Question d'origine :
Pouvez vous me donner une définition précise de la littérature jeunesse s'il vous plait ?
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 09/11/2015 à 11h33
Bonjour,
La littérature d'enfance et de jeunesse (LEJ) est le secteur de l'édition spécialisé dans les publications destinées à la jeunesse (enfants et adolescents). C'est un genre littéraire qui a émergé à partir du XIXe siècle et a pris de l'importance au cours du XXe siècle.
source : Wikipedia
A cette définition très simplifiée de Wikipédia, nous pourrions ajouter ces considérations, exposées sur le site de la Fédération Wallonie-bruxelles :
Il n’existe pas, à l’heure actuelle, une seule et unique définition de la littérature de jeunesse. Cette appellation qui semble renvoyer à une réalité concrète remet en questions les notions de littérature et littérature pour jeunesse. Nous tenterons d’exposer de manière claire et concise, ce qui se cache sous cette dénomination en nous appuyant sur les dits de spécialistes.
Prenons comme point de départ une définition pédagogique :
« La littérature adressée à l’enfance ne s’est jamais située en dehors de la littérature que lisent les adultes. Elle se porte seulement vers des lecteurs qui n’ont pas les mêmes interrogations sur le sens du monde que leurs parents, qui n’ont pas non plus la même expérience de la langue. En quelque sorte, elle fait la courte échelle aux plus jeunes pour les introduire à l’univers infini des lectures à venir. »
Cette première interrogation renvoie à une question plus générale : qu’est-ce que la littérature ? Pour Christian Poslaniec, spécialiste de la littérature de jeunesse, "c’est une question sans réponse vigoureuse possible ». En effet, les théoriciens de la littérature n’ont pas trouvé de critères satisfaisants qui définiraient la notion de littérarité. Il est donc difficile d’expliquer une notion qui dépend d’un terme non défini.
Un autre aspect important doit être relevé ici : l’appellation littérature de jeunesse « se fonde sur une opposition implicite ». Dans Littérature de jeunesse, incertaines frontières, Isabelle Nères-Chevrel remarque que « le territoire des livres pour la jeunesse serait donc défini par exclusion : il serait celui des « livres-qui-ne-sont-pas-pour-les-adultes ». Or, comme nous le constatons dans la définition pédagogique, la littérature de jeunesse fait partie de la littérature dite « pour adulte ».
Dans l’entretien réalisé en 2006 par l’éditeur "école des loisirs" pour répondre à la question "Qu’est-ce que la littérature de jeunesse ? », Christian Poslaniec donne son point de vue. Il assure que la littérature de jeunesse ne diffère pas de la littérature pour adulte puisque l’on trouve les mêmes instances littéraires. La seule différence est la présence d’ « une forme littéraire pour enfants qui n’existe pas pour adultes », nous parlons bien entendu de l’album.
Jean Perrot, universitaire spécialiste de la littérature de jeunesse, aborde la question dans le même sens mais sous un angle différent. Lors de son intervention dans un colloque en 1993, il dit que « la seule définition réaliste d’un livre d’enfant, aussi absurde que cela semble, est la suivante : c’est un livre qui apparaît dans le catalogue d’un éditeur pour la jeunesse. ».
