Question d'origine :
Avez-vous des informations et savez-vous ou je pourrais trouver une photo de Suzanne Noël.
Chirurgien esthétique, elle a réparé des gueules cassées de la Grande Guerre.
Merci beaucoup
Réponse du Guichet
gds_se
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 24/10/2014 à 14h12
Bonjour
La Bibliothèque Interuniversitaire de Santé (Paris) nous propose une biographie de Suzanne Noël (1878-1954) : pionnière de la chirurgie esthétique et du mouvement féminin Soroptimist :
Suzanne Gros est née en 1878, à Laon, dans l’Aisne. Son père meurt alors qu’elle n’a que six ans. Elle fait les études des jeunes filles de la bourgeoisie provinciale ; elle possède un joli talent de dessinatrice.
A dix-neuf ans, elle épouse le Dr Henri Pertat, âgé de vingt-huit ans. Sur la photo de mariage, on note avec amusement le contraste entre la frêle silhouette de la jolie mariée et son regard déterminé.
A peine mariée, Suzanne Pertat se jette sur les études qui n’ont pu être menées à bien, c’est évident, qu’avec l’aide de son mari. Elle met trois ans à obtenir son baccalauréat, puis son P.C.N., et commence sa médecine. Elle est nommée externe des hôpitaux en 1908.
Elle commence son externat chez le Pr agrégé Morestin. C’est là que vont se nouer les fils de son destin. Elle fait la connaissance d’un jeune collègue, André Noël, qui a sept ans de moins qu’elle (donc seize de moins que son mari). Elle admire le Pr Morestin. Quand il opère avec succès une cicatrice de brûlure déformant la joue d’une petite fille, elle subjuguée. Elle en gardera un souvenir qui ne s’effacera jamais et sera probablement à l’origine de sa vocation pour la chirurgie esthétique.
En 1909, elle est externe à Saint-Louis, en dermatologie, chez le célèbre Pr Brocq où André Noël est également externe. […]
Elle se présente en 1912, ainsi qu’André Noël, au concours de l’internat. Suzanne, première à l’écrit, se classe finalement quatrième. André Noël, lui, se situe en fin de liste.
L’année suivante, André Noël et elle prennent leur premier poste d’interne à Saint-Louis, toujours chez Brocq. Là, elle se risque à quelques interventions limitées, à visées esthétiques sur des patients volontaires. […]
Les Bibliothèques Universitaire de l’Université de Picardie met, elle aussi, une courte biographie (avec photo !) de Suzanne Noël :
Reçue à l’internat en 1912, elle approfondit ses connaissances dans le domaine de la chirurgie maxillo-faciale ; elle est notamment amenée à soigner la cantatrice Sarah Bernhardt à la suite d’un lifting pratiqué aux Etats-Unis et ayant abouti à un demi-échec.
Durant la Grande Guerre, elle est autorisée à exercer sans avoir soutenu sa thèse et s’occupe des « gueules cassées ».
Pendant la guerre, sans avoir soutenu sa thèse, comme tous les internes, Suzanne est autorisée à exercer la médecine de ville. Elle tombe malade et demande un congé illimité à l’Assistance publique. En 1916, elle contacte Thierry de Martel (1875-1940), ancien interne de Morestin, père fondateur de la neurochirurgie, pour qu’il la forme aux techniques de chirurgie réparatrice et correctrice. Elle peut ainsi participer à l’effort de guerre en soignant les « Gueules cassées ». Elle travaille dans des conditions matérielles précaires. Les blessés de la face voyant leur nombre augmenter sans arrêt, la jeune femme s’épuise à les soulager du mieux qu’elle peut.
A la fin de la guerre, les internes n’ayant pas soutenu n’ont plus le droit de pratiquer. Cependant, la grippe espagnole fait des ravages. Suzanne travaille nuit et jour. […]
En 1925, sous son nom de jeune fille, elle soutient enfin sa thèse.
Pendant les dix années qui suivent, la doctoresse se consacre exclusivement à la chirurgie esthétique et à son mouvement féministe. Ses conférences connaissent un franc succès et elle fait beaucoup d’émules. Elle reçoit la Légion d’honneur et la Reconnaissance de la Nation en 1928, "pour sa contribution à la notoriété scientifique de la France sur la scène internationale".
Son exercice chirurgical évolue. Au début, elle fait de la petite chirurgie où elle tient compte de l’élasticité de la peau et procède par petites étapes successives, n’hésitant jamais à faire revenir le patient plusieurs fois. Particulièrement innovante, ses résultats sont remarquables et dénués de complications. Par la suite, elle se décide pour une chirurgie plus lourde et n’hésite plus à remodeler des seins, des fesses ou des membres, à dégraisser des ventres ou des cuisses.
