Prénoms hurluberlubuesques
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 23/04/2014 à 09h00
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Question d'origine :
Bonjour,
j'ai appris récemment que les prénoms "Wendy" et "Jessica" sortaient tout droit de l'imagination de James Matthew Barrie et William Shakespeare, qui les ont popularisé à travers leurs œuvres (" Peter Pan" et " Le marchand de Venise" ).
Y a-t-il en France et à l'étranger d'autres prénoms "reconnus" ( assez populaires pour être considérés par la majorité des gens comme des " vrais" prénoms ) qui ont été ainsi crée de toute pièce ?
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 24/04/2014 à 09h19
Bonjour,
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il semble que J. M. Barrie n’ait pas inventé le prénom de Wendy, mais il l’a rendu populaire. Ce prénom, très rare en Grande-Bretagne avant Peter Pan, serait d’origine galloise, peut-être dérivé de Gwendolyn. On en trouve en tout cas des traces dans les années 1880, donc avant la publication de la pièce de J.M. Barrie (en 1904).
Source : Wikipedia (en anglais)
On peut trouver d’autres exemples de prénoms popularisés ou inventés par des auteurs, et adoptés comme « vrais » prénoms :
•Mireille , popularisée en France par le poète Frédéric Mistral :
Article paru dans le Figaro du 6 septembre 1913.
On parle beaucoup de Mireille, à propos du monument de Gounod, qui sera inauguré le 6 septembre 1913 à Saint-Rémy-de-Provence. À ce sujet, on nous demande si le nom de Mireille peut figurer à l'état civil de nos mairies ou sur les registres de baptême. Y a-t-il eu déjà des Mireille dans le Midi avant ce personnage poétique créé par Mistral, et y en a-t-il encore actuellement?
Or, voici la réponse à cette question, que l'un de nos collaborateurs a reçue du père de Mireille, le grand poète, qu'il avait interrogé:
Mireille n'a jamais existé, selon le poème que j'ai écrit sur ce nom. Mais le nom, le nom seul existe, et dans mon enfance on disait, ici, en parlant d'une belle jeune fille: Voilà Mireille, la belle Mireille, Mireille mes amours. Il restait ce nom d'une héroïne oubliée.
Je suis persuadé que Miréio (Mireille) est le même nom que Marie, dérivant de l'hébreu Myriam et provençalisé par les juifs de Provence, très anciens dans le pays.
Depuis le poème et l'opéra de Gounod, le nom de Mireille est très usité comme nom de baptême. Il y en a des centaines et des centaines!
Au commencement, les curés et les officiers d'état-civil refusaient de l'admettre; maintenant il est admis par l'Église et par l'État. Il est même inscrit au ciel par une planète nouvelle découverte et baptisée par Flammarion.
Je n'ai d'autre enfant que mon poème de Mireille, mais je suis le parrain d'une multitude d'autres de ce nom.
F. MISTRAL.
Donc, quoique ne figurant pas au calendrier ni sur la liste des saintes de l'Église sous ce joli nom de Provence, Mireille est devenu «prénom» usité aux deux extrémités de la France, en Bretagne comme en Provence.
•Vanessa , inventé par Johnathan Swift en référence à son amie Esther Vanhomrigh.
Source : Wikipedia
•Thelma , inventé par la romancière britannique Marie Corelli en 1887 avec son roman homonyme.
Source : Un prénom pour mon enfant, Jean-Marc de Foville
•Fiona , inventé par l’écrivain anglais William Sharps, qui l’utilisa comme pseudonyme.
Source: Un prénom pour mon enfant, Jean-Marc de Foville
•Pamela , inventé par le poète anglais Philip Sidney au XVIe siècle, auteur de l’Arcadie.
Source : Un prénom pour mon enfant, Jean-Marc de Foville
Mais ces inventions / popularisations littéraires sont le sommet de l’iceberg, si on décide de prendre en compte les variantes, diminutifs et prénoms rares qui se sont formés anonymement, notamment à partir du XIXe siècle :
Alors que les prénoms masculins ont longtemps été plus divers que les prénoms féminins, à partir du XIXe siècle, le stock de prénoms féminins augmente plus vite que le stock des prénoms masculins. Les filles reçoivent plus facilement comme prénom des innovations, sous la forme de variantes, de diminutifs utilisés comme prénoms, de suffixations (en –ine ou en –ette). Elles ne reçoivent plus de prénoms masculins et la différence des sexes est dorénavant plus marquée [Daumas, 2000]. A partir du XIXe siècle donc, le nombre de prénoms féminins en circulation dépasse le nombre de prénoms masculins en circulation : si « Jeannette » devient un prénom à part entière, « Jeannot » reste un surnom. Le XXe siècle, d’un certain côté, peut alors être vu comme un temps d’accélération des phénomènes apparus au cours du XIXe siècle.
L’accélération du XXe siècle
Les prénoms connaissant un certain succès suivent un « cycle » temporel. Un prénom depuis longtemps abandonné est repris par quelques parents, un prénom est inventé et donné à quelques enfants… Dans certains cas, ce phénomène semble faire « boule de neige », d’autres parents donnent ce prénom, de plus en plus fréquemment. Après une période d’accélération de quelques années, le prénom arrive à un sommet et la fréquence retombe aussi vite qu’elle avait augmenté.