Marc Soriano professeur et spécialiste de la littérature pour jeunesse, précise que le récepteur enfant n’est pas le même que le récepteur adulte, cette différence doit être prise en compte. Il propose la définition suivante : (1918-1994)
« La littérature de jeunesse est une communication historique (autrement dit localisée dans le temps et dans l’espace) entre un scripteur adulte et un destinataire enfant (récepteur) qui, par définition en quelque sorte, au cours de la période considérée, ne dispose que de façon partielle de l’expérience du réel et des structures linguistiques, intellectuelles, affectives et autres qui caractérisent l’âge adulte. »
Comme le mentionnent de nombreux ouvrages, ce que l’on considère aujourd’hui comme de la littérature pour enfant ne l’a pas toujours été. Il suffit de penser aux contes de Perrault pour réaliser que le facteur temporel est important. Isabelle Nères-Chevrel a su bien expliquer cette problématique :
« Les frontières de la littérature de jeunesse sont mouvantes et poreuses. Elles délimitent un territoire qui se déplace au gré des représentations que les adultes se font, non par simplement des jeunes lecteurs, mais également des ouvrages qui doivent leur être proposés. »
Un exemple montre la mobilité des frontières : Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll est considéré comme de la littérature de jeunesse mais il est lu et apprécié par des adultes. Et s’il existe une démarcation entre le livre pour enfant et le livre pour adulte, cela n’empêche pas les plus grands d’aimer la littérature de jeunesse. On trouve une belle explication de cet attachement chez l’auteure Elzbieta :
« Pour chaque adulte, qu’il soit lecteur ou auteur, exilé de fait ou solidement enraciné, le livre pour enfants est par essence un livre sur la perte puisqu’il le met en présence de son propre irréversible exil de l’enfance. Et peu importe que cette enfance ait été heureuse ou haïe ; qu’elle demeure dans la mémoire comme un refuge ou, au contraire, comme un lieu d’impossibles réparations : elle est à jamais disparue. »
La sémantique du mot est important pour comprendre notre objet, souvent il y a confusion entre littérature de jeunesse et littérature pour la jeunesse. Selon Daniel Blampain, l’appellation littérature de jeunesse « est utilisée comme terme générique pour désigner une production multiple dans ses formes qui va du roman à la bande dessinée en passant par la presse - à l’exclusion des manuels scolaires, et multiple dans sa destination, de la première enfance à l’adolescence. » Tandis que l’appellation littérature pour la jeunesse est réduite « à ce qui offre le plus de conformité avec le littéraire, en tant qu’objet d’un consensus, et privilégie plus précisément le domaine des livres de fiction. » La littérature de jeunesse est donc un terme qui englobe une série de livres fort différents (album pour bébé, roman pour adolescent, livre d’artiste, livre d’activité, etc.).
Pour terminer, il est utile de souligner que littérature de jeunesse n’est pas synonyme de littérature de moindre qualité. Une évolution des mentalités se dessine dans ce sens, la littérature de jeunesse est de plus en plus l’objet d’étude universitaire bien qu’elle ne figure pas dans la matière enseignée.
« Il n’y a pas d’art pour l’enfant, il y a de l’Art. Il n’y a pas de graphisme pour enfants, il y a le graphisme. Il n’y a pas de couleurs pour enfants, il y a des couleurs. Il n’y a pas de littérature pour enfants, il y a la littérature. <…> En partant de ces quatre principes, on peut dire qu’un livre pour enfants est un bon livre quand il est bon pour tout le monde. » François Ruy-Vidal
Autres définitions :
- Qu'est-ce que la littérature de jeunesse Morant, Josette (2007) - Le Français dans le Monde, Mars-avril 2007 - N°350
- A qui s’adresse le livre de jeunesse ?
- Entretien : Martine Chouvy, bibliothécaire à la ville de Lyon / Les tendances actuelles de la littérature jeunesse pour le collège et le cycle 3 - Par Anne Francou et Christine Morin
- CDI, littérature jeunesse et édition
Nous vous orientons ensuite vers cette précédente réponse qui retrace un historique de la littérature jeunesse.
En complément :
SavoirsCDI
Histoire de la littérature jeunesse
Educasources : littérature de jeunesse
Zoom sur…La littérature d’enfance et de jeunesse
Quelques livres à la bibliothèque municipale de Lyon sur la Littérature jeunesse parus aux éditions du Cercle de la librairie.
