Plafond inachevé à l'Opéra de Lyon
LYON, MÉTROPOLE ET RÉGION
+ DE 2 ANS
Le 15/07/2016 à 11h50
427 vues
Question d'origine :
Bonjour,
Je cherche des infos concernant le fait que le plafond central du Grand Foyer de l'Opéra de Lyon, peint par Domer, n'a pas été achevé faute de crédit suffisant pour rémunérer l'artiste...
Je ne trouve aucune info écrite qui le confirme, et pas non plus la raison qui expliquerait que la fresque n'ait pas, depuis le temps, pu être terminée ?
Merci d'avance pour votre aide, et bel été à vous !
Emmanuelle
Réponse du Guichet
bml_reg
- Département : Documentation régionale
Le 18/07/2016 à 14h29
Bonjour,
Le Grand-Théâtre de Lyon est reconstruit à partir de 1826 ; l'édification du nouveau bâtiment est laborieuse, semble-t-il, et se déroule "dans un climat passionnel". Pour financer l'affaire, il a fallu recourir à un grand emprunt, mais les fonds s'épuisent rapidement, ralentissant les travaux. Finalement, le théâtre ne sera achevé qu'en 1832 après avoir coûté au contribuable lyonnais la coquette somme de 4 500 000 francs. (voir Trois siècles d'opéra à Lyon)
Mais la décoration du Foyer est beaucoup plus tardive que cette première phase de travaux :
En 1886, nouveaux travaux d’envergure... prévus des 1883 et toujours remis depuis lors. L’essentiel du chantier concerne le Grand Foyer qui est doté d’une imposante décoration très fin de siècle où les guirlandes le disputent aux écusson et aux médaillons. Deux grands lustres sont installés et le plafond est décoré de trois scènes allégoriques par le peintre lyonnais Joanny Domer, fils d’un canut de la Croix-Rousse, ayant débuté comme apprenti peintre-plâtrier avant de devenir un artiste fameux, décorant de nombreux édifices officiels de la ville (Hôtel de Ville, Préfecture...) (Trois siècles d'opéra à Lyon, p.108)
Il n'est pas fait état de l'inachèvement de la fresque de Domer ; dans la presse d’époque consultée à ce sujet, on ne trouve pas mention non plus de problème financier particulier au moment de la rénovation du Foyer. Si au moment de son inauguration, une seule des trois fresques est achevée, ce n’est dû qu’à un retard de l'artiste :
En conséquence, c'est lundi au plus tard qu'on admirera les réparations de l'intérieur, des escaliers et du foyer de notre déjà vénérable Grand-Théâtre. Architecte, peintres, décorateurs, sculpteurs et tapissiers se sont distingués à qui mieux mieux. — Et ce n'était pas sans besoin.
(…)
Revenons au grand Salon. Il est — ou plutôt il sera — couronné par trois caissons ornés de peintures de Domer. En l'état, notre plafonnier lyonnais n'a terminé que son plafond central. Les deux autres panneaux viendront plus tard. Ils représenteront la musique guerrière et la musique religieuse. Nous en parlerons quand ils seront en place.
Le caisson central, de bien plus grande dimension, est achevé. Domer l'a merveilleusement réussi. Je ne sais au juste quel en est le sujet, Domer ayant pour coutume d'expliquer fort peu les rêves aériens qu'enfante son pinceau d'harmonieux coloriste. Je vois cependant là-dedans l'aurore qui disparaît dormant naissance au jour, pendant que la nuit meurt, abandonnant d'une main défaillante, le miroir théâtral qu'elle tenait tout à l'heure. Les arts suivent enlacés avec la gloire, et Phébus-Apollo, lançant dans les cieux son Pégase indompté, préside aux nobles plaisirs de cette nuit poétique.
Après cela, ce que j'en dis est peut-être tout à fait inexact et la pensée du peintre a été tout autre. Qu'importe ? L’allégorie ne vaut que par son charme et la séduction de son aspect. Et il est charmant ce nouveau plafond de Domer, chaud et brillant dans son parti pris jaune doré. C'est par un mouvement superbe que le Pégase s'élance et semble planer, la figure défaillante est heureuse d'abandon, de lassitude et de mollesse, et les corps féminins qui planent dans l'air, emportés dans leur course céleste, s'allongent en ces lignes souples et onduleuses dont Domer à l'intuition et la grâce.
Voilà donc à notre Grand-Théâtre un foyer absolument réussi.
(Courrier de Lyon, 1886-10-07)
Mais nous voici dans le foyer, où les travaux de restauration sont plus considérables.
Disons tout de suite que l'ensemble en est d'un goût parfait et fera le plus grand honneur à M. Hirsch, l'architecte de la ville, et à M. Thoubillon, son principal collaborateur.
