Question d'origine :
Bonjour, pourquoi les feux tricolores sont vert-orange-rouge ?
Merci
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 06/07/2015 à 14h13
Bonjour,
Dans l’ouvrage Les Couleurs de nos souvenirs, Michel Pastoureau consacre un article aux feux tricolores. Après avoir évoqué la difficulté de trouver des informations sur la question, avant d’expliquer que
sur de nombreux points, la signalisation routière est l’héritière de la signalisation ferroviaire, elle-même fille de la signalisation maritime, née au XVIII° siècle. Sur route comme sur mer, les premiers feux étaient bicolores et opposaient le rouge et le vert. […] Le premier feu parisien fut placé au carrefour des boulevards Sébastopol et Saint-Denis ; il était entièrement rouge, le vert ne faisant son apparition qu’au début des années 1930.
[…]
Pourquoi a-t-on choisi ces deux couleurs, le rouge et le vert, pour réglementer la circulation, d’abord sur mer, puis sur rail et enfin sur route ? Le rouge est certes la couleur du danger et de l’interdiction depuis les époques anciennes (il l’est déjà plus ou moins dans la Bible), mais pendant des siècles le vert n’a rien à voir avec la permission ou le laissez-passer. Au contraire, il joue le rôle de couleur du désordre, de la transgression, de tout ce qui va à l’encontre des règles et des systèmes établis. En outre, il n’est pas pensé comme un contraire du rouge, comme peuvent l’être le blanc – depuis toujours – et le bleu – depuis le Moyen Age central. Mais le classement des couleurs change dans le courant du XVIII° siècle, lorsque s’imposent les théories de Newton, qui a découvert le spectre quelques décennies plus tôt, puis que se diffuse dans le monde savant l’opposition entre couleurs primaires et couleurs complémentaires. Le rouge, couleur primaire, a désormais pour complémentaire le vert. Les deux couleurs commencent à faire couple et, puisque le rouge est la couleur de l’interdiction, le vert, sa complémentaire, presque son contraire, devient peu à peu celle de la permission. Sur mer puis sur terre, entre 1780 et 1840, on prend l’habitude de « donner le feu vert » pour autoriser le passage. Une nouvelle histoire des codes chromatiques se met en place. Le vert devient signe de laissez-passer, et même de liberté. Il l’est encore aujourd’hui.
Dans le Dictionnaire des couleurs de notre temps, le même auteur précise le rôle du jaune ou du orange comme couleur intermédiaire entre le feu rouge et le feu vert :
Quant au jaune (ou à l’orange), comme pallier intermédiaire entre le vert et le rouge, il est lui aussi fortement daté, impensable avant la mise en valeur du spectre et l’emploi (tardif) de celui-ci dans les codes sociaux. Pendant des siècles, peut-être des millénaires, le jaune n’a pas été pensé comme un sous-rouge mais comme un sous-blanc.
Le jaune est donc apparu dans un dernier temps, considéré comme la couleur intermédiaire entre le vert et le rouge sur le spectre des couleurs.
Si la question des couleurs vous intéresse, vous pouvez également vous référer au Petit livre des couleurs de Michel Pastoureau, ou à La Symbolique des couleurs de Frédéric Portal.
Bonne journée !
Dans l’ouvrage Les Couleurs de nos souvenirs, Michel Pastoureau consacre un article aux feux tricolores. Après avoir évoqué la difficulté de trouver des informations sur la question, avant d’expliquer que
sur de nombreux points, la signalisation routière est l’héritière de la signalisation ferroviaire, elle-même fille de la signalisation maritime, née au XVIII° siècle. Sur route comme sur mer, les premiers feux étaient bicolores et opposaient le rouge et le vert. […] Le premier feu parisien fut placé au carrefour des boulevards Sébastopol et Saint-Denis ; il était entièrement rouge, le vert ne faisant son apparition qu’au début des années 1930.
[…]
Pourquoi a-t-on choisi ces deux couleurs, le rouge et le vert, pour réglementer la circulation, d’abord sur mer, puis sur rail et enfin sur route ? Le rouge est certes la couleur du danger et de l’interdiction depuis les époques anciennes (il l’est déjà plus ou moins dans la Bible), mais pendant des siècles le vert n’a rien à voir avec la permission ou le laissez-passer. Au contraire, il joue le rôle de couleur du désordre, de la transgression, de tout ce qui va à l’encontre des règles et des systèmes établis. En outre, il n’est pas pensé comme un contraire du rouge, comme peuvent l’être le blanc – depuis toujours – et le bleu – depuis le Moyen Age central. Mais le classement des couleurs change dans le courant du XVIII° siècle, lorsque s’imposent les théories de Newton, qui a découvert le spectre quelques décennies plus tôt, puis que se diffuse dans le monde savant l’opposition entre couleurs primaires et couleurs complémentaires. Le rouge, couleur primaire, a désormais pour complémentaire le vert. Les deux couleurs commencent à faire couple et, puisque le rouge est la couleur de l’interdiction, le vert, sa complémentaire, presque son contraire, devient peu à peu celle de la permission. Sur mer puis sur terre, entre 1780 et 1840, on prend l’habitude de « donner le feu vert » pour autoriser le passage. Une nouvelle histoire des codes chromatiques se met en place. Le vert devient signe de laissez-passer, et même de liberté. Il l’est encore aujourd’hui.
Dans le Dictionnaire des couleurs de notre temps, le même auteur précise le rôle du jaune ou du orange comme couleur intermédiaire entre le feu rouge et le feu vert :
Quant au jaune (ou à l’orange), comme pallier intermédiaire entre le vert et le rouge, il est lui aussi fortement daté, impensable avant la mise en valeur du spectre et l’emploi (tardif) de celui-ci dans les codes sociaux. Pendant des siècles, peut-être des millénaires, le jaune n’a pas été pensé comme un sous-rouge mais comme un sous-blanc.
Le jaune est donc apparu dans un dernier temps, considéré comme la couleur intermédiaire entre le vert et le rouge sur le spectre des couleurs.
Si la question des couleurs vous intéresse, vous pouvez également vous référer au Petit livre des couleurs de Michel Pastoureau, ou à La Symbolique des couleurs de Frédéric Portal.
Bonne journée !
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