De qui est cette citation grecque ?
Question d'origine :
Bonjour,
Dans son livre Le Réel - Traité de l'idiotie, p. 43, le philosophe Clément Rosset cite un poète grec qu'il ne nomme pas :
"Un poète grec a écrit :
Ὄμμασι σῶμα τεὸν λήψεσθαι, παρθένε, φάσκον
νήπιος ὅν τι γάρ ἐστ ὅμματα, σῶμα δὲ πᾶν.
(Insensé quand j'ai cru de mes yeux saisir ton corps, ô Vierge,
Puisque mon oeil n'est rien et que ton corps est tout.)"
Pouvez-vous m'aider à retrouver le nom de ce poète et l’œuvre dont ces vers sont extraits?
Merci d'avance, cordialement,
Jean Pierre Vidal
Réponse du Guichet
Nous n’avons pas trouvé l’auteur de ces vers grecs.
Bonjour,
Des recherches, en grec et en français, en plein texte, n’ont rien donné.
La citation en grec, puis en français, de Clément Rosset, laisse penser qu’il a pu la tirer d’une édition grec-français des textes de l’auteur que nous cherchons. Si l’auteur était célèbre ou connu, pourquoi ne pas l’avoir cité?
L’absence d’auteur cité par Clément Rosset, ainsi que la référence, a priori chrétienne, à la Vierge avec une majuscule, nous ont d’abord fait penser à l’Anthologie grecque, dont les premiers livres contiennent des épigrammes chrétiennes. L’anthologie grecque est d’un recueil d’épigrammes grecques, de plusieurs poètes, rassemblées entre le IIIe et le Xe siècle.
La première traduction française date de 1863, mais l’édition ne donnait pas le texte grec. Une recherche plein texte dans cette édition numérisée n’a pas donné de résultat probant. Une recherche approfondie permettrait d’en avoir le cœur net, mais cette piste n’est sans doute pas la meilleure. Une consultation des éditions français-grec parues aux Belles-lettres s’est avéré trop fastidieuse, car ne disposant que d’un index des auteurs (nombreux). La liste des poètes de l’Anthologie, disponible sur la page Wikipedia, donne en effet une idée de la diversité des auteurs grecs de poésie, dont des œuvres autres que les épigrammes nous sont parvenus.
Nous avons cherché aussi dans quelques éditions numérisées de traductions de Grégoire de Naziance, dont l’œuvre poétique est connue de longue date et a fait l’objet d’éditions grec-français, mais des recherches plein-texte (faute d’édition avec des index permettant des recherches aisées) n’ont pas permis de repérer ce passage.
Enfin, il est possible, tout simplement, que si l'auteur n'est pas cité, il s'agisse d'un anonyme.
Bonne journée.
Complément(s) de réponse
Réponse du département Langues et Littératures :
Bonjour,
Malgré nos recherches, nous ne sommes pas parvenus à retrouver l’auteur de ces vers, qui n’apparaissent dans aucun des ouvrages présents dans les collections du département Langues et Littératures.
Nous avons consulté les textes suivantes:
- Les élégiaques grecs, édition introduite et commentée par Jean Defradas, PUF, 1962
- Anthologie de la poésie grecque antique, dir. Charles Dantzig, préfacé par Jacqueline de Romilly, Belles Lettres, 2000
- La séduction: anthologie de la poésie érotique grecque et latine, présenté et trad. par Yves Battistini et dirigé par Marie-Claude Char, Nil, 1994
- Anthologie Palatine T.2 (volume consacré à l’amour et à l’érotisme), Belles Lettres, 1928
- Poème élégiaques, Théognis, Belles Lettres, 1975
- Œuvres connues, suivies des Anacréontiques, Sappho et Anacréon, éd. D’Aujourd’hui, 1982
- Fragments, Archiloque, Belles Lettres, 1958
Il faut savoir que très nombreux sont les poèmes antiques anonymes.
À cela plusieurs raisons:
- le fait que la poésie était à cette période un art essentiellement oral, fait pour être chanté.
- parce que les textes qui nous sont parvenus sont le plus souvent parcellaires rendant très difficile l’identification de leur auteur ̶ on pense notamment au Bouclier d’Héraclès qui a été attribué à Hésiode, mais qui, après coup s’est avéré trop récent pour cela.
- enfin, il faut avoir à l’esprit que la proportion d’œuvres de la littérature antique grecque et romaine qui nous est parvenue est infime et que la majorité des textes qui nous ont été transmis l’ont été par le biais des copies médiévales, ce qui, ajoutant un intermédiaire, augmente le risque de perte d’information. On estime à 0,1% le nombre d’œuvres produites ayant réussi à nous parvenir, ne serait-ce que sous forme de fragments.
Afin de découvrir où le philosophe Clément Rosset a lui-même puisé cette citation, peut-être faudrait-il contacter son éditeur afin d’être mis en contact avec l’auteur directement.
Bien cordialement.