Question d'origine :
Bonjour SVP quel à été la première reine en Algérie et qui a construit Alger en premier.
Merci infiniment pour le partage du savoir puisse Dieu vous bénisse et vous enrichisse en connaissance
Réponse du Guichet
Alger ne semble pas avoir été construite par une reine mais vous faîtes probablement allusion à la reine Dihya appelée aussi la Kahina, une reine qui marqua l'histoire de l'Algérie. Attachée à sauvegarder l'indépendance du peuple berbère, elle lutta contre les envahisseurs Omeyyades.
L'histoire officielle algérienne retient le nom de Bologhine ibn Ziri, un prince ziride, comme premier bâtisseur d'Alger.
Bonjour,
Alger semble être à l'origine d'un ancien comptoir phénicien fondé au IVe siècle av. J.-C. baptisé Ikosim.
Selon une légende gréco-romaine, elle aurait été construite par vingt (Eïkosi) compagnons d’Hercule mais l'histoire algérienne retient le nom de Bologhine ibn Ziri comme premier bâtisseur d'Alger.
C'est ce qu'explique Malek Chebel dans le Dictionnaire amoureux de l'Algérie :
C'est l'Icosium antique, nom latin de l'une des villes que le mythique Hercule construisit, prétend la légende - lui ou ses compagnons, qui étaient selon les Grecs au nombre de vingt (eikosi) - sur le modèle de celles qu'il avait érigées partout ailleurs, en Méditerranée, jusqu'aux fameuses grottes de Gibraltar. Le mot Icosium devint Icosion. Les Grecs, quant à eux, auraient donné à Alger le nom de Bartas. Alger est la capitale de l'ancienne Césarée dont parlent Strabon et Antonin. Si les Algériens d'aujourd'hui nomment la ville Al-Djazaïr al-'açima, avec un 'a guttural, c'est que l'Algérie tout entière s'appelle Al-Djazaïr, ce qui signifie "les Îles" ou "les Îlots", du fait d'un escarpement à quatre sommets, le Peñón de Argel (son nom espagnol vers 1510), situé dans la rade d'Alger et que El-Bekri, le géographe arabe du XIe siècle, avait baptisé les Stofla. La vulgate locale, en revanche, en a fait Béni Mazghenna, qui est le coteau sur lequel s'appuie la ville. Alger vient d'une contraction du mot arabe : Al-Jazaïr, puis ad-Dzaïr qui a donné Algieri (pour les italiens), Algiers (Pour les Anglais), Argel (pour les Espargnols).
Pour l'histoire officielle algérienne, le véritable bâtisseur d'Alger est Bologhine ibn Ziri - un prince ziride, donc - et Alger se disait déjà El-Djazaïr Beni Mezghenna au Xe siècle (environ 980), ce qui fait d'Alger la cadette d'un siècle du Caire. Bologhine ibn Ziri aurait hésité entre plusieurs endroits, à l'ouest et à l'est de l'emplacement actuel, et finalement jeté son dévolu sur le lieu actuel de la Casbah, car l'anse était peu exposée aux vents.
L'ouvrage de Salah Guemriche, intitulé Alger la blanche : biographies d'une ville, nous explique les origines diverses du nom d'Alger :
" De comptoir phénicien, baptisé Ikosim, au IVe siècle avant J.-C., Alger devint trois siècles plus tard un municipe romain, latinisé en Icosium. Moins importante mais mieux lotie, géostratégiquement, que Tipaza et Césarée de Maurétanie (l'actuelle Cherchell), Icosium fut en fait livrée comme "butin de guerre" dans le conflit qui opposa les légions romaines (dépêchées par Caliula) aux légions numides de Ptolémée de Maurétanie...
Cité Berbère, et pour une part judéo-berbère, christianisée après Rome et avant Tours, cité considérée à l'époque comme la "Rome des Gaules", Icosium est le sixième comptoir phénicien, après Hippone (Annaba), Jijel, Bougie, Tipaza et Cherchell, à avoir compté parmi sa population une communauté juive berbère. [...]
Longtemps, on a traduit le toponyme Ikosim par l'"île aux Mouettes". Cette référence "insulaire" semble bien trouver justification dans le fait que les Arabes eux-mêmes, conquérants parmi les conquérants de l'Algérie, donneront à Ikosim le nom d'El-Djazaïr, ce qui, on l'a vu, veut dire précisément "les îles".
Une autre thèse, qui nous vient de la légende, affirme que peu avant leur traversée du détroit de Gibraltar, à la recherche des Pommes d'or, les adeptes de l'étymologie punique (ikosim) font dériver ce nom du grec Eikosi, qui signifie "vingt". C'est ce que nous rapporte un grammairien latin du IVe siècle, Caius Julius Solinus (Solin, en français) : "Nous ne quitterons pas Icosium sans en parler. Lorsque Hercule traversa cette contrée, vingt de ses compagnons, l'ayant abandonné, choisirent un emplacement et y élevèrent des murailles. Afin qu'aucun d'eux ne pût se glorifier d'avoir particulièrement imposé son nom à la cité, on lui donna un nom [faisant référence] au nombre de ses fondateurs.