[…]Aux prénoms choisis dans un stock limité par la loi (qui interdisait de choisir des prénoms autres qu’historiques ou inscrits dans les calendriers) et les coutumes ont succédé des prénoms piochés dans un stock beaucoup plus large : à la fois parce que la loi permet un nombre beaucoup plus grand de prénoms et parce que les parents ne reprennent plus systématiquement des prénoms en usage aux générations précédentes.
Ainsi, s’il suffisait des vingt prénoms les plus fréquents pour nommer la moitié d’une classe d’âge en 1946, il en faut plus de cent quarante en 2004. Les choix des parents se sont éparpillés :ils préfèrent de plus en plus des prénoms rarement donnés, en France comme aux Etats-Unis[Twenge et al., 2010].
Quelle que soit l’échelle d’observation, l’on constate au cours du XXe siècle une augmentation du nombre de prénoms « uniques » ou rares, des prénoms qui individualisent mécaniquement les enfants qui les portent. Que l’on prenne comme mesure le nombre de prénoms donnés une seule fois dans l’année ou le nombre de nouveaux prénoms (faisant leur apparition dans les registres pour la première fois), c’est une augmentation que l’on va repérer […]. Depuis l’après-guerre, une part croissante des bébés de l’année reçoivent un prénom rare (au sens du Fichier des prénoms, c’est-à-dire donnés une ou deux fois dans l’année seulement). Vers 2005, 7% des filles et 6% des garçons reçoivent un prénom « rare ». Choisir un prénom très rare, pris collectivement, n’est pas une pratique ultraminoritaire : chaque prénom individuel l’est, mais choisir un tel prénom s’inscrit dans une tendance partagée.
Source : Sociologie des prénoms, Baptiste Coulmont
Pour se rendre compte de la proportion de prénoms « courants » (mais aussi beaucoup moins communs) constitués à partir d'une même racine ou d’une même origine, il suffit d’ouvrir un guide de prénoms. Ainsi le Dictionnaire des prénoms d’hier et d’aujourd’hui, d’ici et d’ailleurs indique pour le prénom Laure / Laurent (du latin laurus, laurier) pas moins de 58 variantes : Laura, Laurence, Laurentin, Laurentine, Laurette, Laurie, Lauriane, Laurianne, Lori, Lorrie, Laureen, Laurel, Lanrene, Laurena, Lanty, Lora, Loren, Loretta, Loritta, Lorna, Lorenza, Lorenzo, Laurens, Lawrence, Larry, Lawry, Lorin, Larrance, Lawrance, Lorenz, Laurenz, Lauritz, Lars, Labhras, Labhruinn, Lorinda, Louwra, Lavra, Lavria, Lavr, Oretta, Laureano, Lauridas, Lauréat, Lortz, Lewerentz, Löhr, Löns, Lavrenti, Louwine, Renske, Lauers, Lourens, Rienzo, Renzo, Zenzo, Lencho, Lorans.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il semble que J. M. Barrie n’ait pas inventé le prénom de Wendy, mais il l’a rendu populaire. Ce prénom, très rare en Grande-Bretagne avant Peter Pan, serait d’origine galloise, peut-être dérivé de Gwendolyn. On en trouve en tout cas des traces dans les années 1880, donc avant la publication de la pièce de J.M. Barrie (en 1904).
Source : Wikipedia (en anglais)
On peut trouver d’autres exemples de prénoms popularisés ou inventés par des auteurs, et adoptés comme « vrais » prénoms :
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Article paru dans le Figaro du 6 septembre 1913.
On parle beaucoup de Mireille, à propos du monument de Gounod, qui sera inauguré le 6 septembre 1913 à Saint-Rémy-de-Provence. À ce sujet, on nous demande si le nom de Mireille peut figurer à l'état civil de nos mairies ou sur les registres de baptême. Y a-t-il eu déjà des Mireille dans le Midi avant ce personnage poétique créé par Mistral, et y en a-t-il encore actuellement?
Or, voici la réponse à cette question, que l'un de nos collaborateurs a reçue du père de Mireille, le grand poète, qu'il avait interrogé:
Mireille n'a jamais existé, selon le poème que j'ai écrit sur ce nom. Mais le nom, le nom seul existe, et dans mon enfance on disait, ici, en parlant d'une belle jeune fille: Voilà Mireille, la belle Mireille, Mireille mes amours. Il restait ce nom d'une héroïne oubliée.
Je suis persuadé que Miréio (Mireille) est le même nom que Marie, dérivant de l'hébreu Myriam et provençalisé par les juifs de Provence, très anciens dans le pays.
Depuis le poème et l'opéra de Gounod, le nom de Mireille est très usité comme nom de baptême. Il y en a des centaines et des centaines!
Au commencement, les curés et les officiers d'état-civil refusaient de l'admettre; maintenant il est admis par l'Église et par l'État. Il est même inscrit au ciel par une planète nouvelle découverte et baptisée par Flammarion.
