A quoi correspond, au XVIe siècle, la "prison pontificale du Soudan " ?
Question d'origine :
Bonjour,
Je suis en train de lire une histoire qui se déroule au XVI ° siècle. A un moment donné,il est question de "la prison pontificale du Soudan".
_ Qu'est-ce cette prison ?
_ Quand a-t-elle été créée ?
_ Où était-elle ?
_ Pourquoi ce nom ?
Merci
Réponse du Guichet
La prison pontificale du Soudan était située à Avignon et dépendait de la juridiction du Pape. Le terme "Soudan" faisant référence au "soldanus" qui la surveillait et non au pays d'Afrique.
Bonjour,
De 1309 à 1418, le pape réside à Avignon (cf article wikipedia : Papauté d'Avignon) et la "prison pontificale du Soudan" désigne la prison destinée aux personnes ayant commis des délits relevant de la compétence du pape (hérésie, faux). Cette prison était réservée au gens d'Eglise.
Paul Payan, dans À l'assaut du Palais [Livre] : Avignon et son passé pontifical, nous dit que la prison dite "du Soudan" était réservée aux ecclésiastiques et située non pas au Palais mais en plein coeur de la ville, probablement entre Saint-Didier et Notre-Dame-la-Principale.
Une notice wikipedia consacrée à Jean de Roquetaillade indique que cette prison pourrait être située dans l'actuelle rue Galante : " prison de l'auditeur de la Chambre apostolique, dite du Soudan, rue Garlanderie à Avignon (actuellement rue Galante). Les garlandiers étaient des ciseleurs sur métal, qui fabriquaient des couronnes et guirlandes de fleurs artificielles ou des coiffures pour femmes. " sans toutefois mentionner la source.
Voici quelques extraits de documents qui pourront vous intéresser :
Guillaume Mollat décrit la Cour pontificale dans son ouvrage intitulé Les Papes d'Avignon (1305-1378) et précise que le nom de Soudan proviendrait d'un dérivé de "soldanus", le nom du geôlier chargé de la surveillance de la prison :
Les sergents d'armes (servientes armorum) dont le nombre durant le XIVe siècle varia de 23 à 72, exercent la surveillance dans l'intérieur du palais apostolique. La nuit, ils sont casernés dans trois corps de garde éclairés par des lampes à l'huile. Ils doivent se tenir toujours prêts à chevaucher pour quérir les clercs délinquants, procéder à leur arrestation et les amener à la cour. Ils ont aussi la garde de la prison pontificale. [...]
La surveillance de la prison pontificale appartenait à un geôlier, le soudan [soldanus] qui avait sous ses ordres des sergents. Il était soumis à l'autorité d'un gardien-chef (magister carceris).
Le «magister carceris» avait sous ses ordres le gardien effectif de la prison, le «soldanus», d’où le nom donné à la prison elle-même : «carcer soldani». Le «soldanus» a sous ses ordres des «servientes». En 1352, le «soldanus» est en même temps «custos». C’est Bernadus [de S. Margarita]. En 1354, le «custos» est Bertrandus de Prolenga, «domicellus», le «serviens», Johannes Charnesii (Schäfer, Die Ausgaben der apostolischen Kammer, Paderborn, 1911, p. 411 et suiv.).
source : Études sur Jean de Roquetaillade (Johannes de Rupescissa) / Jeanne Bignami Odier · 1952 (page 20)
Le nom de « Soudan » apparaît sous Clément VI (1342-1352). Cette « prison du pape » se trouvait dans une ou plusieurs demeures privées louées par la chambre apostolique aux confins des paroisses Saint-Didier et Notre-Dame-la-Principale (Liber Ostensor, éd. cit. n. 9, introduction, p. 3).
source : MARMURSZTEJN, Elsa. Issues obligatoires : Clôture et incarcération dans la pensée scolastique des xiiie-xive siècles In : Enfermements. Volume I : Le cloître et la prison (vie-xviiie siècle) [en ligne]. Paris : Éditions de la Sorbonne, 2011 - autre lien