Il est impossible de reconnaître notre vieux foyer aux murs enfumés. Les petits carreaux de vitre des fenêtres ont disparu pour faire place à des ouvertures plus larges. En face des fenêtres, des glaces immenses descendent presque jusqu'au parquet et donnent au foyer un aspect plus gai ; au-dessus des glaces et des portes, deux ouvertures avec accoudoirs ont été pratiquées, afin de permettre au public des secondes et troisième galeries d'avoir une vue sur le foyer. Les grandes fenêtres seront, en outre, ornées de grandes et belles tentures, et çà et là des poufs seront placés pour permettre aux spectateurs de se reposer.
Les peintures du foyer sont d'une teinte un peu sombre qui fait ressortir l'éclat des dorures. De toutes parts, entre les cintres des glaces et des fenêtres, on remarque des masques tragiques et comiques exécutés par des peintres appartenant à la maison Fiachat et Cochet. De nombreux cartouches avec les noms des grands compositeurs anciens et modernes ornent également les murs du foyer.
Quant au plafond, il a été divisé en trois parties : un grand ovale et deux carrés qui sont destinés à recevoir les peintures de Domer. Pour le moment, la décoration du panneau central est seule terminée et posée. Cette décoration représente le triomphe d'Apollon.
Nous reviendrons sur cette œuvre qui est une des plus belles de notre grand peintre décorateur.
L'éclairage du foyer a été complètement renouvelé : deux lustres énormes et de nombreuses girandoles feront ressortir la beauté du foyer, en attendant que l'on se soit entendu avec l'entrepreneur de l'éclairage du Grand-Théâtre, pour substituer la lumière électrique au gaz, ce qui ne serait pas d'un médiocre avantage pour la conservation des peintures.
On croyait que l'on aurait profité de toutes ces réparations pour changer le système d'éclairage de la salle et pour enlever le lustre qui empêche une bonne partie des spectateurs des troisièmes et quatrièmes galeries de voir ce qui se passe sur la scène; mais ces nouvelles restaurations auraient nécessité trop de temps, et on a dû les remettre à plus tard. (Salut Public, 1886-10-10)
Grand Théâtre.
L'ouverture du Grand-Théâtre â eu lieu hier : trois rentrées et six débuts, tel est le programme de la soirée, sans compter le début du foyer neuf qui n'est pas le moins important.
Il est éblouissant, ce foyer; presque trop éblouissant encore, mais le temps se chargera d'atténuer vite l'éclat un peu criard de ses dorures. Des glacés immenses, de l'or à profusion, un éclairage éclatant, un gracieux plafond signé Borner, tout cela constitue un ensemble grillant et gai, sinon original. Une seule lacune : les rideaux des fenêtres sont un peu mesquins, mais il paraît que les crédits votés n'ont pas permis de faire mieux. (Salut Public, 1886-09-25)
Quelle source vous pousse donc à affirmer que ces fresques sont restées inachevées ? Aucune information dans les sources que nous avons consultées ne nous permet d’arriver à une telle conclusion. D'autant plus que ces deux fresques ornant les caissons latéraux, dont on a pu déplorer à l'époque un petit retard de livraison, existent bien aujourd’hui et sont effectivement attribuées à Domer. La page consacrée à L’Opéra du site patrimoine-Lyon nous en donne deux photographies.
Commentaire de
emma69230 :
Publié le 20/07/2016 à 08:10
Bonjour,
Vous avez répondu récemment, avec une exhaustivité dont je vous remercie +++ , à ma question sur le plafond de l'Opéra dont j'avais appris qu'il n'avait pas été terminé faute de crédits... et vous me demandiez mes sources !
Les voici : article page 14 de la dernière revue VivreLyon, disponible en kiosques...
Du coup j'ai contacté le journaliste auteur de l'article qui se dit lui-même étonné de mon étonnement :-) car il tiendrait cette info... de l'Opéra himself (si j'ose dire) qui la lui a donnée !
Ceci dit, l'Opéra en question parle de Daumer (sic) et non Domer : peut-on éventuellement mettre en doute la fiabilité de leurs affirmations ?
Il va falloir que j'aille voir par moi même si en effet un "quadrillage préparatoire" est encore visible (ce que j'ai lu)... je vais également tenter de vérifier l'info auprès de l'informateur de mon journaliste !
Voilà les infos dont je dispose, à suivre !...
Bien cordialement,
Emmanuelle Cart-Tanneur
Réponse du Guichet
bml_reg
- Département : Documentation régionale
Le 22/07/2016 à 11h14
Rien ne permet d'affirmer, d'après les évocations de cette œuvre que nous avons pu trouver, qu'elle soit restée inachevée, jusqu'aux photos trouvées ici ou là qui ne nous laisse pas l'impression qu'elle n'a jamais été terminée...
N'hésitez cependant pas à nous faire part de vos découvertes.
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Commentaires 1
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