente de faire diminuer le taux de suicide, l'un des plus élevé au monde,
L'an dernier 27.766 personnes ont mis fin à leurs jours dans l'archipel. Depuis 1998, ce nombre de cas était, chaque année, resté supérieur à 30.000.
Vous trouverez bien d’autres articles dans la base de données Europresse, disponible dans les bibliothèques du réseau BML ou consultable à distance si vous êtes abonnés.
Cela étant dit, quelles peuvent bien être les causes du suicide au Japon ?
L’AFP relevait le 9 mars 2012 que le nombre de suicides avait nettement augmenté l'an dernier au Japon après le
En mai 2011, 3.375 personnes se sont donné la mort, soit plus d'un dixième du total annuel et plus de 20% par rapport au même mois de l'année précédente.
Selon les statistiques de la police et du gouvernement, le nombre de suicides a atteint 30.651 en 2011.
"Un sentiment d'anxiété s'est diffusé au sein de toute la société japonaise après la catastrophe et nous soupçonnons cela d'avoir été un facteur aggravant", a déclaré un responsable du gouvernement. Il a ajouté que le nombre de suicides a été particulièrement élevé parmi les hommes de trente ans.
Néanmoins, ce ne sont pas là les uniques raisons et dès 2007 dans le journal L’Orient, Carine Mansour s’interrogeait sur le « malheur » des japonais :
À en croire une étude réalisée par le groupe de recherche britannique FDS le mois dernier,
Trois catégories sont représentées : les hommes entre deux âges, victimes d'une restructuration économique et qui ont perdu leur emploi, les personnes âgées et les enfants, victimes du « ijime » à l'école, ce qui se traduit souvent par des persécutions ou des mises en quarantaine entre petits camarades.
Enfin, poursuit Muriel Jolivet, je crois qu'il existe malgré tout une
Ce même constat a été formulé par Françoise Biotti-Mache dans son article « Un rite social de mort: seppuku aspects historiques ». Celle-ci explique en effet que les causes du suicide au Japon sont bien évidemment multiples, mais la plupart tournent autour de la notion d’honneur, honneur exigeant, rigoureux, honneur qui se concrétise dans l’abnégation et le sacrifice de soi, mais aussi honneur qui plonge ses racines dans l’esprit guerrier des samouraïs, synthétisé dans leur code bien connu, le Bushid, enfin honneur qui, par-dessus tout, revêt un impérieux caractère social. La terminologie du suicide ou jisatsu en témoigne et des expressions comme inseki jisatsu (pour éviter la honte) ougyokusai (pour l’honneur) sont éloquentes (…) Dès l’origine, le suicide, au Japon, fut donc marqué par ce double caractère : guerrier et honorable.
Source : Biotti-Mache Françoise, « Un rite social de mort: seppuku aspects historiques », Études sur la mort 2/ 2011 (n° 140), p. 113-122
URL : http://www.cairn.info/revue-etudes-sur- ... ge-113.htm. (base de données consultable dans les bibliothèques du réseau BML )
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