(Source : Suzanne Noël (1878-1954) : une femme médecin dans le service de santé des armées / Verdun-Meuse)
L’article De la réparation des « gueules cassées » à la « sculpture du visage » : la naissance de la chirurgie esthétique en France pendant l’entre-deux-guerres de Nicolas Guirimaud revient sur la contribution de Suzanne Noël et Raymond Passot dans cette discipline :
Suzanne Noël : chirurgie esthétique et militantisme féministe
Au regard de l’univers limité des possibles qui s’offre à elle, la chirurgie esthétique présente l’avantage d’être un domaine neuf, peu investi car peu légitime, mais où toute offre est susceptible de réveiller une demande latente. Demande qu’elle peut d’autant mieux percevoir et même anticiper qu’elle a une connaissance intime de l’univers social du féminisme des classes dominantes de l’époque. Dans ce milieu de femmes qui dirigent des entreprises, enseignent à l’université, exercent des professions libérales ou artistiques, tout en menant une vie mondaine, l’apparence corporelle est un enjeu. L’offre de chirurgie esthétique est susceptible de répondre aux attentes de celles qui se sentent tenues de se conformer aux canons de « l’éternelle jeunesse ». En gommant les rides, bien sûr, mais aussi en effaçant les déformations de la poitrine et de la ceinture abdominale consécutives aux accouchements (surtout lorsqu’ils sont répétés). Mais cette offre de service ne se cantonne pas pour elle au seul groupe féministe qu’elle anime. Elle doit pouvoir toucher un public beaucoup plus large. Alors que Raymond Passot insiste sur la dimension « psychothérapeutique » de la chirurgie esthétique, Suzanne Noël parle, elle, de son rôle social et des bénéfices qu’elle peut apporter à toute la population, aux femmes bien sûr, mais aussi aux hommes de toute condition. […]
Pendant l’Occupation, elle « arianisera » des « nez sémites » et modifiera des visages de résistants recherchés par la police. Puis, après la guerre, elle s’emploiera à effacer les stigmates de quelques survivantes des camps de concentration.
Vous trouverez quelques photos de Suzanne Noël sur le site Soroptimist Internationale : Union française et sur le club Soroptimist de Saintes ainsi dans cet article de l’Ardennais.
© Soroptimist International
Bonne journée
La Bibliothèque Interuniversitaire de Santé (Paris) nous propose une biographie de Suzanne Noël (1878-1954) : pionnière de la chirurgie esthétique et du mouvement féminin Soroptimist :
Suzanne Gros est née en 1878, à Laon, dans l’Aisne. Son père meurt alors qu’elle n’a que six ans. Elle fait les études des jeunes filles de la bourgeoisie provinciale ; elle possède un joli talent de dessinatrice.
A dix-neuf ans, elle épouse le Dr Henri Pertat, âgé de vingt-huit ans. Sur la photo de mariage, on note avec amusement le contraste entre la frêle silhouette de la jolie mariée et son regard déterminé.
A peine mariée, Suzanne Pertat se jette sur les études qui n’ont pu être menées à bien, c’est évident, qu’avec l’aide de son mari. Elle met trois ans à obtenir son baccalauréat, puis son P.C.N., et commence sa médecine. Elle est nommée externe des hôpitaux en 1908.
Elle commence son externat chez le Pr agrégé Morestin. C’est là que vont se nouer les fils de son destin. Elle fait la connaissance d’un jeune collègue, André Noël, qui a sept ans de moins qu’elle (donc seize de moins que son mari). Elle admire le Pr Morestin. Quand il opère avec succès une cicatrice de brûlure déformant la joue d’une petite fille, elle subjuguée. Elle en gardera un souvenir qui ne s’effacera jamais et sera probablement à l’origine de sa vocation pour la chirurgie esthétique.
En 1909, elle est externe à Saint-Louis, en dermatologie, chez le célèbre Pr Brocq où André Noël est également externe. […]
Elle se présente en 1912, ainsi qu’André Noël, au concours de l’internat. Suzanne, première à l’écrit, se classe finalement quatrième. André Noël, lui, se situe en fin de liste.
