Que deviendront les pays pétroliers lorsque nous cesserons de produire des moteurs thermiques ?
Question d'origine :
A partir de 2030 on cessera en Europe et ailleurs de produire des moteurs essence et diesel alors quel est le sort des pays pétroliers du golfe ?
merci.
Réponse du Guichet

Les pays du Golfe ont d'ores et déjà enclenché une transition économique en misant sur le tourisme, les technologies, la finance et le tertiaire.
Bonjour,
Les pays du Golfe préparent l'après pétrole et développent depuis quelques années d'autres modèles économiques.
Comme le rappelle un article publié en 2021 dans Les Echos, pour contrer des économies dépendantes du pétrole, le FMI exhortait les pays du Golfe à des réformes structurelles. La jeune génération de leaders a intégré ces enjeux en impulsant une nouvelle politique :
Les pays du Golfe sont engagés, depuis plusieurs années, dans une modernisation à marche forcée. La « Vision 2030 » de Mohammed Ben Salmane en Arabie saoudite, la « Qatar National Vision 2030 » de l'émir Tamim Al Thani, ou les différents plans stratégiques au sein de la fédération des Emirats, sont censés réaliser la diversification des économies. Services, tourisme, finances et technologies, ou le récent tournant dans les énergies vertes annoncé dans le sillage de la Cop26, autant de secteurs diversement investis par les puissances arabes, qui ne sont pas toutes parties du même point - Riyad ouvre un marché du loisir où le cinéma était encore interdit il y a trois ans, tandis qu'Abu Dhabi est un hub pour la fintech depuis près de dix ans.
Julien Bouissou dans l'article "Les pays du Golfe portés par le bond du pétrole", publié dans Le Monde du 25 mai 2022, écrit ainsi que :
Le royaume, dirigé de fait par le prince héritier Mohammed Ben Salman, dit « MBS », veut accélérer la diversification de son économie et il en a les moyens, grâce à un prix du baril aux alentours de 110 dollars (104 euros). « La hausse des cours permet à l'Arabie saoudite d'atteindre des objectifs qui paraissaient trop ambitieux il y a encore quelques années » , assure Francois-Aïssa Touazi, du fonds d'investissement Ardian, sis à Paris. Des objectifs détaillés dans le plan « Vision 2030 » et qui consistent à développer les secteurs du tourisme, du divertissement, de l'hydrogène ou des nouvelles technologies.
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Il faut du temps, des compétences, un tissu d'entreprises locales pour développer une industrie, alors que le secteur des services peut être créé beaucoup plus rapidement » , affirme Ayham Kamel, chargé de la région Afrique du Nord et Moyen-Orient au sein du cabinet de conseil Eurasia Group. L'Arabie saoudite a annoncé en février qu'elle voulait construire 150 000 chambres d'hôtel au cours des trois prochaines années, dont 70 % dans le secteur privé. Encore faut-il attirer les investissements étrangers, qui ne dépassent pas 1 % du PIB.
Concurrence mortifère
Riyad s'y emploie en modernisant son image avec l'organisation de rave-parties dans le désert, de forums économiques comme le « Davos du désert » ou des compétitions sportives, à l'instar du Paris-Dakar. « Mais le contexte international actuel, avec le durcissement des politiques monétaires et des conditions financières mondiales, pourrait affecter les investissements directs étrangers dans la région » , tempère Adriana Alvarado, vice-président de l'agence de notation financière DBRS Morningstar.
Autre écueil : les pétromonarchies se livrent une concurrence mortifère sur les mêmes secteurs d'activité. L'Arabie saoudite a ainsi dévoilé son intention d'injecter 100 milliards de dollars dans le secteur aéronautique d'ici à 2030, de lancer une nouvelle compagnie nationale aérienne et de construire un nouveau « méga aéroport » près de sa capitale, Riyad, alors que de nombreuses compagnies des paus voisins, d'Emirates à Qatar Airways, en passant par Flydubai, luttent déjà pour capter des parts de marché.
L'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis se livrent aussi une âpre bataille pour attirer les plus grands tournois de golf, et dépensent des centaines de millions de dollars dans la construction de terrains, en vue d'attirer les cadres dirigeants des grandes multinationales. Riyad a même menacé de ne plus signer de contrats avec celles qui n'installent pas leurs sièges régionaux dans le pays d'ici à 2024.
