En quoi consistait la profession de fabricante d'étoffe sur Lyon début 19e siècle ?
Question d'origine :
Je recherche des informations concernant la profession de fabricante d'étoffe sur Lyon début 19 ème siècle.
Une de mes aïeules née en 1802 était comme noté sur l'acte de naissance de son fils fabricante d'étoffe rue Écorchéboeuf au numéro 9 dans le 2 ème arrondissement de Lyon.
Pourriez-vous m'indiquer à quoi consiste cette profession ? Travail des soyeux lyonnais ? Y a-t-il des archives sur les personnes qui exerçaient ces métiers ?
Et aussi des archives de la rue écorchéboeuf ?
Dans l'attente de réponses mes remerciements.
Josiane M F
Réponse du Guichet

La fabrique d'étoffe consiste à tisser les fils (de soie, de chanvre, etc.) sur un métier à tisser pour en faire du tissu au mètre. De nombreuses spécialisations, ou techniques, pouvaient caractériser plus précisément cette dénomination très générale.
L'ordonnance de Louis XI du 23 novembre 1466 accorde à Lyon des privilèges pour la fabrication des étoffes de soie, mais il faudra attendre le début du XVIIIe siècle pour que le style lyonnais s'impose, alors qu'à la cour du Roi, la soie est remise à la mode par Mme de Pompadour.
Après un ralentissement de la production et une chute du nombre des métiers à tisser à la fin du XVIIIe (il en fonctionne 15000 en 1788, puis 2000 seulement en 1793), une ère nouvelle s'ouvre dès 1804 avec la mise au point du métier Jacquard, et sous l'impulsion de Napoléon Bonaparte (c'est l'époque de la création de la Condition des soies, réglementation assurant la pesée et la conservation des tissus). Le nombre de métiers s'élève à 10000 en 1802, 20000 en 1815 et 30000 en 1830. Il n'y a en revanche pas de fileur à Lyon: l'élevage des vers à soie, et la fabrication des fils de soie se font en dehors de la région.
Née en 1802, votre aïeule a dû connaître les riches heures de l'industrialisation de la Fabrique dans la première moitié du XIXe. Si la mention de "fabricante d'étoffe" sur l'acte de naissance de son fils est très vague, statistiquement, il y a de fortes chances à Lyon que l'étoffe en question soit effectivement la soie.
Nous avons essayé de trouver trace d'autres industries textiles que celle de la soie à Lyon à cette époque, et, dans la limite étroite de nos recherches, nous sommes restés bredouilles. Il devait exister des tisseurs indépendants qui travaillait le chanvre, voire le taffetas ou le coton, ne serait-ce que pour le marché local car il fallait bien vêtir les habitants de Lyon et tous n'étaient pas bourgeois, mais la production de la soie domine l'industrie textile lyonnaise.
La fabrique d'étoffe consiste à tisser les fils (de soie, de chanvre, etc.) sur un métier à tisser pour en faire du tissu au mètre. De nombreuses spécialisations, ou techniques, pouvaient caractériser plus précisément cette dénomination très générale, et sont autant de métiers que votre aïeule pouvait exercer si elle était "fabricante d'étoffe":
Le tisseur est quotidiennement assisté par toute une série d’autres métiers :
* Dévideuse : personne réceptionnant les flottes de soie, les disposant sur des roquets, des tavelles ou de petites bobines transmises à l’ourdisseuse. Cette opération de dévidage est parfois appelée détrancannage.
* Ourdisseuse : personne pratiquant l’ourdissage, opération consistant à rassembler les fils de la chaîne d’un tissu en nombre et en longueur voulus, sur un ourdissoir, appareil dont l’élément essentiel est un tambour sur lequel s’enroulent les fils.
* Remetteuse : ouvrière passant les fils de chaîne dans les mailles et les piquant au peigne.
* Canetière : ce sont principalement les canuses qui font les canettes.
* Tireur de lacs, lanceur : Aide-ouvrier tirant les cordes, dans les anciens métiers de tissus façonnés, pour préparer le travail de l’ouvrier-tisseur permettant ainsi les passages successifs de la navette au travers des fils de chaîne. L’emploi est occupé par de jeunes garçons que l’apparition du métier Jacquard fait disparaître.
