Question d'origine :
J'ai lu les principaux ouvrages d'Aurélien Barrau; je l'ai écouté parler pendant des heures. Pourquoi ne perçois-je pas chez lui l'amour des gens, mais seulement (et encore, même pas sûr) l’amour des arbres ? On peut réagir à ce que je dis là en rétorquant, peut-être, que l'on n'a pas besoin d'être misanthrope pour être écolo. Mais je réponds: "Ah bon ? Alors on fait comme le martien dans "The day the earth stood still" ? On sauve la terre de la présence des hommes en provoquant la fin de l'humanité ? Est-ce ce que souhaite Barrau ? Que pourrait-il bien souhaiter d'autre ? Changer les mœurs ? Pfff... Il est trop intelligent pour croire en une telle ineptie. Bien sûr qu'il semble honorable de raisonner les populations quand leur comportement détruit la planète; et leur comportement détruit souvent la planète. Mais... Voyons... J'aime profondément mon prochain (Véridique ! Je me sens bien plus proche des êtres humains que des arbres !) ; et je l'aime assez pour savoir, en mon for intérieur, qu’il n’y aura pas de changement radical. Et ce n’est pas grave ! Si ? Nous disparaîtrons ; la planète restera. Elle était là avant nous ; elle sera là après. Et ce n’est pas nécessairement triste. J’aime les gens pour ce qu’ils sont. Pas pour une aspiration bidon et surréaliste; pas pour ce qu'ils DEVRAIENT être.
Les idées de Barrau sont cohérentes, non ? Mais je ne l'aime pas. Je n'aime pas sa manière soi-disant éloquente de les déployer, je n'aime pas son regard, je n'aime pas sa façon de se comporter avec ses interlocuteurs. Je sens, chez lui, une propension à la manipulation et un ego gigantesque. Finalement, je le sens bien trop préoccupé par l'amour qu'il se porte, pour l'être par quoi que ce soit d'autre.
Ma question est la suivante. Suis-je le seul à avoir à son égard une grande méfiance toute naturelle ? Et vous, madame ou monsieur l'agent du guichet, aimez-vous Barrau ? Me comprenez-vous ?
Road66
Réponse du Guichet
Aurélien Barrau, comme toute personnalité médiatique, doit régulièrement faire face à différentes critiques.
La question sous-jacente à votre interrogation semble être «Comment se fait-il que nous développions des affinités ou de la méfiance envers une personne?». Des études récentes nous montrent que l'amitié entre deux personnes peut s'expliquer par la similarité des odeurs corporelles, par des fonctionnement neuronaux semblables et par une proximité de leur configuration génétique. La méfiance quant à elle relève majoritairement de processus cognitifs mais elle n'est pas pour autant à chaque fois le fruit d'une décision rationnelle.
Bonjour,
Aurélien Barrau, comme toute personnalité médiatique, doit régulièrement faire face à différentes critiques :
Dans une tribune publiée en 2019 le chirurgien-urologue Laurent Alexandre se désole car selon lui Aurélien Barrau «est malheureusement ethno-masochiste, malthusien et illibéral».
Dans un entretien donné au magazine d’actualité Le Point, Marc Fontecave, professeur au Collège de France et auteur de Halte au catastrophisme !, s'exprime au sujet de la crise climatique et dit : « j'en ai assez d'entendre sur ce sujet toujours les mêmes personnes, qui portent le même discours : les Aurelien Barrau, Nicolas Hulot, Cyril Dion... ont solidement installé dans l'opinion la perception que nous courrions à une catastrophe imminente». Il déplore aussi «la pauvreté conceptuelle de ce mouvement».
La question sous-jacente à votre interrogation semble être «Comment se fait-il que nous développions des affinités ou de la méfiance envers une personne?»
Différentes pistes ont été explorées pour rationaliser l’amitié :
- La piste olfactive :
Une récente étude israélienne a mis en lumière l’importance de l’odeur (et notamment la similarité chimique des odeurs corporelles) comme facteur lié à la naissance d’une forte amitié:
«De parfaits étrangers pourraient commencer à nous intéresser au premier reniflement plutôt que seulement au premier regard.» Et l'odeur serait, aussi, un bon facteur prédictif d'une amitié quasi instantanée.
- La piste des neurosciences sociales et de la similarité de fonctionnement des cerveaux des amis :
De nombreuses études montrent, qu’en très grande majorité, les groupes humains entretiennent des relations privilégiées avec les personnes qui leur ressemblent.
Des chercheurs de l’Université de Californie à Los Angeles sont allés plus loin et ont examiné au niveau cérébral « l’homophilie », ce phénomène qui exprime l’attirance amicale pour les personnes similaires à soi-même. Les résultats de cette étude ont démontré que «les amis ont en commun des processus de pensées qui les font voir, interpréter et réagir émotionnellement de la même manière.» . Cependant, l’étude ne nous permet pas de savoir si le fait que le cerveau des amis fonctionne de la même manière est une cause ou une conséquence de l’amitié.
- La piste génétique
D'autres études, comme celle de chercheurs des universités de Yale et de Californie-San Diego, ont de leur côté lié... le génome à l'amitié. Si on les compare à des étrangers, des amis auraient ainsi une configuration génétique globalement aussi proche que celle de cousins au quatrième degré. «Les amis seraient une sorte de parentèle fonctionnelle» , analysent ces scientifiques pour qui il y aurait un avantage évolutionnaire à ces similitudes, même si elles se manifestent de manière complexe. (L’Obs – Site Web)
Pour terminer, c'est le sociologue Sebastien Shehr (Université de Savoir mont Blanc) qui nous éclaire sur les mécanismes qui sous-tendent les comportements de méfiance vis-à-vis d'une autre personne :
La méfiance semble […] nécessiter plusieurs points d’appui pour se développer, aussi divers soient-ils. Elle n’est jamais, […], la résultante d’un facteur unique. Pour autant, elle n’en demeure pas moins à dominante cognitive: dans tous les cas que nous avons mobilisés interviennent de manière prépondérante –mais non exclusive– savoirs (tirés notamment de l’expérience pratique) et non-savoirs (degré d’incertitude caractérisant situations et interactions), et ce, quelles que soient les différences entre les situations ou les enjeux propres aux contextes d’action analysés(…].Cependant, cela ne veut pas dire que la méfiance et les réactions qu’elle induit seraient chaque fois le fruit d’une décision rationnelle prise sur la base des informations ou du stock de connaissances que possède l’acteur: elle apparaît plutôt ici comme étant la conséquence d’une évaluation plus ou moins tacite et d’un apprentissage cognitif, émotionnel et pratique (développement de compétences ad hoc) liés à la confrontation récurrente à certains environnements ou à certaines expériences.