Bonne journée
La littérature d'enfance et de jeunesse (LEJ) est le secteur de l'édition spécialisé dans les publications destinées à la jeunesse (enfants et adolescents). C'est un genre littéraire qui a émergé à partir du XIXe siècle et a pris de l'importance au cours du XXe siècle.
source : Wikipedia
A cette définition très simplifiée de Wikipédia, nous pourrions ajouter ces considérations, exposées sur le site de la Fédération Wallonie-bruxelles :
Il n’existe pas, à l’heure actuelle, une seule et unique définition de la littérature de jeunesse. Cette appellation qui semble renvoyer à une réalité concrète remet en questions les notions de littérature et littérature pour jeunesse. Nous tenterons d’exposer de manière claire et concise, ce qui se cache sous cette dénomination en nous appuyant sur les dits de spécialistes.
Prenons comme point de départ une définition pédagogique :
« La littérature adressée à l’enfance ne s’est jamais située en dehors de la littérature que lisent les adultes. Elle se porte seulement vers des lecteurs qui n’ont pas les mêmes interrogations sur le sens du monde que leurs parents, qui n’ont pas non plus la même expérience de la langue. En quelque sorte, elle fait la courte échelle aux plus jeunes pour les introduire à l’univers infini des lectures à venir. »
Cette première interrogation renvoie à une question plus générale : qu’est-ce que la littérature ? Pour Christian Poslaniec, spécialiste de la littérature de jeunesse, "c’est une question sans réponse vigoureuse possible ». En effet, les théoriciens de la littérature n’ont pas trouvé de critères satisfaisants qui définiraient la notion de littérarité. Il est donc difficile d’expliquer une notion qui dépend d’un terme non défini.
Un autre aspect important doit être relevé ici : l’appellation littérature de jeunesse « se fonde sur une opposition implicite ». Dans Littérature de jeunesse, incertaines frontières, Isabelle Nères-Chevrel remarque que « le territoire des livres pour la jeunesse serait donc défini par exclusion : il serait celui des « livres-qui-ne-sont-pas-pour-les-adultes ». Or, comme nous le constatons dans la définition pédagogique, la littérature de jeunesse fait partie de la littérature dite « pour adulte ».
Dans l’entretien réalisé en 2006 par l’éditeur "école des loisirs" pour répondre à la question "Qu’est-ce que la littérature de jeunesse ? », Christian Poslaniec donne son point de vue. Il assure que la littérature de jeunesse ne diffère pas de la littérature pour adulte puisque l’on trouve les mêmes instances littéraires. La seule différence est la présence d’ « une forme littéraire pour enfants qui n’existe pas pour adultes », nous parlons bien entendu de l’album.
Jean Perrot, universitaire spécialiste de la littérature de jeunesse, aborde la question dans le même sens mais sous un angle différent. Lors de son intervention dans un colloque en 1993, il dit que « la seule définition réaliste d’un livre d’enfant, aussi absurde que cela semble, est la suivante : c’est un livre qui apparaît dans le catalogue d’un éditeur pour la jeunesse. ».
Marc Soriano professeur et spécialiste de la littérature pour jeunesse, précise que le récepteur enfant n’est pas le même que le récepteur adulte, cette différence doit être prise en compte. Il propose la définition suivante : (1918-1994)
« La littérature de jeunesse est une communication historique (autrement dit localisée dans le temps et dans l’espace) entre un scripteur adulte et un destinataire enfant (récepteur) qui, par définition en quelque sorte, au cours de la période considérée, ne dispose que de façon partielle de l’expérience du réel et des structures linguistiques, intellectuelles, affectives et autres qui caractérisent l’âge adulte. »
Comme le mentionnent de nombreux ouvrages, ce que l’on considère aujourd’hui comme de la littérature pour enfant ne l’a pas toujours été. Il suffit de penser aux contes de Perrault pour réaliser que le facteur temporel est important. Isabelle Nères-Chevrel a su bien expliquer cette problématique :
« Les frontières de la littérature de jeunesse sont mouvantes et poreuses. Elles délimitent un territoire qui se déplace au gré des représentations que les adultes se font, non par simplement des jeunes lecteurs, mais également des ouvrages qui doivent leur être proposés. »
