L'Histoire du rhône à Lyon et ses inondations
LYON, MÉTROPOLE ET RÉGION
+ DE 2 ANS
Le 18/12/2019 à 14h38
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Question d'origine :
Bonjour, ma question est assez large, j'espère ne pas vous déranger.
J'aimerais savoir quand les lyonnais ont commencés à vouloir contenir le Rhône et donc de quand dates les premières digues et quelles techniques ont été employées pour les construire. Merci !
Réponse du Guichet
bml_reg
- Département : Documentation régionale
Le 20/12/2019 à 17h03
Bonjour,
Au 18 e siècle, il n’était pas encore envisageable de trouver une solution pérenne au problème de crue, les inondations étaient plutôt considérées comme une contrainte acceptée. A cette époque l’imaginaire Lyonnais était toujours fortement marqué par le risque de déplacement du Rhône vers les balmes dauphinoises. Le premier effort important d’endiguement prend son origine donc dans la peur du déplacement du fleuve alors que des infrastructures portuaires et industrieuses étaient tributaires du Rhône pour leur fonctionnement :
« Lyon, ville du Rhône autant que de la Saône, craignait le déplacement d’un fleuve qui avait fixé l’activité portuaire : garage pour bois brûler et charbons du port Saint-Clair, port à bois variés des Jésuites (devant le Lycée Ampère actuel), port de la pierre de taille et du charbon aux Cordeliers, enfin abreuvoir du port de l’hôpital au nord de l’Hôtel-Dieu. D’innombrables bateaux et usines flottantes, tels que moulins, teintureries, fabriques de boutons… s’appuyaient au quai Retz, construit de 1737 à 1745 du port Saint-Clair au pont du Rhône. » Le Rhône [Livre] : du Léman à Lyon / Jean-Paul Bravard, p197
Après une crue en 1754 qui emporta le domaine de la Tête d’Or et jeta le Rhône sur la Guillotière en coulant par Béchevelin, il fut décidé par arrêt du conseil du Roi du 3 octobre 1756 que des travaux seraient réalisés. Des travaux d’aménagement débutèrent en 1757 sous la responsabilité de sieur Deville « ingénieur du Rhône » :
« - Le premier ouvrage réalisé fut, cette année-là, une digue en éperon « à la pointe de Neyron sur Vaux, en Dauphiné » pour repousser le Rhône sous le château de la Pape. L’intendant du Dauphiné laissa la direction des opérations à son collègue lyonnais qui se chargeait des dépenses.
- Construire la première digue de la Tête d’Or fut un travail autrement difficile. Il fallut creuser des tranchées dans la grève caillouteuse de la rive droite pour y attirer le fleuve et « pour se rendre maître du Rhône qui était très profond et dont le courant était rapide, on fit couler à fond plus de cent penelles pleines de pierres prises au Saut du Rhône et ce ne fut qu’en 1760 que l’on put commencer à piloter et jusqu’en 1768, on confectionna la digue. » Il était exceptionnel, à l’époque, de ne pas ancrer la digue sur un versant stable et de travailler sur un « terrain mouvant et sur sables » ; la digue fut d’ailleurs endommagée en 1769 par une crue.
- Cette œuvre de fixation du Rhône lyonnais fut complétée par la digue dite des Brotteaux à l’aval du pont Morand (1772-1774) et par une digue ancrée au pont de la Guillotière pour protéger Béchevelin. » Le Rhône [Livre] : du Léman à Lyon / Jean-Paul Bravard, p198
Malgré cette première série d’aménagement de nature à contenir le fleuve, des épisodes de crues ont continué à dévaster la rive gauche qui connait alors, en cette fin de 18e et début 19e, une forte expansion urbaine. La protection de Lyon contre les inondations devient un enjeu crucial au 19e avec l’urbanisation croissante de la plaine inondable de la rive gauche, à la Guillotière, aux Brotteaux et à Villeurbanne. En 1825, l’Académie de Lyon se pencha sur le problème de la défense contre les crues. Plusieurs projets sont envisagés, dont celui qui sous l’égide du maire de La Guillotière amena à construire en 1826 une route insubmersible faisant office de digue depuis le pont Charles X jusqu’à Villeurbanne.