Les historiens modernes, eux, nous proposent une autre thèse. En 1940, lors de travaux effectués dans le quartier de la Marine, au pied de la Casbah, on découvre un lot de pièces de monnaie portant, gravés sur l'avers, le buste d'un dieu phénicien, Melqart, vêtu d'une peau de lion, et sur l'envers cette inscription (déchiffrée à l'époque par Jean Cantineau, professeur de langues chamito-sémitiques à l'université d'Alger) : ikosim. Selon le linguiste, ce mot est composé d'un préfixe i, qui signifie "île" (comme dans Ibosim, qui a donné Ibiça puis Ibiza) ; quant au radical (kosim), Jean Cantineau proposait de lire : "mouettes" ou "hiboux". Les historiens privilégieront ainsi, pour traduire Ikosim, le surnom d'"île aux Mouettes".
C'est à l'administration coloniale que l'on doit la dénomination "Algérie", laquelle apparaît pour la première fois en 1834."
Pour en savoir plus sur l'histoire d'Alger, nous vous conseillons la lecture de ces documents :
A la recherche d'Icosium / Le Glay Marcel - In: Antiquités africaines, 2,1968. pp. 7-54.
Alger / G. Camps, M. Leglay, L. Golvin, R. Mantran and P. Boyer - Encyclopédie berbère, 4 | 1986, 447-472.
Alger : une longue histoire / Encyclopaedia Universalis
Le père d’El-Djazaïr, Bologhine Ibn Ziri Ibn Manad
Une reine a toutefois profondément marqué l'histoire de l'Algérie. Il s'agit de la Kahena ou Kahina, de son vrai nom Dihya ou Damya. C'est une reine guerrière berbère zénète des Aurès qui combattit les Omeyyades lors de l'expansion islamique en Afrique du Nord au VIIe siècle.
Surnom de la « reine des Aurès » signifiant « la Prophétesse ». Al-Kāhina régna sur plusieurs tribus de Berbères de l'Aurès, dont la sienne propre, celle des Djarawa, de 685 environ à 704 ou 705. À la fin du viie siècle, l'Afrique du Nord voit s'affronter trois forces : les Byzantins d'abord, solidement implantés sur les côtes, avec Carthage surtout et Septem (Ceuta) comme points d'appui ; les Arabes, ensuite, qui arrivent de l'est et tentent de pénétrer en Ifriqiyya (actuelle Tunisie) et, de là, dans tout le Maghreb (Occident) ; les Berbères enfin, habitants des lieux, groupe homogène du point de vue ethnique mais profondément divisé selon qu'ils sont nomades ou sédentaires, agriculteurs ou citadins commerçants, chrétiens ou juifs. Carthage tombe (695) devant Hasan ibn al-Nu'mān al-Ghassānī, nouveau gouverneur de l'Ifriqiyya. L'empereur Léontios réussit à reprendre la ville, mais seulement pour trois ans. De son côté la Kāhina parvient à refaire l'unité berbère autour de sa personne et de sa tribu. Elle écrase l'armée d'Ibn al-Nu'mân, sur les bords de la Miskiyâna (près de Tébessa) dans le Constantinois et la repousse en Tripolitaine. En 698, Ibn al-Nu'mān reporte ses efforts sur Carthage qu'il enlève, mettant les Byzantins en déroute : la maîtrise des mers dans le bassin occidental de la Méditerranée passe aux Arabes. Ibn al-Nu'mān fonde Tunis.
Un seul obstacle se dresse encore devant l'avance des Arabes vers l'ouest : la Kāhina et le royaume qu'elle a constitué au Maghreb. Âme d'une résistance intransigeante, elle aurait pratiqué la politique désespérée de la terre brûlée, saccageant le pays, détruisant les villes et brûlant les plantations pour en détourner les Arabes et les décourager. Cette politique lui aliène la population sédentaire, tant citadine (grecque et berbère) que campagnarde. Ibn al-Nu'mān tire parti de cette situation, réclame et reçoit des renforts armés que le calife ‘Abd al-Malik vient de lui envoyer (702) et reprend l'offensive. La tradition veut qu'à la veille de la bataille qu'elle savait décisive, la Kāhina, plaçant l'intérêt de la famille avant celui de la tribu, ait intimé l'ordre à ses deux fils de rejoindre les rangs des Arabes. Y ont-ils, en sus, reçu un commandement et poursuivi la guerre contre les Berbères ? Certaines sources le prétendent. La bataille eut lieu à Tabarqa. La Kāhina y fut vaincue et décapitée au lieu dit depuis Bīr al-Kāhina (le puits de la Kāhina). La voie vers l'Atlantique était ouverte aux Arabes. L'histoire de cette femme fougueuse et indomptable (la « Déborah berbère ») est en grande partie légendaire : les romanciers s'en sont emparés.
source : Universalis
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter ces documents :
La Kahena, reine berbère / Lepetitjournal Tunis - 17/03/2020
Dihya / Wikipedia
La Kahéna, reine et guerrière d’Ifrîqiyâ / Nessrine Naccach - 17/07/2019
Deux mythes féminins du Maghreb : la Kahina et Aïcha Kandicha / Samira Douider
Bonne journée.