Un exemple montre la mobilité des frontières : Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll est considéré comme de la littérature de jeunesse mais il est lu et apprécié par des adultes. Et s’il existe une démarcation entre le livre pour enfant et le livre pour adulte, cela n’empêche pas les plus grands d’aimer la littérature de jeunesse. On trouve une belle explication de cet attachement chez l’auteure Elzbieta :
« Pour chaque adulte, qu’il soit lecteur ou auteur, exilé de fait ou solidement enraciné, le livre pour enfants est par essence un livre sur la perte puisqu’il le met en présence de son propre irréversible exil de l’enfance. Et peu importe que cette enfance ait été heureuse ou haïe ; qu’elle demeure dans la mémoire comme un refuge ou, au contraire, comme un lieu d’impossibles réparations : elle est à jamais disparue. »
La sémantique du mot est important pour comprendre notre objet, souvent il y a confusion entre littérature de jeunesse et littérature pour la jeunesse. Selon Daniel Blampain, l’appellation littérature de jeunesse « est utilisée comme terme générique pour désigner une production multiple dans ses formes qui va du roman à la bande dessinée en passant par la presse - à l’exclusion des manuels scolaires, et multiple dans sa destination, de la première enfance à l’adolescence. » Tandis que l’appellation littérature pour la jeunesse est réduite « à ce qui offre le plus de conformité avec le littéraire, en tant qu’objet d’un consensus, et privilégie plus précisément le domaine des livres de fiction. » La littérature de jeunesse est donc un terme qui englobe une série de livres fort différents (album pour bébé, roman pour adolescent, livre d’artiste, livre d’activité, etc.).
Pour terminer, il est utile de souligner que littérature de jeunesse n’est pas synonyme de littérature de moindre qualité. Une évolution des mentalités se dessine dans ce sens, la littérature de jeunesse est de plus en plus l’objet d’étude universitaire bien qu’elle ne figure pas dans la matière enseignée.
« Il n’y a pas d’art pour l’enfant, il y a de l’Art. Il n’y a pas de graphisme pour enfants, il y a le graphisme. Il n’y a pas de couleurs pour enfants, il y a des couleurs. Il n’y a pas de littérature pour enfants, il y a la littérature. <…> En partant de ces quatre principes, on peut dire qu’un livre pour enfants est un bon livre quand il est bon pour tout le monde. » François Ruy-Vidal
Autres définitions :
- Qu'est-ce que la littérature de jeunesse Morant, Josette (2007) - Le Français dans le Monde, Mars-avril 2007 - N°350
- A qui s’adresse le livre de jeunesse ?
- Entretien : Martine Chouvy, bibliothécaire à la ville de Lyon / Les tendances actuelles de la littérature jeunesse pour le collège et le cycle 3 - Par Anne Francou et Christine Morin
- CDI, littérature jeunesse et édition
Nous vous orientons ensuite vers cette précédente réponse qui retrace un historique de la littérature jeunesse.
En complément :
SavoirsCDI
Histoire de la littérature jeunesse
Educasources : littérature de jeunesse
Zoom sur…La littérature d’enfance et de jeunesse
Quelques livres à la bibliothèque municipale de Lyon sur la Littérature jeunesse parus aux éditions du Cercle de la librairie.
Bonne journée
Commentaire de
curieuse70 :
Publié le 10/11/2015 à 07:55
Bonjour, pouvez me dire quel est le public qui est concerné par la littérature jeunesse s'il vous plait ?
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 10/11/2015 à 08h52
Bonjour,
La problématique du public jeunesse a été abordée dans les documents cités ci-dessus.
Nous vous invitons à les consulter, ainsi que les ouvrages de notre fond à la cote 020.4.
En complément, nous vous invitons à consulter ces quelques articles du BBF.
Bonne journée.
La problématique du public jeunesse a été abordée dans les documents cités ci-dessus.
Nous vous invitons à les consulter, ainsi que les ouvrages de notre fond à la cote 020.4.
En complément, nous vous invitons à consulter ces quelques articles du BBF.
Bonne journée.
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Commentaires 1
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