Question d'origine :
Bonjour,
j'ai le souvenir d'enfance d'une photo, encadrée chez ma grand-mère, représentant une statue de marbre blanc classique (pouvant aussi bien être de Praxitèle que de Cellini, Michelangelo ou Rodin...).
Elle représentait un couple nu, entravé dos-à-dos par aux bras et aux jambes et cherchant néanmoins à s'embrasser.
Ni époque, ni auteur, ni dimension mais énormément d'émotion.
Ma chère grand-mère a disparu et le cadre aussi. J'ai visité de nombreux musées pour retrouver la statue. Je serais extrêmement reconnaissante si quelqu'un acceptait le challenge d'identifier ce chef d'oeuvre.
Merci
Réponse du Guichet
bml_art
- Département : Arts et Loisirs
Le 08/11/2016 à 15h51
Nous pensons que la sculpture à laquelle vous faites allusion est celle de Rodin, intitulée
Fugit Amor
Sur le site du Musée Rodin, on dispose de cinq versions de l’œuvre, portant le même titre, mais différentes selon les matériaux employés.
Le livre Marbres de Rodin : collection du musée, fait mention de deux versions en marbre ayant pour titre Fugit Amor.
La notice accompagnant la version portant le n° d’inventaire S. 1154 décrit ainsi la sculpture :
« Ce sujet, conçu pour la Porte de l'Enfer, est l'un des plus connus de l'œuvre de Rodin et a donné lieu à de multiples variantes en toutes matières. C'est ainsi que doivent exister au moins quatre versions en marbre, que nous n'avons pu toutes localiser.
Nous n'avons pas non plus déterminé les divers praticiens ayant travaillé sur ces groupes, ce qui en rend difficile la datation précise.
Il semble que les premiers d'entre eux aient été exécutés après l'exposition d'un plâtre à la galerie Georges Petit en 1887. Un marbre, figurant à l'exposition de 1900, est vendu à cette occasion.
La multiplicité des titres attribués, à tort ou à raison, à ce groupe ne facilite pas la tâche: Le Sphynx, à Vienne en 1898 ou La Sphynge, dans la donation de 1916, Le Rêve, à l'exposition Monet-Rodin de 1889. Il n'est pas du tout sûr que La course à l’abîme, La Nuit ou L'Aurore se rapportent à cette même composition, ainsi que l'affirme Grappe. Le peu d'importance réellement accordée par Rodin à ses titres n'a fait que multiplier ce type de confusions. »
La description la plus précise de l’œuvre se trouve dans le livre Rodin, la Porte de l'Enfer / Antoinette Le Normand-Romain :
« Conçu pour La Porte de l'Enfer, où il apparaît à deux reprises dans le vantail droit (dont une fois combiné à la figure féminine dite l'Éveil), Fugit Amor, parfois appelé Le Rêve, Le Sphinx ou La Sphinge, représente la course infernale de deux êtres chassés par la tourmente qui, au deuxième cercle de l'Enfer, secoue, heurte et harcèle sans repos ceux qui ont cédé à une passion coupable. Le groupe apparût en 1887 à la galerie Georges Petit, ainsi qu'en témoigne Gustave Geffroy dans La justice du 19 mai 1887 : " [le groupe] présente la course envolée et farouche d'une femme qui emporte sur son dos, en sa damnation, sa victime, l'homme inanimé et rigide. Le dos de la femme se creuse, le torse de l'homme s'aplatit, ses jambes retombent, une arabesque de membres furieux et de membres morts se dessine ». Présenté de nouveau au même endroit, lors de l'exposition Monet-Rodin de 1889, il devait bientôt apparaître comme l'une des œuvres les plus appréciées de Rodin. Cette image d'une course irrémédiable à 1' abîme correspond en effet à tout un aspect du symbolisme contemporain, marqué par l'angoisse et le pessimisme des Fleurs du Mal de Baudelaire que Rodin illustrait au même moment. De son succès témoigne le nombre d'exemplaires réalisés dans toutes les matières : il en existe en effet plusieurs séries en bronze qui diffèrent entre elles par le traitement de la terrasse. Il en va de même pour les marbres dont on connaît au moins quatre versions. Le musée Rodin en possède deux, distantes de plus de vingt ans sans doute, la première ayant été exécutée peu après 1890 pour le banquier et ami de Rodin, J. Peytel, tandis que la seconde fait partie du groupe de marbres que Rodin fit réaliser à la fin de sa vie pour son futur musée.
Le personnage masculin constitue sans doute l'élément le plus ancien du groupe. Il a sa source dans le groupe d'Ugolin et plus précisément dans l'enfant dressé à la gauche de celui-ci : tête et torse sont en effet identiques.
On peut donc imaginer qu'à une date indéterminée (vers 1885 ?) Rodin intéressé par l'expressivité que confère à la figure la tête renversée en arrière, ait doté celle-ci de nouveaux membres qui en accentuent encore le caractère … »
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