En 1836, un projet des Ponts et Chaussées est ressuscité par le préfet du Rhône afin d’occuper les ouvriers de la fabrique de Lyon mis au chômage :
« Des ateliers de charité placés sous le contrôle de l’armée édifièrent pour 202 000 francs de l’époque une digue haute de quatre mètres cinquante ; elle était bâtie en terre sablonneuse pilonnée et recouverte de cinquante à soixante centimètres de terre végétale gazonnée. Son couronnement était arasé à soixante centimètres au-dessus des repères de la grande crue de 1812 et placé en avant des emprunts larges et profonds qui avaient servi à son édification. Son tracé englobait la plaine villeurbannaise en s’adaptant aux contours d’anciens chenaux du fleuve : à l’est, elle s’accrochait à la balme de Cusset, épousait le tracé des marais de Vaulx(actuel canal de Jonage) en défendant ce qui s’appellera le quartier Saint-Jean, rejoignait le cours du Rhône et s’ancrait à la partie amont de la digue de la Tête d’Or ; le tracé bifurquait au sud-ouest le long du ruisseau de la Petite Lône en laissant à l’extérieur l’ensemble du bois de la Tête d’Or. » Le Rhône [Livre] : du Léman à Lyon / Jean-Paul Bravard, p204-205
Mais les autorités prennent le problème encore plus aux sérieux après les grandes inondations de 1840 et surtout après celle de 1856 qui fit beaucoup de dégâts. Deux projets supposés plus durable sont envisagés:
« - La solution d’un canal de dérivation, déjà évoquée après l’inondation de 1840, retint l’attention de Napoléon III à l’occasion d’une visite sur place. Large de cinquante mètres, il aurait débité 900m3 /s pendant la crue de 1856 et aurait abaissé son niveau de quatre-vingts à quatre-vingt-dix centimètres ; deux tracés furent étudiés, l’un en limite des forts, l’autre plus au large. Cette hypothèse, d’un intérêt certain, fut repoussée par le service des Ponts et Chaussées comme trop coûteuse (20 000 000 francs).
- Nettement moins coûteuse, puisqu’évaluée à 12 600 000 francs, la solution de l’endiguement fut retenue, financée à 50 % par la ville et 50 % par l’Etat, conformément à la loi de 1858. Cette digue longue de 4751 mètres, élevée à 8,24 mètres au-dessus de l’étiage, était censée assurer une revanche de un mètre sur la crue de 1856 » Le Rhône [Livre] : du Léman à Lyon / Jean-Paul Bravard, p209
Cette construction fut donc la première solution viable sur le long terme :
« La « digue insubmersible des Brotteaux » fut construite entre 1857 et 1859 par compactage du gravier de la balme de Cusset et du lit du Rhône. Son tracé était semblable à celui de la digue en terre de 1937, mais laissait de côté le quartier Saint-Jean à Villeurbanne. Inscrit à l’intérieur du précédent tracé, il amputait le terrain militaire du Grand-Camp de trente-neuf hectares ; en compensation, le domaine de la Doua fut exproprié et les bâtiments agricoles fut transformés en casernes.
La « digue insubmersible des Brotteaux » était relayée, au-delà de la ligne de chemin de fer Lyon- Genève, par le quai de la Tête d’Or terminé comme elle en 1859. Vers l’aval et dans leur prolongement, les quais de la rive gauche bénéficiant d’un exhaussement capable de rendre la défense homogène. En avant de cette longue digue d’inondation fut perfectionnée une défense basse destinée à bloquer l’érosion latérale :
- En avant du quai de la Tête d’Or, la digue submersible de 1843 fut rectifiée et prit le nom de « digue basse de la Tête d’Or » ;
- A l’amont du viaduc de chemin de fer, elle fut prolongée par la « Défense du Grand-Camp », revêtue d’un perré qui rendait caduque la vieille digue de la Tête d’Or » Le Rhône [Livre] : du Léman à Lyon / Jean-Paul Bravard, p209-210
bonne journée.
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