* Moulineur : personne imposant une torsion à plusieurs fils de soie afin de donner la résistance nécessaire à leur tissage. On obtient des étoffes d’aspect différent selon la nature de la torsion. Au milieu du XVIIIe siècle, le moulineur prend le nom d’ovaliste à cause de la forme ovale de la pièce centrale du moulin à fil de soie.
* Gareur : mécanicien-monteur venant organiser le métier à chaque nouvel article.
* Commis de balance : ouvrier chargé de peser et d’inscrire les matières qu’il confie au canut mais aussi d’inscrire les pièces et les matières que celui-ci lui rend.
* Commis de ronde ou rondier : intermédiaire entre le négociant et le chef d’atelier chargé de visiter les ateliers et d’inspecter les métiers au travail pour s’assurer que la pièce sera rendue à temps.
* Liseur de dessins ou piqueur de cartons : personne perçant les cartons de la mécanique conformément à la mise en carte.
* Metteuse en mains : ouvrière divisant les paquets de soie ouvrée, assortissant les grosseurs, choisissant les flottes.
* Passementier : personne confectionnant des passements, des galons, réalisés à partir de fils de soie, d’or et d’argent mais aussi de fils de coton ou de lin, principalement utilisés pour orner des vêtements d’apparat ecclésiastiques ou militaires.
* Guimpier : personne réalisant des fils métalliques destinés au tissage ou à la broderie. Les tissus réalisés avec des fils d’or et d’argent sont appelés brocarts.
* Teinturier : si la soie a besoin d’être teinte, elle l’est avant d’être tissée. Les teinturiers ayant besoin de beaucoup d’eau, s’installent près des berges du Rhône ou de la Saône.
* Apprêteur : au XVIIIème siècle, l’apprêt consiste à passer sur l’envers, une légère couche de gomme arabique donnant de la raideur à l’étoffe. Plus tard, l’apprêteur devient ennoblisseur.
Mais aussi satinaires, brodeuses, finisseuses, fabricants de peignes…
Dans le même article, on apprend que le terme de "fabriquant" pouvait également s'appliquer au négociants-banquiers qui commandent et financent la soie, mais on peut arguer que ces "fabriquants" étaient principalement des hommes, et qu'il est douteux que l'assertion puisse s'appliquer à votre aïeule :
Fabricant : souvent appelé “mon marchand” par le canut et “soyeux” par les Lyonnais. Ce sont des négociants-banquiers qui transmettent aux canuts les commandes, leur donnant la soie nécessaire pour la confection des pièces. Ils assurent également la commercialisation auprès de la clientèle.
Cet extrait provient d'un article publié pour L'Influx, notre webzine, revenant brièvement sur l'histoire de la soie à Lyon. Nous vous invitons à le consulter ; d'autres articles de L'Influx sur le sujet :
Les sources suivantes, consultables en salle à la bibliothèque de la Part-Dieu vous en apprendrons plus sur cette industrie :
- Du génie de la Fabrique au génie 2.0
- L'art de la soie
- Soieries de Lyon
- La soie à Lyon
- La soierie lyonnaise
Quant à la rue Ecorche-Boeuf, elle sera renommée "rue du Port-du-Temple" (plan datant de 1864), nom sous laquelle elle est encore actuellement connue. Son nom fait référence à une coutume de la fête des merveilles durant laquelle un boeuf était précipité dans la Saône à partir d'un des ponts; la bête s'échouant à l'embouchure de la rue sur le quai, elle était sacrifiée sur place. La Revue du Lyonnais publie un historique de cette rue dans le tome 2 de la série 4 (1876) : LA RUE ECORCHE-BOEUF.
L'annuaire lyonnais le plus ancien que nous possédons remonte à 1863, trop tardif pour vous intéresser. Reconstituer une "archive" des habitants d'une rue s'avère donc un peu laborieux : il faudrait par le biais des recensements de population établir la liste des habitants pour une rue donnée au fil des ans. Vous pouvez vous y essayer pour la rue du Port-du-Temple sur le site des archives municipales. Notre test s'est avéré assez concluant, une fois renseignées les informations suivantes :
: Lyon
: 2e arrondissement
: Port-du-Temple (rue du)
:
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