Je n'ai d'autre enfant que mon poème de Mireille, mais je suis le parrain d'une multitude d'autres de ce nom.
F. MISTRAL.
Donc, quoique ne figurant pas au calendrier ni sur la liste des saintes de l'Église sous ce joli nom de Provence, Mireille est devenu «prénom» usité aux deux extrémités de la France, en Bretagne comme en Provence.
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Source : Wikipedia
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Source : Un prénom pour mon enfant, Jean-Marc de Foville
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Source: Un prénom pour mon enfant, Jean-Marc de Foville
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Source : Un prénom pour mon enfant, Jean-Marc de Foville
Mais ces inventions / popularisations littéraires sont le sommet de l’iceberg, si on décide de prendre en compte les variantes, diminutifs et prénoms rares qui se sont formés anonymement, notamment à partir du XIXe siècle :
Alors que les prénoms masculins ont longtemps été plus divers que les prénoms féminins, à partir du XIXe siècle, le stock de prénoms féminins augmente plus vite que le stock des prénoms masculins. Les filles reçoivent plus facilement comme prénom des innovations, sous la forme de variantes, de diminutifs utilisés comme prénoms, de suffixations (en –ine ou en –ette). Elles ne reçoivent plus de prénoms masculins et la différence des sexes est dorénavant plus marquée [Daumas, 2000]. A partir du XIXe siècle donc, le nombre de prénoms féminins en circulation dépasse le nombre de prénoms masculins en circulation : si « Jeannette » devient un prénom à part entière, « Jeannot » reste un surnom. Le XXe siècle, d’un certain côté, peut alors être vu comme un temps d’accélération des phénomènes apparus au cours du XIXe siècle.
L’accélération du XXe siècle
Les prénoms connaissant un certain succès suivent un « cycle » temporel. Un prénom depuis longtemps abandonné est repris par quelques parents, un prénom est inventé et donné à quelques enfants… Dans certains cas, ce phénomène semble faire « boule de neige », d’autres parents donnent ce prénom, de plus en plus fréquemment. Après une période d’accélération de quelques années, le prénom arrive à un sommet et la fréquence retombe aussi vite qu’elle avait augmenté.
[…]Aux prénoms choisis dans un stock limité par la loi (qui interdisait de choisir des prénoms autres qu’historiques ou inscrits dans les calendriers) et les coutumes ont succédé des prénoms piochés dans un stock beaucoup plus large : à la fois parce que la loi permet un nombre beaucoup plus grand de prénoms et parce que les parents ne reprennent plus systématiquement des prénoms en usage aux générations précédentes.
Ainsi, s’il suffisait des vingt prénoms les plus fréquents pour nommer la moitié d’une classe d’âge en 1946, il en faut plus de cent quarante en 2004. Les choix des parents se sont éparpillés :ils préfèrent de plus en plus des prénoms rarement donnés, en France comme aux Etats-Unis[Twenge et al., 2010].
Quelle que soit l’échelle d’observation, l’on constate au cours du XXe siècle une augmentation du nombre de prénoms « uniques » ou rares, des prénoms qui individualisent mécaniquement les enfants qui les portent. Que l’on prenne comme mesure le nombre de prénoms donnés une seule fois dans l’année ou le nombre de nouveaux prénoms (faisant leur apparition dans les registres pour la première fois), c’est une augmentation que l’on va repérer […]. Depuis l’après-guerre, une part croissante des bébés de l’année reçoivent un prénom rare (au sens du Fichier des prénoms, c’est-à-dire donnés une ou deux fois dans l’année seulement). Vers 2005, 7% des filles et 6% des garçons reçoivent un prénom « rare ». Choisir un prénom très rare, pris collectivement, n’est pas une pratique ultraminoritaire : chaque prénom individuel l’est, mais choisir un tel prénom s’inscrit dans une tendance partagée.
Source : Sociologie des prénoms, Baptiste Coulmont
Pour se rendre compte de la proportion de prénoms « courants » (mais aussi beaucoup moins communs) constitués à partir d'une même racine ou d’une même origine, il suffit d’ouvrir un guide de prénoms. Ainsi le Dictionnaire des prénoms d’hier et d’aujourd’hui, d’ici et d’ailleurs indique pour le prénom Laure / Laurent (du latin laurus, laurier) pas moins de 58 variantes : Laura, Laurence, Laurentin, Laurentine, Laurette, Laurie, Lauriane, Laurianne, Lori, Lorrie, Laureen, Laurel, Lanrene, Laurena, Lanty, Lora, Loren, Loretta, Loritta, Lorna, Lorenza, Lorenzo, Laurens, Lawrence, Larry, Lawry, Lorin, Larrance, Lawrance, Lorenz, Laurenz, Lauritz, Lars, Labhras, Labhruinn, Lorinda, Louwra, Lavra, Lavria, Lavr, Oretta, Laureano, Lauridas, Lauréat, Lortz, Lewerentz, Löhr, Löns, Lavrenti, Louwine, Renske, Lauers, Lourens, Rienzo, Renzo, Zenzo, Lencho, Lorans.
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