A combien d'exemplaires fut tirée la 3e édition des Historiarum Veteris Testamenti Icone ?
Question d'origine :
Bonjour !
D'après Firmin Didot, les frères Frellon, qui ont acquis l'enseigne et le matériel des Trechsel, dont les bois des figures de la Bible d'Holbein, procurent en 1543 une troisième édition des Historiarum Veteris Testamenti Icones. Sait-on à peu près à combien d'exemplaires cet ouvrage est tiré, quelle somme il faut débourser pour l'acquérir, et ce que représente cette somme en pouvoir d'achat ?
Réponse du Guichet
Il est très difficile, sauf exception documentée par des sources d'archives spécifiques, de répondre de manière précise à la question du tirage d'un titre particulier et de son prix de vente.
Bonjour,
Il est très difficile, sauf exception documentée par des sources d'archives spécifiques, de répondre de manière précise à la question du tirage d'un titre particulier et de son prix de vente.
Ce dernier figure parfois sous forme d'annotation manuscrite sur les pages de garde de l'exemplaire, et il serait intéressant d'interroger les institutions conservant un exemplaire des Historiarum Veteris Testamenti Icones de 1543 afin d'en vérifier la présence éventuelle. Si la Bibliothèque municipale de Lyon elle-même ne conserve aucun exemplaire de cette édition, elle en possède en revanche trois de celle de 1547 chez les frères Frellon, mais aucun de ces ouvrages ne comporte de mention de prix.
Nous avons pu, par le passé, répondre de manière générale à une question analogue à la vôtre portant sur le nombre d'exemplaires d'une édition donnée au XVIe siècle.
La question du prix est quant à elle d'autant plus ardue à résoudre que les montants peuvent différer d'une édition et/ou d'un lieu à l'autre. Si le livre imprimé, au XVIe siècle, reste de manière générale un objet relativement cher, son prix de vente, appelé "prix des marchands" ou "prix nécessaire des marchands", fluctue grandement en fonction de la quantité de papier utilisée, de la présence d'illustration, de la reliure (la plupart du temps à la charge du client après achat du livre fourni en cahiers), du nombre d'intermédiaires dans la distribution et du coût du transport selon le lieu d'achat.
"Si la vaste majorité des prix des imprimés mis en vente reste inconnue, certaines sources permettent d'entrevoir le coût de certains exemplaires. [...] L'amplitude des prix était remarquable. A Paris, Robert Estienne proposait dans son catalogue [de 1546] tant une édition vendue pour le montant modique de deux deniers, qu'une autre pour la somme princière de dix livres [soit 2400 deniers]" nous informe Malcolm Walsby dans L'imprimé en Europe occidentale, 1470-1680, Rennes, PUR, 2020, p. 90.
"L'accessibilité d'un imprimé en termes de prix peut être considérée en comparant ce dernier au prix d'autres marchandises pendant cette même période. Entre 1538 et 1542, le litre de vin coûtait en moyenne 5,5 deniers, soit presque le triple de l'imprimé le moins cher [de l'atelier Estienne], et un oeuf 1,15 denier. On pouvait donc acquérir un petit imprimé pour le prix de deux oeufs ; un prix modique qui indique que l'achat de livres était à la portée de bien des bourses..." (Walsby, p. 90). Rappellons tout de même qu'il s'agit ici du cas particulier d'un livre spécialement bon marché !
Un autre exemple de la grande disparité des prix nous est donné par le cas d'une édition partagée entre quatre libraires parisiens, Poncet le Preux, Oudin Petit, Jean Foucher et Vivant Gaultherot, qui s'unissent en 1552 pour partager les frais d'impression de la Somme de saint Thomas d'Aquin. Des sources conservées aux Archives nationales nous apprennent que le prix coûtant de chacun des 600 exemplaires prévus est de 41 sous et le prix de vente, fixé par contrat, de 46 sous, soit 552 deniers, somme déjà élevée pour un livre (Annie Parent-Charon, "Associations dans la librairie parisienne du XVIe siècle" in L'Europe et le livre. Réseaux et pratiques du négoce de librairie (XVIe-XIXe siècles), Paris, Klincksieck, 1996, p. 21).
Un autre cas concerne un ouvrage de droit canon, les Sextus decretalium liber... de Boniface VIII, imprimé en 1550 à Paris par Charlotte Guillard et Guillaume Des Bois. Chaque exemplaire du tirage de 900 exemplaires est vendu 9 sous, soit 108 deniers (Parent-Charon, p. 30).
On peut ainsi mesurer les écarts de prix existant entre ces différentes éditions quasi contemporaines.
Au prix de vente fixé initialement par l'imprimeur-libraire assurant le rôle d'éditeur doivent également s'ajouter les frais de transport : "Quand [les livres imprimés à Paris] étaient achetés à Lyon, le prix variait peu (entre 0 et 6,25 % en plus) par rapport au prix annoncé à Paris, mais dans les villes moins bien desservies comme Montpellier, Poitiers ou Alcala de Henares, il pouvait sensiblement croître (entre 20 et 25 % en plus) (Walsby, p. 90)".
"Ces fluctuations suggèrent qu'il serait erroné de chercher un prix d'achat du livre qui serait normatif. Ceci est d'autant plus vrai que l'acte d'achat auprès d'un libraire ne se limitait pas à considérer le prix de chaque élément séparément. En effet [...], le prix d'un livre était parfois ouvert au marchandage, et en fonction du nombre de livres et de la qualité de l'acheteur, il pouvait, au moins dans la période incunable [soit de 1455 à 1500], fluctuer de manière relativement importante (Walsby, p. 91)".
A défaut d'avoir pu vous répondre sur le cas précis des Historiarum Veteris Testamenti Icones, nous espérons avoir pu vous apporter quelques éléments de contextualisation.