Par ailleurs, un site commercial analyse le tournant engagé par les pays du Golfe :
La coupe du monde de football au Qatar, le tourisme à Dubaï, le projet NEOM en Arabie Saoudite, les gouvernements sont actifs et investissent à coup de milliards pour ne plus être considérés, à terme, comme seulement des exportateurs de pétrole (et de gaz naturel). C’est en tout cas la volonté de l’Arabie Saoudite avec “Vision 2030” ! Ce plan de développement du pays porté par l’héritier au trône lui-même (imminemment roi) le prince Mohammed Ben Salmane (ou MBS) vise à affranchir le pays de sa rente pétrolière historique. Ce plan est annoncé en 2016 dans un contexte où le prix du baril du pétrole est en chute libre depuis 2008, 90% des recettes budgétaires du pays provenant des recettes du pétrole, les difficultés budgétaires se font sentir.Le plan prévoit notamment de développer les capacités liées aux énergies renouvelables, au secteur minier, ainsi qu’à la production de gaz naturel. Les exportations de produits non pétroliers devraient augmenter de 43 milliards d’euros à 70,4 milliards d’euros à l’horizon 2030. Avec la valorisation de nouveaux secteurs d’activité comme les loisirs ou le numérique, le gouvernement poursuit l’objectif de créer 450 000 emplois dans le secteur privé d’ici 2027. C’est à travers ce plan que des projets fous comme NEOM sont nés. NEOM (neo en latin et le M de Mostaqbal pour futur en arabe) est un projet de ville futuriste en plein milieu du désert dans le Nord-Ouest du pays et qui devrait voir le jour d’ici 2025. Une ville de 25 000 km2 (la superficie de la Bretagne), qui coûterait la bagatelle de 500 milliards de dollars à la construction, et qui serait totalement autonome. La monarchie voudrait en faire une ville à la pointe de la technologie avec au programme: énergies renouvelables, agriculture verticale ou encore livraison par drones.
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La situation est cependant bien différente aux Emirats Arabes Unis (EAU). Le pays opère depuis une vingtaine d’années une diversification volontariste (poussée par l’Etat) expliquant la moindre dépendance des Emirats à une rente pétrolière qui ne représente plus que 30 % du PIB de la confédération.
Le gouvernement développe des filières industrielles porteuses, notamment dans l’aluminium ou le pharmaceutique. La création de la zone franche virtuelle de Fujaïrah facilite l’implantation de sociétés transnationales en leur garantissant une fiscalité très avantageuse. La confédération a utilisé sa manne pétrolière au service d’une stratégie de montée en puissance de ses secteurs tertiaires. Le tourisme s’est développé au rythme des projets urbanistiques avant-gardistes de Dubaï et d’Abu Dhabi. Les Emirats ont investi dans le sport en rachetant le club de football Manchester City ou en créant et subventionnant massivement la compagnie aérienne Fly Emirates. Leur voisin le Qatar a fait du sport un axe complet de développement avec le rachat du PSG, la création d’une chaîne de diffusion (Bein Sport) et la construction d’infrastructures pour accueillir des événements sportifs mondiaux comme la coupe du monde de football en 2022 ou encore les championnats du monde d’athlétisme en 2019.
(...)La péninsule du Bahreïn est le précurseur de la finance islamique et veut attirer les entrepreneurs. Ce petit archipel a vu sa manne pétrolière décroître dès les années 1970, actuellement, sa production n’excède pas les 60.000 barils par jour, loin des 11 millions produits par le voisin saoudien. Le secteur pétrolier ne représente que 20 % du PIB du royaume. Le pays fut précurseur dans la finance islamique au Moyen-Orient en devenant le premier pays concevant des produits financiers variés (obligations, contrats d’assurance, placements…) conformes aux lois coraniques. La capitale Manama abrite ainsi les sièges des principaux organismes de régulation de la finance islamique (AAOIFI, CIBAFI, IIFM). L’archipel abrite plus de 400 institutions financières agréées et 2 800 fonds d’investissement, soulignant la puissance de la place financière de Bahreïn. La banque centrale du Bahreïn a ainsi attiré 733 millions de dollars d’IDE en 2017 (source : Le Monde Diplomatique), attestant de l’attractivité du royaume pour les capitaux étrangers.Fortes de ces réussites, les autorités bahreïnis entendent capitaliser sur le leadership de la place financière de Manama pour moderniser la finance islamique.
Bahreïn surfe également sur une dynamique de création d’entreprises : le nombre d’enregistrements de sociétés commerciales a augmenté de 28% pour le seul exercice 2017.
En complément, certains ouvrages abordent cette problématique :