L’année suivante, André Noël et elle prennent leur premier poste d’interne à Saint-Louis, toujours chez Brocq. Là, elle se risque à quelques interventions limitées, à visées esthétiques sur des patients volontaires. […]
Les Bibliothèques Universitaire de l’Université de Picardie met, elle aussi, une courte biographie (avec photo !) de Suzanne Noël :
Reçue à l’internat en 1912, elle approfondit ses connaissances dans le domaine de la chirurgie maxillo-faciale ; elle est notamment amenée à soigner la cantatrice Sarah Bernhardt à la suite d’un lifting pratiqué aux Etats-Unis et ayant abouti à un demi-échec.
Durant la Grande Guerre, elle est autorisée à exercer sans avoir soutenu sa thèse et s’occupe des « gueules cassées ».
Pendant la guerre, sans avoir soutenu sa thèse, comme tous les internes, Suzanne est autorisée à exercer la médecine de ville. Elle tombe malade et demande un congé illimité à l’Assistance publique. En 1916, elle contacte Thierry de Martel (1875-1940), ancien interne de Morestin, père fondateur de la neurochirurgie, pour qu’il la forme aux techniques de chirurgie réparatrice et correctrice. Elle peut ainsi participer à l’effort de guerre en soignant les « Gueules cassées ». Elle travaille dans des conditions matérielles précaires. Les blessés de la face voyant leur nombre augmenter sans arrêt, la jeune femme s’épuise à les soulager du mieux qu’elle peut.
A la fin de la guerre, les internes n’ayant pas soutenu n’ont plus le droit de pratiquer. Cependant, la grippe espagnole fait des ravages. Suzanne travaille nuit et jour. […]
En 1925, sous son nom de jeune fille, elle soutient enfin sa thèse.
Pendant les dix années qui suivent, la doctoresse se consacre exclusivement à la chirurgie esthétique et à son mouvement féministe. Ses conférences connaissent un franc succès et elle fait beaucoup d’émules. Elle reçoit la Légion d’honneur et la Reconnaissance de la Nation en 1928, "pour sa contribution à la notoriété scientifique de la France sur la scène internationale".
Son exercice chirurgical évolue. Au début, elle fait de la petite chirurgie où elle tient compte de l’élasticité de la peau et procède par petites étapes successives, n’hésitant jamais à faire revenir le patient plusieurs fois. Particulièrement innovante, ses résultats sont remarquables et dénués de complications. Par la suite, elle se décide pour une chirurgie plus lourde et n’hésite plus à remodeler des seins, des fesses ou des membres, à dégraisser des ventres ou des cuisses.
(Source : Suzanne Noël (1878-1954) : une femme médecin dans le service de santé des armées / Verdun-Meuse)
L’article De la réparation des « gueules cassées » à la « sculpture du visage » : la naissance de la chirurgie esthétique en France pendant l’entre-deux-guerres de Nicolas Guirimaud revient sur la contribution de Suzanne Noël et Raymond Passot dans cette discipline :
Au regard de l’univers limité des possibles qui s’offre à elle, la chirurgie esthétique présente l’avantage d’être un domaine neuf, peu investi car peu légitime, mais où toute offre est susceptible de réveiller une demande latente. Demande qu’elle peut d’autant mieux percevoir et même anticiper qu’elle a une connaissance intime de l’univers social du féminisme des classes dominantes de l’époque. Dans ce milieu de femmes qui dirigent des entreprises, enseignent à l’université, exercent des professions libérales ou artistiques, tout en menant une vie mondaine, l’apparence corporelle est un enjeu. L’offre de chirurgie esthétique est susceptible de répondre aux attentes de celles qui se sentent tenues de se conformer aux canons de « l’éternelle jeunesse ». En gommant les rides, bien sûr, mais aussi en effaçant les déformations de la poitrine et de la ceinture abdominale consécutives aux accouchements (surtout lorsqu’ils sont répétés). Mais cette offre de service ne se cantonne pas pour elle au seul groupe féministe qu’elle anime. Elle doit pouvoir toucher un public beaucoup plus large. Alors que Raymond Passot insiste sur la dimension « psychothérapeutique » de la chirurgie esthétique, Suzanne Noël parle, elle, de son rôle social et des bénéfices qu’elle peut apporter à toute la population, aux femmes bien sûr, mais aussi aux hommes de toute condition. […]
Pendant l’Occupation, elle « arianisera » des « nez sémites » et modifiera des visages de résistants recherchés par la police. Puis, après la guerre, elle s’emploiera à effacer les stigmates de quelques survivantes des camps de concentration.
Vous trouverez quelques photos de Suzanne Noël sur le site Soroptimist Internationale : Union française et sur le club Soroptimist de Saintes ainsi dans cet article de l’Ardennais.
© Soroptimist International
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