Comment fait-on pour augmenter la masse monétaire disponible ?
Question d'origine :
Bonjour,
je me demande quelles sont les différentes méthodes pour créer de l'argent, augmenter la masse monétaire disponible.
J'ai compris que la dette était une solution, que l'inflation était une autre solution. Mais quand on dit que "la Banque centrale européenne a injecté des milliards dans l'économie." Comment cela se passe-t-il concrètement ? Car pour ma part je n'ai rien vu passé....
Un grand merci à vous pour le travail formidable que vous faites !
Réponse du Guichet
La Banque Centrale Européenne -BCE- est l’acteur principal de la politique économique et monétaire dans l’Union Européenne. Créée en 98, c'est une banque indépendante des états européens. Elle a pour objectif principal le contrôle du niveau d’inflation au sein de la zone euro. En cas de crise, elle peut intervenir ponctuellement au moyen de deux outils :
- en injectant des liquidités importantes dans l'économie de manière à stimuler l'activité et à redresser le taux d'inflation pour éviter que l'économie ne tombe en déflation
- en achetant directement de la dette publique. C'est ce qu'on appelle la monétisation de la dette.
Bonjour,
Votre question fait certainement référence à la mesure prise par la Banque Centrale Européenne(BCE) lors de la crise sanitaire pour soutenir l'économie des états européens. En mars 2020, elle a en effet déployé un programme massif d'injection d'argent frais dans l'économie européenne : c'est le "programme d’achat d’urgence pandémique" ou Pandemic Emergency Purchase Program (PEPP), d'un montant de 750 milliards d’euros. En gros, la BCE, seule institution autorisée à créer des euros, c'est-à-dire à imprimer des billets de banque, va créer des milliards pour les prêter aux Etats européens.
Ce plan de soutien massif nous interroge légitimement sur l’origine de cette création monétaire sans corrélation directe à la constitution de richesses dans l’économie réelle ! Si l'on s'en réfère aux bases de l'économie monétaire, on sait en effet qu'une monnaie créée sans modération n'inspire plus confiance. Et quand l'argent perd sa valeur, les prix montent et l'inflation attaque le pouvoir d'achat des citoyens ! Peut on pour autant parler « d’argent magique » ?
En réalité, il n'en est rien. Cette mesure s'inscrit dans le cadre des politiques monétaires non conventionnelles appelées Quantitative Easing (QE) déjà mises en œuvre par la BCE depuis 2015 et renouvelées depuis.
En effet, après la crise de 2008, face au risque de déflation, les prix ont baissé de manière généralisée et durable entrainant de facto une baisse générale de l’activité et de l’emploi. Les banques centrales (BCE pour la zone euro et FED pour les Etats Unis) ont alors baissé leurs taux directeurs à des taux historiquement bas, nuls parfois, voire négatifs. Pour renforcer l’efficacité de leur action, elles ont également mis en place de nouveau outils:
- le guidage prospectif qui permet de donner des indications sur le niveau futur des taux directeurs (taux auquel les banques centrales prêtent aux banques commerciales). Banques, entreprises et particuliers peuvent ainsi mieux anticiper l’évolution des taux d'intérêt et y adapter leur stratégie.
- l'assouplissement quantitatif (Quantitative Easing) : il s’agit de racheter massivement aux banques et acteurs financiers des titres d’emprunt d’état et d’entreprises. La BCE rachète ces obligations d’Etat sur le marché secondaire et les finance par l’émission de réserves sur les comptes que détiennent les banques commerciales auprès de la Banque centrale.
L'objectif recherché par la Banque centrale lorsqu'elle met en œuvre un programme d'assouplissement quantitatif est donc bien d'injecter des liquidités importantes dans l'économie. Cette perfusion d’argent frais dans l’économie devait permettre aux entreprises de tenir le choc de la crise du coronavirus, grâce à des taux d’intérêt plus faibles, pour rebondir plus facilement une fois la crise passée. Cette mesure permet également de rassurer les marchés financiers, qui n’avaient cessé de chuter depuis le début de l’épidémie.
En revanche, cette opération n'est pas gratuite ! Le Quantitative Easing permet aux états de renforcer leur capacité à financer leur dette grâce à des taux d’intérêt plus faibles. Ce mécanisme est particulièrement bénéfique aux états connaissant fortement endettés, et qui souhaitent se financer sur les marchés financiers. En effet, les taux d’intérêt sur les obligations souveraines pourraient être très élevés en raison du risque d’insolvabilité de ces Etats.
Cette mesure prise par la BCE ans le cadre de la crise COVID a permis aussi de pallier l’absence de politique budgétaire commune de l'Union européenne. Elle représente donc une avancée majeure sur le plan budgétaire. Pour la première fois, la Commission a emprunté sur les marchés financiers pour abonder le budget européen. 500 milliards d’euros ont ainsi été transférés, par le canal du budget européen, aux États membres qui ont été les plus affectés par le Covid-19 et 250 milliards d’euros distribués sous forme de prêts.
Compléments en vidéo :
Des injections massives de liquidités pour lutter contre la déflation : réalisé par le site très pédagogique La finance pour tous
Je décrypte la nouvelle politique monétaire de la BCE : vidéo réalisée par une étudiante en économie, pour nous expliquer les raisons et l'impact de l'augmentation historique du taux directeur de la BCE en septembre 2022.
Si vous n'avez pas trop mal à la tête, allez plus loin avec :
Ce que signifie, concrètement, « la BCE a injecté des liquidités »